Chapitre 8(première partie)

Après la réunion avec tout le personnel, j'ai demandé à jeter un œil au travail de chacun, histoire d'avoir une idée du comment ça bosse pour faire prospérer la boîte.

J'ai bien remarqué que notre présence à mon frère et à moi les intimidait beaucoup...je les sentais même très crispés de notre présence. Et si intimider les autres m'a toujours autant divertir, ça n'a pas été le cas aujourd'hui. J'en ai eu marre de les voir autant tremblé alors j'ai demandé à Ansel qu'on les laisse travailler tranquillement.

Natacha m'a suggéré de travailler pendant une heure avec son assistante histoire de voir comment on pourrait évoluer et...

J'avoue que la présence de cette fille m'a énormément perturbé.

Mais bien évidemment, je n'ai laissé rien paraître.

J'ai passé mon temps à lui jeter des coups d'œil furtifs les moments où elle était concentrée. Mais elle ne montrait aucun signe de celle qui en a les hommes en horreur comme nous l'a dit Natacha.

Je sais pas, c'est peut-être parce que nous n'avions fait que travailler et que je n'ai pas été trop proche d'elle même si je n'ai fait qu'épier ses moindres gestes.

Je cherchais à savoir si elle joue la comédie de ne pas me reconnaitre ou pas. Mais après mûre réflexion... après avoir constaté qu'elle n'a même pas daigné me lancer d'autres regards que lorsque je demande son attention sur un détail concernant le travail, j'ai fini par accepter le fait qu'elle ne se souvienne vraiment pas de moi.

Aussi...en seulement quelques heures, j'ai remarqué qu'elle semble indifférente à tout et tous.

Elle se fiche que dalle de ce que disent les autres, seul son job l'intéresse.

Lorsqu'on travaillait elle et moi, Natacha et Ansel étaient venus nous assister et on avait commencé à discuter tranquillement des évènements passés ensemble tout en rigolant.  Mais en aucun cas, cette miss Kobé ne nous a prêté attention. Elle était comme dans un autre monde où il n'y avait qu'elle seule.

Je n'ai pas été surpris que mon frère le remarque aussi vu qu'il m'avait beaucoup questionné du regard...

Sauf que tout comme lui, j'ignore totalement tout sur cette jeune femme.

Lorsque j'ai à mon tour questionné ma cousine des yeux à propos du comportement de son assistante, elle a juste haussé les épaules et à continuer à siroter son verre de cognac.

Je sais, ce qui compte pour elle, c'est qu'elle fait bien son travail, le reste, on s'en fout.

C'est aussi ma devise à moi mais...

Je ne sais pas pourquoi je n'arrive pas à faire avec, concernant cette fille.

Elle a énormément changé.

Quelque chose a dû la rendre ainsi.

C'est vrai je ne la connaissais pas avant ce jour là dans ce restaurant... et nous n'avions pas non plus échangé en tant que tel mais... Le peu de temps qu'on a passé là, même si nous n'avions fait que nous engueuler elle et moi, je l'avais quand même remarqué un tout petit peu...

Elle riait à cœur joie et souriait beaucoup à cœur joie également.

Mais cette jeune femme avec qui j'ai travaillé tout à l'heure ne connait pas ces mots.

Elle sourit certes, mais ce sont des sourires hypocrites...

Elle le fait juste pour passer à autre chose... pour se débarrasser de la personne à qui elle sourit...

Ou elle le fait pour rester polie.

En tout cas, elle joue très bien.

Raison de plus de croire qu'elle fait semblant de ne pas me reconnaitre...

Enfin bref, dommage pour ceux qui ne l'ont pas percés à jour.

Avec ce jeu d'actrice, elle pourrait facilement vendre une personne et cette dernière s'achèterait elle-même sans qu'elle ne le sache.

Je soupire, plissant le front pour essayer de faire disparaitre les images de cette nana de mon esprit.

Depuis quand suis-je devenu ce genre de mec hein?!...

On dirait un putain d'ado non dépucelé. Je déteste franchement cette situation putain, ça me gave grave.

Je grogne de frustration, me levant du derrière le bureau pour aller me servir un verre d'alcool.

Mon seul loisir qui arrive à me détendre sérieusement.

J'ai réussi à ne plus touchés aux jointes mais l'alcool ?!... bah je peux pas m'en passer.

Et qui est-ce qui peut le faire hein?!...

Moi je l'ai dans la peau...

Tout comme cette nana .

Je vide mon verre puis jette un œil rapide à ma montre.

Il est midi... Natacha a traîné Ansel je-ne-sais où pour faire je-ne-sais quoi.

Une envie soudaine me prend et je fronce les sourcils :

C'est pas une mauvaise idée, si?...

Bah non, c'est même carrément la meilleure au monde...

Enfin je crois.

Je sors du bureau, vraiment décidé à ne pas prendre mes jambes à mon cou les deux secondes qui vont suivre puis m'arrête à l'entrée de celui en face du mien...enfin de celui de Natacha mais bon ça sera le mien bientôt.

Je souffle un grand coup puis ouvre la porte avec fracas et sans frapper je précise.

La personne qui hante mes pensées depuis ces dernières putain de sept années sursaute, me toisant quelques secondes, le téléphone fixe collé à son oreille alors que je la dévisage l'air impassible et pourtant les battements affolés de mon cœur doivent sérieusement me trahir.

Qu'est-ce que je suis venu chercher dans son bureau déjà ?!...

Ah oui, je veux savoir si elle feint ne pas me reconnaitre ou si elle ne me reconnait réellement pas.

__ Je te rappelle Nadine. Dit-elle avant de raccrocher et braquer son regard marron dans le mien sans ciller.

Cette fille !...

Rares sont ceux ou celles qui arrivent à me regarder plus d'une minute sans détourner le regard mais elle...

Elle n'est pas comme les autres.

__ Je peux vous aider monsieur ? Questionne-t-elle pendant qu'elle se lève doucement de son siège, le regard toujours accroché au mien.

Je ne réponds pas...mais fais deux pas dans sa direction, les battements de mon cœur martyrisant ma poitrine.

Je ne sais pas pourquoi je flippe autant... ou si.

Peut-être parce que je le sens déjà mal, mais bon quand j'ai une idée en tête, j'arrive pas à m'arrêter avant d'arriver au bout.

Mais le souci là prestement c'est que je sais que dalle de ce que j'ai l'intention de faire. Lorsque j'ai quitté mon bureau, c'était uniquement dans le but de me rendre dans le sien... Qu'est-ce que j'allais faire ensuite ? Là j'ai rien prévu. Peut-être improviser ?!...

Mais en quoi faisant merde, je fous quoi là ?

__ Vous désirez quelque chose ? Fit-elle.

__ Oui. J'aimerais que vous fassiez votre travail plutôt que de roucouler au téléphone.

Voilà, c'est dit.

J'avais pas la moindre idée de quoi lui dire pour justifier ma présence mais voilà que j'ai sorti cette phrase sans réfléchir...

Et puis, ça tient quoi, elle est là pour travailler. Et cela m'étonnerait qu'elle discutait avec un client.

Elle fronce légèrement les sourcils et ça me stoppe dans mon élan .

Enfin un petit geste de sa part, ça prouve qu'elle est un peu humaine enfin de compte.

Mais...

Le fait que cette nana arrive à me regarder dans le blanc des yeux sans cligner les siens me fait un peu flipper et commence aussi à me pomper les nerfs.

C'est quand même pas moi qui vais détourner le regard en premier rassurez-moi !...

__ C'est l'heure de ma pose. Grimace-t-elle et je sors de mes pensées. Je ne passe jamais des appels personnels durant mon heure de travail monsieur, rassurez-vous... Sinon, je peux vous aider? Elle croise les bras sur sa poitrine et je ne peux m'empêcher de loucher sur cette dernière durant quelques secondes avant d'accrocher à nouveau mon regard au sien.

__ Vous savez que vous êtes très belle ? Je lâche telle une bombe après avoir avalé lentement ma salive.

Je ne sais pas pourquoi c'est la première chose qui m'ait venue. Mais j'aurai dû réfléchir une minute avant de parler parce que... le fait qu'elle ne réagisse même pas à mon compliment me frustre encore plus.

Soupirant d'agacement ou de je sais pas quoi, elle lève légèrement les yeux au ciel avant de les planter encore une fois dans les miens :

__ Première nouvelle ! Elle marmonne et je suis sidéré.

Attend mais comment ça première nouvelle?!...

Mais merde, c'est pas possible de se foutre autant du reste du monde enfin !

Je croyais être le pire des ceux qui s'en branlent royalement de ce que pensent les autres mais là , elle bat tous les records, c'est incroyable...

__... Vous n'êtes pas venu dans ce bureau uniquement pour me dire ça, n'est-ce pas?

Elle esquisse un petit rictus hypocrite et je fronce les sourcils.

Va falloir te calmer ma belle, ça a toujours été moi qui mène le jeu, tu ne feras pas exception.

__ Et si je vous disais que oui?! Dis-je, esquissant à mon tour un rictus, le regard toujours accroché au sien.

__ Eh bien merci ? Dit-elle en sortant du derrière son bureau. Je ne veux pas paraître mal polie mais si vous n'aviez rien d'autre à me dire, je vais devoir y aller, je suis attendue pour le déjeuner.

Je saisis son bras alors qu'elle était sur le point de sortir et elle se tend violemment puis se fige et j'ai la vague impression que...son corps entier tremble.

Je l'examine sans comprendre pourquoi son corps a cette réaction avant de encore planter mes yeux dans les siens et...ils sont devenus exorbitants tout à coup.

Il y a quelque chose qui va pas.

Natacha a dit qu'elle a les hommes en horreur mais-

__ Lâ-lâchez-moi...s'il vous plaît.

Sa voix a légèrement tremblé.

Et le fait de la voir serrer les dents me fait arquer un sourcil.

Elle a peur des hommes c'est ça ?!...

Mais non, Natacha a dit qu'elle les  a en horreur, elle n'a pas dit qu'elle en a peur, c'est pas pareil.

__ Pourquoi voulez-vous que je vous lâche? Dis-je dans un petit sourire. Vous n'aviez pas l'aire d'avoir peur de moi tout à l'heure, qu'est-ce qui vous arrive ?

Je la lâche tout de même et avance d'un pas rapide vers elle. Mais la rapidité à laquelle elle recule jusqu'à se cogner le dos au mur m'arrête dans mon geste et je la regarde le cœur encore plus battant que tout à l'heure.

Elle tremble encore plus et...

Merde, merde, merde, fait chier elle pleure ?!

Mais pourquoi pleure-t-elle putain j'ai... j'ai rien fait...

N'est-ce pas?

__ Hé, je suis désolé, calmez-vous, je...

__ Ne vous approchez pas. Dit-elle d'une voix à peine audible, une main levée dans ma direction et je me fige direct.

Mais putain qu'est-ce qui se passe ?

Je ne voulais pas l'effrayer, je...

Et puis pourquoi est-elle si effrayée, je n'ai rien fait pour.

__ Calmez-vous mademoiselle. Dis-je avec prudence. Vous n'avez pas à avoir peur, je n'ai pas l'intention de...

__ Ne vous approchez pas je vous en supplie ne vous approchez pas.

Elle éclate en sanglots et c'est à présent moi qui tremble de tout mon être.

Mais enfin, bon sang de bonsoir, qu'est-ce qui se passe ?

J'avale lentement ma salive alors que je jette un coup d'œil par dessus mon épaule et dans cette situation étrange, je souris amer. Mon geste passerait pour celui qui est en train de commettre un crime putain.

Recroquevillée sur elle, elle sanglote à en avoir du mal à respirer.

Toute cette histoire me dépasse nom de Dieu et ça commence à faire encore plus peur.

Ignorant qu'elle m'interdit d'approcher, je presse les pas puis la saisie et elle se tend à nouveau violemment alors qu'elle lève la tête pour croiser mon regard.

Fait chier, son visage est inondé de larme.

__ Mademoiselle Kobé, calmez-vous, s'il vous plaît, vous-

__ Ne me touchez pas, lâchez moi, NE ME TOUCHEZ PAS.

Ahuri, je me lève d'un bond puis recule de deux pas, la regardant sidéré alors que mon être entier tremble.

Seigneur, mais il se passe quoi ?

__ Cannelle?

Je sursaute violemment en même temps que je me retourne et vois entrés en trombe Natacha, Ansel et une jeune fille.

J'avale encore une fois ma salive alors qu'ils pressent les pas dans notre direction. Mon frère s'arrête juste à côté de moi pendant que Natacha et la fille accourent vers celle qui sanglote, toujours recroquevillée sur elle.

Il s'est passé quoi nom de Dieu, il s'est passé quoi ?

Je lui parlais tranquillement enfin, je n'ai rien fait de travers.

__ Qu'est-ce qui s'est passé Pharell ? Questionne ma cousine.

J'ai la bouche sèche. Alors bien évidemment, j'ai du mal à lui répondre sur le champ.

Ce qui s'est passé ?

J'en ai pas la moindre idée putain.

Je discutais simplement avec elle, je n'ai rien fait de déplacer.

__ Pharell?

Je sursaute encore violemment alors que mon frère pose une main sur mon épaule.

Il me regarde surpris, clignant des yeux...les battements de mon cœur qui martèlent ma poitrine.

__ Du calme. Fait mon frère ayant un mouvement de recul.

__ Je n'a rien fait. Dis-je pour ma défense tel un gosse. Je suis simplement venu lui parler et elle...

Je ferme les yeux ne sachant même pas quoi ajouter de plus.

Elle a piqué une crise est le mot que je recherchais. Mais est-ce que ça en vaut la peine de le dire à voix haute ? Tout le monde ici présent sait qu'elle a piqué une putain de crise. Mais ce qu'on ignore tous, c'est la raison de cette crise...

Enfin, pas tous.

Parce que vu la façon dont sa collègue lui parle et la console, elle doit avoir une idée du pourquoi cette fille s'est comportée ainsi.

Mais merde, ça va me donner une mauvaise réputation putain, chuis pas un pervers enfin.

Toujours tétanisé, je suis les moindres gestes de sa collègue qui la prend dans ses bras, la console lui murmurant des je sais pas quoi à l'oreille.

Le souffle de mon frère qui me fouette la joue me pousse à tourner la tête pour lui faire face.

Je soutiens son regard puis secoues la tête pour répondre à sa question silencieuse.

J'ai pas la moindre idée de ce qui a pu se passer, je vous assure.

On entend des pas pressés puis un type entre. Mais le froncement de sourcil de la collègue attire mon attention. Elle cherche le regard de Natacha pendant quelques secondes et quand elle l'a, elle garde les yeux dans les siens... comme si elle essayait de communiquer par télépathie avec elle.

Natacha soupire puis demande à celui qui vient d'arriver de retourner travailler.

Est-ce qu'on se pose des questions ?

Oui, des milliers.

Mais là présentement je commence à avoir la rage.

Que va penser tout le personnel de moi hein? Que je suis un psychopathe ? Un harceleur ?

__ Laissez-moi la raccompagner patronne. Suggère la collègue et je serre les dents.

Comment ça, aussi facilement ?

Mais elles me prennent pour qui ces deux là, pour un blaireau sans fin?

Bien sûr qu'elle n'est pas celle qui raccompagnera l'autre là, parce que c'est elle qui va devoir répondre aux questions qui me brûlent tellement les lèvres que j'ai envie de hurler de colère.

Elle sait forcément quelque chose parce qu'elle est la seule ici qui n'a pas été surprise de retrouver l'autre toute tremblante, recroquevillée sur elle et le visage inondé de larme.

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