L’appartement

porte de son immeuble, le cœur battant un peu trop vite. Il avait prié intérieurement pour qu’Elias lâche l’affaire avant d’arriver jusque-là, mais non. Le gars suivait toujours, calme, comme s’il avait été invité.

Dans le hall désert, Adrien se retourna, les clés à la main.

— Bon. C’est là. Merci d’avoir squatté tout le chemin.

— Tu veux que je parte ? demanda Elias.

Adrien inspira.

— C’est toi qui décides pas, normalement ?

Elias esquissa un sourire, puis haussa les épaules.

— Alors décide.

Adrien le fixa quelques secondes. Il aurait dû dire “oui, barre-toi.” Fermer la porte, couper net. Mais les mots ne sortaient pas. Pas parce qu’il avait peur. Pas parce qu’il ne savait pas comment. Juste parce qu’au fond, il n’avait pas envie.

Il tourna la clé dans la serrure, ouvrit la porte, et lâcha :

— Tu rentres pas.

Puis, après une seconde de flottement :

— … sauf si t’as vraiment rien d’autre à foutre.

Elias sourit franchement, pour la première fois de la nuit. Il entra sans attendre.

Adrien ferma la porte derrière lui et déposa ses clés sur la table du couloir. L’appartement était sombre, un deux-pièces mal rangé, avec des livres empilés un peu partout et un vieux canapé qui prenait la moitié du salon. Elias balaya la pièce du regard, comme s’il cherchait à enregistrer chaque détail.

— T’habites seul ? demanda-t-il.

— Ouais.

— Ça se voit.

Adrien arqua un sourcil.

— Ça veut dire quoi, ça ?

— Ça veut dire que personne te dit de ranger.

Adrien lâcha un petit ricanement, malgré lui.

— T’es gonflé pour un invité surprise.

— Je préfère dire… invité toléré.

Adrien secoua la tête, alla chercher deux verres dans la cuisine et posa une bouteille de coca sur la table.

— J’ai que ça.

— Parfait, dit Elias en s’asseyant sur le canapé.

Il s’installa comme s’il était chez lui, détendu, les bras posés sur le dossier. Adrien s’assit à l’autre bout, volontairement loin. Mais la distance ne changeait rien : Elias avait une présence qui remplissait l’espace.

Ils burent quelques gorgées en silence. Puis Elias tourna la tête vers lui.

— T’as remarqué que t’arrêtes pas de dire “non” mais que tu finis toujours par dire “oui” ?

Adrien leva les yeux au ciel.

— T’analyses toujours tout ?

— Seulement quand ça m’intéresse.

Un silence retomba. Mais cette fois, il était lourd. Adrien sentait son cœur cogner contre sa poitrine. Il savait qu’il devait mettre une barrière, dire un truc clair, couper court. Mais il ne bougea pas. Et Elias non plus.

Puis Elias se pencha légèrement, sans quitter son regard. Pas brusque, pas intrusif. Juste assez pour que l’air devienne électrique entre eux.

— Dis-moi de partir, dit-il doucement.

Adrien ouvrit la bouche, mais aucun mot ne sortit. Ses doigts serraient le verre, ses poumons semblaient coincés. Et il comprit, dans ce silence, que la nuit ne s’arrêterait pas là.

Adrien n’avait jamais été du genre à perdre ses moyens devant quelqu’un. Normalement, il gardait toujours le contrôle, le mur froid qui décourageait les autres. Mais Elias avait trouvé une faille, sans forcer, juste en restant là.

Il posa son verre, doucement, comme pour ne pas briser le silence.

— Tu dis rien, donc je suppose que je reste, murmura Elias.

Adrien voulut répliquer, mais Elias s’était déjà rapproché. Pas brutalement, pas avec un geste qu’on pourrait repousser facilement. Plutôt comme une évidence, comme si l’espace entre eux n’avait jamais eu de raison d’exister.

Adrien se raidit, son souffle plus court.

— Tu devrais pas…

— Je devrais pas quoi ?

Leurs visages n’étaient plus qu’à quelques centimètres. Adrien sentait son parfum, un mélange discret, pas étouffant. Rien d’agressif. Et pourtant, tout était trop intense.

— T’approcher, lâcha Adrien dans un souffle.

Elias sourit.

— Alors pousse-moi.

Adrien resta figé. Sa main trembla à peine sur l’accoudoir, comme s’il hésitait à le repousser pour de vrai. Mais il ne le fit pas. Et Elias, patient, attendait, ses yeux plantés dans les siens.

Le silence devint insupportable. Adrien céda. Pas complètement, pas un abandon total, mais juste assez : il laissa ses doigts effleurer la manche d’Elias, comme un aveu maladroit qu’il n’osait pas formuler.

Elias posa sa main sur la sienne, ferme mais pas possessif.

— Voilà, dit-il doucement. Tu vois ? Rien de compliqué.

Adrien ferma les yeux une seconde. Sa tête criait de reculer, de briser ce moment avant qu’il devienne irréversible. Mais son corps, lui, ne bougeait pas.

Elias s’approcha encore, assez pour que leurs souffles se mélangent. Adrien sentit la chaleur de ses lèvres sans qu’elles se touchent encore. Il se surprit à attendre, à désirer. Et ça, c’était ce qui l’effrayait le plus.

— Tu veux ? demanda Elias, la voix basse.

Adrien déglutit. Sa réponse n’eut pas besoin de mots. Il ne recula pas.

Et quand leurs lèvres se rencontrèrent enfin, ce fut d’abord un choc : rapide, maladroit, comme si Adrien voulait tester avant de s’engager. Mais Elias suivit, patient, sans brusquer. La douceur inattendue fit exploser les défenses d’Adrien. Son cœur battait si fort qu’il avait peur que l’autre l’entende.

Il recula brusquement, une seconde après, essoufflé.

— Putain…

Elias le fixa, calme.

— Trop ?

Adrien détourna les yeux.

— Pas assez.

Un silence tendu, puis Elias rit doucement, un rire qui allégea tout d’un coup. Adrien se laissa retomber contre le canapé, la main encore serrée dans la sienne.

Et pour la première fois depuis longtemps, il ne pensa pas à fuir….

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