Chapitre 5 : La Trahison Intérieure

Le vent sifflait à travers les ruines de la forteresse d’Yrhael, autrefois bastion de la résistance du sud. Kaelan, les traits tirés par la fatigue et la méfiance, contemplait les flammes mourantes du feu de camp. Chaque ombre semblait murmurer des secrets, chaque craquement de bois un avertissement venu du passé.

Ils étaient peu à peu parvenus à rassembler une poignée d’alliés : des hors-la-loi, des survivants, quelques anciens soldats encore fidèles à la couronne déchue. Au centre de ce groupe fragile, Tharin, son ami d’enfance, tenait toujours sa place… mais quelque chose avait changé. Kaelan le sentait sans pouvoir l’expliquer. Une distance. Un silence pesant. Des regards évités.

Maela s’approcha, frottant le sang séché de son épée.

— « Encore deux embuscades cette semaine. Quelqu’un connaît nos trajets. »

Elle ne haussait plus la voix, mais Kaelan entendait dans son ton la suspicion.

— « Tu penses à une trahison ? »

— « Je pense que le hasard n’a jamais été aussi bien informé. »

Le prince détourna les yeux, son regard se posant un instant sur Tharin qui discutait avec deux éclaireurs à l’écart. Son rire résonnait, franc, mais une ombre s'était incrustée dans ses gestes.

Retour en arrière — Trois ans plus tôt

Dans les jardins suspendus du palais d’Elyndor, Kaelan et Tharin s’entraînaient à l’épée, riant comme deux frères. Tharin, fils d’un conseiller royal tombé en disgrâce, avait été recueilli par le roi Aldric après une tentative d’assassinat orchestrée par des rivaux de la cour. Depuis, il avait grandi aux côtés de Kaelan.

— « Un jour, c’est toi qui commanderas, Kael. Et moi, je serai là. »

Kaelan avait souri, frappant doucement son ami à l’épaule.

— « Tu seras plus que mon conseiller, Thar. Tu seras mon frère d’armes. »

Présent — Les soupçons s’épaississent

La nuit suivante, alors que Kaelan observait les étoiles, Lysara apparut derrière lui, telle une brume silencieuse.

— « Tu dors peu, Prince du Sang. Les ombres te tiennent éveillé ? »

— « Elles me murmurent des vérités que je refuse d’écouter. »

— « Et si ce que tu refuses était précisément ce qui te sauvera ? »

Kaelan la regarda, intrigué.

— « Tu sais quelque chose. »

— « Je sais que la trahison ne vient jamais de l’ennemi. Elle naît dans le cœur de ceux qu’on croit le plus proches. »

Il frissonna. Lysara, comme toujours, ne disait jamais les choses directement, mais ses paroles visaient juste. Il se leva brusquement et descendit vers la crypte souterraine où les cartes et plans étaient stockés. Plusieurs étaient déplacés. Une des cartes stratégiques avait disparu.

Maela, entrée silencieusement, l’interrogea du regard.

— « Il nous trahit. Tharin. Je sens sa main partout. »

— « Des preuves ? »

— « Pas encore. Mais je vais en trouver. »

La confrontation

Trois jours plus tard, dans un village brûlé par les troupes de Lord Varyn, le piège se referma.

Lysara avait utilisé sa magie pour tendre une illusion — une lettre codée, soi-disant écrite par Kaelan et destinée à un informateur royal. Elle fut laissée en évidence. Seul Tharin entra dans la tente cette nuit-là. Seul Tharin en sortit, nerveux.

À l’aube, Kaelan fit arrêter son ami.

— « Tu as lu cette lettre. »

— « Quoi ? Non, bien sûr que non ! »

— « Elle était piégée. La cire contenait une poudre enchantée. Ton pouce est marqué. »

Tharin regarda sa main, où une légère lueur bleue brillait.

— « Ce… ce n’est pas ce que tu crois… »

Kaelan s’approcha, ses yeux emplis de tristesse.

— « Alors dis-moi ce que c’est, Tharin. Dis-moi pourquoi les embuscades coïncident toujours avec nos mouvements. Pourquoi la carte de la passe de Dorvael a disparu. Pourquoi mes hommes meurent. »

Le silence. Puis, une explosion.

— « Parce que tu ne comprends rien, Kael ! Ce royaume ne peut être sauvé. Il est gangrené. Tu crois que tu peux défaire la malédiction par la seule force de ton héritage ? Tu es né pour échouer, comme tous les autres. »

Le choc le frappa comme une lame invisible.

— « Alors tu préfères trahir ? Vendre ce qu’il reste de notre sang ? »

— « J’ai choisi de survivre ! Varyn m’a promis un avenir. Un poste, un pouvoir. Mieux que d’attendre de mourir dans un combat perdu d’avance. »

Kaelan recula, écœuré.

— « Alors tu n’es plus mon frère. »

Tharin fut enchaîné et placé sous surveillance. Mais la blessure était faite.

Le poids du doute

Les jours suivants furent une marche silencieuse. Kaelan ne parlait plus. Même Maela n’osait plus l’approcher. Lysara, elle, veillait à distance, ses yeux d’émeraude scrutant l’âme du prince.

Une nuit, elle lui parla.

— « Ton cœur s’effondre, Kaelan. Tu veux sauver ce royaume, mais tu oublies que pour reconstruire, il faut accepter la ruine. »

— « J’ai perdu mon père, ma couronne, et maintenant mon meilleur ami. »

— « Tu as encore ta volonté. C’est la seule chose que la malédiction n’a pas pu te prendre. »

Il releva les yeux vers elle.

— « Dis-moi… ai-je une chance ? »

— « Pas en tant que prince. Mais peut-être… en tant qu’homme. »

Le complot plus vaste

Alors que Kaelan planifiait de déplacer son camp, un messager surgit — à moitié mort, transpercé par des flèches empoisonnées. Avant de mourir, il murmura :

— « Varyn… pacte démoniaque… Tharin… n’était qu’un pion… »

Le sang de Kaelan se glaça.

Et s’il s’était trompé ? Et si Tharin n’avait été qu’une pièce d’un jeu plus sinistre ? Un pion dans une guerre d’ombres menée par Varyn avec des forces d’un autre monde ?

Il se précipita dans la tente de prison, mais Tharin avait disparu. Les gardes… morts. Une marque sombre, en forme d’œil, brillait sur le sol. Lysara, arrivée juste après, fronça les sourcils.

— « C’est une rune d’Invocation. Il n’est pas parti… il a été pris. »

Kaelan chancela. La trahison n’était peut-être que le début d’un mal plus profond.

Cliffhanger de fin

Au sommet d’une falaise, alors que les éclairs grondaient au loin, Kaelan jura devant les ruines d’un ancien autel royal.

— « Plus de mensonges. Plus de compromis. Je retrouverai Tharin… et je mettrai fin à cette damnation. »

Derrière lui, la silhouette d’un homme à demi consumé par la magie noire — Tharin, mais changé, déformé — observait en silence, ses yeux brillants d’une lueur surnaturelle.

Fin du Chapitre 5

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