Chapitre 5

La semaine venait à peine de commencer qu’Alexiana sentait déjà l’agitation tourner autour d’elle comme une ruche. Depuis lundi, tout avait changé : les regards, les chuchotements, les attitudes. Là où on l’ignorait, on la saluait maintenant. Là où on la jugeait, on la complimentait. Et quelque part dans tout ce chaos, il y avait lui. Harris Stiven Parks.

Le milliardaire au sourire trop confiant, au regard trop intense.

Depuis ce jour dans le couloir, il n’avait pas cessé de la chercher du regard.

Elle faisait semblant de ne pas le remarquer, mais à chaque fois qu’elle sentait ses yeux sur elle, son cœur battait un peu plus vite.

Et ça, elle détestait.

********

Mercredi, fin de cours. Alexiana rangeait ses affaires dans son sac quand une ombre s’étendit sur sa table.

— Toujours en train de fuir, on dirait.

Elle leva les yeux. Harris, chemise ouverte, blazer noir, un sourire en coin.

— Non, répondit-elle sèchement. J’ai juste cours d’après.

— Mensonge, répliqua-t-il calmement. T’as pas cours avant deux heures.

Elle fronça les sourcils.

— T’espionnes mon emploi du temps ?

— Disons que j’ai mes sources.

Elle soupira, agacée.

— Qu’est-ce que tu veux, Harris ?

— T’inviter à prendre un café. Rien de dramatique. Juste toi et moi.

Elle éclata d’un rire incrédule.

— Toi et moi ? Harris, on ne vit pas dans un film.

— Peut-être que si, murmura-t-il, penché légèrement vers elle. Peut-être que tu ne t’en rends juste pas encore compte.

Il la fixait avec une intensité déconcertante.

Alexiana sentit un frisson lui parcourir la peau, mais elle se força à détourner le regard.

— Non.

— Non ? répéta-t-il, surpris.

— Non, Harris. J’ai pas envie.

Il la dévisagea, un peu déstabilisé. Peu de gens lui disaient “non”.

— Très bien, dit-il finalement, un sourire ironique aux lèvres. Mais je ne baisse pas les bras aussi facilement.

Et il s’éloigna, la laissant étrangement troublée.

*********

Les jours suivants, il redoubla d’imagination.

Un café déposé sur sa table le matin, un mot plié à l’intérieur.

Une rose glissée dans son casier, sans signature mais avec son parfum.

Un message discret :

> Tu finiras par dire oui, Alexiana Grosvelt.

Elle essayait de rester indifférente. Elle avait juré de ne plus tomber dans le piège des beaux parleurs.

Mais Harris n’était pas comme les autres. Il n’avait pas besoin de mots doux ni de promesses creuses. Il avait une façon de la regarder, directe, sans filtre, comme s’il voyait toutes les versions d’elle, même celles qu’elle cachait.

Et cette attention-là… la déstabilisait plus que tout.

Ethan, bien sûr, ne tarda pas à s’en mêler.

— Ce type te tourne autour, cousine. Et t’as ce regard qui dit “non” avec la bouche mais “peut-être” avec les yeux.

— Dégage, Ethan.

— Juste fais gaffe. Ce genre de gars, c’est dangereux.

— Je sais.

— Et pourtant, t’as l’air d’aimer le risque.

Elle lui lança un regard noir, mais il n’avait pas tort.

Vendredi, la journée avait été longue. Et bizarrement, silencieuse. Pas de message. Pas de café. Pas de trace d’Harris.

Elle en était presque soulagée… presque déçue.

En fin d’après-midi, alors qu’elle sortait du bâtiment principal, elle le vit appuyé contre sa voiture, un modèle de luxe noir brillant.

— Toujours aussi têtu, souffla-t-elle.

— J’avais dit que je ne lâchais pas l’affaire. Juste une promenade. Dans le parc. Pas de dîner, pas de promesse, pas d’arrière-pensée.

Elle le regarda, hésitante.

Le soleil couchant dessinait sur lui une lueur dorée, et il avait ce calme désarmant qui rendait tout difficile à refuser.

— Une promenade, c’est tout ?

— Scout’s honor, dit-il en levant la main, faussement solennel.

Elle soupira.

— D’accord. Mais je te préviens : je pars à la moindre phrase clichée.

— Marché conclu.

Le parc était presque vide, baigné dans une lumière orangée. Les feuilles d’automne craquaient sous leurs pas.

Pendant un moment, ils ne parlèrent pas. Juste le bruit du vent et de la ville au loin.

— Tu sais, dit Harris après un long silence, t’es la première à me dire non.

— J’en doute.

— Sérieusement. Les gens… ils veulent toujours quelque chose de moi. Argent, influence, apparence.

— Et moi, tu crois que je veux quoi ?

— Rien. Et c’est justement ce qui m’intrigue.

Elle détourna le regard, mal à l’aise.

— Peut-être que je veux juste la paix.

— Ou peut-être que t’as peur.

Elle s’arrêta net.

— Peur de quoi ?

— De ressentir à nouveau.

Elle serra les poings.

— Tu sais rien de moi.

— Peut-être. Mais j’essaie de comprendre.

Il la regardait avec une douceur inattendue.

Et, pour la première fois, elle vit en lui autre chose que l’arrogance d’un héritier. Il y avait de la sincérité dans ses yeux.

Quelque chose de vrai.

Ils continuèrent à marcher. Lentement, comme deux âmes fatiguées d’avoir trop combattu.

Quand le soir tomba, Harris proposa :

— Et si on mangeait quelque chose ?

— Harris, j’avais dit…

— Je sais. Pas de clichés. Mais j’ai faim. Et je meurs d’envie de voir ton visage quand tu goûteras les meilleurs sushis de la ville.

Elle soupira, amusée malgré elle.

— T’as toujours une phrase prête, hein ?

— Seulement quand ça en vaut la peine.

Et elle céda. Encore.

Le restaurant était élégant, baigné d’une lumière tamisée. La musique douce, le parfum des plats, tout semblait étrangement apaisant.

Ils parlèrent de tout et de rien : leurs rêves, leurs galères, leurs cicatrices.

Harris n’essayait pas de l’impressionner. Il écoutait, vraiment.

Et ça, Alexiana ne s’y attendait pas.

À un moment, il la fixa longuement.

— Tu sais, je comprends pourquoi ton regard me hante.

— Excuse-moi ?

— Il dit toujours “je m’en fiche”, mais on voit bien qu’il a déjà trop souffert pour encore faire semblant.

Elle baissa les yeux, touchée sans vouloir l’admettre.

Et c’est à cet instant qu’une voix résonna derrière eux.

— Alex… ?

Son sang se figea.

Elle se retourna lentement.

Ryan.

Il se tenait là, les mains dans les poches, l’air hésitant mais les yeux brillants.

Le même sourire charmeur, mais plus hésitant qu’avant.

— Ryan, murmura-t-elle.

— Wow… t’as… t’as changé, dit-il, bouche bée.

— Merci, répondit-elle sèchement.

— Non, je veux dire… t’es magnifique.

Harris resta silencieux, les observant avec un calme glacial.

— Qu’est-ce que tu fais là ? demanda-t-elle.

— Je voulais te parler. Depuis des semaines. Je savais pas comment.

Elle croisa les bras.

— Il y a rien à dire.

— Si. J’ai merdé, Alex. Je le sais. Et je m’en veux. J’ai été con. J’étais juste… perdu.

Elle sentit la colère remonter.

— Perdu ? Tu m’as humiliée. Tu m’as remplacée en moins de 24 heures avec ma demi-sœur, Ryan. Ça, c’est pas être perdu, c’est être lâche.

Il baissa la tête.

— Je sais. Et je regrette. Mais quand je te vois aujourd’hui… j’me dis que j’ai tout gâché. Que j’aurais dû rester.

Le silence tomba lourdement.

Harris posa calmement sa fourchette, ses yeux se plantant dans ceux de Ryan.

— Je crois qu’elle t’a déjà répondu.

Ryan serra la mâchoire.

— Et toi, t’es qui, au juste ?

— Quelqu’un qui sait reconnaître une femme forte quand il en voit une. Et qui n’a pas besoin de la blesser pour s’en rendre compte.

Alexiana le regarda, choquée par la simplicité avec laquelle il l’avait défendue.

Ryan, lui, pâlit, marmonna un « désolé » et s’éloigna sans insister.

Harris reprit calmement son verre.

— Désolé si j’ai un peu cassé l’ambiance.

— Non… c’est moi qui devrais te remercier.

Il haussa les épaules.

— Tu n’as pas à me remercier. J’ai juste dit la vérité.

Elle le fixa un long moment.

— Harris… pourquoi tu fais tout ça ?

— Parce que j’ai vu dans tes yeux ce que c’est que de se relever quand tout le monde t’a écrasée. Et parce que je sais que derrière ton sarcasme, il y a une femme qui mérite d’être regardée autrement.

Elle resta muette. Son cœur battait si fort qu’elle en oublia de respirer.

— T’as pas besoin de me répondre, ajouta-t-il doucement. J’ai tout mon temps.

Il se leva, paya la note avant qu’elle ne proteste, puis lui tendit la main.

— Allez, viens. Je te raccompagne.

Elle hésita, puis la lui prit.

Et pour la première fois depuis longtemps, elle se sentit en sécurité.

********

Cette nuit-là, Alexiana se regarda dans le miroir.

Le reflet qu’elle voyait n’était plus celui d’une fille brisée.

C’était celui d’une femme qui renaissait.

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