Jess : Rey est malade ?

C’est quoi cet histoire ? Je n’ai jamais vu Rey paniquer comme elle le fait en ce moment.

Elle est très pâle et elle tremble beaucoup. Sa petite main serre la mienne aussi fort qu’elle le peut comme si elle avait peur que je la lâche, je ne veux pas la lâcher, je l’accompagnerai jusqu’au bout de cette histoire même si je ne sais pas de quoi s’agit-il. Je suis curieux mais elle a bien dit

« Pas de commentaire ni de question », elle a juste besoin de quelqu’un à agripper comme une gamine de cinq ans obsédée par sa nounou.

Sa respiration s’accélère, je peux carrément l’entendre, ses lèvres sont sèches et sa gorge nouée. Je peux clairement voir qu’elle est terrifiée, mais pourquoi ?

 - Bonjour, Rey.

 - Bonjour docteur.

Apparemment, c’est un médecin spécialiste en psychologie et neurologie, un

psychothérapeute, le genre de type qui me fait flipper. Il fait de l’hypnose.

 - Alors, qu’est-ce qui vous amène aujourd’hui ? Des problèmes ou des changements ?

 - A vrai dire, il m’est arrivé quelque chose de bizarre et d’inhabituelle aujourd’hui. Je…

J’ai… Euh…

Elle ne sait pas par où commencer, la pauvre. Que lui est-il arrivé ? Bon sang ! J’aimerai un

peu comprendre mais je me contente d’écouter leur conversation attentivement. Rey a toujours sa main dans la mienne.

 - Respirez profondément et dites-moi tout. Je vous écoute.

- Elle aspire un grand coup et se lance.

 - Je pouvais voir clairement le visage d’une personne.

 - Quoi ?

Et alors ? Où est le problème.

 - En êtes-vous sûr ?

 - Oui, j’ai pu la voir clairement.

 - Et maintenant ?

 - C’est ce que j’ai trouvé bizarre, je ne peux voir qu’elle… J’étais perturbée et je ne savais

pas comment réagir donc je suis parti et je vous ai appelé tout de suite après.

 - Donc vous dites que cette personne est la seule dont vous pouvez voir le visage ?

 - OUI !!! C’EST EXACTEMENT CE QUE J’AI DIT !

Elle hurle assez fort. Mais c’est quoi cet histoire ? Donc elle ne peut pas voir le visage des gens ? Mais pourquoi ? Je ne comprends rien. Pour ne pas la mettre encore plus en colère qu’elle l’est déjà, je me contente de me taire même si j’ai des milliers de questions qui me montent à la tête.

 - Du calme, Rey. Il y a forcément une explication à tout cela.

 - Je ne trouve aucune explication docteur, tout ça n’a aucun sens. Je veux dire…je ne

peux même pas me reconnaître dans un miroir et…tout à coup une personne apparaît

devant moi et c’est la seule personne que je puisse voir. C’EST RIDICULE ! D’abord,

pourquoi elle ?

Rey fond en larme, sous mes yeux et je ne trouve aucun mot réconfortant à lui dire. Des

larmes montent dans mes yeux mais je ne dois pas pleurer, surtout pas maintenant. La pauvre. Je n’aurais jamais pu deviner qu’elle a autant souffert et toujours toute seule.

Rey arrive à vivre son quotidien sans montrer aux autres sa faiblesse, je suis très

impressionné ; si j’étais à sa place, je n’aurais même pas pu sortir de chez moi. Elle devrait de temps en temps partager ses chagrins à d’autres personnes qui l’entoure, à sa sœur par exemple, ou à…moi.

Le docteur n’a pas trouvé de réponse pour le moment, il a tout simplement dit que c’est

un cas particulier et qu’il n’avait jamais vu quelque chose comme ça. « Soit on peut voir, soit on ne le peut pas. Mais voir clairement une personne en particulier ? Cela n’a aucun sens ». Ce sont ses mots. Il l’a simplement suggérer de s’approcher de cette personne pour trouver de réponse.

Elle ne voulait ni aller en cours ni rentrer chez elle donc je l’ai emmené à l’endroit où je

l’ai emmené la première fois, on s’est promis de revenir ici ensemble mais je ne pensais pas que ça pourrait être dans une circonstance pareille. Elle est restée silencieuse pendant trop longtemps, je n’en peux plus de la voir comme ça mais j’ai tellement peur de la mettre en colère.

Mais…

 - Parle si tu veux parler, je sais que t’as des milliers de questions à me poser.

C’est elle qui a brisé la glace.

 - Oui, t’as raison. Mais je ne voulais pas te mettre mal à l’aise donc je n’ai rien dit. Ce

n’est pas grave si tu n’as pas envie de parler, je comprends mais je veux seulement être

là pour toi quand tu seras prête.

 - Poses tes questions, je te répondrais, je suis prête.

Sérieusement ? Mais ça me gêne quand même.

 - D’accord. Euh… Qu’est-ce que tu as vraiment ? Je veux dire de quelle maladie es-tu atteint ?

 - Ce n’est pas vraiment une maladie mais un handicap, ça s’appelle la prosopagnosie.

 - Et ça veut dire quoi exactement ?

 -En gros, je ne peux pas voir les visages des gens, même pas le mien.

Je n’en ai jamais entendu parler.

 - Et…ça a toujours été comme ça ? Depuis…

 - Non. Ça fait maintenant quatre ans, dû à un choc émotionnel.

Elle m’a raconté toute l’histoire.

Apparemment, il y a quatre ans, elle est tombée amoureuse d’un mec nommé Kyle, un mec normal et issu d’une famille assez pauvre. Elle était prête à tout pour vivre cet amour mais son père l’en a empêché. Elle était en parfait désaccord avec son père puisqu’elle a beaucoup insisté pour qu’il accepte son petit ami. Kyle voulait devenir médecin mais ses parents n’en avaient pas les moyens donc le père de Rey lui a offert une bourse d’étude à l’étranger à condition qu’il quitte sa fille. Monsieur Erwin est vraiment sans cœur, il a menacé Kyle de ruiner sa famille s’il s’obstine à être avec Rey donc il a craqué et a accepté la bourse d’étude, quel crétin. Quand Rey a su que Kyle allait partir, elle est allée chez lui pour l’arrêter mais ils ont fini par se disputer.

Kyle est monté dans un taxi pour l’aéroport et Rey l’a suivi dans un autre taxi mais tout à coup…

CRASHHHHH ! Un accident ! Kyle est mort dans cet accident, sous les yeux de Rey. Ça a dû être un choc pour elle. Je comprends maintenant pourquoi elle ne s’entend pas avec son père.

 - Je suis…

 - Ne dis surtout pas que t’es désolé.

 - Ok. Comment te sens-tu ?

 - Je vais bien.

 - Tu dis toujours que tu vas bien.

Parce que je vais vraiment bien.

Si tu le dis.

Pourquoi est-elle comme ça ?

Je ne sais pas pourquoi je n’arrive pas à la cerner parfois. Des fois, elle affirme directement ce qu’elle ressent, pas avec des mots mais ces gestes le montrent ; mais d’autres fois, elle fait le contraire de ce qu’elle pense, par exemple elle sourit d’oreille à oreille quand elle est en colère mais ne sourit jamais quand elle est normale.

 - Viens, on rentre. Je vais mieux.

 - D’accord.

Pendant qu’on était dans la voiture, son téléphone n’arrête pas de sonner mais elle ne répondait pas, je trouve ça bizarre donc je lui demande.

 - Tu ne réponds pas ?

 - Non

 - C’est ton père ?

 - Non. C’est une amie.

 - Ah bon ? Alors pourquoi tu ne réponds pas ?  - Je n’en ai pas envie, j’ai sommeil.

 - Donc je réponds, je pense qu’elle s’inquiète pour toi.

 - Fais comme tu veux.

Je prends son téléphone et je vois le nom « Key » sur l’écran, je décroche et dès que je l’ai fait la fille a parlé folle de rage.

[Honey, tu réponds enfin, où es-tu ? On s’inquiète pour toi. Tu ne nous as donné aucune nouvelle de toi, t’es parti comme ça sans nous dire où est-ce que t’allais.]

Est-ce vraiment une amie ? On dirait plutôt un petit copain jaloux.

- Attends ! Honey ?

 - Excusez-moi mais Rey ne peut pas répondre pour le moment.

[Merde ! Mais t’es qui ? Où est-elle ? Si tu lui as fait quelque chose, je te préviens je te

tue.]

 -Quoi ?

Je me suis retourné vers Rey qui me regardait pendant un moment. Je ris puis je lui dis :

 - Tu entends ça, Rey ? Ta copine va me tuer s’il t’arrivait quelque chose, t’imagines ?

 - Donne ! je vais lui parler… Salut Key !

[Merde ! C’était qui ? ]

 - Un ami

[Un petit ami, tu veux dire.]