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« Attendez un peu, jeune Conor. »

Conor resta, la tête baissée. Le professeur se leva et flotta jusqu'à lui.

« Je dois flotter vers toi, car nous savons tous les deux que le contraire est impossible, n'est-ce pas ? »

Conor continua à garder la tête baissée.

« En théorie, tu es le meilleur élève de ta classe. Tu es même meilleur que Deryl, ce qui est un exploit extraordinaire, parce que Deryl est ...Deryl. »

« Mais ? Parce qu'il y a un 'mais', n'est-ce pas ? »

« Mais tu n'es pas un mage. »

Conor rit cyniquement.

« Sans blague. »

« Tu aurais dû arrêter depuis longtemps. Mais une chose est sûre, ta persévérance est admirable. Même les meilleurs de l'école l'admettent. Mais pour une fois, cette persévérance ne sera pas récompensée. Il n'y aura pas de fin heureuse pour toi dans le monde magique. »

Sa voix et son expression étaient neutres, comme d'habitude, et il semblait se contenter d'énoncer l'évidence. C'était donc moins douloureux pour Conor. Il était un excellent professeur à sa manière.

« Comment ça, je dois passer dans le monde des humains ? »

« C'est bien que tu l'aies compris toi-même. »

L'examen suivant, qui consistait à invoquer une créature, devait se dérouler dans la chambre d'invocation. Une chambre qui ressemblait à un immense parc coloré, semblable à un berceau de la flore et de la faune. Mais toutes les créatures qui y résidaient étaient tenues à l'écart du point d'examen et soumises à un sort de sommeil pour ne pas déranger ou être dérangées, et surtout pour ne pas devenir un objet de tricherie pour les paresseux et les bons à rien, à l'exception de Conor.

Les élèves étaient appelés cinq par cinq à se tenir sur une immense plate-forme et à invoquer une créature. Le score dépendait évidemment du type et de la puissance de la créature. Le test a été mené par le professeur Sitine, une jeune sorcière aux cheveux roux et à la peau indigo, très belle et avenante, quoique moins que Marion, et célèbre pour avoir notamment été l'amante du professeur Miodis.

Les cinq premiers évoquèrent des créatures ordinaires.

Deryl fut appelé seul et invoqua une énorme créature ailée aux plumages étincelantes.

Tout le monde fut stupéfait et applaudit.

« Je me demande pourquoi vous devez encore passer des examens, jeune maître, votre niveau dépasse déjà celui de tous les enfants de votre génération » fit remarquer le professeur Sitine, admirative comme les autres, mais avec une pointe d'ironie.

Deryl fit un geste fier et arrogant, qui amplifia le sentiment d'injustice et d'impuissance de Conor, sa profonde amertume.

Lorsqu'il fut appelé, le dernier comme d'habitude, il eut du mal à contenir son cri de colère et de ressentiment.

Conor se concentrait avec acharnement, vraiment désespérément, mais il ne réussit à invoquer qu'une mouche. Tous les élèves éclatèrent de rire. Le professeur Sitine haussa les épaules.

« Au moins, il s'est passé quelque chose, même si c'est minuscule. »

L'examen suivant consistait en un combat : une bataille contre des monstres spéciaux, créés par la magie.

Tous les élèves de la classe de Conor passèrent dans l'immense salle de Lutte, dont les murs et le haut plafond étaient décorés de motifs mouvants de combat, et qui contenait également divers instruments que les élèves pouvaient emprunter pendant les exercices et les tests, bien que cela n'arrivât que rarement, car la majorité des élèves se procuraient eux-mêmes les armes qu'ils maîtrisaient le mieux et s'entraînaient avec elles quotidiennement.

Les élèves seraient cette fois appelés dix par dix pour combattre chacun un énorme monstre de pierre océane. L'épreuve était dirigée par un mage brun à la peau incarnée, pareillement connu sous le nom de Thole, qui signifiait en langue côtière « le bras de fer », car il était aussi imposant que puissant, et son endurance était supérieure à celle de n'importe quel autre membre du corps enseignant de cette école hors du commun.

Son visage au menton carré respire la confiance. Il était du genre à se fier aux apparences, c'est pourquoi il était constamment à court d'argent, mais une fois trahi, il entrait dans une rage folle et détruisait tout sur son passage, comme la barrière de protection de l'école, la plus belle semaine de la vie de Conor. Les dix premiers se mirent en position pour commencer.

« Vous êtes prêts ? Vous savez ce que vous avez à faire. Bonne chance. » dit-il gravement.

« Attendez une minute, professeur. »

Le professeur Thole se figea immédiatement, comme sous l’effet d'une gifle, et se tourna lentement vers l'élève responsable, pour ne pas dire irrespectueux. Apparemment, à force de se faire abuser, le célèbre professeur gentil ne l'était plus... Conor attendit impatiemment que l'incident se déroule ; pour une fois, il n'était pas au centre de l'attention, ce qui n'était jamais positif, et c'était tant mieux pour lui.

« Oui ? »

« Pourquoi sommes-nous toujours les premiers à être appelés ? »

« Tu te plains alors que plus vite, tu passes le test, plus vite, tu finis ? »

Plus que son expression, c’était son ton qui était encore rassurant. L’élève en question pouvait encore se retirer. Et il aurait même dû le faire, mais il ne l’a pas fait.

« Mais nous sommes les premiers à y être confrontés, et nous ne savons pas à quoi nous attendre, donc c'est un désavantage pour nous. En d'autres termes, cela modifie beaucoup nos notes, ce qui est trop injuste. »

« Pour qui vous prenez-vous pour croire que nous sommes des amateurs comme vous ! Tout est parfaitement pris en compte et parfaitement ordonné en conséquence. »

« Nous voulions juste être sûrs ! », insista-t-il d'un air mauvais, ne se sentant pas obligé de s'arrêter là.

Une punition, s'il vous plaît, une punition, n'importe quelle punition », supplia Conor en se léchant les lèvres.

« Pour votre comportement irrespectueux, je vous retire les dix premiers points à tous les dix. » Et il le déclara, toujours avec son air affable. C'était d'autant plus... terrifiant.

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