Chapitre 5 (deuxième partie)

Désolée, je ne suis pas des celles qui aiment se débarrasser des gosses mais là c'est différent. Ils s'agit d'une grossesse issue d'un viol, je suis sûre qu'aucune femme n'aimerait tenir dans ses bras un enfant qui est le fruit d'une telle atrocité.

Ils n'ont pas été d'accord avec ma proposition mais de toute façon ce n'est pas notre avis à nous qui compte ici mais celui de la concernée.

C'est quand même elle qui portera ce ventre pendant neuf mois et c'est encore elle qui s'occupera de ce gosse.

C'est aussi elle qu'on montrera du doigt... Et cet enfant... c'est sûr qu'il n'aura pas la vie facile si jamais son entourage apprend comment il a été conçu.

Alors pendant qu'il n'est pas encore tard, nous pouvions lui faciliter les choses et empêcher qu'il souffre plus tard.

Je sais, je ne suis personne pour parler ainsi. Mais bon que voulez-vous ? Canny est ma meilleure amie et je... je pense pas avoir la force à aimer cet enfant. Parce que lui aussi est coupable de la souffrance de mon amie, il avait qu'à pas se pointer merde.

Je soupire puis me masse frénétiquement la tempe.

Monsieur Kobé n'est toujours pas revenu de son voyage... ce qui veut dire qu'il n'est au courant de rien concernant les dernières nouvelles parce que... Canny ne veut pas qu'on le lui dise, il écourterait ses affaires sinon. Et je suis persuadée que Cruella n'a pas ce temps, surtout qu'elle se fiche royalement de comment va la nièce de son mari. Et puis...elle sait très bien que si elle le met au courant, il prendrait le premier vol pour revenir et ça elle ne le souhaite pas... parce que s'il est là, elle se verra dans l'obligation de chercher à savoir comment va Canny. Seule Christelle s'en soucie.

Elle avait même décidé d'annoncer la nouvelle à son père au téléphone mais comme je l'ai dit, Canny a refusé.

Nous sursautons alors que la porte de la pièce où on se trouve s'ouvre avec fracas.

Je fronce les sourcils en toisant celle qui vient de faire son entrée.

Elle jette des coups d'œil çà et là puis pose ses yeux sur nous.

Canny est adossée au mur. Je suis assise à sa droite et Nadine à sa gauche puis Christelle face à elle.

Cette dernière se lève lentement sans quitter sa génitrice des yeux puis se plante devant elle alors que Cruella a les yeux posés sur mon amie avec un air de dégoût.

Je me demande comment Dieu peut donner le souffle de vie à ce genre de personne !...

Mais bon qui suis-je moi pour juger quelqu'un ?

C'est vrai je ne suis personne pour juger qui que ce soit. Mais cette femme là n'est pas humaine. Elle fait partie de la descendance de Satan en personne j'en mettrai ma main à couper.

Christelle suit le regard de sa mère puis ses yeux se posent sur Canny qui d'ailleurs n'a pas bougé d'un iota depuis que Cruella est entrée comme si elle comptait défoncer la porte.

Le regard dans le vide, Canny presse légèrement ma main dans la sienne.

Je sais.

Elle sait qui est entré. Et elle appréhende ce que cette femme est capable de faire.

__ Il se passe quelque chose maman ? Questionne doucement Christelle.

Nous attendons tous sa réponse avec impatience parce que oui, faudrait qu'il se passe quelque chose de vraiment grave pour qu'elle se pointe de cette manière.

Cruella ramène les yeux dans ceux de sa fille puis croise les bras sur sa poitrine:

__ Il se passe quelque chose oui. Je ne supporte plus les pleurs de cette trainée qui s'est faite engrosser bêtement par ses nombreux amants, remballe tes affaires et quitte immédiatement cette maison Cannelle.

Sidérée !

Je suis sidérée !

Lâchant doucement la main de Canny, je me redresse légèrement sans quitter cette humaine venue d'une autre planète des yeux.

Elle a le regard strict et la mine renfrognée.

Christelle recule d'un pas, clignant des yeux pour la fixer alors que j'entends le froissement du drap du lit à ma gauche.

Nadine descend puis se poste au chevet du lit près de la commode.

J'avale lentement ma salive et ramène les yeux sur Canny.

Elle n'a toujours pas bougé de sa position, le regard toujours dans le vide.

__ Pardon mais tu peux répéter ? J'entends Christelle et je tourne brusquement la tête dans leur direction. Comment ça elle n'a qu'à remballer ses affaires, c'est quoi cette blague ?

__ Tu m'as déjà vu blaguer avec cette fille ? Fait-elle le menton levé dans notre direction. Et je te demande ma chérie de ne pas te mêler de ça... Alors Cannelle, tu n'es pas sourde n'est-ce pas? Range tes affaires et pars de cette maison, je ne veux plus te voir sous mon toit c'est clair?

Évidemment que ça l'est.

C'est tellement clair que je pense pouvoir m'y voir en travers.

Sans déconner, cette femme n'est pas humaine, c'est pas possible autrement.

Et cette phrase qu'elle vient de lâcher a été comme un coup de poignard que je reçois en plein cœur.

Et si moi je ressens ce mal, je n'ose pas imaginer ce que doit ressentir Canny.

Mais qu'est-ce qui se passe dans ce monde merdique putain ?

Je pensais pas qu'il pouvait y arriver plus pire. Je pensais qu'on avait touché le fond vu toutes les horribles nouvelles que nous apprenons depuis mais je me suis complètement gourrée.

C'est possible d'être aussi mauvaise ?!

Comment peut-on avoir le cœur aussi noir nom de Dieu ?

Le rire à la fois crispé et nerveux que lâche Christelle me pousse à ramener les yeux sur elle.

Je sais.

Personne ne peut croire à un comportement aussi pourri, même pas sa fille.

Et... le calme que manifeste Canny depuis que cette vipère est entrée me fait flipper.

D'accord, elle ne l'a pas beaucoup ouvert depuis que nous avions appris sa grossesse...ou je dois dire depuis que cette personne a gâché sa vie. Mais le fait de rester autant calme alors que la femme de son oncle est en train de la foutre à la rue et pendant l'absence de ce dernier m'inquiète énormément.

Qu'est-ce qu'on peut faire ?

Appeler monsieur Kobé ?

On peut le faire oui, mais pourra-t-il faire grand-chose étant donné qu'il n'est pas sur place?

Il peut menacer sa vipère de femme et elle laissera tomber. On sait tous à quel point elle le craint.

C'est bien la seule personne qui peut la calmer d'ailleurs.

C'est vrai.

On va faire ça oui.

Je vais le faire moi-même pour-

__ Tu veux de l'aide?

Je me crispe et ma respiration se coupe.

__...je ne plaisante pas.

__ Attends maman, tu es devenue folle alliée ou quoi? S'emporte Christelle et sa génitrice fronce les sourcils la détaillant sous toutes les formes. Tu te rends compte que ton délire n'amuse personne ici ?

__ Tu me respecte Christelle tu m'entends ?

__ Le respect! Elle rigole nerveusement, se passant une main sur le visage. MAIS PUTAIN, DE QUEL RESPECT TU PARLES?  Tu peux pas te lever comme ça et décider de jeter Canny dehors, t'en as pas le droit, cette maison lui appartient parce qu'elle est la nièce de papa.

Cruella éclate d'un rire hystérique et sadique et je vous assure qu'à ce instant précis, je la vois aux personnages méchants des dessins animés et des feuilletons à la télévision. Je ne me suis jamais imaginée que ça pouvait exister dans la vie réelle... Et pourtant là encore je me suis trompée.

Cette scène ressemble à celle d'une série télévisée. Je savais que l'être humain était mauvais mais pas à un tel degré. Au cours de mes dix-huit années et demie sur cette terre je n'ai jamais croisé une telle créateur.

Pendant que des personnes bien et aimables sont malades ou sont peut-être morts, cette femme qui a le cœur aussi noir que le charbon, vit, elle et est en très bonne santé.

Je la déteste !

Je la haie tellement, elle n'a pas idée.

Je lui souhaite le pire dans le reste de sa vie dans ce monde merdique. Je lui souhaite le pire.

Qu'elle ne soit jamais plus heureuse de sa vie ici bas. Qu'elle regrette chaque minute qui passera tout le mal qu'elle a fait à Canny.

Qu'elle soit détestée par toutes les personnes qui lui sont chères.

Je serres les lèvres ainsi que les poings alors qu'elle affiche un sourire hypocrite à sa fille.

Crève !

Crève Lydie Kobé...

Non, non.

La mort sera bien trop un doux châtiment.

Tu vivras.

Mais tu seras rejeter par tous et dans le reste de ta putain de vie, le visage de Canny ne quittera jamais plus ton esprit.

Tu seras rongée par la culpabilité au point d'en vouloir abréger tes souffrances.

__... Cette maison n'appartient pas seulement qu'à ton père Christelle, c'est aussi la mienne... Et puis d'où tu sors que c'est la maison de cette trainée ? La maison que ses parents ont construite est en location n'est-ce pas ? Qu'elle aille y habiter, je ne la veux plus ici.

__ Ça suffit maman, ARRÊTE. Gueule Christelle avec rage et Cruella a sursauté ne s'y attendant pas.

Tremblante de tout son corps, elle pointe un doigt sous le nez de sa mère qui la regarde à présent, se demandant certainement pourquoi sa fille a changé de camp.

Je t'assure lucifer, moi aussi je me pose la même question que toi.

__ Comment tu peux dire des horreurs pareilles? Elle s'étrangle avec un sanglot. Tu as oublié tout ce que les parents de Canny ont fait pour nous ?... pour papa?... Dois-je te rappeler que sans mon oncle Christopher, cette maison n'existerait même pas parce qu'il a été celui qui a pris ton mari en charge lorsque leurs parents sont décidés. Il a abandonné ses études à lui pour s'occuper de celles de papa. Et aujourd'hui c'est comme ça que tu traites sa fille ?... MAIS MERDE, QUI ES-TU ? Elle s'étrangle avec un autre sanglot puis s'essuie les larmes. Ce qui me fait le plus mal... elle renifle. Ce qui me fait atrocement mal c'est que tu as réussi à me rendre aussi mauvaise que toi.

Et pour une fois depuis des années, je vois une autre expression sur la tronche de cette vipère.

Les paroles de sa fille la touchent.

Je dois même dire qu'elles lui font mal et je jubile.

Bien vrai qu'elle ne le montre pas, je l'ai quand même percuté.

Tant mieux si quelqu'un d'autre à part ton mari peut te pousser à être humain durant quelques secondes.

__... J'aimais Canny. Poursuit Christelle en suffocant. Je l'adorais même. Mais tu m'as tellement bourré le crâne que je me suis éloignée d'elle. Tu as fait de moi ton pantin au point où j'ai complètement oublié la promesse que j'avais faite à mon oncle. Dieu merci, Mila m'a remis les idées en place.

Elle renifle encore une fois puis fait un tour sur elle même le visage inondé de larmes.

À ce moment précis, je me dis qu'elle aussi doit souffrir d'avoir été si méchante avec sa cousine sous la manipulation de sa mère.

Mais n'empêche que cette pensée ne m'aide pas à lui pardonner, non.

__ Avec tout ce que Canny est en train d'endurer, t'as pas le droit de lui faire ça maman, papa te le pardonnera jamais.

Elle suffoque tellement que j'ai l'impression qu'elle a du mal à respirer convenablement.

Le regard de sa mère se voile de tristesse pendant quelques secondes puis elle remets rapidement le masque de la dame stricte.

__ Tu ne sais vraiment pas ce que tu racontes ma chérie. Soupire Cruella. Ses amis t'ont bourrés le crâne alors tu penses avoir une raison de me parler ainsi.

__ La seule personne qui m'a bourré le crâne ici c'est toi maman... Mais enfin, comment tu fais pour n'avoir aucun remords ?

__ Tu peux bien penser ce que tu veux Christelle ma décision est prise. Je ne veux plus de cette fille chez moi.

Sans rien ajouter de plus, elle ressort comme elle est entrée en claquant la porte.

Le silence qui règne se fait perturber par les sanglots et les reniflements de Christelle.

Je ne comprends pas pourquoi c'est elle qui pleure d'ailleurs.

Elle ne croyait pas sa mère capable d'un tel acte ?

Je dois avouer que moi non plus.

Je la savais mauvaise mais jamais je me serais imaginée qu'elle peut aller aussi loin.

Je sens quelqu'un me donner un léger coup de coude et je plonge directement dans les yeux de Nadine qui me fait signe de voir quelque chose.

Mon cœur fait un salto dans ma poitrine alors que je vois Canny sortir ses vêtements de son placard.

Mon air paniqué attire l'attention de Christelle et elle affiche un regard surpris avant de presser les pas dans la direction de sa cousine.

__ Mais... qu'est-ce que tu fais Canny ? Dit-elle, voulant saisir la main de cette dernière mais elle se dégage et commence à fourrer les vêtements dans les grandes valises qu'elle a fait descendre du haut des placards.

__ Canny...

__ Vous pouvez m'aider s'il vous plaît ? Fait ma meilleure amie, s'adressant à Nadine et à moi.

Je ne sais pas si je dois obéir ou...

__ Mais qu'est-ce que vous attendez ?

Je sursaute parce qu'elle a presque hurlé.

Je ne réfléchis pas à deux fois et commence à sortir toutes ses affaires. Personne ne sait où elle a l'intention d'aller habiter...mais je ne vais pas le lui demander. De toute façon ma mère sera très contente qu'elle vienne vivre avec nous.

Sauf que telle que je connais Canny, je doute qu'aller vivre avec ma mère et moi fasse partie de son nouveau projet.

Je sors toutes ses affaires pendant que Nadine s'occupe de ses effets personnels et que Canny elle-même défile entre la salle de bain et la chambre pour ranger ses affaires qui s'y trouvent.

Christelle essaye de lui parler mais elle ne l'écoute pas

Alors que nous rangeons ses effets dans de grandes valises... des moyennes, des petites et d'autres sacs de voyage... je capte que Canny n'a pas l'intention de revenir dans cette maison parce que même un épingle à cheveux ne restera pas, j'en suis certaine.

__ Canny écoute moi. Christelle la saisie et elle lui fait face. Arrête tout ça s'il te plaît, tu ne peux pas partir.

__ Si Christelle, il le faut. Elle soupire puis ferme les yeux quelques secondes avant de les rouvrir et prendre les deux mains de sa cousine. Je suis désolée pour tout.

__ C'est pas toi qui dois t'excuser cousine. Elle éclate en sanglots. C'est moi qui suis désolée de t'avoir tant fais souffrir toutes ces années ! Je t'en prie pardonne moi. Pardonne moi s'il te plaît mais ne t'en va pas.

Christelle se jette au cou de Canny puis y enfouie son visage en suffocant... mais même la voir dans cet état ne me pousse pas à lui pardonner moi.

Canny lui rend son étreinte tout en lui assurant que tout va bien. Qu'elle ne lui en ai jamais voulu car elle ne savait pas ce qu'elle faisait.

Tu m'étonnes !

Je savais bien qu'elle n'allait jamais lui en vouloir. Même à cette vipère de Lydie, je suis sûre qu'elle arrivera très facilement à lui pardonner.

__ Je t'aime cousine. Lui murmure Canny et cela triple les sanglots de Christelle qui est toujours perchée à son cou.

__ Ne pars pas s'il te plaît j'ai besoin de toi. Renifle-t-elle. Je te demande pardon, ne pars pas.

Elle lâche brusquement Canny, suffocant sans quitter son regard.

__ Je te laisserai pas partir tu m'entends ? Elle n'a pas le droit de te mettre à la porte, je vais appeler papa et tout de suite.

Canny n'eut pas le temps de dire quoi que ce soit que Christelle sort de la chambre en courant.

Je regarde mon amie, espérant qu'elle change d'avis parce que sa cousine veut mettre son oncle au courant mais bon le rêve est permis.

Canny soupire puis referme les valises qui sont ouvertes et nous fait signe de descendre avec.

J'échange un regard avec Nadine qui en a déjà empoigner deux puis soupire à mon tour.

Quoi qu'il arrive, Canny ne reviendra pas sur sa décision alors il faut que j'arrête d'espérer que l'appel de Christelle pourra y changer quelque chose.

Un dernier tour dans la chambre pour descendre les dernières valises. Canny ne prend même pas la peine de jeter un œil derrière elle, je le fais à sa place.

Je détaille cette chambre complètement vide puis eu un pincement au cœur.

Monsieur Kobé, je suis désolée. Je suis sûre que vous allez énormément souffrir du départ de Canny mais je crois que c'est mieux d'une part.

Elle n'a jamais été heureuse dans cette maison. Peut-être que là où elle va, elle retrouvera le bonheur et le sourire par la même occasion.

***Téléchargez NovelToon pour profiter d'une meilleure expérience de lecture !***