Chapitre 5 : Les Jeux du Destin

Art'héna était déterminée. Les échecs de ses échecs commençaient à la rendre folle, mais cela ne faisait que renforcer sa volonté de défier son étrange sort. Cette fois, elle décida d'aller encore plus loin. Si la créativité et l'originalité étaient ses ennemies, elle allait opter pour la tâche la plus monotone et la plus mécanique qu'elle pouvait imaginer : les mathématiques.

Elle s'inscrivit à un concours de calcul mental, persuadée que ses compétences en mathématiques étaient si mauvaises que personne ne pourrait la qualifier de génie dans ce domaine. Dans son esprit, il n'y avait aucun moyen que son destin puisse transformer des erreurs de calcul en une quelconque forme de réussite. Elle se préparait à commettre volontairement des erreurs si évidentes que même un enfant les repérerait.

Le jour du concours, elle se retrouva entourée de prodiges des mathématiques. Art'héna, assise à son pupitre, se sentait comme un poisson hors de l'eau, un léger sourire aux lèvres. Elle savait que cette fois, l'échec était à portée de main. Les premières équations défilèrent sur le tableau, et elle les résolut rapidement, mais en se trompant volontairement sur chaque réponse. Elle inversa des chiffres, additionna à la place de soustraire, et multiplia là où il fallait diviser.

Pourtant, au fur et à mesure que le concours avançait, quelque chose d'inhabituel se produisit. Les juges commencèrent à s'agiter, à échanger des regards et à chuchoter entre eux. Ils semblaient intrigués, voire impressionnés, par les réponses d'Art'héna. À la fin de l'épreuve, ils la firent venir devant tout le monde.

« Art'héna, » annonça le président du jury, « vous avez adopté une approche mathématique que nous n'avions jamais vue auparavant. Vos réponses sont erronées, mais d'une manière tellement spécifique qu'elles suivent une logique complexe que seul un esprit créatif pourrait concevoir. Vous avez littéralement créé un nouveau système de résolution mathématique ! »

Art'héna ne savait plus si elle devait rire ou pleurer. Comment un concours de calcul mental, un domaine où l'objectivité règne, avait-il pu devenir une autre arène pour sa malédiction du succès ? Alors qu'elle restait bouche bée, les applaudissements retentirent dans la salle. Art'héna avait, encore une fois, transformé un échec en une réussite éclatante, et cette fois, d'une manière si unique qu'elle en avait révolutionné le concours.

En sortant de la salle, elle vit Désiré l'attendre, comme toujours. Son sourire s'était transformé en un rire silencieux. Lorsqu'elle s'approcha de lui, elle lui donna un léger coup sur l'épaule, le regard plein de frustration.

« Ne dis rien, » grogna-t-elle. « Ne dis absolument rien. »

Mais Désiré ne pouvait s'empêcher de sourire. « Art'héna, tu cherches à échouer, mais à chaque tentative, tu découvres quelque chose de nouveau sur toi-même. Peut-être que l'échec que tu poursuis n'est pas le vrai défi. Peut-être que c'est ta définition de la réussite qui doit changer. »

Art'héna resta silencieuse. Pour la première fois, elle se demandait si Désiré avait raison. Tout au long de sa quête pour échouer, elle avait touché à des domaines qu'elle n'aurait jamais explorés autrement. Sa quête d'échec l'avait conduite à se surpasser, à briller là où elle s'y attendait le moins.

Mais elle n'était pas prête à abandonner. Pas encore. Si sa vie voulait jouer à ce jeu avec elle, alors elle jouerait aussi. Avec un sourire en coin, elle jura intérieurement de continuer à défier son destin, peu importe combien de fois il la ferait tomber du côté du succès.

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