La flamme qui consume

Chapitre II – La flamme qui consume

Le lendemain matin, Douala s’éveillait sous une chaleur humide, caractéristique des matins trop tôt après une nuit de pluie. Les rues, encore perlées de gouttes nocturnes, miroitaient sous les premiers rayons du soleil qui perçaient entre les nuages. Adrian sortit de son appartement, le cœur encore troublé par la rencontre de la veille. Chaque détail d’Estella revenait en mémoire avec une précision presque douloureuse : le glissement de ses doigts lorsqu’elle avait saisi son carnet, l’ombre de timidité dans ses yeux, la douceur de sa voix qui résonnait encore comme une musique lointaine.

Il se surprit à marcher plus lentement que nécessaire, s’attardant à observer les passants pressés, les vendeurs de beignets et de café sur le trottoir, les enfants éclaboussant les flaques d’eau. La ville, habituelle et familière, semblait soudain différente, animée par la promesse de quelque chose qu’il ne savait pas encore nommer.

Son téléphone vibra, un message inattendu. « Bonjour Adrian, c’est Estella. J’espère que la pluie n’a pas effacé votre souvenir d’hier… » Son cœur fit un bond. Les mots simples contenaient une chaleur qu’il ne pouvait ignorer. Il répondit aussitôt, essayant de cacher son excitation derrière des phrases mesurées. Rapidement, une conversation s’engagea, légère, teintée de curiosité et de sourires invisibles.

L’après-midi, il la retrouva dans un petit café du quartier Akwa, celui qu’elle avait mentionné dans ses messages. Elle l’attendait, un livre à la main, et lorsque leurs regards se croisèrent, un frisson passa dans l’air, imperceptible pour les autres clients, mais suffocant pour eux deux. La chaleur du lieu contrastait avec l’humidité extérieure, mais ce n’était pas la température qui réchauffait Adrian ; c’était sa présence.

Ils parlèrent pendant des heures, découvrant des fragments de leurs vies. Estella racontait avec passion sa jeunesse dans les quartiers de Douala, ses rêves de voyage et d’écriture. Adrian, d’ordinaire si réservé, se surprit à lui confier ses ambitions, ses peurs, et même ces moments de solitude qu’il gardait jalousement pour lui-même. Il y avait dans ses mots une transparence rare, une authenticité qu’il n’avait jamais connue avec personne.

Le soleil commençait à décliner, teignant le ciel de nuances rouges et dorées. Douala se transformait sous cette lumière crépusculaire, les immeubles reflétant les derniers rayons, les rues se peuplant de silhouettes pressées. Adrian et Estella sortirent, marchant côte à côte le long des quais du Wouri. Le vent léger apportait le parfum de l’eau et des fleurs des marchés flottants. Chaque pas rapprochait leurs mondes, et chaque regard volé laissait une brûlure douce au cœur d’Adrian.

Ils s’arrêtèrent près d’un banc, où l’on pouvait voir les bateaux glisser lentement sur le fleuve. Les mots devinrent superflus. Estella posa sa main sur celle d’Adrian, et un silence chargé de désir s’installa entre eux. Le contact, si bref et pourtant si intense, éveilla une flamme qu’aucun des deux ne voulait éteindre. Les bruits de la ville semblaient s’éloigner, remplacés par le tumulte de leurs cœurs battant à l’unisson.

Pourtant, sous cette passion naissante, un frisson d’inquiétude persistait. Adrian sentait cette peur étrange, subtile, que quelque chose dans cette perfection fragile pouvait basculer à tout instant. Il tenta de chasser cette pensée, se concentrant sur le sourire d’Estella, sur la chaleur de sa main contre la sienne. Elle, de son côté, semblait elle aussi consciente de la tension entre désir et incertitude, mais ses yeux brillaient d’une détermination tendre, presque audacieuse.

Les jours suivants s’écoulèrent comme un rêve éveillé. Chaque rencontre renforçait leur lien, Douala devenant le théâtre de leur romance. Ils se promenaient dans les ruelles animées de Bonanjo, goûtaient aux délices des marchés, riaient sous la pluie qui revenait parfois inopinément, chaque goutte semblant ponctuer leur passion. Le soir, Adrian rentrait chez lui avec l’esprit en feu, incapable de détacher son imagination des courbes d’Estella, de la douceur de sa voix, de son rire cristallin qui persistait longtemps après qu’ils se soient séparés.

Mais l’amour naissant ne connaissait pas que la lumière. Un jour, en traversant le marché de Mokolo, Adrian aperçut Estella discuter avec un homme dont l’allure éveilla un malaise immédiat. La conversation était ponctuée de gestes intimes, et Adrian sentit un éclat de jalousie, un poison inconnu qui s’insinuait dans son cœur. Il détourna les yeux, tentant de chasser cette vision, mais le doute s’était installé, fragile mais tenace.

Le soir, ils se retrouvèrent au même café qu’ils avaient appris à aimer ensemble. Adrian, incapable de contenir ses sentiments, la questionna doucement. « Est-ce qu’il y a quelqu’un… dans ta vie ? » Les yeux d’Estella s’emplirent d’une surprise mêlée de tendresse. « Non, Adrian… Il n’y a que toi. » Pourtant, un voile d’incertitude persistait dans ses yeux, une hésitation qu’Adrian ne pouvait interpréter.

La passion, cependant, avait son propre langage. Une soirée, sur la terrasse d’un petit restaurant surplombant le fleuve, la chaleur de leurs corps rapprochés, le parfum de la pluie mêlé à celui de la nourriture, tout conduisit à un rapprochement irréversible. Leurs lèvres se touchèrent enfin, et le monde autour d’eux s’effaça. Les émotions qu’ils refoulaient depuis des jours explosèrent en un torrent de désir et de douceur. La flamme qui consumait Adrian brûlait maintenant en Estella, et chaque geste, chaque souffle partagé scellait un lien que rien ne semblait pouvoir rompre.

Pourtant, même dans ce tourbillon de passion, une ombre persistait. Adrian sentait une force invisible, un murmure lointain, comme si le destin, déjà, préparait ses épreuves. Chaque sourire échangé, chaque main serrée devenait un pacte fragile avec l’avenir, un futur incertain où l’amour et la trahison pourraient coexister. Et malgré l’ivresse de ces moments, Adrian savait, au plus profond de lui, que la flamme qui les consumait n’était peut-être pas seulement celle de l’amour, mais celle d’une tragédie qui se dessinait lentement dans les cendres de Douala.

Lorsque la nuit enveloppa la ville, et que les lumières des lampadaires se reflétaient sur l’eau du fleuve, Adrian et Estella s’attardèrent encore, enlacés, silencieux. Le vent jouait avec leurs cheveux, la pluie fine de la veille laissait des perles sur leurs visages, et la ville tout entière semblait retenir son souffle, spectatrice muette de ce lien intense et fragile. Dans ce moment suspendu, Adrian comprit que son monde venait de basculer. Il avait trouvé Estella, et avec elle, une passion qui le consumait entièrement… mais dont le prix restait encore inconnu.

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