Le soleil était à peine levé au-dessus des tours d’obsidienne du palais de Drakaris. Dans la chambre royale, baignée d’une lumière dorée, Aelstrom Kaelen Drakaris observait la cité silencieuse depuis la grande baie vitrée. Vêtu d’une simple tunique noire, les bras croisés dans le dos, il n’avait pas dormi.
Un murmure instinctif au fond de son esprit le tenaillait depuis l’aube. Un pressentiment… ou peut-être une certitude.
Il tourna la tête vers le lit, désormais vide. Ilmarion n’y était plus.
Cela faisait plusieurs heures. Trop longtemps pour une simple promenade.
Le roi fronça les sourcils. Ilmarion n’avait rien dit, ni laissé de message. Aucune trace de sa présence dans les couloirs, aucun garde ne l’avait vu passer. Aelstrom saisit sa ceinture et attacha prestement son épée à sa hanche. Ses pas furent rapides, déterminés, claquant contre le sol de marbre alors qu’il quittait ses appartements.
— Aelstrom ? appela une voix dans son dos.
Il s’arrêta net. C’était Galen, son bras droit, l’un des rares à le connaître assez pour lui parler sans trembler. Le conseiller accourait avec un air soucieux.
— Le prince elfe. Il a quitté sa chambre avant l’aube. Aucun garde ne l’a vu franchir la porte principale. Nous pensons qu’il est sorti par la galerie arrière, celle qui mène aux écuries.
— Et personne ne l’a arrêté ? gronda Aelstrom.
Galen s’inclina légèrement, évitant son regard.
— Il s’est montré discret… et il a dû agir avant le changement de garde. Mais… nous avons retrouvé des empreintes. Il a pris un cheval. Seul.
Aelstrom serra les dents. Ilmarion, blessé, affaibli, était parti en silence… Mais pourquoi ?
Puis, il comprit. Ce regard que l’elfe lui avait lancé la veille, empli d’un feu discret mais indomptable.
— Il est parti chercher sa famille, murmura Aelstrom.
Il fit volte-face et se dirigea vers les écuries sans un mot de plus.
— Prépare mon destrier. Immédiatement.
Quelques instants plus tard, monté sur sa monture noire comme la nuit, il franchit les portes du palais à vive allure, laissant derrière lui la cité de pierre et de flammes.
⸻
La forêt d’Ilythar se dessinait au loin, un mur sombre et imposant. Aelstrom n’avait qu’une vague direction, mais il connaissait assez bien la région pour deviner où un elfe chercherait refuge. Son regard balayait l’horizon, traquant la moindre trace, le moindre indice.
Le silence de la nature ne l’inquiétait pas. Ce qui l’inquiétait, c’était le temps. Chaque seconde passée loin d’ici augmentait les risques. Des démons rôdaient encore dans certaines régions.
Après plusieurs heures de chevauchée, il repéra des empreintes fraîches. Des sabots légers. Elfiques.
— Tu es passé par ici, murmura-t-il, esquissant un sourire discret.
Le roi accéléra.
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Quelques kilomètres plus loin, dans une clairière dissimulée par des feuillages épais, Ilmarion avançait prudemment, l’arc des Dieux en bandoulière, les sens en alerte. Il n’était plus qu’à quelques lieues de l’endroit où il avait caché ses frères et sœurs.
Chaque pas dans cette forêt résonnait en lui comme un souvenir douloureux. Le cri de son père, la lumière des flammes, le sang sur les feuilles…
Mais il n’avait pas le droit de faillir. Pas maintenant.
Il accéléra l’allure, lorsqu’un bruissement attira son attention. Il se retourna, l’arc levé.
— Tu comptes vraiment aller seul jusqu’à eux, en boitant ?
Cette voix… sèche, ferme, moqueuse.
Ilmarion baissa légèrement son arc. Aelstrom venait d’émerger des ombres, toujours sur son cheval.
— Tu m’as suivi, souffla Ilmarion.
— Je n’ai pas pour habitude de laisser des invités disparaître dans mon dos. Encore moins des princes têtus qui ont une flèche plantée dans la jambe il y a quelques jours.
Ilmarion détourna les yeux.
— Je n’avais pas le choix. Ce sont mes frères, mes sœurs. Ils sont seuls. Ils ont besoin de moi.
Aelstrom descendit de cheval. Lentement. Sans le quitter des yeux.
— Tu aurais pu me le dire.
Un silence s’installa. Puis, Aelstrom ajouta, plus doucement :
— Je vais avec toi.
Ilmarion releva les yeux, surpris.
— Pourquoi ? Ce n’est pas ton combat.
— Tu es sous ma protection. Et ce royaume ne perdra pas son seul espoir par orgueil.
Il tendit la main.
— On y va, prince elfe ?
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