maëlisa rends visite

Allongée sur mon lit, je fixais mon téléphone, hésitant à appeler ou attendre qu’il le fasse. Il avait dit qu’on allait s’appeler ce soir, mais j’avais plus la même énergie qu’en journée.

J’ai repensé à Brice, à son sourire agaçant et à sa manière de me regarder comme si… comme si j’étais déjà à lui. J’ai secoué la tête.

Concentre-toi, Selya.

Juste à ce moment-là, mon téléphone a vibré.

Kévin appelle.

J’ai pris une grande inspiration avant de décrocher.

— Allô ?

— T’as failli me poser lapin, hein.

J’ai souris légèrement.

— J’avais la tête ailleurs.

— Ouais ? Ailleurs où ?

J’ai senti qu’il me testait.

— Rien d’important.

Il a fait un petit bruit, comme s’il réfléchissait.

— Tu veux me dire quoi par là ?

— Rien du tout.

— T’as rencontré des gens, c’est ça ?

J’ai fermé les yeux. C’est maintenant que ça commence.

— Bien sûr que j’ai rencontré des gens. Je vais pas rester enfermée toute seule.

— Je demande juste, hein. Tu fais ce que tu veux…

Mais son ton disait le contraire.

— Kévin, faut pas commencer.

— Je commence rien. Tu sais quoi, bonne nuit.

Et il a raccroché.

J’ai soufflé longuement en posant mon téléphone sur mon ventre.

Nouvelle ville. Nouveau quartier. Nouveaux amis.

Mais les problèmes d’amour, eux, ils changeaient jamais.

•°•

Je me suis réveillée ce matin-là, un peu en retard comme d’habitude. Mon téléphone vibrait sur la table de nuit, mais j’ai décidé de le laisser. Je n’étais pas pressée de commencer la journée. Je me suis traînée hors du lit, les yeux encore un peu collés, pour aller dans la cuisine.

Ma mère était déjà là, assise à la table, en train de boire son café. Elle m’a saluée d’un geste de la main, sans même lever la tête.

— Bonjour ma chérie, t’as bien dormi ?

— Ouais, ça va…

Je suis allée m’asseoir en face d’elle, et j’ai pris un peu de pain. Le silence est tombé sur la pièce, juste le bruit de la tasse de ma mère qui claque contre la table.

J’ai fini mon petit-déjeuner rapidement, en attendant qu’il se passe quelque chose. Je savais que la journée allait être comme les autres, mais j’avais ce pressentiment que ça allait changer.

En sortant dehors pour prendre un peu d’air, je me suis installée devant la porte de la maison, les bras croisés sur les genoux. Je regardais les passants qui s’activaient, les enfants qui couraient dans la rue. Le quartier était calme ce matin-là.

Et là, je l’ai vue. Maëlisa. Elle venait d’en face, un grand sourire aux lèvres. Elle s’est approchée de moi, et avant même que je ne dise quoi que ce soit, elle m’a dit :

— Selya, ça va ?

— Ah, t’es là ! J’ai souri, surprise mais contente de la voir. Tu viens d’arriver ?

Elle a hoché la tête et s’est assise à côté de moi.

— Ouais, je suis venue te dire bonjour. Tu veux boire un truc ?

Je l’ai regardée un instant avant de secouer la tête.

— Non, c’est bon, je vais bien.

On a commencé à discuter de tout et de rien, des petites choses du quotidien. Puis, en plein milieu de notre conversation, mon téléphone a vibré dans ma poche.

Je l’ai attrapé sans regarder le nom, mais en voyant que c’était Kévin, j’ai froncé les sourcils. Pourquoi il m’appelle maintenant ?

Je me suis levée et j’ai quitté Maëlisa des yeux pour m’éloigner un peu, histoire de ne pas que ce soit trop gênant.

— Allô ?

— Bébé…

Ma voix est restée calme, mais dans ma tête, j’étais déjà en train de réfléchir à ce que j’allais lui dire.

— C’est quoi maintenant ?

— Écoute, je suis désolé pour hier.

J’ai soupiré, un peu agacée.

— Ah, tu t’en rends compte maintenant, hein ?

Il a soupiré de l’autre côté du fil.

— Ouais… Je suis con, je sais. Je t’ai mal parlé, mais c’est parce que je tenais à toi.

J’ai roulé des yeux. Ce genre de conversation me fatiguait.

— T’es sûr que c’est ça ?

Il a pris un ton plus doux.

— Bébé, tu me manques… Je voulais juste te dire que je suis désolé.

J’ai regardé Maëlisa qui était là, en train de me regarder curieusement. J’ai baissé la voix et j’ai dit :

— Ok, c’est bon. T’es pardonné, mais faut pas que ça se reproduise.

Je sentais les yeux de Maëlisa sur moi, mais je n’ai pas osé la regarder.

— Merci, merci, tu sais que je t’aime, hein ?

— Ouais, ouais… C’est ça…

— Tu veux qu’on se voie ce soir ?

— Si je peux, je t’appelle, ok ?

J’ai raccroché, en me retournant vers Maëlisa, qui me fixait toujours. Elle avait un sourire en coin.

— Ah ouais, donc tu es en couple avec ce mec, hein ?

J’ai haussé les épaules, gênée mais j’ai voulu jouer à la cool.

— Ben, on va dire que… J’ai hésité quelques secondes, cherchant mes mots. C’est pas facile avec lui. Tu vois, un "bad boy" du quartier, ça a son lot de complications.

Maëlisa a éclaté de rire, et j’ai levé les yeux au ciel.

— C’est toi qui rigoles ?

Elle a haussé les épaules.

— Non, je rigole pas. C’est juste que… avec lui, c’est pas simple, hein ?

J’ai soupiré.

— Ouais, mais bon, tu sais comment c’est. C’est pas facile d’être avec quelqu’un qui a une vie déjà bien remplie de problèmes.

Elle a secoué la tête, un sourire sur les lèvres.

— Mais alors, tu l’aimes ou pas ?

Je me suis un peu repliée sur moi-même, cherchant à répondre sans trop en dire.

— C’est pas une question de "l’aimer" ou pas… C’est juste que… je sais pas. C’est compliqué. Il est pas comme les autres gars du quartier, tu vois.

Maëlisa a acquiescé, et je pouvais lire dans ses yeux qu’elle comprenait. Mais elle ne m’a pas poussé plus loin.

— C’est chaud, mais je te souhaite de bien t’en sortir avec tout ça.

— Merci.

On est restées là, à discuter de tout et de rien, pendant que mon cœur battait toujours un peu plus fort, me rappelant que cette histoire avec Kévin allait encore être plus compliquée que ce que j’avais prévu.

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