L’homme derrière la porte.

Minuit.

Le plafond, pâle et lisse, le regardait fixement depuis des heures.

William s’était tourné pour la centième fois, étouffé par la chaleur d’un drap froissé contre ses jambes. Le ventilateur ronronnait quelque part au plafond, mais l’air restait épais, lourd. Collant.

Il avait essayé de fermer les yeux.

Mais dès qu’il les fermait, d’autres images revenaient. Le sable, les cris, l’odeur du sang brûlant au soleil. Les détonations, le silence après. Et toujours ce souffle dans sa nuque, celui qu’il n’avait pas pu sauver.

Il se redressa brusquement, en sueur. Un soupir rauque s’échappa de sa gorge.

Encore une nuit blanche.

Il s’était habitué à ne plus dormir depuis longtemps. Depuis son retour, le sommeil était devenu un terrain miné. Il ne savait jamais sur quoi il poserait le pied : un souvenir, une vision, un fantôme.

Il jeta un œil au réveil numérique : 00h16.

Il savait qu’il ne dormirait pas cette nuit-là. Il le sentait dans sa peau. Alors, comme souvent, il se leva.

Son pas était lourd mais précis. Il connaissait son appartement par cœur, chaque recoin, chaque meuble, chaque irrégularité du sol. Il traversa le couloir dans la pénombre sans allumer la lumière, poussa la porte de la cuisine.

Il ouvrit le frigo, le referma aussitôt — trop de lumière. Il prit un verre, ouvrit le robinet, laissa couler un filet d’eau fraîche. Le bruit du liquide remplissant le verre était presque apaisant.

Presque.

Il but lentement, dos appuyé contre le comptoir.

Et c’est là que l’image revint. Vague. Brève. Mais nette.

L’homme de l’ascenseur.

Ce type. Grand, musclé, torse brillant de sueur. Regard tranchant, sourire à peine esquissé. Il s’était dit que ce n’était rien. Juste un voisin.

Mais le souvenir de ce visage refusait de s’effacer.

Pourquoi ce type l’avait marqué ?

Il avait vu des centaines de visages, dans des circonstances bien pires. Il en avait oublié des dizaines. Et pourtant celui-là… persistait. Comme une brûlure légère qu’on ne peut s’empêcher de toucher.

William reposa le verre. S’appuya un instant sur le plan de travail.

Il n’avait pas échangé plus de quelques mots avec cet homme. Un simple bonjour et un phrase. Et pourtant, il se revoyait clairement dans l’ascenseur : le regard, le silence, le léger frisson qu’il avait ressenti.

C’était… autre chose. Un instinct. Une alerte interne. Comme si son corps reconnaissait quelque chose de dangereux. Quelque chose de similaire.

Un prédateur qui en reconnaît un autre.

Il secoua la tête, tenta de chasser la pensée. C’était stupide. Il se sentait ridicule d’accorder de l’importance à une rencontre aussi brève.

Et pourtant…

Il sortit une cigarette d’un tiroir, l’alluma, même si ce n’était pas dans ses habitudes. Il tirait dessus sans plaisir, comme pour occuper ses doigts, ou faire taire le vide.

Il se dirigea vers la baie vitrée, jeta un coup d’œil à la ville.Tout semblait paisible. Trop paisible.

William plissa les yeux,Il ne savait même pas son nom. Juste… un visage. Et une sensation.

Il détestait ça. Ne pas comprendre ce qu’il ressentait. Ne pas savoir d’où venait ce malaise. Ce frisson.

Peut-être que c’était simplement l’adrénaline. Une réminiscence de ces jours où chaque rencontre pouvait être un piège. Peut-être qu’il devenait parano.

Mais il savait reconnaître un regard vide.

Et celui de ce type ne l’était pas. Il était trop vivant. Trop vif. Comme s’il cachait quelque chose.

Et William… détestait ce qui se cache.

Il finit sa cigarette, l’écrasa dans l’évier. L’odeur lui tournait la tête.

Il revint s’asseoir dans le canapé, toujours en short, torse nu. Il alluma la télévision sans le son, juste pour faire danser les ombres sur les murs.

Il savait qu’il ne dormirait pas. Pas encore.

Alors il resta là, à fixer les lumières clignotantes, et parfois, sans le vouloir…

Il pensait à lui.

À ce type au sourire étrange.

À ce regard.

À ce “bonjour” qui sonnait encore comme une promesse.

Une promesse ou une menace — il ne savait pas encore.

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