Depuis sa découverte de la Salle des Fondateurs, Amélia ne pensait plus à rien d’autre. Le visage du portrait, les paroles murmurées, l’attitude d’Oscar… tout cela l’obsédait. Elle passa la nuit à griffonner des hypothèses dans un vieux carnet noir, récupéré dans un tiroir chez elle. Elle y traçait des plans du lycée de mémoire, notait des noms, des lieux, des impressions.
Le lendemain, elle entra dans la cour les yeux fatigués mais l’esprit en alerte. Elle chercha Oscar du regard, mais il était introuvable. En revanche, elle aperçut *Esther*, seule pour une fois, assise dans l’ombre d’un arbre. D’ordinaire toujours collée à Mirabelle, elle semblait pensive, presque inquiète.
Amélia hésita, puis s’approcha.
— Salut… Tu es Esther, c’est ça ?
La jeune fille leva les yeux, surprise, puis hocha la tête.
— Tu voulais me parler ? demanda-t-elle, un peu distante.
— Je… je voulais savoir… Tu connais la Salle des Fondateurs ?
Esther la fixa quelques secondes. Un léger frisson la parcourut.
— Tu y es entrée ?
Amélia acquiesça lentement. Esther baissa les yeux.
— Alors il faut que je te montre quelque chose.
Sans un mot de plus, elle se leva et entraîna Amélia à l’écart, derrière le bâtiment administratif. Là, dans une fissure du mur, elle tira une petite boîte métallique rouillée. Elle l’ouvrit lentement, révélant un carnet en cuir brun, usé.
— C’était à ma sœur. Elle était ici, à Notre Vu, il y a trois ans. Elle a disparu sans laisser de trace.
Le cœur d’Amélia manqua un battement.
— Disparu ?
— Officiellement, elle a « fugué ». Mais moi je sais que c’est faux. Elle écrivait tout dans ce carnet. Et juste avant qu’elle ne disparaisse, elle parlait souvent de cette salle… et d’Oscar.
Amélia ouvrit le carnet. L’écriture était nerveuse, serrée. Des mots revenaient souvent : *"cercle"*, *"clef"*, *"les visages bougent"*, *"Oscar ment"*, *"ne pas leur faire confiance"*.
— Pourquoi elle parlait d’Oscar ?
Esther croisa les bras, hésita, puis répondit :
— Il était déjà ici. Il est dans ce lycée depuis… au moins cinq ans. Et il n’a pas changé. Pas vieilli. Pas bougé. Toujours dans la même classe. Comme figé dans le temps.
Un long silence s’installa.
— Il est peut-être coincé lui aussi, murmura Amélia.
Elle rangea le carnet dans son sac. Il fallait qu’elle en sache plus. Et pour cela, elle devait reparler à Oscar. Ce soir.
***
À la fin des cours, Amélia se précipita dans le vieux bâtiment administratif. Elle savait qu’Oscar y traînait parfois, près des salles oubliées. En tournant au coin d’un couloir, elle le trouva, assis par terre, adossé à un mur.
— On doit parler, dit-elle fermement.
Oscar leva les yeux. Il semblait fatigué. Triste, même.
— Tu as trouvé le carnet, hein ?
Amélia resta figée.
— Tu savais qu’il existait ?
Il hocha lentement la tête.
— Elle aussi avait vu des choses. Et elle a voulu aller trop loin. J’ai essayé de l’en empêcher… mais c’était trop tard.
— Qu’est-ce que tu caches, Oscar ? Qui es-tu vraiment ?
Il ne répondit pas tout de suite. Puis, dans un souffle :
— Je suis ici depuis longtemps. Trop longtemps. Et je n’ai pas le droit de partir.
Il se leva.
— Cette école est un piège. Un cycle. Tous les dix ans, elle choisit quelqu’un. Quelqu’un qui voit ce que les autres ignorent. Quelqu’un comme toi.
— Et toi ? Tu es quoi, alors ? Une victime ? Un gardien ?
Oscar la regarda avec une tristesse profonde.
— Je suis celui qui doit veiller. Jusqu’à ce que quelqu’un rompe le cycle.
Il sortit une clé en cuivre de sa poche. Petite, ancienne, gravée d’un symbole étrange.
— Si tu veux comprendre ce qui se passe ici, va à la bibliothèque. Demande le *livre que personne ne veut lire*.
Puis, sans un mot de plus, il disparut dans le couloir, comme s’il se fondait dans les murs.
Amélia, seule, serra la clé dans sa main. Le mystère venait à peine de commencer. Et déjà, elle sentait que la vérité serait bien plus dangereuse qu’elle ne l’imaginait.
𝑻𝒐 𝒃𝒆 𝒄𝒐𝒏𝒕𝒊𝒏𝒖𝒆𝒅
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