Chapitre 4 : L’éveil des sentiments

Les jours passèrent, et à chaque rencontre, Aina et Anastasia semblaient se rapprocher un peu plus. Le jardin qu’elles partageaient était devenu leur havre de paix, leur espace à part, à l’abri du monde extérieur. Elles avaient pris l’habitude de se retrouver là, presque sans se donner rendez-vous, comme si un accord tacite les unissait.

Ce matin-là, Aina se sentait étrangement nerveuse en approchant le jardin. Il y avait quelque chose de différent en elle, un sentiment nouveau, doux et inconnu, qui se mêlait à l’enthousiasme de revoir Anastasia. Alors qu’elle poussait la vieille porte de bois du jardin, elle aperçut Anastasia assise sur leur banc habituel, un carnet entre les mains, le visage illuminé par un rayon de soleil filtrant à travers les arbres. Elle était absorbée dans ses pensées, et Aina, sans vouloir troubler ce moment, s’arrêta un instant pour l’observer de loin.

Elle réalisa que cette amitié était devenue plus qu'un simple réconfort. Il y avait dans le regard d'Anastasia, dans ses gestes, quelque chose qui la fascinait, une douceur et une intensité qui semblaient la faire vibrer d’une manière qu’elle n’avait jamais ressentie auparavant. Aina se surprit à admirer la délicatesse de son visage, la façon dont ses doigts caressaient la couverture de son carnet, comme si chaque mouvement était une danse subtile, une poésie en soi.

Finalement, Anastasia leva la tête, son regard rencontrant celui d’Aina. Elle lui sourit, et Aina sentit son cœur s’accélérer légèrement.

« Je t’attendais, » dit Anastasia avec ce léger sourire qui la rendait si énigmatique.

Aina vint s’asseoir à côté d’elle, cherchant ses mots. « Désolée pour le retard, je… je réfléchissais en chemin. » Elle n’osa pas ajouter que ses pensées l’avaient justement portée vers Anastasia, ni qu’elle ignorait encore comment mettre des mots sur ce qu’elle ressentait.

« À quoi tu pensais ? » demanda Anastasia en la regardant avec curiosité.

Aina hésita. Elle avait envie d'être honnête, mais en même temps, une part d'elle redoutait de dévoiler la profondeur de ses sentiments naissants. Elle choisit la prudence, se contentant de répondre : « À beaucoup de choses. À la façon dont les rencontres peuvent nous surprendre, nous changer… »

Anastasia sembla comprendre. Elle hocha la tête, le regard perdu dans la verdure qui les entourait. « Je ressens la même chose. Ce jardin… notre amitié… c’est comme une parenthèse, quelque chose d’unique. »

Un silence s’installa, doux et serein, mais chargé d’une émotion qu’aucune des deux ne parvenait à exprimer. Aina sentit le frôlement de la main d’Anastasia contre la sienne, un geste involontaire, mais qui fit naître un frisson au creux de sa paume. Elles échangèrent un regard, et dans les yeux d’Anastasia, Aina crut lire un éclat d’hésitation mêlé de tendresse.

Brisant finalement le silence, Anastasia murmura : « Aina… tu sais, je n’ai jamais eu de lien aussi fort avec quelqu’un avant toi. C’est comme si… comme si tu étais entrée dans ma vie au moment où j’en avais le plus besoin. »

Ces mots touchèrent profondément Aina, et elle se surprit à sentir sa gorge se nouer. Elle tenta de dissimuler son émotion en prenant une inspiration avant de répondre, presque à voix basse : « Tu es importante pour moi aussi, Anastasia. Je crois que je n’avais jamais… ressenti ça avant. »

Leurs mains se frôlèrent à nouveau, cette fois plus intentionnellement. Anastasia posa alors doucement sa main sur celle d’Aina, et une chaleur douce les enveloppa. Aina, bien qu’hésitante, ne retira pas sa main. Elle sentit une proximité nouvelle, une intimité qui lui était encore inconnue, mais qui lui paraissait à la fois douce et naturelle.

Leur regard s’intensifia, chaque seconde semblant étirer le temps, comme si le monde autour d’elles s’était effacé pour ne plus laisser que ce moment partagé. Finalement, Anastasia, la voix un peu tremblante, dit : « J’ai l’impression que cet endroit… ce jardin… a été le témoin de quelque chose qui nous échappe un peu, toi et moi. »

Aina sourit, troublée mais apaisée par la sincérité de ses mots. Elle sentit que c’était le moment de lui répondre, de lui avouer à demi-mot ce qui naissait en elle. « Peut-être que c’est parce que ce jardin nous offre cet espace pour être nous-mêmes, sans peur, sans jugement. Et peut-être que… que je ressens bien plus que de l’amitié quand je suis avec toi. »

Anastasia sourit, un sourire teinté de surprise et de douceur. Elle serra un peu plus la main d’Aina, rapprochant légèrement leurs visages. « Moi aussi, » murmura-t-elle dans un souffle.

Les dernières lueurs de l’après-midi baignaient le jardin d’une lumière dorée, et tout semblait suspendu autour d’elles. Elles se regardèrent, longuement, comme si à travers ce simple échange de regards, elles se disaient tout ce qui n’avait pas besoin de mots. Et, doucement, leurs lèvres se rencontrèrent dans un baiser tendre, presque timide, comme une promesse silencieuse de ce qui pourrait être.

Lorsqu’elles se séparèrent, un sourire complice éclairait leur visage. Elles savaient que leur relation venait de franchir une étape, qu’elles s’aventuraient désormais sur un chemin inconnu, mais empli d’espoir. Le jardin, témoin silencieux de leur amour naissant, semblait briller d’une lumière nouvelle, comme s’il bénissait cette union.

Le soir tombait, et elles quittèrent ensemble le jardin, main dans la main, prêtes à découvrir ce que la vie leur réservait.

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