chapitre 5 : Premier sang

L'entrepôt désaffecté à la sortie de la ville sentait la rouille, la sueur et la poudre. C’était là que Carlos avait décidé de commencer l’entraînement de Justin. Pas de salle high-tech. Juste du béton, du froid et la vérité nue.

— « Aujourd’hui, tu apprends à te défendre… et à frapper pour survivre, » dit Carlos, lançant des gants à Justin.

Justin les enfila sans mot dire.

— « Tu m’attaques pas ? » demanda-t-il, en reculant d’un pas.

— « Ce serait inutile. »

Carlos le fixa droit dans les yeux.

— « Je vais t’enseigner comment faire mal sans te perdre. »

***

Pendant ce temps, Meghan, silencieuse et calme, observait discrètement Rachel depuis un immeuble voisin. Elle notait tout dans un carnet : les allées et venues, les visages, les horaires.

Bob la rejoignit sans bruit.

— « Tu bosses seule maintenant ? »

— « Je fais ce que vous ne voyez pas. »

— « Tu sais que Justin s’entraîne ? »

— « Oui. Et je sais aussi que Rachel recrute d’anciens mercenaires. Quelque chose se prépare. »

***

Retour à l’entrepôt.

Carlos assène une balayette à Justin, qui tombe lourdement.

— « T’hésites trop. »

— « J’veux pas te faire mal. »

— « Alors tu vas mourir. »

Carlos s’agenouille, le regarde droit dans les yeux.

— « Si tu veux m’aimer, faut aussi apprendre à me survivre. »

Justin reste silencieux. Puis il se relève, plus vite cette fois.

Le combat reprend. Moins hésitant. Plus précis. Et quand Justin le surprend avec un crochet au menton, Carlos sourit.

— « Là, tu commences à exister. »

***

De l’autre côté de la ville, Valentin s'adresse à Rachel, d’un ton agacé.

— « On n’aurait jamais dû les sous-estimer. »

— « On a encore l’avantage. »

— « Mais plus pour longtemps. Meghan bouge dans l’ombre. Bob est introuvable. Et Carlos est amoureux. Ça le rend imprévisible. »

Rachel, posée, allume une cigarette.

— « Justement. Un homme amoureux, c’est un homme qu’on peut faire tomber. »

Elle écrase la cigarette, se tourne vers Valentin.

— « Tu sais ce qu’il te reste à faire. »

***

Fin de la journée. Justin saigne du front, mais il tient debout.

Carlos le regarde, haletant.

— « On continue demain. »

— « Pas besoin. On continue maintenant. »

Un regard entre eux. Plus qu’un défi.

Une promesse.

Et quelque part dans la ville, la guerre se préparait.

Pas entre mafieux.

Entre ceux qui voulaient s’aimer…

…et ceux qui voulaient les briser.

Le vent sifflait dans les rues sombres de la ville. La pluie tombait en fine bruine, comme si le ciel pleurait sur ce qui allait venir. Dans une ruelle derrière un bar louche, Meghan retrouvait Bob.

— « T’as mis longtemps, » dit-elle en essuyant la buée de ses lunettes.

— « Fallait éviter les yeux de Rachel. Elle soupçonne quelque chose. »

— « Elle devrait. » Meghan se redressa, sortant un petit disque dur de sa veste. « J’ai les plans de l’entrepôt. Carlos forme Justin. Et… ils sont proches. »

— « Proches comment ? »

— « Très. Et ça va jouer contre eux. »

***

Pendant ce temps, dans l'appartement de Carlos.

Justin, torse nu, soignait une plaie au flanc. Carlos le regardait, silencieux.

— « T’aurais pu esquiver. »

— « J’ai préféré encaisser pour contre-attaquer. »

— « Mauvais choix. »

Un silence. Puis Justin :

— « Pourquoi tu fais tout ça ? M’enseigner, me garder ici… »

Carlos s’approcha lentement.

— « Parce que j’ai jamais vu un regard comme le tien. Parce que dans ce monde pourri, t’es un peu de lumière. Et peut-être… j’en ai besoin. »