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« Tu devrais aussi faire ce que ta mère te dit de faire, et finir ton année dans une école normale. » poursuit Mattias, insensible à la remarque acide de son jeune interlocuteur.

« Je vois bien que rien de notre vie n'a de secret pour vous, et que vous vous donnez la peine de me dire ce que je dois faire. »

« Parce que ce que nous disons est la sagesse même. » dit le deuxième habitué, décidant d'entrer lui-même dans la conversation. Celui-ci était un homme qui correspondait parfaitement à la définition, se fondant dans la foule.

« Je ne veux pas entendre cela, surtout de votre part, monsieur Fiop, qui ne cesse de dépenser sa pension dans des courses illégales de Joulou. Votre femme n’est pas encore partie ? »

Au lieu de perdre son sang-froid, le malchanceux joua le jeu, bombant le torse comme un coq dans une basse-cour, et déclara.

« Pour une fois, j'ai gagné le jeudi, donc ma femme est revenue. J'ai de la chance, hein ? Mais il ne s'agit pas de moi. »

« Une femme qui ne revient vers vous que pour l'argent ? Je ne sais pas qui de nous deux est le plus à plaindre. »

Cette fois, le coup avait porté. Il quitta son masque de bon vivant pour arborer un air véritablement énervé.

« En plus d'être dépourvue de magie, tu n’as aucune manière, aucun respect. Tout le contraire de notre chère Marion. »

Conor, bien sûr, ne laissa pas passer cette autre occasion. Il était même reconnaissant envers ces idiots indiscrets.

« Ce qui revient à dire que je tiens de mon père. Ce père dont je ne sais rien et dont je ne saurai probablement rien si ça continue comme ça ! »

Un silence pensif, lourd de sens, s'ensuivit, comme il s'y attendait, et il attendit avec impatience la suite.

« Ton père, hein ? » fit remarquer Monsieur Mattias en avalant une bonne bouchée.

Conor le dévisagea avec colère, puis sa mère.

« Vraiment, tu es sérieuse, maman ! Malgré mon insistance, tu ne vas vraiment rien me dire ! Tu ne me parleras jamais de l’auteur de mes jours ! ».

« Tu ne lui as jamais parlé de ton père ? » s’enquit Monsieur Fiop, soutenant Conor sans s'en rendre compte.

« Très intéressant ». M. Mattias fit observer, intrigué.

« Ce ne sont pas vos affaires, les garçons ! »

Conor se tourna directement vers les deux mages et s'enquit avec excitation, sans se soucier de ce qui venait d'être échangé.

« Vous connaissez mon père ? »

« Non. » répondit aussitôt sa mère en leur nom.

« Est-ce que quelqu'un autour de nous le connaît ? Au moins son visage ? » s’enquit le jeune mage, grandement irrité.

Les trois clients se regardèrent et secouèrent la tête.

« Non. »

« Et comment est-ce possible ! » s'écria le jeune garçon en faisant des gestes grandiloquents. « Personne ne sait rien de mon père !

« C'est possible, mais j'aimerais avoir cette discussion à la maison, mon chéri. »

« Parce que nous en parlerons peut-être ! Laisse-moi rire ! Je te fais remarquer que cela fait des années que je te le demande, et tout d'un coup, tu te décides enfin à m'en parler, et bien sûr, à l'abri des oreilles indiscrètes ».

« Conor...parlons-en plus tard quand nous serons rentrés à la maison, s'il te plaît. » répéta la sorcière d'un ton suppliant et nerveux. Elle n'avait vraiment pas envie d’avoir cette discussion en public. Et de toute façon, ce n'était pas convenable de le faire, mais Conor ne la laisserait plus faire, et allait exiger une promesse.

« Et que dois-tu me dire ? Le nom de mon père ? Sa vie ? Son histoire ? »

Crystal ne dit plus rien.

« J'ai le droit de savoir ! Il s'agit de mon père ! »

« Je sais ! je...»

« Non, tu ne sais pas. » Cette fois, Conor explosa et se laissa aller. De toute évidence, et de façon compréhensible, tout était écrasant : son échec à l'école d'Ogemos, son expulsion, sa faiblesse et tout ce qu'elle lui faisait ressentir, le secret de son père et enfin la fin de ses rêves…

C'était un fardeau trop lourd, comme une malédiction.

« Tu n'as aucune idée de ce que c'est que de grandir sans père parce que tu en as un. Un père qui t'adore et qui ne cesse de t'offrir des cadeaux. »

« A toi aussi ! » protesta sa mère, sidérée.

« Parce qu'il estime qu'il n'a pas le choix ! »

« Comment peux-tu dire ça ! »

« Oh, c'est vrai ! Il me tolère à peine et ne passe presque jamais de temps avec moi. La seule fois où il le fait, c'est quand tu le lui demandes. »

« Il est un peu... maladroit, c'est tout ! » tenta d'expliquer Marion pour défendre son père.

« Maladroit mon œil, il ne m'aime pas, oui, et il n’ait pas besoin de posséder la magie pour deviner que c'est à cause de mon père. Ce père dont tu ne veux pas me parler ! »

« Ce n'est pas si simple ! »

« Je sais, mais j'ai le droit de savoir ! Il s'agit de mon père, il s'agit d'une partie de moi, de ma vie. »

Crystal tenta de calmer Conor, mais il était déjà trop tard, autant demander à la pluie de monter au ciel.

« Il aurait pu me dire comment faire... sans magie. »

Un silence tendu s'installa à nouveau. La sorcière dévisagea son unique enfant, puis soupira.

« Je suis désolée, mon trésor. Je savais que c'était difficile, mais je ne sais pas quoi faire. Alors c'est d'accord, je te parlerai de ton père, mais seulement à ton prochain anniversaire ! »

« Mais c'est dans quasiment un an ! » s'écria-t-il, indigné.

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