La chute est lente

Ce fut un mardi. Un de ces soirs où l’air semble plus lourd que d’habitude, chargé d’un pressentiment qui colle à la peau.

Léna n’avait pas eu de nouvelles depuis six heures. Rien. Aucun message, aucun appel, aucun emoji lancé à la volée comme il le faisait parfois, juste pour dire qu’il pensait à elle. Il avait mentionné une réunion, mais elle le savait.

Ce n’était pas vrai.

Elle le sentait.

Une tension dans sa poitrine. Un vertige sous les côtes.

Alors elle le chercha.

Elle appela une fois. Pas de réponse.

Deux fois. Toujours rien.

Elle ouvrit sa localisation. Rien d’anormal. Mais c’était justement ça le problème. Tout était trop lisse.

Elle marcha dans les rues, sans but précis. Ou plutôt : avec un seul but, inconscient, irrépressible. Son corps savait ce que son esprit refusait encore d’admettre. Et elle le trouva.

À une rue d’un bar qu’ils aimaient bien. Sous un porche humide, mal éclairé, à l’abri du tumulte.

Il était là. Avec elle.

Une femme. Jeune. Élégante. Une beauté douce, sans excès.

Léna la reconnut immédiatement.

Maëlle.

Elle les observa dans le silence du bitume, dissimulée derrière un lampadaire.

Ils s’embrassaient.

Pas un baiser volé. Pas une erreur.

Un baiser plein, profond, chargé.

Un baiser qui disait je te veux ici, maintenant, avec tout ce que tu es.

Un baiser qu’il avait réservé à Léna. Un baiser sacré.

Elle sentit ses doigts se crisper, ses ongles s’enfoncer dans sa paume. Mais elle ne fit pas un bruit.

Pas un cri. Pas un mot.

Elle se retourna, rentra chez elle. Marcha vite, sans trembler.

Pas une larme.

Elle entra, alluma une seule lumière.

Enleva ses talons, s’assit face à son bureau.

Elle alluma son ordinateur.

Déverrouilla son téléphone.

Ouvrit ses notes, ses captures d’écran, ses profils enregistrés, ses historiques. Tout ce qu’elle avait vu. Tout ce qu’elle avait préparé. Parce que même dans l’amour, Léna gardait toujours une longueur d’avance.

Elle connaissait Maëlle. Elle savait où elle travaillait. À quelle heure elle sortait. Qui elle suivait, qui la suivait, qui commentait ses publications.

Et cette fille… cette fille ne savait rien.

Mais elle allait comprendre.

Elle allait sentir qui était Léna.

Pas la blonde parfaite qu’on croise dans une galerie.

Pas la femme bien habillée qui sourit poliment.

Mais celle qui dévore, qui marque, qui traque.

On ne touche pas à ce qui est à moi.

Elle rédigea un message. Court. Tranchant. Pour lui.

Pas pour supplier. Pas pour pleurer.

Pour signer l’acte de guerre.

Mais elle ne l’envoya pas. Pas encore.

Elle savait que la vengeance n’a de goût que lorsqu’elle est précise.

Alors elle se releva.

Alluma une cigarette qu’elle n’avait pas touchée depuis deux ans.

Et regarda son reflet dans la baie vitrée.

Pas de larmes.

Juste ce feu lent, intérieur, maîtrisé.

Celui qui précède les grandes décisions.

— Tu aurais pu tout avoir, murmura-t-elle.

Elle ne parlait pas à Maëlle.

Elle ne parlait même plus à Niko.

Elle parlait à cette part d’elle-même qu’elle avait muselée depuis trop longtemps.

Et maintenant qu’elle était réveillée, il n’y aurait plus de retour en arrière.

Il allait comprendre.

Comprendre ce qu’on perd quand on trahit ce genre de femme.

Comprendre qu’il n’avait pas été avec une amante.

Mais avec une tempête.

Episodes

Télécharger maintenant

Aimez-vous ce travail ? Téléchargez l'application et vos enregistrements de lecture ne seront pas perdus
Télécharger maintenant

Bien-être

Les nouveaux utilisateurs peuvent télécharger l'application pour débloquer 10 chapitres gratuitement.

Recevoir
NovelToon
Ouvrir la porte d'un autre monde
Veuillez télécharger l'application MangaToon pour plus d'opérations!