Le Poids de l’Humanité

Chapitre 4

La nuit enveloppait la petite maison de bois d’une obscurité silencieuse, seulement troublée par le souffle du vent qui faisait danser les feuilles de bambou à l’extérieur. Xianü était allongée sur la natte, fixant le plafond de bois sombre. Elle avait cru que la fatigue du corps l’emporterait rapidement vers le sommeil, mais l’expérience humaine était bien plus complexe qu’elle ne l’avait imaginé.

Elle ressentait tout.

Le froid qui s’insinuait sous la couverture, le poids étrange de son propre corps, la tension dans ses muscles après une simple journée à marcher comme une mortelle. Mais surtout, elle ressentait ce vide douloureux en elle. L’absence de son essence divine était comme une blessure invisible, une amputation qu’aucune médecine ne pouvait guérir.

À côté du foyer éteint, Liang était assis, sculptant un morceau de bois avec une patience méticuleuse. Il n’avait pas posé plus de questions après leur bref échange, acceptant son silence avec une étonnante résignation. De temps en temps, il levait les yeux vers elle, mais ne disait rien.

Finalement, il posa son couteau et soupira.

— Demain, il faudra que tu m’accompagnes au marché. Si tu veux survivre ici, il va falloir apprendre à te débrouiller.

Xianü détourna le regard. Survivre. Un mot qu’elle n’avait jamais eu à considérer auparavant.

Elle voulait lui répondre, mais les mots lui échappaient encore. Son esprit connaissait la langue des dieux, mais pas celle des mortels. Pourtant, elle devait apprendre. Elle n’avait pas le choix.

Liang observa son hésitation, puis reprit d’une voix plus douce :

— Tu apprendras. Il faut du temps, mais tu apprendras.

Xianü ferma les yeux.

Le lendemain matin, elle fut réveillée par l’odeur du riz chaud et du thé infusé aux herbes. Liang était déjà debout, affairé à préparer leur repas. Elle se redressa difficilement, ses muscles endoloris protestant à chaque mouvement.

— Viens manger, dit-il simplement.

Elle s’assit en face de lui, observant le bol qu’il lui tendait. Les grains de riz semblaient ternes par rapport à la nourriture céleste dont elle se nourrissait autrefois. Pourtant, en prenant la première bouchée, elle sentit une chaleur douce se répandre en elle. Le goût était simple, mais réconfortant.

Liang l’observa du coin de l’œil.

— Tu n’as jamais mangé de riz, pas vrai ?

Elle hésita, puis secoua la tête.

Un sourire amusé effleura ses lèvres, mais il ne posa pas plus de questions.

Après le repas, ils partirent vers le marché du village. La route était longue, bordée de champs où les paysans travaillaient sous le soleil matinal. Xianü marchait lentement, sentant chaque pierre sous ses pieds, chaque souffle de vent sur sa peau. C’était une sensation étrange d’être si vulnérable, de ne plus être portée par l’énergie céleste.

Le village était animé. Des marchands criaient pour attirer les clients, des enfants couraient entre les étals, et l’odeur des épices et des fruits mûrs flottait dans l’air.

Liang l’entraîna à travers la foule, s’arrêtant ici et là pour échanger quelques pièces contre des légumes, du poisson séché et du tissu. Xianü observait tout avec fascination et appréhension. Ce monde était bruyant, vivant, chaotique.

Alors qu’ils s’arrêtaient devant un stand de poteries, une vieille femme s’approcha, plissant les yeux en observant Xianü.

— C’est qui, cette fille ?

Liang se raidit légèrement.

— Une voyageuse. Elle s’est perdue et n’a nulle part où aller.

La femme hocha la tête d’un air sceptique.

— Elle a un drôle d’air. On dirait qu’elle ne sait même pas comment tenir un panier.

Xianü sentit un malaise s’installer en elle. Elle n’avait jamais été jugée de cette façon. Autrefois, elle était vénérée, intouchable. Ici, elle n’était qu’une étrangère.

Liang lui jeta un regard avant de répondre calmement :

— Elle apprend.

La vieille femme haussa un sourcil mais n’insista pas.

Xianü baissa les yeux. Elle comprenait maintenant. Dans ce monde, elle n’était personne. Juste une inconnue perdue, une femme sans passé, sans nom.

Et pour la première fois, elle se demanda si elle pourrait jamais retrouver une place parmi les mortels.

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