Les mois s’étaient écoulés depuis son retour d’Islande, et Art’héna avait changé. Elle n’était plus simplement une musicienne qui cherchait à se faire entendre. Elle était devenue une créatrice à part entière, une chercheuse, une exploratrice de l’âme humaine, de ses silences, de ses mots non prononcés. Son public, qui l’avait toujours admirée pour son talent, commençait à percevoir un changement profond dans sa manière d’être, une évolution qui allait au-delà de la musique.
Les concerts qu’elle organisait en plein air étaient différents de tout ce qu’elle avait fait auparavant. Ce n’étaient pas des spectacles, mais des rituels. Dans des jardins, des forêts, des plages désertes, Art’héna jouait pour une poignée de personnes, mais chaque note, chaque silence, semblait atteindre l’essence même de l’existence. Les gens venaient non pas pour assister à un show, mais pour être témoins d’un moment suspendu, un espace-temps où la musique, la nature et l’être humain se fondaient en une seule unité.
Ce soir-là, Art’héna se préparait pour un concert particulier. Il ne s’agirait pas d’un concert dans un lieu connu, mais d’une performance improvisée, un retour à l’essence même de la musique. Elle s’était rendue dans un petit village côtier, où la mer battait les rochers avec une force tranquille. C’était ici, sur cette plage déserte, qu’elle jouerait.
Elle avait prévu de commencer son concert avant le coucher du soleil, alors que la lumière était encore douce et dorée. Le lieu était simple, presque brut : une petite scène faite de bois flotté, entourée de pierres naturelles. Les spectateurs étaient peu nombreux, mais Art’héna savait que chaque présence comptait. Ils étaient venus à la recherche d’une vérité qu’ils n’arrivaient pas à formuler. Et elle, elle était là pour leur offrir ce qu’ils cherchaient, sans mot, sans discours, mais simplement par la musique.
### **La Rencontre avec un Inconnu**
Avant le début de la performance, Art’héna se tenait seule, les yeux fixés sur l’horizon, écoutant le bruit des vagues. Un homme s’approcha d’elle, un étranger au regard profond, comme s’il venait de nulle part. Il avait l’air d’un vagabond, de ceux qui n’appartiennent à aucun endroit précis, mais qui comprennent les subtilités de l’univers.
« Vous êtes Art’héna, n’est-ce pas ? » demanda-t-il d’une voix calme.
Elle le regarda, étonnée qu’il sache qui elle était. Il n’avait rien de l’admirateur typique, et pourtant il semblait la connaître.
« Oui, c’est moi. » répondit-elle, sans vraiment savoir pourquoi.
L’homme sourit, un sourire doux et sage. « J’ai entendu parler de vous. De votre musique. Vous avez trouvé le silence. Mais la vraie question, c’est : avez-vous trouvé ce que vous cherchez dans ce silence ? »
Art’héna resta silencieuse, l’esprit en proie à une tempête de questions. Elle avait passé des mois à chercher dans la musique et dans le silence. Mais était-elle vraiment arrivée au bout de sa quête ?
L’homme continua, presque comme s’il lisait ses pensées. « Vous cherchez la vérité dans la musique, dans le monde. Mais la vérité, vous ne la trouverez jamais là où vous pensez la chercher. Elle est déjà en vous. Tout ce que vous avez à faire, c’est de la voir. »
Ces paroles, aussi simples qu’elles étaient, résonnèrent profondément en elle. Elle se rendit compte que pendant tout ce temps, elle avait été à la recherche d’une vérité extérieure, d’une forme pure de la musique, de la beauté. Mais ce qu’elle avait négligé, c’était qu’elle portait déjà cette vérité en elle. Elle n’avait pas besoin de voyager dans le monde pour la trouver, ni de jouer pour la reconnaître. Elle l’avait toujours eue, simplement en elle.
### **Le Concert du Cœur**
Le concert commença. Art’héna s’assit devant son piano, les doigts légèrement tremblants, mais sûrs. Le son qui s’échappa du clavier était doux, fluide, presque imperceptible au début. C’était une musique qui ne cherchait pas à impressionner, mais à libérer. Chaque touche, chaque accord était une invitation à se perdre dans l’espace. Les spectateurs étaient suspendus à chaque note, ne sachant pas s’il s’agissait de musique ou de silence. Les sons se faisaient échos les uns des autres, puis se fondaient dans le vent, dans les vagues, dans la lumière dorée du soleil couchant.
Art’héna jouait sans se soucier de l’heure, sans se soucier du monde autour d’elle. Elle jouait pour elle-même, pour ce qu’elle avait compris dans ce silence. La musique était devenue le reflet de sa propre évolution, de sa propre illumination.
Et alors qu’elle jouait, le regard de l’inconnu la traversa une dernière fois. Il se tenait toujours à l’écart, observant en silence. Mais Art’héna n’avait plus besoin de mots, ni de confirmation. Elle savait que cette quête, ce voyage intérieur, avait pris fin. Elle avait trouvé ce qu’elle cherchait, non dans un lieu lointain, mais dans chaque souffle qu’elle prenait, dans chaque geste qu’elle accomplissait.
Lorsque la dernière note se dissipa dans l’air, il n’y eut pas de cris, pas d’applaudissements. Il y eut seulement ce silence profond, cet instant suspendu où tout semblait parfaitement en place. Les spectateurs, comme elle, savaient qu’ils étaient témoins d’une vérité, mais une vérité qui ne se disait pas. Elle se vivait.
Ce fut là, sur cette plage, au coucher du soleil, que Art’héna comprit que la véritable musique ne se trouve pas dans l’éclat de la scène, ni dans l’acclamation du public. Elle réside dans l’acceptation du silence, dans l’écoute de ce qui n’est pas dit, dans l’illumination du regard qui sait voir au-delà du visible.
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