Chapitre 5 – Illusions et cicatrices

Le lendemain matin, la villa Lin était baignée d’une lumière dorée. Dans la salle à manger, Tang Mei, habillée d’un uniforme impeccable fraîchement repassé, dégustait des toasts beurrés et du jus pressé. Ses oncles s’étaient montrés généreux : nouvelle garde-robe, nouveau téléphone, même un sac à main flambant neuf.

Elle se leva avec grâce et lança un sourire éclatant.

— « Oncle Wei, est-ce que je pourrais avoir un petit service ? Tu pourrais me déposer à l’université ? Je… j’ai un peu de mal avec les bus bondés. »

Lin Wei, le PDG à l’allure imposante, lui répondit d’un hochement de tête. Il n’aimait pas trop s’attarder, surtout avec un emploi du temps chargé, mais il faisait un effort. Après tout, c’était leur précieuse nièce retrouvée.

— « Monte. Je te déposerai en chemin vers le siège de Lin Group. »

Tang Mei s’installa à l’arrière de la voiture de luxe, ravie que tous les regards se tournent vers elle à l’arrivée sur le campus. Une Bentley noire aux vitres teintées n’était pas un spectacle courant à l’université.

Devant l’entrée principale, elle descendit avec grâce et salua son oncle à travers la vitre.

— « Merci, oncle Wei ! Bonne journée ! »

Les étudiants autour d’elle s’arrêtèrent, surpris.

— « Attends, c’est pas une Bentley ça ? »

— « Tang Mei ?! Elle est riche maintenant ? »

— « C’est qui cet homme ? Il avait l’air hyper influent… »

Tang Mei souriait, ravie de cette effervescence. Elle arrangea sa coiffure et marcha d’un pas léger vers l’entrée.

Au même moment, dans un petit quartier modeste, Lin Xia se réveilla dans sa minuscule chambre. Elle jeta un œil à sa grand-mère encore endormie, puis enfila rapidement son uniforme de livraison.

À peine la porte ouverte, elle tomba nez à nez avec sa mère adoptive, Chu Lifen, qui croisait les bras en l’attendant dans le couloir.

— « Tu comptes rester encore longtemps ici ? Tu ne payes presque rien, tu vis au crochet de la famille. Et maintenant tu te pavanes dans ton uniforme comme une souillon. »

Lin Xia baissa les yeux. Elle avait l’habitude. Mais chaque mot blessait un peu plus profondément.

— « Je vais à l’université, puis j’ai des livraisons ce soir. J’ai laissé l’argent pour l’électricité sur la table. »

Chu Lifen renifla avec mépris.

— « Heureusement que Hao n’a pas besoin de mendier comme toi. Lui, il mérite cette maison. Toi, tu n’étais qu’un poids mort qu’on a accepté par pitié. »

Lin Xia serra les dents. Pas une larme. Pas un mot. Elle descendit, monta sur son petit scooter électrique de service, et démarra en silence.

La route jusqu’à l’université était familière, mais aujourd’hui, son cœur pesait plus lourd que jamais.

Quand elle arriva sur le campus, elle se dirigea vers l’entrée en baissant la tête. Quelques regards se posèrent sur elle, certains moqueurs, d’autres indifférents.

Et là, au milieu du hall principal, Tang Mei rayonnait.

— « Vous avez vu ? Mon oncle m’a déposée en Bentley ce matin. Il dirige une entreprise internationale. C’est dingue, hein ? »

— « Je savais que tu n’étais pas comme les autres, Mei. »

— « Tu devrais te présenter à Miss Campus cette année ! »

Tang Mei savourait chaque flatterie. Elle jouait son rôle à la perfection. Personne ne savait qu’elle vivait encore il y a peu dans un appartement décrépit, à porter des fausses marques pour cacher sa pauvreté.

Mais maintenant, elle était la nièce des Lin.

Et Lin Xia, elle, n’était qu’une ombre dans un coin du couloir, à fixer la scène avec un pincement au cœur. Elle détourna rapidement les yeux. Elle n’était pas envieuse. Elle était juste… perdue.

Où était son pendentif ?

Pourquoi ce sentiment d’avoir été arrachée à quelque chose d’important la hantait-il autant ?

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