Les semaines suivant le concert furent remplies d’une étrange tranquillité pour Art’héna. Elle avait réussi à ouvrir une porte vers quelque chose de plus vaste qu’elle, mais à l’intérieur, un sentiment de vide persistait. Elle n’arrivait pas à comprendre ce qui la dérangeait. Était-ce la reconnaissance qui suivait son succès local ? Ou était-ce un sentiment plus profond, une inquiétude intérieure qu’elle n’arrivait à définir ?
Elle se retrouva un soir, assise seule dans son appartement, son journal ouvert devant elle, mais aucune pensée claire pour remplir les pages. Depuis le concert, les gens venaient à elle, demandant des conseils, des collaborations, des opportunités. Et chaque fois, Art’héna se sentait plus étrangère à tout cela. Pourquoi était-elle constamment sollicitée, alors qu’elle-même, à l’intérieur, se sentait toujours aussi perdue ?
Un appel inattendu la tira de ses réflexions. C’était Désiré, son ton sérieux.
« Art’héna, je pense qu’il est temps de faire face à quelque chose. » Il marqua une pause, comme s’il pesait ses mots. « Je t’ai observée, et je sens qu’il y a une résistance en toi, un blocage. Tu cherches à avancer, mais tu n’oses pas vraiment te laisser aller. »
Elle le laissa parler, sentant que ces mots étaient le reflet exact de ce qu’elle ressentait sans pouvoir l’exprimer.
« J’ai l’impression que tu as peur de découvrir qui tu es vraiment, sans tes masques ni tes contradictions. Mais tu ne peux pas échapper à cette vérité éternelle : plus tu résistes, plus tu te perds. »
Le silence qui suivit ses paroles sembla s’étirer à l’infini. Art’héna, bien qu’il n’ait jamais été aussi direct avec elle, savait au fond que Désiré avait raison. Elle se cachait derrière des illusions de contrôle et d’échec, évitant de plonger dans l’inconnu qui l’effrayait : *Elle-même.*
Ce soir-là, elle décida de partir seule. Elle n’avait pas de destination précise, mais il lui semblait que le voyage, en lui-même, pourrait l’aider à comprendre. Elle se rendit dans un café qu’elle aimait, où la musique douce se mêlait à la lumière tamisée. Assise dans un coin, elle se perdit dans les visages des autres, dans les discussions de groupe et les rires. Mais au fond d’elle, il y avait un calme étrange, une sensation de ne pas appartenir à cet endroit, comme si ce monde n’était pas celui qu’elle recherchait.
Une femme âgée s’assit à sa table, sans demander la permission. Elle portait un chapeau de paille et un sourire aussi paisible que la mer calme.
« Tu sembles avoir un poids sur le cœur, ma chère, » dit-elle doucement. « Parfois, la vérité se cache dans le silence. Peut-être que tu cherches trop à comprendre. »
Art’héna la regarda, étonnée par l’intrusion. « Que voulez-vous dire ? »
La femme la scruta un instant, comme si elle lisait chaque pensée de son esprit. « Ce que tu cherches n’est pas dans tes efforts, mais dans ta capacité à t’arrêter, à laisser venir. Le monde, tout comme toi, se construit à partir des petites choses oubliées, des silences entre les mots. »
Cette rencontre, aussi brève et mystérieuse fut-elle, laissa Art’héna perturbée. Elle avait toujours été dans l’action, dans la recherche incessante d’un objectif à atteindre. Mais cette conversation, pleine de sagesse simple, l’obligeait à reconsidérer sa manière de voir les choses.
Le lendemain, elle prit une décision radicale. Elle partirait. Pas pour fuir, mais pour prendre le temps de réfléchir, de se retrouver dans la solitude et dans le calme. Elle se rendrait dans un endroit retiré, loin des bruits et des attentes de Cotonou. Peut-être qu’en s’éloignant du tumulte, elle pourrait enfin entendre ce qu’elle ne parvenait pas à entendre depuis si longtemps : la vérité sur ce qu’elle cherchait vraiment.
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