CHAPITRE 4 : Les Failles du Mur

Chapitre 4 : Les Failles du Mur

Léna ne dormit presque pas cette nuit-là. Elle avait tourné et retourné dans son lit, les yeux rivés au plafond, le souffle irrégulier. Les mots de Kaël s’étaient incrustés dans sa mémoire comme une cicatrice fraîche : « Tu pourrais être mon alliée, ou ma plus grande menace. »

Elle ne comprenait pas pourquoi ces paroles l’avaient autant troublée. Était-ce parce qu’elles portaient un double sens ? Ou parce qu’en elle, quelque chose—peut-être son cœur—avait déjà choisi une réponse ?

Le lendemain matin, elle arriva plus tôt que d’habitude, dans l’espoir d’éviter Kaël. Peine perdue. Dès qu’elle entra dans le bâtiment, il l’attendait dans le hall, adossé contre la paroi de marbre blanc, son regard fixé sur elle comme s’il l’attendait depuis toujours.

— Vous êtes en avance, dit-il simplement, sans sourire.

— Vous aussi, répondit-elle, le menton légèrement relevé.

Il la fixa quelques secondes, puis tourna les talons.

— Suivez-moi. J’ai quelque chose à vous montrer.

Ils marchèrent en silence jusqu’à un étage auquel elle n’avait encore jamais eu accès. C’était un niveau réservé, invisible sur les ascenseurs normaux, accessible seulement par un badge spécial. Kaël le glissa, les portes s’ouvrirent. Un frisson lui traversa l’échine. Il n’était pas seulement un PDG. Il était quelque chose de plus… ou de moins humain, parfois.

À cet étage, tout était différent. Plus sombre, plus feutré, presque confidentiel. Ils entrèrent dans une pièce aux murs noirs, où trônait un écran géant affichant des chiffres en temps réel, des graphiques, des cartes. Un seul mot clignotait en haut à droite : ARGOS.

— C’est le cœur de NovaCorp, dit Kaël, les bras croisés. Là où tout se joue. Ce que tu fais au quotidien n’est qu’une vitrine. Ici, c’est le pouvoir. Brut.

Léna s’approcha, fascinée. Elle sentait que ce qu’elle voyait dépassait tout ce qu’elle aurait pu imaginer.

— Pourquoi vous me montrez ça ? demanda-t-elle, la voix basse.

Kaël ne répondit pas tout de suite. Il la regardait, ses yeux brillants d’un éclat étrange. Puis il murmura :

— Parce que tu es déjà trop impliquée. Et parce que je n’ai pas envie de te mentir.

Elle cligna des yeux, surprise.

— Depuis quand les gens comme vous disent la vérité ?

Un sourire, cette fois. Léger, amer.

— Depuis qu’ils rencontrent quelqu’un qu’ils ne peuvent pas contrôler.

Un silence suivit. Dense.

Il s’approcha, doucement. La distance entre eux fondait comme neige sous une flamme. Léna sentit son cœur battre à s’en briser les côtes.

— Ce n’était pas prévu, Léna. Ni toi. Ni ce que je ressens.

Elle recula d’un pas. Son souffle se bloqua.

— Je ne suis pas un pion sur votre échiquier, Kaël.

Il hocha la tête, lentement.

— Non. Tu es bien plus que ça. Et c’est ce qui me fait peur.

Ses mots la traversèrent comme une onde. Elle voulait fuir, mais ses pieds refusaient de bouger. Elle était coincée entre raison et instinct, entre prudence et ce feu naissant qu’elle ne comprenait pas encore.

— Alors, que fait-on ? souffla-t-elle.

Kaël s’approcha encore, et cette fois, elle ne recula pas.

— On laisse le destin décider. Mais pas sans combattre.

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