De fil en aiguille
– Zut.
Qu'est-ce qu'il se passait encore ? Légèrement paniquée, Livi s'essuya plusieurs fois le nez espérant que ça s'arrête mais elle en étala davantage sur ces mains. Elle n'aimait pas ça, vraiment pas. C'était la première fois qu'une telle chose lui arrivait.
Comme s'il avait été frappé par la foudre, Swam sursauta, l'attrapa par l'épaule et l'emmena dans sa salle de bain en insistant pour qu'elle garde la tête baissée en avant. La plupart des personnes avaient relevaient la tête par réflexe, chose à ne pas faire car elle pourrait faire couler ce sang dans ses poumons. C'était bien la dernière chose qu'il voulait. Ouvrant le robinet, le sang qui s'écoulait du nez de Livi se mélangea avec l'eau avant de s'engouffrer dans les canalisations.
Voici une des raisons pour lesquelles Swam avait hésité à lui montrer ses souvenirs. Livi avait eu libre accès à son réseau psychique, elle choisissait elle-même ce qu'elle voulait voir, son temps de réaction pour stopper la vision du souvenir était donc limité ; mais en plus de cela elle y était restée longtemps. Le lien physique et psychique qu'ils avaient dû créer quelques tensions nerveuses. Le cerveau de Livi manifestait donc son mécontentement face à cette long et intense sollicitation en lui envoyant un message d'alerte couleur écarlate. Avoir une activité cérébrale aussi importante était néfaste pour le corps.
D'un regard inquiet Swam attendit au côté de Livi près du lavabo, espérant que l'écoulement d'hémoglobine s'arrête d'elle-même, mais ce ne fut pas le cas. Il y en avait toujours plus et l'odeur de cette substance commençait à devenir très présente dans sa chambre. Le vampire s'éloigna une seconde de la salle de bain, fit pousser une plante odorant pour dissimuler celle du sang de Livi avant de revenir vers elle.
Il passa alors sa main sous l'eau puis releva la tête de Livi. Cette dernière gémis doucement en portant ces mains à son nez. Swam ôta sa main, posa son indexe et son pouce sur l'arrête de son nez puis murmura une formule qu'elle ne comprit pas. Le cœur battement pulsant rapidement dans sa poitrine, Livi vit les doigts du brun briller d'une couleur verte.
– Garde les yeux ouverts, c'est presque fini, énonça-t-il alors que ces paupières se fermaient.
Clignant plusieurs fois des yeux pour se maintenir éveillée, les mains de Livi étaient retombées le long de son corps, laissant le surplus de sang coulé sur ses lèvres, son menton ainsi que son haut. Une petite minute, durant laquelle aucun des deux ne dit rien, s'écoula avant qu'elle ne se sente bien mieux. La petite chaleur qu'elle ressentait au niveau de son nez s'en était allée.
– Merci, souffla-t-elle en respirant par la bouche.
Elle n'osait le faire avec ces narines de peur d'avoir du sang au fond des poumons. Cette petite hémorragie l'avait fait profondément frissonner, voir autant de son sang quitter son corps sans avoir de blessure était inquiétant. Elle devrait en parler à Guiseppe mais il n'était pas là, et puis Swam avait quelque pouvoir de guérison, sa magie avait dû la soigner.
En parlant de ce dernier, il fixait sa main depuis un bon moment sans cligner des yeux. Livi déplaça sa main de droite à gauche et vit les iris du vampire suivre son geste.
– Ça va ? Demanda alors Livi.
Il était étrange tout à coup. Swam hocha doucement la tête en attrapant sa main. Il la porta à son nez et huma le parfum qui s'en dégageait.
– J'avais oublié comme ça sentait bon, souffla-t-il.
Son regard était rivé sur ces doigts qu'il plaqua sur son nez comme pour mieux sentir l'odeur.
– Swam ? Qu'est-ce que tu fais ? Demanda Livi en tentant de retirer sa main.
Néanmoins le vampire la retenait grâce à sa force.
– Qu'est-ce qu'il te prend ? Lâche-moi ! Cria-t-elle alors qu'il vint lécher son doigt.
Sa voix s'évanouit dans la salle d'eau lorsqu'elle croisa son regard rouge d'envie. Merde. Elle se demanda alors à quel moment remontait le dernier repas du vampire. Un jour ? Deux ? Une semaine ? Un mois ? Quoiqu'il en soit d'après le rythme féroce avec lequel la langue du vampire lapait ses doigts, Swam n'avait pas mangé aujourd'hui. Elle s'inquiéta encore plus lorsqu'il attrapa sa mâchoire et approcha sa bouche de son nez.
- Si tu me lèche le nez je...
Personne n'entendit la fin de sa menace puisqu'il captura ses lèvres, essuyant voracement le sang qui s'était écoulé jusque-là. Sa main tremblante posée sur son torse n'arrive pas à le repousser, elle frappa à de nombreuses reprises son torse glacial et couina. Swam entendit parfaitement se bruit mais n'en tient pas compte. Il était en plein extase. Livi le vit lécher sa lèvre inférieure coloré de sang.
Du sang... Son sang.
Il n'y avait rien de mieux pour étancher la soif d'un vampire. Il pouvait sentir sa peau bouillonner contre la sienne. Il raffolait de cette sensation.
Le vampire grogna. Franchement Swam se demandait pourquoi est-ce que Jagger refusait toujours qu'il en boit. Tous les membres du palais avaient droit à un verre à chaque déjeuner, lui il en avait un tous les 36 du mois. Il était un vampire comme les autres. Certes il avait été transformé par Jagger, mais il était un vampire. Sa main se pressa davantage contre le bras de Livi qu'il trouva bien pâle d'un coup. Il se rendit alors compte qu'il était en train de la mordre et retira ces canines de sa peau avant de se sentir projeter en arrière. Swam fit une roulade arrière, se redressa sur ses jambes et montra ses crocs, sur la défensive, bien qu'il connaissait cette surnaturelle.
La vampire qui lui faisait face ne broncha pas et se plaça entre lui et Livi. Il grogna d'avantage et elle serra les poings ; voir Swam ainsi l'inquiétait toujours. En particulier lorsque ses yeux devenaient rouges. Enfin un œil serait plus exact. Mila-Swan ne connaissait pas les détails de l'histoire mais contrairement à la plupart des vampires, un seul des yeux de Swam devenait rouge. Elle aurait pu penser que cela arrivait aux humains qui réussit à survivre à la phase de transformation vampirique mais non. Comme lui, Mila-Swan avait été humaine il y a un bon nombre d'année. Elle avait été transformée par un vampire fou et Swam par le roi durant la même année. Ils avaient tous deux fait leur premier pas dans leur nouvelle vie de vampire ensemble. Ils s'étaient entraidés durant leur premières années vampiriques, puis avait dû se quitter. Mais ils étaient restés de bons amis même après toutes ces années. Mila-Swan savait qu'il avait de gros problème avec le sang.
Prendre du sang était une chose, s'arrêter en était une autre.
– Dégages, grogna-t-il.
– Tu vas la tuer, réplique doucement la serveuse.
Les yeux du vampire s'ouvrirent comme des billes et son œil droit reprit sa couleur vert naturelle.
– Je ne voulais pas... fit-il en s'adressant au deux filles.
Livi elle était plutôt perdu. A quel moment est-ce que Mila-Swan était entrée ?
– Ce n'est rien, s'exprima la vampire. Tu as juste besoin de te reposer.
Accompagnant son geste, Mila-Swan se dirigea vers la fenêtre. Sa main agrippa le rideau qui couvrait la fenêtre face à la salle de bain.
– Ne touche pas à ce rideau ! S'écria-t-il.
Trop tard. La vampire-serveuse tira sur le tissu sombre et les rayons du soleil traversèrent la vitre puis touchèrent le vampire. Swam s'écroula au sol, assommé. Il secouait sa tête de droit à gauche pour se maintenir éveillé, mais rien à faire. Il bailla deux fois avant d'envoyer un regard plein de reproche à Mila-Swam.
– Meurt tranquillement, je m'occupe d'elle, articula-t-elle en posant une main compatissante sur son épaule.
Elle n'attendit que quelques secondes pour voir la tête du brun se poser au sol et ses yeux se fermer.
La surnaturelle faisait partie des personnes au courant pour la façon particulière dont Swam s'endormait. Elle l'avait découvert alors qu'elle lui faisait goûter un nouveau smoothie. Sur le coup elle avait cru qu'elle l'avait tué en se trompant dans les doses, mais cet imbécile c'était tranquillement réveillé une quinzaine de minutes plus tard en gloussant comme un âne. Il l'avait nargué un petit moment puis lui avait parlé de son « sommeil ».
Le temps de mort du vampire n'était jamais le même, c'est pour cela que Mila-Swan s'activa. Elle poussa à l'aide de son pied les quelques produits qui s'étaient éparpillés au sol et s'approcha de Livi qui l'observait avec méfiance.
– Je ne te ferais rien ne t'inquiète pas, j'ai déjà mangé. Tu permets que je m'occupe de ça ? Fit-elle en indiquant sa peau.
Livi, qui avait eu un mouvement de recul, hocha la tête. La vampire humidifia son pouce avec sa salive, essuya les gouttes de sang et finit par lécher son doigt.
– Hum... C'est vrai que c'est bon. Oups ! Fais comme si tu n'avais rien entendu, ria-t-elle nerveusement avant de reprendre son sérieux. Tu ne devrais pas rester ici longtemps, les autres ne tarderont pas à regagner ce couloir.
– Comment tu as su que j'étais ici ?
– Abigaël m'a prévenu. Elle m'a dit que tu passerais me voir. J'ai patienté dans ma chambre puis j'ai entendu du bruit venant de cette chambre alors je suis venue voir. J'ai bien fait apparemment, rigola-t-elle avant de soulever le corps du vampire. Elle le porta jusqu'au lit où elle l'installa comme elle le pu avant de le regarder.
– Il est mignon quand il dort non ? On dirait un lapin près à être étranglé et cuit.
– Hum... Oui, fit Livi en voyant que la serveuse avait sa propre définition du mot mignon.
– Pourquoi est-ce que tu voulais me voir au juste ?
Swam ne sut jamais combien de temps les deux filles étaient restées parlées, ni même de quoi est ce qu'elles parlaient. Tous ce qu'il savait, c'est que Mila en avait profité pour ranger ses affaires, ça ne le surprenait pas elle était une grande maniaque, et pour lui dessiner sur le visage avec un crayon. Heureusement que ce truc partait avec du savon, ça aurait été moins drôle pour lui si c'était indélébile.
Complètement sec maintenant, il se rhabilla puis gagna rapidement la chambre de Vasco.
– T'es en retard, articula le conseiller depuis l'autre bout de sa chambre.
– Et toi tu aurais pu t'habiller, contra Swam en le voyant juste avec un bas.
– Je suis dans ma chambre, râla le vampire.
– Dans ce cas profite-en pour raser la moquette qui pousse sur ton torse.
– Sois pas jaloux de tes poils de rats, ironisa Vasco. Aller ramènes-toi.
Il s'approcha sans avoir à fermer la porte puisque Béryl entra à son tour. Elle salua Swam puis embrassa son mari.
Avant de commencer j'ai croisé Livi dans les couloirs , fit Vasco en s'adressant à Béryl et Swam.
Le conseiller de guerre avait croisé ses bras contre son torse et attendait une réaction de leur part. Réaction qui ne vint pas. Swam menti en disant qu'il ne l'avait pas revu depuis un bon moment, Béryl lui dit qu'elle l'avait vu à la bibliothèque de la Bulle mais pas depuis.
– D'accord, je suis tombé sur sa l'autre jour... Commença alors Vasco en ouvrant un fichier sur son ordinateur.
Concentré sur la simulation de la zone mis en place par Vasco, Swam vit tout de même Béryl s'éclipser doucement. Comme Vasco n'avait rien dit sur la présence de la blonde hors de la bulle à Lucan, Béryl n'avait dit à personne qu'elle l'avait croisé dans les couloirs. Pire, elle l'avait même aidé à entrer discrètement.
Il y a quelques bonnes heures de cela, pendant que Swam dormait, deux gardes vampires accompagnaient Béryl pour déposer à la bibliothèque le nouvel arrivage de livre. Après avoir été soudoyer contre des jarres de sang, ils avaient aidé à cacher Livi dans un des chariots sous un drap et étaient entrée par la porte arrière de la bibliothèque de la Bulle. C'est donc en pleine conversation avec Béryl qu'Alexane avait retrouvé Livi. La vampire fronça les sourcils. Béryl avait mis fin à la discussion en souhaitant une bonne soirée aux deux femmes. Livi était ensuite restée à la bibliothèque, avant de rejoindre Joris à la salle de sport comme tous les jeudis.
Ce ne fut qu'après s'être douchée et avoir regagner sa chambre qu'elle put parler avec les jumelles. Elle les remercia en sautant comme une adolescente surexcitée sur place. Ce qui s'était passée durant la journée était digne d'un film d'espion, même si Livi avait eu besoin de plus de temps elle était rentrée à temps, grâce à Béryl. Décidément cette vampire était tombée à pic.
Leur échange n'avait pas duré longtemps, les jumelles regagnèrent leur chambre et Livi s'allongea sur son lit, caressant le doux duvet de Coconut.
Elle songeait à ce qu'elle avait vu dans les souvenirs de Swam.
Il avait bien voulu lui parler de sa famille, tout le contraire de Jagger. Elle n'aurait même pas été surprise s'il avait ordonné de tous les tuer pour être sûr qu'elle reste ici. Mais au moins elle savait qu'ils étaient toujours en vie et en bonne santé. Cette pensée lui fit du bien, mais la soudaine sérénité don elle faisait preuve, disparu instantanément en pensant au reste de ce qu'elle avait vu. Livi porta sa main à son épaule et la frotta avec douceur. Son corps avait gardé quelques sensations des coups infligés à Swam.
Le claquement du fouet s'abattant sur la peau du vampire lui revint en mémoire. Elle porta ses mains à ses oreilles, comme pour faire abstractions de ce bruit sourd et ferma les yeux. Pourtant ils raisonnèrent encore et encore, lui donnant la chair de poule. Elle entendait le grincement des objets métalliques de la cellule. Il y avait le grincement de la porte qui s'ouvrait et se fermait pour laisser entrer le bourreau, l'entrechoquement des mailles des chaînes qui retenait le vampire prisonnier, l'entrechoquement des armes suspendu dans la cellule d'en face, le grincement de la porte du dôme. Le dôme.... Swam pouvait le voir depuis sa cellule et grâce au trou formé en hauteur qui servait accessoirement de fenêtre. Elle avait vu lors du souvenir, des personnes, sans doute des démons, s'approcher de cette armature métallique qui dégageait une forte chaleur. Ils gardaient une certaine distance de sécurité et l'ouvrait, une leur orangé et un souffle d'air sortant de l'endroit était alors visible. Les démons y jetaient un corps puis la porte se refermait tout aussi vite.
La lumière aperçu lui faisait penser au jour du la parhélie, ce moment ci particulier où aucun vampire n'osait pointer le bout de son nez dehors sous peine de s'évaporer instantanément sous l'action des triples soleils visibles dans le ciel.
– Livi ?
La dhampire sursauta à l'entente de son prénom et vit Joris debout dans l'encadrement de la porte. Tout en restant allongée sur le lit, elle l'observa méfiante.
– Cela fait un moment que je t'appel, fit-il pour justifier sa présence. C'est l'heure de manger, te joins-tu as nous ?
Elle secoua négativement la tête.
– Je n'ai pas faim.
– Cela fait plusieurs fois que tu sautes un repas, fit-il remarquer.
– Je suis régime.
– Ne dit pas de bêtise. On sort à peine de la salle de sport. Je pensais que cela t'ouvrirait l'appétit.
Elle ne lui répondit pas. Il s'approcha.
– Ça va ?
– Dis-moi, quel acier utiliserais-tu si tu souhaiterais emprisonner de la chaleur ?
– Tu veux dire pour une maison, ou bien dans le cas d'un thermostat ?
– Un thermos.
– Un thermos est composé de bouteilles emboîtées l'une dans l'autre et séparées par un petit espace où il n'y a que du vide. Cela est suffisant pour isoler le contenu à l'intérieur et ralentir le refroidissement.
– Tu penses que ça marcherait à plus grande échelle ? Par exemple pour un bâtiment ?
– Je ne pense pas non. J'utiliserais plutôt une éponge à chaleur, c'est est massif, sans trous et rigide. Il suffit de l'exposer à une source de chaleur et il l'absorbe, pour la libérer on exerce une pression dessus.
– Comment ça marche ?
– Aucune idée, tu devrais le demander à Mike. Il a parlé à Vasco qui m'en a parler un jour. Tous ce que j'ai retenu c'est que cette chose est très efficace, voir trop, il s'est brûlé avec à un moment.
– Brûler ?
– Oui, Guiseppe a dû lui faire une greffe de peau pour cacher ça. Pourquoi cela t'intéresse-t-il ?
Ce mot passa en boucle dans sa tête et fini par quitter sa chaise dans un bruit sourd en fronçant les sourcils. Sans même lui répondre, Livi quitta brusquement le lit et attrapa ces sandales.
– Qu'est-ce qu'il y a ? Fit Joris surpris par son élan vers la porte.
– Il faut que je voie Aramis.
– Pourquoi ?
– Parce qu'ils vont tous se faire tuer.
***Téléchargez NovelToon pour profiter d'une meilleure expérience de lecture !***
Comments