La forêt était silencieuse. Trop silencieuse.
Izumi avançait, ses bottes s’enfonçant légèrement dans la terre humide, le panier en osier à la main. Les feuilles craquaient sous ses pas. Cela faisait plusieurs jours qu’elle avait quitté le village, plusieurs jours que Kaen et elle avaient trouvé refuge dans une cabane délabrée, à l’orée d’une forêt dense et oubliée.
Kaen dormait encore. Elle en avait profité pour partir tôt, espérant ramener des champignons, quelques racines comestibles… voire même du gibier, s’ils avaient de la chance. Mais ce matin, quelque chose était différent. Elle le sentait dans l’air, dans ses tripes, dans la marque au creux de son cou qui semblait vibrer à un rythme irrégulier.
Un grondement lointain la sortit de ses pensées.
Elle se retourna brusquement, le panier tombant de ses mains.
Des ombres. D’abord une, puis deux… puis une troisième. Silencieuses, sinueuses, elles s’approchaient lentement. Izumi recula, tendue, le souffle court.
— Kaen… murmura-t-elle, comme un appel muet.
Mais il était trop tard.
Un rugissement fendit l’air, et la créature surgit des arbres.
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C’était grand, terriblement grand. Une bête autrefois humaine, à moitié couverte d’un métal noir strié de veines rouges, comme si sa peau était fendue de l’intérieur. Des chaînes rouillées pendaient de ses bras massifs. Son visage était à peine humain — déformé, mutilé — et ses yeux brillaient d’une lueur morbide.
Une Relique. Vivante. Mais… possédée.
Izumi n’eut pas le temps de réfléchir. La chose fonça sur elle.
Elle roula sur le côté, se relevant aussitôt, le cœur battant. Son corps entier tremblait, pas de peur cette fois — de rage. La marque sur son cou brûlait, s’illuminant d’un rouge profond.
— C’est… toi qui as fait ça ?! cria-t-elle.
La créature ne répondit pas. Elle rugit encore, chargeant.
Cette fois, Izumi ne recula pas.
Elle leva les bras, et une force inconnue s’échappa de son corps.
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Un cri de douleur jaillit de sa gorge alors que ses bras furent parcourus d’un éclair brûlant. Son dos se courba. Des souvenirs de son père, de la porte, de la tête explosée, du sang sur le sol, refirent surface brutalement. Et là, au milieu de cette douleur… un autre pouvoir naquit.
Ses mains se mirent à luire d’un halo pâle. Quelque chose pulsait. Quelque chose qu’elle n’avait jamais ressenti.
La bête l’atteignit, la projetant au sol. Elle roula, cracha du sang, mais se releva presque aussitôt.
Son bras droit pendait mollement, disloqué. Elle posa une main dessus… et vit la lumière pâle s’infiltrer dans sa peau. En quelques secondes, l’os se remit en place, les muscles se resserrèrent.
— Guérison… murmura-t-elle. C’est… mon pouvoir ?
Mais ce n’était pas tout. Lorsque la bête fonça à nouveau, elle ne bougea pas.
Elle tendit simplement la main, le regard brûlant. Et dans un cri primal, elle projeta une onde invisible.
La bête hurla. Elle s’arrêta net. Son corps se convulsa… et tomba à genoux.
— Tu sens ça ? souffla Izumi. Ce que tu m’as fait vivre…
La douleur. Instantanée. Transférée. Elle avait hurlé son existence à la bête, et celle-ci l’avait reçue comme une sentence divine.
Un nouveau pouvoir. Le pouvoir de douleur.
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Kaen surgit de la cabane, haletant, son arme en main.
— IZUMI !
Il la vit, debout, le regard incandescent, la marque sur son cou étincelante comme une lame vive.
La créature était au sol, souffrante, affaiblie. Kaen n’eut besoin de rien faire. Il s’approcha, mais Izumi le stoppa d’un geste.
— Je… je veux l’épargner, dit-elle. C’est… pas sa faute. C’est la Relique. Elle l’a corrompu.
Kaen hocha lentement la tête.
— Tu as grandi, souffla-t-il. Et tes pouvoirs… ils viennent de s’éveiller, hein ?
Izumi tomba à genoux, à bout de force. Les larmes coulaient sur ses joues sans qu’elle ne les contrôle. Des larmes de douleur, de haine, de soulagement.
— Je… je veux devenir plus forte, Kaen. Pas pour me venger. Mais pour… protéger.
Il s’agenouilla près d’elle, posa une main sur son épaule.
— Tu as déjà commencé.
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Ce soir-là, autour d’un feu, Izumi resta silencieuse.
La créature, purifiée par Kaen, dormait non loin de là, surveillée. Kaen avait évoqué des méthodes anciennes pour séparer la Relique du porteur. C’était risqué, mais possible.
Izumi, elle, fixait ses mains.
— J’ai peur, Kaen. Et si je perdais le contrôle ?
— C’est pour ça que je suis là, répondit-il calmement. Pour t’aider à marcher droit… même si tu n’as plus d’ombre.
Elle esquissa un sourire.
— Merci…
Il sourit à son tour, avant de regarder les étoiles.
— Ce n’est que le début, Izumi. D’autres viendront. Des corrompus. Des survivants. Des porteurs comme toi. Comme moi.
Elle hocha la tête. Et dans l’obscurité de la forêt, une lumière naquit en elle. Brûlante. Inébranlable.
Elle était prête.
Prête pour la suite.
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Comments
Li-may 💕❤️•°~
yeah
2025-07-25
2