Chapitre 2 : Un père

Point de vue d'Isabella :

— Je veux m'enfuir avec toi.

Surpris, il baissa les yeux sur moi. Je le regardai déjà.

— Tu me l'as déjà dit, ça, sourit-il

— Oui, mais avoue que c'est une bonne idée, avec tous les problèmes qu'on a.

— On serait des lâches, grimaça-t-il.

— Des lâches qui veulent seulement la paix.

— On est bien là, non ? haussa-t-il les sourcils.

— Oui, maintenant... quand on est seuls, rien que toi et moi, on est bien, on se déconnecte du reste du monde... mais ce bonheur est éphémère, à chaque fois un truc vient perturber notre sérénité.

Il souffla, partageant ma mélancolie.

— Tu verras, un jour, on se réunira autour du canapé, avec nos deux magnifiques enfants, tu seras enceinte du troisième, et on rigolera en repensant à ces jours sombres qu'on a réussi à surmonter malgré tout.

— Trois enfants, donc ?

C'était la seule chose qui m'avait interpellé. Il n'y avait aucune irritation ou peine dans ma voix, car j'avais surmonté courageusement le fait que je ne sois pas enceinte, et que tout au fond de moi, j'aurais désiré l'être.

— Oui, répondit-il, tu en veux plus ?

— Non, c'est parfait. Combien de filles et combien de garçons ? continuai-je ma rêverie.

— Alors... je dirais une fille et un garçon, d'âges assez rapprochés, deux ans d'écart maximum, pour qu'ils grandissent ensemble et après, on pourrait leur donner une petite sœur quand ils seront plus grands. J'aime l'idée qu'en plus d'avoir un fils – le digne fils de son père - j'aurais deux petites princesses aussi merveilleuses que la reine de mon cœur.

Je le vis fermer les yeux, s'imaginant déjà la scène, alors que les miens se perlèrent de larmes.

— Ce serait parfait, murmurai-je, émue.

— Ne pleure pas ma puce, on ne fait que discuter...

— Je sais... mais j'ai tellement hâte de porter tes enfants.

— J'ai hâte aussi, Isabella... je sais que j'ai été dur avec toi, j'aurais dû prendre tes sentiments en considération sachant à quel point tu veux des enfants... Alors, on n'attendra pas tes trente ans.

Je me redressai dans mon lit, essoufflée, le cœur battant la chamade. Je regardai automatiquement à côté de moi, mais il n'était pas là. Sa place était vide, froide... et j'étais seule. J'étais définitivement seule.

Les sanglots m'envahirent, et un cri de rage s'échappa de ma bouche avant que je ne m'effondre contre son oreiller. Je n'avais pas pris la peine de le laver, et pourtant, son parfum s'estompa progressivement. À force de ne plus le percevoir, je risquais de l'oublier.

L'idée de l'oublier était insupportable. Les détails de son visage se dissipaient de ma mémoire. Chaque jour, je feuilletais notre album de mariage pour retrouver son magnifique sourire, ses yeux pétillants, les délicates fossettes au coin de ses joues, la minuscule ride entre ses sourcils quand il les fronçait, ses cheveux soyeux qu'il procrastinait à couper, sa moustache qui me chatouillait à chaque baiser, sa barbe que j'aimais caresser, ses lèvres roses et pulpeuses qui embrassaient divinement, son corps musclé, et ses bras réconfortants...

La porte de ma chambre s'ouvrit brusquement et Marie se précipita vers moi. Elle tenta de me faire relever la tête, mais je continuais de pousser des cris étouffés par l'oreiller.

— Isabella, je vous en prie... les bébés !

Je me figeai. Mon chagrin m'avait aveuglé au point où je ne distinguais même plus la douleur dans mon ventre. Je m'écrasais littéralement contre le matelas, luttant pour respirer alors que je suffoquais. Avec effort, je me redressai, aidée par la brune, et plaçai mes mains tremblantes sur mon ventre.

— Je suis désolée... tellement désolée...

— Ce n'est rien... tout va bien ma chérie, me réconforta-t-elle.

Je me blottis contre elle, et pleurai à chaudes larmes. Elle me caressa les cheveux et me berça, comme à chaque fois. Je faisais des cauchemars quasiment toutes les nuits. Parfois, je revoyais mon kidnapping, et d'autres, je revivais des souvenirs avec Chris. Les seconds étaient les plus éprouvants pour moi.

Le revoir dans mes rêves ne m'apaisait pas, au contraire. Ça me rappelait constamment qu'il n'était plus là, que les six mois que j'avais partagés avec lui, dont trois en étant mariés, n'étaient plus que de lointains souvenirs et qu'il n'y aurait plus jamais d'autres.

— Je vais rester avec toi jusqu'à ce que tu te rendormes, ça va aller, Isabella... ça va aller.

***

Je soupirai en descendant la dernière marche d'escalier. Je me dirigeai vers la cuisine où résonnaient des voix familières. Mes lèvres s'étirèrent en découvrant Marilyn, assise à table, un cookie à la main, en train de discuter avec Marie.

— Bonjour, leur fis-je remarquer ma présence.

— Isabella ! Ma chérie ! Comment tu vas ?

Ma belle-mère se hâta vers moi pour me prendre dans ses bras. Elle fit attention à mon ventre arrondi et dès qu'elle se recula, elle posa tendrement sa main dessus. Son grand sourire réchauffa mon cœur.

— Comment vont mes petits-enfants ?

— Ils vont bien, souris-je.

— Ils ont bougé ?

— Pas vraiment, fis-je la moue.

— Ça va venir, ne t'inquiète pas... tu as une échographie bientôt ?

— Oui, et normalement, je connaîtrai leurs sexes, répondis-je.

Elle se pinça les lèvres, hésitant à me demander quelque chose :

— Tu ne devrais pas y aller toute seule... ta grand-mère pourrait t'accompagner, ou sinon je me porte volontaire, c'est comme tu veux...

— Pas Irène, soufflai-je. Je n'ai pas envie qu'elle me prenne la tête.

Elle sourit doucement.

— Si vous voulez vous pouvez venir avec moi, lui donnai-je mon accord, ou bien, je demanderai à Sarah. L'essentiel, c'est que je ne compte pas y aller seule. Je veux être bien entourée pour un moment aussi important.

— Tu peux compter sur moi, Isabella, je serai toujours là pour toi.

Elle me reprit dans ses bras, et je fus apaisée par son câlin. Marie et elle étaient les seules à véritablement m'aider. Sébastien et Sarah faisaient de leur mieux, mais leurs emplois et leurs propres relations les accaparaient. Je ne leur en voulais pas. Je refusais qu'ils mettent leur vie en suspens pour moi.

— Je dois y aller, j'ai promis à une amie de déjeuner avec elle, fit-elle.

— Merci d'être passé, Marilyn.

Elle fixa une dernière fois mon ventre en souriant avec amour, puis s'en alla. Marie me servit le petit-déjeuner ; du jus de saison et les cookies qu'elle avait préparés. Je finissais à peine de manger que la sonnette retentit. La brune partit ouvrir et revint en compagnie d'Irène. Je pestai discrètement.

— Bonjour, Isabella.

— Bonjour. Tu viens de manquer Marilyn.

Son visage se ferma. À vrai dire, elles étaient un peu en froid toutes les deux. Depuis la nuit de l'incident, où les médecins avaient découvert les marques du fouet sur mon corps, une tension s'était installée entre les deux familles.

Marilyn avait compris que Chris m'avait effectivement frappée, même si c'était dans un contexte sexuel et que j'étais parfaitement consentante. Cependant, elle était scandalisée que son propre fils ait commis quelque chose d'aussi « barbare ».

Irène quant à elle, ne s'était pas gênée pour dire franchement qu'elle regrettait de m'avoir laissé épouser Chris. Elle regrettait d'avoir honoré la promesse de mes parents. Pour elle, il n'était qu'un dépravé sexuel qui m'aurait manipulé pour abuser de moi. Le fait qu'il soit mort n'avait pas atténué sa rancœur à son égard et par extension, sa famille en payait les frais.

J'avais horriblement peur qu'elle méprise mes enfants. Je savais qu'elle n'était pas cruelle à ce point, mais ils lui rappelleront forcément leur défunt père...

— Qu'est-ce qu'elle voulait ? fit-elle méchamment.

— Prendre de mes nouvelles, haussai-je les épaules.

— Ça va être compliqué quand les bébés seront là, marmonna-t-elle.

— Comment ça ?

— Nos deux familles vont se quereller pour leur éducation. Je ne permettrais pas que mes arrière-petits-fils deviennent comme...

— Comme qui ? Leur père ? haussai-je le ton.

Marie déglutit, remarquant mon visage qui rougissait de colère. Ma grand-mère resta de marbre.

— Oui, lâcha-t-elle.

— Pour être parfaitement clair, grand-mère, personne d'autre que moi ne sera responsable de l'éducation de mes enfants, et je souhaite ardemment qu'ils héritent des traits merveilleux de leur père ! Je les élèverai de manière à ce qu'ils ne soient en aucun cas coincés et fermés d'esprit, crachai-je.

— Tu es enceinte, change de ton, Isabella, gronda-t-elle.

— Je suis chez moi, j'emploie le ton que je veux !

Je plaquai mes mains contre la table. Marie sursauta, contrairement à ma grand-mère, impassible.

— Jusqu'au là, je ne voulais pas te brusquer, mais il est temps que j'aborde avec toi un sujet... délicat.

Mon cœur rata un battement. Quoi encore ?

— Tu as peut-être raison, ce n'est pas à nous d'élever tes enfants, mais tu ne peux pas le faire toute seule non plus. Un seul bébé, c'est déjà difficile, mais alors deux...

Elle marqua une pause.

— Ils auront besoin de présence masculine. Ils auront besoin d'un père.

— Ils ont déjà un père ! criai-je. Un père qui est mort sans même être au courant de leur existence !

— Je sais, garda-t-elle un ton calme. Christopher sera toujours leur père biologique, tu leur parleras de lui quand ils seront en âge de comprendre, mais ils auront besoin d'un homme dans leurs vies. Toi aussi, tu as besoin d'un conjoint, un mari qui te soutiendra et qui t'épaulera...

Ma mâchoire se décrocha, sidérée.

— Les nouvelles vont vite, la tragédie que tu as vécue est arrivée aux oreilles de beaucoup d'hommes riches, célibataires, et convenables... certains m'ont contacté pour demander ta main. Ça ne les dérange pas que tu sois veuve et enceinte. Ta beauté les fascine et ils souhaitent t'épouser. Évidemment, je ne te laisserai pas entre les mains de n'importe qui. Je ne commettrai pas deux fois la même erreur. Ton futur mari sera un homme charmant, discret, et respectable. Il te comblera et il sera un père pour...

— Sors d'ici.

J'avais difficilement articulé. Je tremblais. J'allais m'évanouir tellement ma tension montait et mon taux de glycémie chutait. Pour la première fois de ma vie, je souhaitais que cette femme ne soit pas de ma famille.

— Isabella...

— Sors d'ici ! Tout de suite ! criai-je.

Elle ne bougeait pas, le regard aussi glacial que jamais. N'ayant pas d'autres recours, je me mis à pousser des cris hystériques, plongeant Marie dans le désarroi alors qu'elle tentait désespérément de me calmer, mais je m'agitais dans tous les sens, hurlant de toutes mes forces. Irène était pétrifiée.

— Je vous en supplie, partez ! la supplia-t-elle.

Elle obéit, disparaissant précipitamment de mon champ de vision. Je me calmai dès que j'entendis la porte se refermer derrière elle. Ma respiration était erratique, je peinais à reprendre mon souffle. Marie me servit un verre d'eau qui me fit le plus grand bien.

— Ça va mieux ? s'inquiéta-t-elle.

— Je ne veux plus qu'elle mette les pieds ici, murmurai-je.

— Elle ne vous obligera pas à vous remarier. Personne ne vous y obligera, Isabella.

Je préférais encore mourir que laisser un autre homme poser ses mains sur moi. J'appartenais à Chris corps et âme, pour toujours et à jamais.

***

J'étais affalée sur le canapé quand je reçus un message d'Henri, m'informant qu'il allait passer. Il venait quotidiennement me rendre visite. Il ne l'exprimait pas ouvertement, mais je savais qu'il se sentait coupable de la mort de Chris.

Il avait tenté de le sauver, mais Ayden avait été plus rapide. Je ne lui en voulais pas, au contraire, je lui étais reconnaissante d'avoir fait son possible pour le défendre. Il était le dernier à avoir vu mon mari en vie et il m'avait avoué que sa dernière pensée avait été pour moi. Je le croyais.

Je ravalai mes larmes en entendant la sonnette. Marie partit lui ouvrir, et je me redressai non sans mal du canapé en voyant sa tignasse bouclée. Ses yeux verts s'arrondissaient à chaque fois qu'il voyait mon ventre. Ça me donnait envie de rire tellement sa timidité le rendait mignon.

— Salut, Henri.

— Salut... Ça va ? balbutia-t-il.

— Oui, et toi ?

Il se dandina sur un pied en se tordant nerveusement les pouces. Je fronçai les sourcils.

— Tout va bien ?

— Pas vraiment, j'ai... j'ai une mauvaise nouvelle.

Mon souffle se coupa.

— Ils l'ont retrouvé ? Ils ont retrouvé son corps ?

— Non, secoua-t-il la tête. Ce n'est pas ça.

Je soufflai de soulagement. Tant que son corps restait introuvable, il y avait un infime espoir pour qu'il soit toujours en vie. J'étais sûrement naïvement optimiste, mais j'en avais besoin pour ne pas m'écrouler complètement.

— C'est à propos d'Ayden, dit-il.

— Quoi ?

— Il va être libéré.

...----------------...

Populaire

Comments

Élie🌈💖Quënny👑💗

Élie🌈💖Quënny👑💗

Irène vas au diable 😠😡😡

2024-03-26

5

lovely

lovely

saleté d Irène

2024-03-26

1

Tous
Episodes
1 Prologue
2 Chapitre 1 : Ressemblance
3 Chapitre 1 : Ressemblance ( la suite )
4 Chapitre 2 : Un père
5 Chapitre 2 : Un père (la suite)
6 Chapitre 3 : Un dilemme irrésolvable
7 Chapitre 3 : Un dilemme irrésolvable (la suite)
8 Chapitre 4 : Petits miracles
9 Chapitre 4 : Petits miracles (la suite)
10 Chapitre 5 : Une battante
11 Chapitre 5 : Une battante (la suite)
12 Chapitre 6 : Drôle de coïncidence
13 Chapitre 6 : Drôle de coïncidence (la suite)
14 Chapitre 7 : Propriété exclusive
15 Chapitre 7 : Propriété exclusive (la suite)
16 Chapitre 8 : Sexy
17 Chapitre 8 : Sexy (la suite)
18 Chapitre 9 : Course poursuite
19 Chapitre 9 : Course poursuite (la suite)
20 Chapitre 10 : prénoms
21 Chapitre 10 : prénoms (la suite)
22 Chapitre 11: Brooklyn
23 Chapitre 11: Brooklyn (la suite)
24 Chapitre 12 : Un pari
25 Chapitre 12 : Un pari (la suite)
26 Chapitre 13 : Le passé reste dans le passé
27 Chapitre 13 : Le passé reste le passé ( la suite)
28 Chapitre 14 : La relaxation
29 Chapitre 14 : La relaxation (la suite)
30 Chapitre 15 : Un frisson
31 Chapitre 15 : Un frisson ( la suite)
32 Chapitre 16 : ENTRAÎNEMENT
33 Chapitre 16 : ENTRAÎNEMENT (la suite)
34 épisode 17 : Le pire jour de sa vie
35 Chapitre 17 : Le pire jour de sa vie (la suite)
36 Chapitre 18 : Une belle journée
37 Chapitre 18 : Une belle journée (la suite)
Episodes

37 épisodes mis à jour

1
Prologue
2
Chapitre 1 : Ressemblance
3
Chapitre 1 : Ressemblance ( la suite )
4
Chapitre 2 : Un père
5
Chapitre 2 : Un père (la suite)
6
Chapitre 3 : Un dilemme irrésolvable
7
Chapitre 3 : Un dilemme irrésolvable (la suite)
8
Chapitre 4 : Petits miracles
9
Chapitre 4 : Petits miracles (la suite)
10
Chapitre 5 : Une battante
11
Chapitre 5 : Une battante (la suite)
12
Chapitre 6 : Drôle de coïncidence
13
Chapitre 6 : Drôle de coïncidence (la suite)
14
Chapitre 7 : Propriété exclusive
15
Chapitre 7 : Propriété exclusive (la suite)
16
Chapitre 8 : Sexy
17
Chapitre 8 : Sexy (la suite)
18
Chapitre 9 : Course poursuite
19
Chapitre 9 : Course poursuite (la suite)
20
Chapitre 10 : prénoms
21
Chapitre 10 : prénoms (la suite)
22
Chapitre 11: Brooklyn
23
Chapitre 11: Brooklyn (la suite)
24
Chapitre 12 : Un pari
25
Chapitre 12 : Un pari (la suite)
26
Chapitre 13 : Le passé reste dans le passé
27
Chapitre 13 : Le passé reste le passé ( la suite)
28
Chapitre 14 : La relaxation
29
Chapitre 14 : La relaxation (la suite)
30
Chapitre 15 : Un frisson
31
Chapitre 15 : Un frisson ( la suite)
32
Chapitre 16 : ENTRAÎNEMENT
33
Chapitre 16 : ENTRAÎNEMENT (la suite)
34
épisode 17 : Le pire jour de sa vie
35
Chapitre 17 : Le pire jour de sa vie (la suite)
36
Chapitre 18 : Une belle journée
37
Chapitre 18 : Une belle journée (la suite)

Télécharger maintenant

Aimez-vous ce travail ? Téléchargez l'application et vos enregistrements de lecture ne seront pas perdus
Télécharger maintenant

Bien-être

Les nouveaux utilisateurs peuvent télécharger l'application pour débloquer 10 chapitres gratuitement.

Recevoir
NovelToon
Ouvrir la porte d'un autre monde
Veuillez télécharger l'application MangaToon pour plus d'opérations!