Chap 3- Des murs trop fins

Il était presque minuit quand Min Joon ferma enfin la porte de son studio. Le loquet grinça faiblement, comme à chaque fois. L’humidité avait tout envahi — les murs, l’air, jusqu’à son lit qui semblait encore plus froid que la veille.

Il déposa son sac à terre, retira sa veste trempée et se laissa tomber sur le matelas.

Son téléphone vibra.

Pas de message. Juste une alerte inutile.

Il soupira et fixa le plafond taché de moisissure. Les paroles de Jae Ha résonnaient encore dans son crâne.

“Tu m’as regardé.”

“Tu devrais faire attention.”

“Je t’emmènerai.”

Des mots étranges, jetés comme des filets. Min Joon n’était pas idiot. Il avait déjà croisé des hommes qui jouaient avec les silences, qui disaient juste assez pour troubler.

Mais Jae Ha… c’était différent.

Il ne semblait pas jouer.

Il semblait savoir.

Min Joon tourna la tête. De l’autre côté de la cloison, on entendait des gémissements étouffés. Le voisin du 2B ramenait souvent des gens. Des inconnus qu’il baisait sans retenue, en oubliant qu’il y avait des murs. Min Joon ferma les yeux. Il aurait voulu couper le monde, l’éteindre juste une heure.

Mais dans son esprit, ce n’était pas les bruits du voisin qu’il entendait. C’était la voix grave de Jae Ha, basse, trop près.

“Tu ne regardes plus.”

Il frissonna.

Pourquoi ce type s’était-il intéressé à lui ? Il n’avait rien de spécial. Rien d’attrayant. Il n’avait rien du genre de mec qu’un homme comme ça — riche, sûr de lui — pourrait vouloir.

Et pourtant…

Min Joon se leva brusquement. Il alla vers la petite table bancale où il laissait traîner son carnet de notes. Là, glissé entre deux feuilles, il trouva le billet que Jae Ha avait laissé la veille.

Trop d’argent pour un café. Trop d’argent pour lui.

Il aurait dû le refuser. Le rendre. Mais il l’avait gardé. Pourquoi ?

Il ferma les yeux.

Il ne voulait pas s’attacher. Il ne voulait pas espérer.

Mais une partie de lui, silencieuse et affamée, en redemandait déjà.

Le lendemain matin, le réveil sonna trop tôt. Comme toujours.

Min Joon traîna les pieds jusqu’à la minuscule salle de bain, se rinça le visage à l’eau glacée, attrapa un pull trop grand — troué au coude — et quitta son studio sans même prendre de petit déjeuner.

Il ne pensait pas à Jae Ha.

Il se forçait à ne pas y penser.

Mais à chaque reflet de vitre, à chaque ombre sous un parapluie, son regard cherchait inconsciemment cette silhouette sombre et droite.

Arrivé au café, il trouva une enveloppe coincée dans la porte.

Il regarda autour de lui, méfiant, avant de la décacheter.

Aucune adresse. Aucun mot.

Juste un téléphone neuf. Noir. Éteint.

Min Joon resta figé un instant. Le froid lui remonta dans les bras.

C’était Jae Ha. Il le savait. Personne d’autre ne ferait ce genre de chose. Personne d’autre ne l’observerait assez près pour savoir qu’il n’avait même pas les moyens de se racheter un téléphone défectueux.

Il hésita. Longtemps.

Puis il alluma l’appareil.

Un seul contact enregistré : J.H.

Aucun message. Aucun appel. Rien d’autre.

Il rangea le téléphone dans sa poche, les doigts glacés. Le cœur lourd.

_________________________________________

Plus tard dans l’après-midi, alors que le café était désert, la porte s’ouvrit à nouveau.

Cette fois, Jae Ha ne portait pas son manteau. Juste une chemise noire, élégante, dont les boutons du col étaient ouverts. Il avait l’air plus jeune sans ses couches de vêtements sombres. Mais son regard, lui, était toujours aussi fixe.

Il s’avança sans rien dire, jusqu’au comptoir.

— Tu l’as trouvé.

Min Joon hocha la tête.

— C’était pas nécessaire.

— Je décide de ce qui est nécessaire, répondit Jae Ha simplement.

Il posa un billet sur le comptoir, comme la veille.

— Je te paye, non ? C’est toi qui me sers. C’est moi qui décide combien tu vaux.

Min Joon se raidit.

Jae Ha pencha la tête, lisant sa réaction comme un livre ouvert.

— Tu crois que j’essaie de t’acheter ?

— Je sais même pas ce que tu veux, murmura Min Joon.

— Je veux…

Il s’interrompit.

Son regard s’assombrit.

— Je veux que tu me laisses t’avoir. Rien qu’un peu. Juste assez pour respirer.

Min Joon resta sans voix. Il n’avait jamais entendu une déclaration pareille. Ce n’était ni un compliment, ni une menace.

C’était une confession.

Télécharger maintenant

Aimez-vous ce travail ? Téléchargez l'application et vos enregistrements de lecture ne seront pas perdus
Télécharger maintenant

Bien-être

Les nouveaux utilisateurs peuvent télécharger l'application pour débloquer 10 chapitres gratuitement.

Recevoir
NovelToon
Ouvrir la porte d'un autre monde
Veuillez télécharger l'application MangaToon pour plus d'opérations!