Kadyyy
La nuit était douce à Koumassi, avec la pleine lune qui éclairait les ruelles sablonneuses du quartier. Kady, le cœur battant, se tenait derrière la maison de sa tante, collée à François, son amoureux secret.
— Faut pas t’inquiéter, ma chérie. Y’a personne, chuchota François en lui tenant la taille.
— C’est ce que tu dis, mais ma tante a des oreilles de hibou, répondit Kady en regardant nerveusement autour d’elle.
Et comme si le destin l’écoutait, un grincement retentit derrière eux.
— HÉÉÉÉÉÉÉ ! QUI EST LÀ-BAS ?!!!
La voix de Tata Oumou fendit la nuit comme un coup de tonnerre. Une lanterne à la main, elle avançait d’un pas menaçant, sa pagne noué fermement à la taille. Son chien, Bougou, grogna en découvrant ses crocs.
François lâcha brusquement Kady et fit un pas en arrière.
— Euh… Tantie, c’est pas ce que vous croyez !
— AH BON ?! TU CROIS QUE MES YEUX SONT FERMENTÉS ?!!!
Kady baissa la tête. Elle savait que sa soirée était terminée. La seule question maintenant, c’était : est-ce que François arriverait à fuir avant que Tata Oumou ne l’attrape ?
Tata Oumou resserra son pagne et pointa sa lanterne droit sur eux. Ses yeux lançaient des éclairs.
— Ahh Kady, c’est comme ça maintenant ? Donc pendant que moi je dors, toi tu es dehors en train de faire palabre avec un garçon ?!
— Tantie, c’est pas ce que tu crois… commença Kady, la voix tremblante.
— Ah bon ?! Donc vous étiez en train de prier dehors à minuit, c’est ça ?!
Bougou, son chien, grogna et avança vers François qui recula d’un pas. Mais Tata Oumou n’avait pas fini.
— Toi, petit garçon là, tu crois que je t’ai pas vu toucher ma nièce ? Hein ?!
François, paniqué, leva les mains en l’air.
— Non non, Tantie, c’est pas ça oh ! Je voulais juste… euh… je voulais lui donner un livre !
— LIVRE À MINUIT ?! TOI, TU ME PRENDS POUR QUI ?!
Elle fit mine d’avancer. François, voyant que ça sentait le roussi, tenta une dernière excuse.
— Tantie, pardon, je vais partir hein…
— Ahh tu vas partir ? Attends, tu vas voir… BOUGOU, ATRAPE-LE !!!
Dès que le chien bondit, François détala comme un sprinter aux Jeux olympiques.
— Héééé, ton pied, mon pied ! cria Tata Oumou en se lançant à sa poursuite avec sa lanterne.
Kady, elle, savait qu’elle était foutue. La nuit allait être longue… et sa tante n’allait pas la lâcher avant l’aube.
Tata Oumou, voyant que François avait déjà pris le large, se retourna furieuse et lança :
— BOUGOU, REVIENS ICI ! Laisse ce bon à rien courir, on va s’occuper de celle qui reste !
Le chien s’arrêta net, puis trottina vers elle, l’air déçu de ne pas avoir eu son dîner surprise. Mais Tata Oumou n’avait pas fini sa mission. D’un geste rapide, elle attrapa Kady par l’oreille et la tira vers la maison.
— Aïe, Tantie ! Doucement ! protesta Kady en essayant de se libérer.
— TOI, TU VAS ME DIRE DE FAIRE DOUCEMENT ?! DONC TOI, TU SORS EN CACHETTE POUR ALLER VOIR GARÇON, C’EST MOI TU VAS ÉDUQUER MAINTENANT ?!
— Mais Tantie, je…
— Y A PAS DE "MAIS" OH ! Toi, tu crois que je suis née hier ?! C’est comme ça que ça commence, aujourd’hui c’est palabre sous la lune, demain c’est quoi ? TU VEUX ME DONNER TENSION ?!
Dès qu’elles entrèrent dans la maison, Tata Oumou referma la porte avec force et traîna Kady jusqu’au milieu de la pièce.
— Toi, mets-toi à genoux ici, ordonna-t-elle en montrant le sol poussiéreux.
Kady hésita une seconde, mais une seule regard de sa tante suffit à lui faire obéir. Elle s’agenouilla lentement, le cœur battant.
— Maintenant, mets tes mains sur ta tête !
Kady obéit encore, serrant les dents. Elle savait ce qui allait suivre. Tata Oumou alla chercher son arme secrète : un long fil en caoutchouc bien plié, qu’elle réservait pour les "grands cas".
— Donne-moi ta main !
Kady tendit sa main droite avec hésitation. La première frappe siffla dans l’air avant de claquer sur sa peau.
— Aïe ! cria-t-elle en la retirant instinctivement.
— DONNE-MOI ÇA ! gronda sa tante en lui reprenant violemment la main.
Les coups tombèrent, un à un, chaque frappe brûlant un peu plus que la précédente. Kady mordit sa lèvre pour ne pas crier trop fort, mais les larmes montaient toutes seules.
— Donc toi, tu veux me faire honte dans le quartier, hein ? Tu crois que moi, j’ai souffert pour élever une petite dévergondée comme toi ?!
Kady reniflait, incapable de répondre.
— Demain matin, tu vas balayer toute la cour et laver tous les habits que j’ai laissés depuis une semaine ! Et si jamais je te vois encore rôder dehors la nuit… HUMMM !
Après plusieurs coups, Tata Oumou finit par lâcher le fil et soupira.
— Maintenant, va dormir, mais sache que demain, on va encore causer !
Kady se releva lentement, les mains en feu, et se traîna jusqu’à sa natte. Elle s’allongea, la tête remplie de regrets et les joues mouillées de larmes.
Mais une seule chose lui revenait en tête : est-ce que François allait bien ?
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