Chapitre 11 : Des vérités entre amies

Julie se sentait lourdement oppressée par le poids de ses récentes décisions. Elle avait pris la difficile résolution de rester avec Lucas, mais l’ombre d’Adrien planait encore sur son cœur. Elle se sentait piégée entre deux versions d’elle-même : l’une qui aspirait à la sécurité et au confort, et l’autre qui brûlait pour une passion qu’elle n’avait jamais totalement vécue. Face à ces tourments, elle savait qu’elle ne pourrait pas affronter cela seule. Il lui fallait l’avis de quelqu’un de confiance, quelqu’un qui connaissait ses moindres secrets et qui pourrait l’aider à y voir plus clair : Léa.

Depuis leur enfance, Léa et Julie étaient inséparables. Elles avaient partagé leurs premiers émois amoureux, leurs peines, leurs joies et leurs rêves d’adolescentes. Léa, avec son esprit vif et ses remarques toujours piquantes mais justes, était la personne parfaite pour l’aider à décortiquer cette situation complexe.

Ce samedi matin-là, elles se retrouvèrent chez Léa, dans sa chambre bordélique où régnaient un désordre ordonné de vêtements, de magazines, et de collages faits main. C’était un espace qui reflétait parfaitement l’esprit libre et artistique de Léa. Les deux amies s’installèrent sur le lit, entourées de snacks qu’elles grignotaient distraitement tout en discutant. Léa, allongée sur le dos avec les bras croisés derrière sa tête, écoutait attentivement Julie lui raconter chaque détail de sa récente conversation avec Adrien. Le ton de sa voix changeait légèrement quand elle mentionnait Lucas, plus calme, plus réfléchi, mais lorsque le nom d’Adrien revenait, il y avait quelque chose de différent dans son intonation, une étincelle presque palpable.

Léa finit par briser le silence, mâchonnant pensivement une fraise. « Franchement, je ne pensais pas qu’Adrien reviendrait dans ta vie comme ça. Mais bon, d’un côté, tu savais bien que ce genre de choses finit toujours par te rattraper. La vraie question, c’est : qui te fait vraiment vibrer, Julie ? »

Julie soupira longuement, ses épaules s’affaissant comme si toute l’ampleur de son dilemme la submergeait à nouveau. « C’est ça, le problème, Léa… Ils me plaisent tous les deux pour des raisons tellement différentes. Lucas est… il est stable, gentil, mystérieux même. On se comprend sans avoir besoin de trop parler, mais parfois, il y a une sorte de distance entre nous. Et puis, avec Adrien… » Elle marqua une pause, cherchant ses mots. « Avec lui, c’est comme si tout était facile. Tout est si familier, comme si rien n’avait vraiment changé entre nous. »

Léa se redressa alors, croisant les jambes en tailleur sur le lit, son expression plus sérieuse qu’à l’accoutumée. « Tu te rends compte que tu décris deux types de relations complètement opposées, hein ? L’une est confortable, familière, et l’autre, plus excitante, plus incertaine. Mais tu dois te poser une vraie question, Julie : qu’est-ce que tu veux ? Ce que tu désires, pas ce que tu penses devoir choisir. Parce qu’au final, personne ne pourra te dire quel est le bon choix, à part toi. »

Julie acquiesça faiblement. Elle avait l’impression que, depuis des jours, elle entendait cette même vérité : elle seule pouvait décider. Mais comment savoir ce qu’elle voulait réellement quand ses émotions étaient si confuses ? Elle s’enfonça un peu plus dans les oreillers moelleux de Léa, cherchant désespérément un répit face à cette indécision qui la dévorait de l’intérieur.

« Et si jamais tu n’arrives vraiment pas à te décider, » ajouta Léa avec un sourire malicieux, brisant l’intensité du moment, « tu les laisses tous les deux en plan et tu pars faire un road trip avec moi cet été. Je viens d’avoir mon permis, et crois-moi, rien de mieux qu’un voyage sur la route pour oublier tous tes problèmes de cœur ! »

Julie éclata de rire, s’imaginant à bord de la petite voiture rouillée de Léa, sillonnant les routes sans destination précise, avec des playlists débordant de morceaux nostalgiques. Elle connaissait Léa : ce road trip serait probablement l’une des aventures les plus chaotiques et dangereuses de sa vie, mais aussi inoubliable. « Oh, c’est certain que ce serait une sacrée aventure… mais peut-être aussi la plus risquée. »

Léa rit à son tour, se penchant en arrière en attrapant une poignée de chips. « Sérieusement, Julie. Peu importe ce que tu fais, choisis ce qui t’apporte du bonheur, pas du stress. Regarde-les bien : qui te fait sourire sans même que tu t’en rendes compte ? Qui te fait te sentir toi-même, sans jouer un rôle ? Parce qu’au final, c’est ça qui compte, non ? »

Julie réfléchit à ces mots en silence. Léa avait raison, comme toujours. Son choix ne devait pas être basé sur des idées abstraites de ce qui était “correct” ou “convenable”. Ce n’était pas une question de savoir qui était le meilleur pour elle sur le papier, mais de comprendre ce qui la rendait réellement heureuse, même dans les moments de doute et de confusion.

Le temps fila rapidement, entre les conversations légères et les blagues insouciantes que seule Léa savait faire pour détendre l’atmosphère. Julie, un peu plus apaisée, se laissa finalement tomber en arrière sur le lit, regardant le plafond avec un petit sourire. Léa parlait maintenant de son dernier projet artistique, une peinture inspirée par les vieux films des années 60, et Julie se sentait presque transportée loin de ses propres soucis.

Mais elle savait que ce répit était temporaire. La question de Lucas et Adrien reviendrait, plus forte, plus pressante. Elle devait trouver un moyen de se confronter à ses sentiments, de clarifier ce qu’elle ressentait réellement, sans fuir. Mais pour l’instant, elle savoura cet instant avec Léa, son amie fidèle, celle qui, au-delà des conseils, savait toujours lui rappeler l’essentiel : la vie était complexe, mais elle valait la peine d’être vécue, avec ou sans certitudes.

Le départ de Julie

En fin de journée, après des heures passées à discuter et rire, Julie finit par se lever, s’étirant paresseusement avant de ramasser son sac. « Merci, Léa. Pour tout, vraiment. Je crois que j’avais besoin de ça, » dit-elle en souriant.

Léa hocha la tête, son regard toujours espiègle mais plus doux maintenant. « Tu sais bien que je serai toujours là pour toi, même si tu décides de tout plaquer et de t’enfuir sur une île déserte. Je t’apporterai des provisions, promis. »

Julie éclata de rire avant de la prendre dans ses bras. « Je sais, et ça me rassure. Je te tiendrai au courant, quoi qu’il arrive. »

Sur le chemin du retour, la légèreté de l’après-midi avec Léa laissa place à un sentiment d’apaisement mêlé d’incertitude. Julie savait qu’elle ne pouvait plus tergiverser indéfiniment. La conversation avec Adrien, la relation avec Lucas… tout cela pesait sur elle comme un choix impossible, mais inévitable. Mais pour la première fois depuis longtemps, elle se sentit un peu plus prête à affronter ses sentiments. Léa avait raison : il ne s’agissait pas de faire plaisir à quelqu’un d’autre ou de prendre la décision qui semblait la plus « logique ». Il s’agissait de choisir la personne qui faisait briller son monde, celle qui la faisait sourire sans effort.

Et pour cela, il lui restait à écouter son cœur, tout simplement.

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