LUNA
La respiration haletante et les yeux plissés, cherchant sans doute à voir quelque chose dans l'obscurité, Luna priait intérieurement pour que rien ne surgisse de l'ombre. La nuit était épaisse, presque palpable, enveloppant la forêt d'un silence oppressant, seulement troublé par le bruissement des feuilles et le souffle du vent. Elle pouvait sentir l'humidité de la terre sous ses pieds, et l'odeur des sous-bois, mélangée à celle de la résine des arbres .
En effet, elle avait été laissée attachée à l'arbre de vie par les anciens de son village. Les souvenirs de ce moment tragique lui revinrent en mémoire avec une clarté douloureuse. Sa mère, avec son visage empreint de désespoir, avait tenté de la sauver, mais les anciens, figés dans leurs croyances, avaient agi sans hésitation. Lorsque sa génitrice avait fait un pas en avant, son cœur battant la chamade, on l'avait retenue. Luna se souvenait de la force avec laquelle ils l'avaient maintenue, les cris de celle-ci résonnant comme un écho lointain. Elle s'était débattue, le désespoir la poussant à vouloir à tout prix sauver sa fille, mais en vain. On l'avait alors assommée pour la tranquilliser, un acte brutal qui avait brisé le dernier lien entre elles.
- Père... mère... murmura-t-elle, ses yeux s'humidifiant de larmes, mon pauvre père. Les souvenirs de son visage souriant, de ses bras réconfortants, lui revenaient en mémoire, mais la douleur de sa perte était insupportable.
Luna ferma les yeux un instant, essayant de repousser la tristesse qui menaçait de l'engloutir. Mais elle n'eut pas le temps de pleurer la mort de son géniteur. Un craquement attira son attention, brisant le silence pesant de la nuit, et son cœur se mit à battre de plus belle. Elle dirigea alors son regard dans la forêt, dans un rythme désordonné, s'attendant à voir la créature mythique dont tout le monde parlait dans son village.
Le bruit se rapprochait, et son imagination s'enflammait. Était-ce la bête aux yeux rouges, celle qui, selon les légendes, se nourrissait de la peur des âmes perdues ? Elle pouvait presque sentir son souffle chaud sur sa peau, comme une promesse de mort. Les ombres dansaient autour d'elle, créant des formes menaçantes qui semblaient vouloir l'avaler.
- Qui est là ? osa-t-elle demander, sa voix tremblante trahissant sa peur. Mais seule la brise lui répondit, chuchotant des secrets oubliés.
Les arbres, immenses et silencieux, semblaient observer, leurs branches tordues se penchant légèrement comme pour écouter. Luna se mit à imaginer des yeux cachés derrière les troncs, des créatures tapies dans l'obscurité, attendant le bon moment pour frapper. Elle se força à respirer lentement, essayant de calmer son esprit tourmenté, mais chaque craquement de branche faisait grimper son anxiété.
Soudain, un autre bruit, plus proche, la fit sursauter. Elle se redressa, tendant l'oreille. C'était un froissement, comme si quelque chose avançait dans les sous-bois. Son cœur battait à tout rompre, et elle se mit à prier, murmurant des mots de protection appris dans son enfance.
- Esprits de la forêt, protégez-moi...
Elle ferma les yeux, espérant que ses prières atteindraient les ancêtres. Mais la peur était là, tangible, et elle rouvrit les yeux, le regard fixé sur l'obscurité. Les ombres semblaient se mouvoir, et une silhouette indistincte apparut, se dessinant lentement dans la pénombre.
- Qui va là ? s'écria-t-elle, sa voix s'élevant avec une force qu'elle ne se connaissait pas.
La silhouette s'arrêta, et un instant, le monde sembla suspendu dans un silence pesant. La brise légère, habituellement apaisante, semblait s'être figée, laissant place à une tension palpable. Luna pouvait sentir son cœur battre dans sa gorge, chaque battement résonnant comme un tambour de guerre, un écho de son angoisse croissante. Ses yeux, grands ouverts, scrutaient l'obscurité, cherchant à percer le mystère qui se cachait dans l'ombre.
Puis, lentement, la créature émergea, se détachant des ténèbres comme un cauchemar prenant forme. Ses yeux brillaient d'un éclat perçant, semblables à des braises ardentes, fixés sur elle avec une intensité déconcertante qui faisait frémir son âme. Luna sentit un frisson glacé parcourir son échine, un instinct primal lui hurlant de fuir.
L'animal avançait avec une grâce redoutable, ses pattes puissantes foulant le sol avec une assurance qui trahissait sa domination sur cet environnement sauvage. Son pelage noir, aussi sombre que la nuit elle-même, semblait absorber toute la lumière, créant une aura de mystère et de danger autour de lui. La créature était à la fois magnifique et terrifiante, un mélange enivrant de beauté sauvage et de menace imminente, comme une tempête prête à s'abattre.
Lorsque l'animal s'approcha plus franchement, Luna prit conscience de la réalité de son existence. Elle se rendit compte que ce n'était pas un simple loup... non, c'était bien plus que cela. Il était trop grand, trop majestueux, trop terrifiant pour n'être qu'un simple prédateur. Un petit cri lui échappa, un son presque inaudible, alors qu'elle aperçut d'autres silhouettes se dessiner derrière lui. Il y avait plusieurs de ses congénères, leurs yeux brillants se fixant sur elle avec la même intensité, avançant à la même cadence, comme une meute unie par un instinct ancestral.
La bête arriva enfin à son niveau, se tenant fièrement en face de l'arbre de vie contre lequel elle avait été attachée. Son cœur cognait contre sa poitrine, résonnant comme un tambour de guerre, tandis qu'elle ressentait le souffle chaud de l'animal qui la reniflait avec curiosité. Puis, dans un mouvement fluide, il baissa le museau au sol. Un craquement résonna dans l'air, et la bête hurla, un cri déchirant qui résonna dans la nuit comme un appel désespéré.
Les muscles puissants du loup se modelaient, se repliant et se redéfinissant sous la peau. La fourrure s'effaçait, laissant place à une peau bronzée, marquée par les épreuves du temps. Les griffes se transformèrent en mains humaines, tandis que le visage bestial se métamorphosait en traits humains, mais gardait une lueur sauvage dans ses yeux. Luna, subjuguée par ce qu'elle voyait, manqua de s'évanouir. L'être qui se tenait devant elle, jadis bête, était devenu un homme d'une prestance incroyable, avec des cheveux longs et ébouriffés qui tombaient sur ses épaules musclées.
Mais elle n'eut pas le temps de se demander si tout cela était bien réel. Une flèche, tirée avec une précision mortelle, manqua de justesse l'homme-loup et se ficha dans le tronc de l'arbre, juste au-dessus de sa tête, faisant vibrer le bois avec un bruit sourd. Les autres bêtes, alertées par l'attaque, se redressèrent, leurs muscles tendus et leurs yeux brillants d'une lueur sauvage. Un grondement sourd s'éleva parmi la meute, un chant de guerre vibrant à travers les feuilles des arbres, comme si la terre elle-même répondait à leur appel.
Surgissant des ténèbres, plusieurs hommes apparurent, leurs silhouettes se découpant dans la nuit. Vêtus de cuir usé par les ans, leurs vêtements portaient les marques d'anciens combats, et des symboles guerriers ornaient leurs poitrines. Leurs visages étaient dissimulés sous des capuchons sombres, mais leurs yeux brillaient d'une détermination froide. Ils tenaient des arbalètes ornées de gravures anciennes, des armes redoutables chargées de carreaux en acier, prêts à tirer.
- Sigurd, on y va ! rugit l'un des hommes, sa voix rauque résonnant comme un écho dans la nuit. Ne les laissons pas s'échapper, pour le clan et pour notre honneur !
Leurs flèches fendirent l'air comme des éclairs, et les loups, enragés, se jetèrent sur les assaillants. Les grognements résonnaient dans la forêt, un cri de guerre qui faisait trembler le sol. Les bêtes, unies dans leur instinct protecteur, se mirent à tourner autour de l'homme-loup, leurs crocs découverts, prêts à défendre leur alpha avec une férocité indomptable.
Dans le tumulte, l'homme-loup se tourna vers Luna, son regard empreint de détermination et de rage. D'un coup de griffe, il trancha les liens qui la retenaient, la libérant ainsi. Puis, sans prévenir, il l'attrapa par le poignet.
- Viens, ne restons pas ici ! dit-il avec une intensité brûlante.
Un énorme loup, le plus grand de la meute, se plaça devant eux, se tenant en défense, ses muscles tendus et son pelage hérissé. Luna fut alors jetée sur son dos, la sensation de la fourrure chaude contre sa peau lui apporta un réconfort fugace. En un clin d'œil, l'homme la rejoignit sur le dos de l'animal, frappant sur la nuque de Luna avec une précision mortelle. L'impact l'assommât , la plongeant dans un sommeil profond, tandis que le chaos de la bataille se déchaînait autour d'elle.
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