(Point de vue de Sara )
La cafétéria du campus sentait la graisse froide et le faux sourire.
Sara s’assit à une table isolée, dos au mur. Elle ne mangeait pas. Elle ne parlait pas. Elle observait. Toujours.
C’était devenu une forme de survie : regarder les autres pour ne pas avoir à penser à elle-même. Et surtout, pour que personne ne la regarde trop longtemps.
Elle avait l’habitude qu’on la juge. Trop jeune pour l’université. Trop brillante. Trop bizarre.
Mais elle n’en avait rien à foutre.
Ce monde n’avait plus rien à lui offrir qu’elle n’ait déjà vu en pire.
Ses doigts jouaient avec une capsule de jus qu’elle ne buvait pas.
Son regard glissait lentement d’un groupe de garçons bruyants à une fille qui riait trop fort à une blague stupide. Tout ça l’écoeurait.
“Ils vivent comme si rien ne pouvait les toucher. Comme si la douleur n’existait que dans les films.”
Elle, elle savait.
Elle portait la douleur dans la chair.
Mais personne ne la voyait. Pas vraiment.
Elle remit sa manche. Le pansement collait à sa peau.
Elle retourna dans sa chambre plus tôt que prévu.
La journée l’étranglait déjà.
Elle ôta ses vêtements lentement, comme si elle se déshabillait devant un miroir invisible qui l’évaluait.
Sous ses manches, ses bras étaient un champ de silence.
Cicatrices anciennes.
Bandages récents.
Pas de sang aujourd’hui.
Juste ce vide.
Elle s’assit sur son lit, nue, les jambes croisées.
“Tu ressembles à une poupée vivante, c’est ce qu’ils disent.
Mais même les poupées ont des coutures.”
Plus tard dans la soirée, elle croisa Elijah dans le couloir.
Il fumait, adossé au mur, discutait avec un autre mec.
Elle le vit avant qu’il ne la voie. Il riait d’un rire profond, mais mécanique.
Le genre de rire qui sert à cacher qu’il ne ressent plus rien.
Quand leurs regards se croisèrent, c’était une gifle silencieuse.
Il la fixa, juste une seconde de trop.
Pas d’envie. Pas de curiosité. Juste ce truc… ce dédain.
Elle ne détourna pas les yeux.
— Tu comptes continuer à me regarder comme si j’étais une erreur de la nature ? lâcha-t-elle froidement.
Il haussa un sourcil, écrasa sa clope lentement.
— C’est marrant, j’allais te poser la même question. Tu ressembles à un cauchemar ambulant.
Elle sourit. Pas pour lui plaire. Pour lui faire peur.
— Parfait. Comme ça t’as une excuse pour te barrer quand je passe.
Il la détailla. De haut en bas. Sans gêne. Mais sans désir non plus.
— T’es pas aussi effrayante que tu veux le faire croire. Juste... cassée.
Elle ne répondit pas. Elle avait déjà tourné les talons.
Il n’était rien. Et pourtant, il l’irritait comme une écharde dans la peau.
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