« Comment peux-tu ? » s'écria son amie, outrée, « je t'interdis de définir mon fils et encore moins de le dénigrer ! Je pensais que tu saurais comment l'aider, mais je vois que ce n'est pas le cas ! »
« Tu as raison, je ne peux pas. » admit-il sans grand effort, « Parce que je ne comprends pas comment une sorcière aussi douée que toi a pu engendrer un enfant aussi peu doué et... »
Le directeur Krez s'arrêta juste à temps, mais le sujet de la discussion s'acheva pour eux.
« ...et laid. »
Sa mère fut surprise d'entendre son enfant parler ainsi, mais cet enfant ne disait-il pas simplement la vérité ?
« Mon chéri ! Tu n'es pas du tout laid ou sans talent. Tu es le premier de ta classe en théorie ! »
« Et ça m'aide beaucoup, comme tu peux le voir ! »
La sorcière ne savait plus que dire et se tourna vers son ami pour quémander un peu d’aide et de soutien de sa part.
« Krez, dis quelque chose ! »
« Et dire quoi », argumenta-t-il, soutenant Conor à sa manière, « qu'il est doué et beau, autant que toi ? Qu'il y a encore de l'espoir pour lui dans le monde magique ? Non. Je ne vais pas lui mentir non plus. D'ailleurs, il l'a accepté. Celui qui ne l'accepte pas, c'est toi. »
Marion, effarée par ce qu'elle venait d'entendre, scruta le visage du sorcier pour voir s'il pensait vraiment ce qu'il disait. Son visage montra que c'était le cas, et celui de son fils aussi.
« Va te faire foutre, Krez ! »
« Celui que tu devrais insulter, c'est son père, Marion. Qui est-il d'ailleurs pour avoir engendré un tel cas à part. »
Cette fois, la discussion pénible, mais fastidieuse intéressa Conor qui releva vivement la tête alors que le sorcier abordait l'un des sujets les plus importants et les plus secrets de son existence. Il était si intéressé qu'il passa outre l'insulte du principal, ainsi que le surnom répugnant que l'école lui avait donné, et demanda :
« Vous connaissez mon père ? »
« Non. » lui affirma-t-il malheureusement, « Je suis désolé que tu ne le saches pas non plus. Mais peut-être que ta mère finira par te le dire. Je parie sur un humain. »
Les deux mâles se tournèrent aussitôt vers celle qui détenait la vérité, mais cette dernière n’avait certainement pas l'intention d'aborder ce sujet plus qu'épineux pour le moment, et certainement pas en présence de son ami qui n'en était plus un.
« Tu n'es qu'un salaud, Krez. »
« Moi, alors que c'est toi qui mens à ton fils, lui faisant croire qu'il est capable de ce qu'il ne pourra jamais faire, sans parler de garder l’identité son père secret ! »
« Ce n'est pas à toi d'en décider. » répliqua Marion en lui jetant un regard noir, mais il ne broncha pas.
« Ce n'est pas non plus à toi. Mais quoi qu'il arrive plus tard, ce ne sera pas ici. »
Marion se leva, continuant à fixer le directeur avec mépris.
« Allez, lève-toi, Conor. Nous partons. »
Mais ayant entamé cette discussion qui lui tenait tant à cœur, Conor n'avait pas l'intention de l'abandonner aussi facilement.
« Mais maman, c'est vrai ce qu'il dit, que mon père est humain ? »
« Non, mais je te raconterai la suite plus tard. »
« Tu me le promets ? » persista-t-il, refusant de bouger.
Marion ne répondit plus.
« Tu promets, maman ! »
« Nous partons. Nous n'avons plus rien à faire ici. »
Et sans plus attendre, sans se soucier que son fils la suive ou non, Marion sortit du bureau du proviseur. Conor la suivit des yeux un instant, hésitant, puis se tourna vers Krez.
« Vous avez vraiment dit la vérité quand vous disiez ne rien savoir à propos de mon père ? »
« Oui, Conor. Je suis désolé. »
« Je vois. Maman a raison, vous êtes vraiment un connard. »
« Et je te souhaite bonne chance, Conor. J'espère que tu trouveras qui tu es et ce que tu pourras faire. »
Le jeune magicien sourit cyniquement.
« Bizarrement, je crois que vous êtes sincère. D'ailleurs, je croirai toujours quelqu'un qui s'intéresse autant à cette personne. »
Et Conor dessina la pile de livres qui parlaient de Zion.
« Il est... spectaculaire, n'est-ce pas ? »
« Oui, il l'est. »
« Toi aussi, à ta façon. Tu serais le seul élève à qui j’aurais jamais échoué. »
« On peut dire que c'est extraordinaire, même si j'aurais préféré qu'il en soit autrement. »
« Je vois. Je comprends. Peut-être trouveras-tu ce que tu cherches parmi les humains. »
Suivant les pas de sa mère, Conor longea une dernière fois les couloirs du lycée d'Ogemos, descendit ses escaliers monumentaux et traversa le grand hall comme sous les yeux invisibles, mais moqueurs de tous ceux qui étaient passés par là et avaient réussi.
Il se retourna et admira les décorations du prochain festival. La plus grande de l'école. Le mois des épopées. Et pour célébrer un événement portant un tel nom, la plus grande épopée célébrée serait évidemment, incontestablement, le combat historique du mage guerrier Zion et du mage noir Jaros.
Ce jour-là, leur combat ou la reconstitution la plus fidèle de ce qu'il fut, en tenant compte de tous les témoins qui avaient décidé de le raconter, fut affiché sur tous les murs.
Jaros se tenait fièrement au milieu de son édifice, invoquant monstres et magies noires, se préparant à accueillir son adversaire de passage, qui fonçait à travers l'espace sur sa bête géante aux ailes et à la fourrure étincelantes.
Les deux mages, plus beaux et plus puissants que jamais, étaient prêts à tout pour remporter la victoire.
Mais un seul sortira vainqueur.
Et ce n'était pas le mage noir.
Conor contempla un instant Zion, sa splendeur, son aura souveraine, son assurance et ses pouvoirs illimités, l'admirant et l'enviant comme jamais auparavant.
Puis il se retourna et s'éloigna.
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