Chapitre 2: Répétitions à distance.

Tokyo — Salle de répétition insonorisée

Le son saturé d'une guitare électrique envahit la pièce, suivi par la voix d’un chanteur légèrement désaccordé. La mélodie s’interrompt brusquement.

— « Stop, stop, stop ! » lança Miyabi Tachibana, d’un ton sec et agacé.

Tous s’arrêtèrent net. Naoki releva la tête, les doigts encore posés sur sa guitare.

— « T’étais pas là du tout, Naoki ! » grogna Miyabi.

— « Désolée, mais je crois que même mon micro a eu pitié de ta note », répliqua-t-elle.

— « …Désolé. Je… j’ai décalé, c’est vrai. »

Renji, installé à la batterie, observait la scène sans dire un mot. Il tapotait doucement une baguette sur sa cuisse, l’air pensif. Toma, affalé sur un ampli, mâchonnait son chewing-gum en lançant :

— « C’est la troisième fois aujourd’hui. Tu penses encore à ta meuf ou à ton riz d’hier soir ? »

— « Ferme-la, Toma. » soupira Naoki, sans réelle agressivité.

Il déposa sa guitare, s’étira, puis leva les yeux vers le miroir du studio. Il y vit son reflet : cheveux en bataille, des cernes discrètes sous les yeux, et ce regard… un peu vide.

Il prit son téléphone. Toujours rien.

Toujours rien...

Un message de Soraya. C’est ce qu’il espérait. Même un mot, un émoji, n’importe quoi. Mais l’écran restait désespérément silencieux.

— « Tu espérais recevoir un message de Soraya ? » lança Toma.

— « Oui… Elle ne vous a pas écrit récemment ? » demanda Naoki.

— « Pas depuis la semaine dernière », répondit Miyabi.

— « Peut-être qu’elle a beaucoup de travail, et qu’elle ne peut pas nous écrire pour le moment », ajouta Renji.

— « La connaissant, elle doit sûrement se tuer à la tâche », renchérit Miyabi.

Naoki allait ranger son téléphone quand la porte s’ouvrit brutalement.

— « Naokiiii ! »

Sayuri Minazuki débarqua comme une tornade. Mini-jupe à carreaux, sac rose bonbon à l’épaule, et un sourire jusqu’aux oreilles. Elle se jeta dans les bras de Naoki sans prévenir.

— « Sayuri !! Qu’est-ce que tu fais ici ? »

— « T’as oublié qu’on devait manger ensemble ? J’ai attendu comme une idiote chez moi ! »

Naoki lui offrit un sourire d’excuse, un peu embarrassé.

— « Pardon. On répétait encore… »

— « Mouais. Bon, je te pardonne si tu me joues la chanson que t’as composée la semaine dernière. »

Naoki rougit légèrement. En arrière-plan, Miyabi leva les yeux au ciel avant de s’éloigner vers les casiers.

— « C’est pas censé être une chanson pour tout le monde, ça ? Pas juste ta groupie privée… »

Sayuri ne réagit pas à la pique, bien que son regard ait brièvement croisé celui de Naoki. Mais lui semblait ailleurs.

— « Tout va bien, Naoki ? » demanda-t-elle, un brin inquiète.

— « Je vais bien. J’étais juste… perdu dans mes pensées. »

— « Et si on allait déjeuner ensemble ? » dit-elle en souriant. « J’ai pris ma journée pour la passer avec toi. Qu’est-ce que tu en dis ? »

— « … »

— « Minute, ma vieille ! » coupa Miyabi en revenant vers eux. « On a une répétition sérieuse, là. »

— « Du calme, Miyabi, » intervint Renji. « On a déjà fini, ils peuvent se détendre un peu. »

— « Ouais, c’est ça. Continuez à prendre sa défense… » grogna-t-elle. « Vous oubliez qu’on a un concert la semaine prochaine. »

— « Tu serais pas comme ça à cause d’Akira, peut-être ? » lança Toma d’un ton moqueur.

— « Qu’est-ce que tu racontes, toi ? » s’écria-t-elle, un peu gênée. « Je vois pas du tout de quoi tu parles. »

— « Arrête de faire ton charme. Avoue que tu meurs d’envie de le revoir ! »

— « Alors toi, si tu continues, je t’enfonce mon micro là où ça fait mal ! » fulmina-t-elle, les joues en feu.

— « Ça va, pas la peine de t’énerver… »

— « Attends… » intervint Sayuri, surprise. « Tu connais le guitariste Akira Shindō ? Du groupe Black Heaven !? »

— « Bien sûr qu’on les connaît », affirma Toma. « C’étaient les copains de lycée de Naoki, Miyabi et Renji. »

— « Tu es sérieux ?! » s’écria-t-elle, les yeux brillants. « C’est mon groupe préféré, j’adore leur musique ! »

— « Ah oui ? » répondit Miyabi, légèrement piquante. « Tu n’es pas fan du groupe de ton copain ? »

— « J’adore aussi votre groupe », rétorqua Sayuri. « Mais bien avant de vous connaître, j’étais déjà l’une de leurs plus grandes fans. Et surtout… j’avais un énorme béguin pour Ren Akabane. »

— « Sérieusement ? » dit Naoki, visiblement blessé dans son ego. « Et dire que je pensais faire le poids… »

— « Mais ne t’en fais pas, mon petit chéri ! » dit-elle avec un sourire enjôleur. « Tu es le meilleur petit copain que j’ai rencontré de toute ma vie. »

Naoki rougit timidement en croisant son regard.

— « Allez, viens ! » lança-t-elle en lui prenant la main. « On va s’amuser un peu. »

— « Attends un peu… Sayuri… » balbutia-t-il, en se laissant entraîner.

Ils quittèrent la salle, laissant les autres derrière eux.

— « Et le voilà déjà parti… » marmonna Miyabi, légèrement agacée. « Elle est vraiment un vrai cas-pieds. »

— « Dis-moi Miyabi, pourquoi t’apprécies pas Sayuri ? » demanda Toma, toujours moqueur.

— « Qu’est-ce que tu racontes ? Je la déteste pas. » répondit-elle. « Je trouve juste que Naoki mérite mieux qu’elle. »

— « Tout comme toi et Akira, hein ? »

— « Alors toi… tu vas souffrir. »

Extérieur — Tokyo, de nuit

Naoki marchait aux côtés de Sayuri. Les rues de Tokyo s’illuminaient, les néons reflétaient sur les vitrines, et la ville battait comme un cœur géant.

Mais dans la tête de Naoki, une autre image persistait.

Le sourire doux de Soraya.

Ses yeux brillants quand il lui jouait ses premiers morceaux, dans ce vieux parc derrière le lycée.

> “Tu deviens vraiment bon. Je suis sûre que tu vas briller.”

Elle l’avait dit comme une promesse. Pas comme un encouragement banal.

— « Naoki… Naoki ? »

— « Hein ? »

— « À quoi tu penses ? » demanda Sayuri. « Tu as l’air ailleurs. »

— « Oui… désolé. J’étais juste un peu perdu dans mes pensées. »

— « Tu penses à elle ? »

Il tourna brusquement la tête vers elle.

— « …Hein ? »

— « À cette fille. Ton amie d’enfance. Celle dont tu parles parfois. »

Il hésita, puis hocha lentement la tête.

— « Un peu, ouais. Pour être franc, elle me manque. »

Sayuri garda le silence quelques secondes, puis prit sa main avec douceur.

— « Tu sembles beaucoup tenir à elle, non ? »

— « Oui. Vraiment. Si tu la rencontrais, je suis sûr que tu l’aimerais autant que nous. »

— « Elle a l’air d’être une fille géniale… » sourit-elle. « Mais pourquoi elle n’est pas ici, avec vous ? »

— « Elle travaille dans un magasin de stylisme. Elle crée des vêtements. C’est compliqué pour elle de venir jusqu’à Tokyo. »

— « Attends… Elle est styliste ?! » s’exclama Sayuri, les yeux brillants. « Il faut absolument que je la rencontre ! »

— « Ah oui… ? » dit-il, un peu surpris.

— « Absolument ! Tu n’imagines pas tout ce que je pourrais apprendre avec elle. Et si c’est elle qui nous habille pour notre futur mariage… Je suis sûre qu’on serait beaux comme des dieux. »

Naoki éclata de rire, tellement surpris qu’il ne pouvait pas s’en empêcher.

— « Tu te moques de moi ! » dit-elle, les joues gonflées.

— « Mais non, pas du tout. C’est juste que… c’est inattendu. »

— « Ouais, c’est ça… » grogna-t-elle. « Quoi qu’il en soit, tu devrais l’inviter un de ces jours. »

— « C’est pas l’envie qui me manque. Mais elle est tellement occupée… »

— « Alors compose quelque chose. Et envoie-le-lui. Même si tu ne sais pas quoi dire. »

— « Tu crois vraiment que ça lui ferait plaisir ? »

— « Mais oui ! » s’exclama-t-elle. « Je suis sûre que ça lui ferait chaud au cœur. »

Naoki la regarda, un peu surpris. Parfois, Sayuri semblait plus perspicace qu’elle ne le montrait.

— « Allez, on rentre maintenant ? » proposa-t-elle en se levant du banc.

— « D’accord. »

Ils reprirent la route, bras dessus bras dessous, comme deux amoureux ordinaires. En chemin, ils achetèrent des glaces, les dégustèrent en riant, et prolongèrent la balade jusqu’à chez elle.

Après l’avoir raccompagnée, Naoki rentra seul chez lui. Douche. Dîner rapide. Puis il alla s’allonger dans sa chambre.

Mais le sommeil ne venait pas.

Quelque chose le troublait. Ou plutôt, quelqu’un.

Pourquoi ce silence, Soraya… ?

Il se leva, marcha jusqu’à son balcon. L’air de Tokyo était tiède, chargé de lumière.

Il sortit son téléphone, commença à écrire :

> Salut. J’espère que tu vas bien.

Il hésita. Puis… effaça le message.

— « Qu’est-ce que je fais ? » soupira-t-il.

Il leva les yeux vers le ciel, pensif.

— « Je me demande ce que tu fais, actuellement, Soraya… »

Devant lui, la ville s’étendait comme une scène vide. Silencieuse. Et un peu trop loin.

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