Chapitre 3
Xianü sentit le poids de son propre corps s’affaisser contre l’homme qui la soutenait. Chaque pas était une épreuve. Elle, qui avait autrefois flotté parmi les nuages sans effort, devait maintenant lutter contre la gravité et la douleur.
L’homme ne disait rien. Son bras solide l’aidait à avancer à travers les champs, son pas sûr contrastant avec son équilibre vacillant. Il l’emmena jusqu’à une petite maison de bois, modeste mais robuste, nichée près d’un bosquet de bambous. La fumée s’échappait doucement de la cheminée, et l’odeur du bois brûlé se mêlait à celle de la terre humide.
Lorsqu’ils atteignirent le seuil, l’homme poussa la porte et l’invita à entrer. Xianü hésita. Son instinct divin lui soufflait encore qu’elle n’avait pas sa place dans un tel endroit, mais ce n’était plus qu’un murmure lointain. Elle n’était plus une déesse. Elle était humaine.
Elle entra.
L’intérieur était simple. Une table en bois occupait le centre de la pièce, accompagnée de quelques tabourets. Contre le mur, un lit rudimentaire recouvert d’une couverture en lin. Quelques ustensiles de cuisine étaient posés sur une étagère. L’espace était petit, mais l’ambiance y était chaude et accueillante, bien différente de l’austérité glaciale du Tribunal céleste.
L’homme l’aida à s’asseoir sur une natte près du foyer, puis disparut un instant avant de revenir avec un bol d’eau tiède.
— Bois.
Xianü leva les yeux vers lui. Elle ne comprenait pas ses mots, mais elle en saisit le sens dans son regard.
Elle prit le bol avec des mains tremblantes et porta l’eau à ses lèvres. La fraîcheur du liquide lui fit du bien, mais elle but lentement, comme si elle devait s’habituer à cette sensation nouvelle. L’eau n’avait pas le goût des sources célestes, cristallines et douces. Ici, elle était brute, réelle.
L’homme l’observa en silence avant de s’asseoir en face d’elle. Il ne semblait pas pressé de poser des questions, mais sa curiosité transparaissait dans ses yeux.
— D’où viens-tu ? demanda-t-il finalement.
Xianü baissa les yeux.
Elle aurait voulu répondre. Lui dire qu’elle venait des cieux, qu’elle était autrefois une immortelle baignée de lumière, mais que tout cela lui avait été arraché. Lui raconter la grandeur du Royaume céleste, la beauté des palais flottants, la danse des étoiles sous ses pieds.
Mais elle ne pouvait pas.
Alors, elle resta silencieuse.
L’homme soupira légèrement, comme s’il s’attendait à cette réponse.
— Je m’appelle Liang, finit-il par dire.
Xianü releva la tête.
Liang.
C’était un nom simple, terrestre. Rien à voir avec les titres honorifiques et les noms chargés de puissance des dieux. Un nom qui appartenait à ce monde auquel elle devait maintenant faire face.
Elle ouvrit la bouche et tenta de prononcer un mot, un son, mais sa gorge semblait nouée. Sa voix était-elle partie avec son immortalité ? Non… elle sentait qu’elle pouvait parler, mais la langue de ce monde lui était encore inconnue.
Liang la regarda, attendant. Finalement, il hocha simplement la tête.
— Tu es perdue, pas vrai ?
Il ne cherchait pas de réponse, il constatait un fait.
Xianü détourna le regard. Elle était plus que perdue. Elle était seule dans un monde qui n’était pas le sien.
Un silence s’installa, seulement brisé par le crépitement du feu. Puis, Liang se leva.
— Reste ici. Je vais préparer quelque chose.
Il s’éloigna vers la petite cuisine improvisée et commença à faire chauffer de l’eau.
Xianü observa ses gestes. Tout semblait si… lent. Les dieux n’avaient jamais besoin de nourriture, de chaleur, de repos. Mais ici, tout prenait du temps.
Elle baissa les yeux vers ses mains. Elles n’avaient plus leur éclat divin. Plus de lumière sacrée, plus de fluidité céleste. Juste de la peau, froide et fragile.
Un sentiment étrange monta en elle.
Un chagrin profond, silencieux.
Elle était une déchue.
Et elle ne savait pas encore si elle pourrait supporter cette vie mortelle.
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