Léonie se tenait dans la pièce exiguë où reposait la sœur de Cédric. La jeune fille, âgée d’une quinzaine d’années, avait des joues pâles et un regard empreint d’une mélancolie silencieuse. Dix ans plus tôt, elle avait été une enfant joyeuse et pleine de vie, et depuis, ses jambes refusaient de la porter. Immobile dans son fauteuil roulant, elle semblait avoir accepté son sort, mais quelque chose dans ses yeux trahissait une résignation douloureuse.
C’est alors que Léonie aperçut une petite créature posée sur les genoux de l’adolescente. Contrairement à celle qu’elle avait vue virevolter autour de Cédric, celle-ci était calme et semblait se reposer sur les jambes de la jeune fille. Ses traits délicats rappelaient les pétales d’une fleur d’aconit, et son aura semblait imprégner l’air d’une sensation douce, mais légèrement oppressante.
Léonie fronça légèrement les sourcils. Une créature liée à l’aconit… Cela explique beaucoup.
Elle poussa un long soupir. Un empoisonnement à l’aconit, même léger, pouvait provoquer des symptômes graves, même après dix ans, les dégâts étaient complexes. Les muscles atrophiés, les nerfs affaiblis et le flux d’énergie bloqué dans le corps rendaient toute guérison encore plus difficile. Pourtant, Léonie comprenait peu à peu la situation.
Cela va demander plus que des potions pour inverser les effets.
Léonie se tourna vers Cédric, qui attendait nerveusement à ses côtés, ses yeux gris fixant chaque geste. Il attrapa son poignet avec une urgence presque désespérée.
— Alors ? Peux-tu la guérir ?
Léonie tira doucement sa main de son emprise et détourna le regard.
— Oui, mais cela ne sera pas simple.
Elle réfléchit un instant. Dans ce genre de cas, il n’y a qu’une seule méthode efficace… l’acupuncture.
Cependant, un problème majeur se posa rapidement dans son esprit : elle n’avait aucun matériel, et pire encore, elle savait que cette pratique était inconnue dans ce monde. Expliquer que planter des aiguilles dans des points spécifiques du corps pouvait soigner risquait d’attirer encore plus de questions qu’elle ne pouvait se permettre de répondre.
Elle fit cependant confiance à ses trois règles et détailla à Cédric les aiguilles dont elle avait besoin, leur longueur, leur finesse et leur matériau. Il fronça les sourcils, clairement méfiant, mais finit par accepter de les lui procurer.
Quand il revint, tenant une petite boîte contenant les précieuses aiguilles, Léonie sentit son cœur s’apaiser légèrement. Enfin, je vais pouvoir commencer.
— Explique-moi ce que tu comptes faire, demanda-t-il en posant la boîte sur une table.
Elle prit une grande inspiration.
— Je vais utiliser ces aiguilles pour débloquer les flux d’énergie dans son corps. C’est ce qui permettra à ses jambes de recommencer à répondre.
Le visage de Cédric se durcit immédiatement.
— Quoi ?! Tu veux planter des aiguilles dans ma sœur ? Jamais !
Sa voix était un mélange de colère et de panique.
— Écoute-moi, tenta Léonie, ce n’est pas une torture. C’est une méthode délicate, précise. C’est sa meilleure chance.
Mais Cédric n’entendait rien.
— Tu caches déjà trop de choses. Ton identité, ton savoir, tes méthodes… Comment puis-je te faire confiance ?
Avant qu’elle ne puisse répondre, il s’avança brusquement, tendant la main vers ses lunettes. Il avait clairement compris que cette accessoire lui permettait de changer son apparence.
— Si tu n’as rien à cacher, alors pourquoi portes-tu ça ?
Léonie recula, mais il était rapide. D’un geste vif, elle saisit une des aiguilles qu’il venait de lui apporter et la planta délicatement dans un point précis sur son bras.
Cédric s’arrêta net, incapable de bouger.
— Qu’est-ce que… qu’est-ce que tu m’as fait ? balbutia-t-il, les yeux écarquillés.
Elle s’approcha lentement, ses yeux froids mais résolus.
— Je t’ai paralysé temporairement. Ce n’est pas dangereux, mais cela devrait te calmer.
Elle se tourna alors vers la jeune fille dans le fauteuil roulant, qui les observait en silence. Léonie s’accroupit à sa hauteur, lui parlant d’une voix douce.
— Et toi ? Que veux-tu ? Si tu n’es pas d’accord, je partirai.
À sa grande surprise, l’adolescente hocha la tête, ses yeux brillants d’une détermination inattendue.
— Je veux essayer. Même si ça fait mal, je veux essayer, murmura-t-elle d’une voix faible mais résolue.
Léonie sourit légèrement.
— Très bien, alors faisons-le.
Elle commença son travail avec une concentration extrême, chaque mouvement calculé, chaque aiguille insérée avec délicatesse. Le silence de la pièce était ponctué uniquement par la respiration régulière de l’adolescente et les bruits légers des aiguilles glissant dans leur étui.
Les heures passèrent, mais Léonie ne relâcha pas son attention. Chaque aiguille placée correspondait à un point précis destiné à stimuler la circulation d’énergie dans le corps et à réactiver les connexions nerveuses endormies.
Cédric, toujours paralysé, observait en silence, ses émotions oscillant entre colère, inquiétude et fascination.
Quand Léonie inséra la dernière aiguille, l’adolescente lâcha un petit gémissement.
— Qu’est-ce que tu ressens ? demanda Léonie.
— Mes jambes… Elles picotent, répondit la jeune fille, ses yeux s’illuminant d’espoir.
Léonie retira lentement les aiguilles, une par une, avant de se redresser. Elle se tourna vers Cédric, planta une aiguille à un autre point précis de son bras, et il retrouva aussitôt sa mobilité.
Il tomba à genoux, son regard passant de sa sœur à Léonie.
— Que… Que lui as-tu fait ?
— Elle peut commencer à marcher, mais doucement. Cela prendra des semaines avant qu’elle ne retrouve une pleine mobilité. Elle devra marcher un peu chaque jour, de plus en plus longtemps.
Cédric ouvrit la bouche pour répondre, mais il s’arrêta en voyant une goutte de sang glisser le long du nez de Léonie.
— Tu saignes ! s’exclama-t-il, alarmé.
Il attrapa un mouchoir et s’approcha d’elle, mais elle le repoussa doucement.
— Ce n’est rien. Un petit effet secondaire de l’utilisation de cette méthode.
Mais Cédric sentit un pincement au cœur en voyant la fatigue dans ses yeux.
— Tu caches trop de choses, murmura-t-il.
Pendant un instant Léonie relâcha sa vigilance habituelle et esquissa un sourire.
— Souviens-toi de nos règles, dit-elle simplement avant de quitter la pièce.
Cédric la regarda partir, son esprit tourmenté par une seule pensée : Qui est-elle vraiment ?
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