chapitre 0 et 1

...Chapitre 0...

𝑨𝒖 𝒃𝒐𝒓𝒅 𝒅𝒖 𝒈𝒐𝒖𝒇𝒇𝒓𝒆

Debout sur le tarmac, je regarde l'avion à bord duquel je suis censée embarquer en faisant de mon mieux pour ne pas péter les plombs.

Ce qui est plus facile à dire qu'à faire.

Et pas seulement parce que je suis sur le point de laisser ma vie entière derrière moi , ême si c était ma préoccupation majeur il y a encore 2 minutes. Non: dans l'immediat, c'est la vue de ce tas de ferraille déguisé en avion qui me fait paniquer.

-Alors, Grace?

L'homme que mon oncle Finn a envoyé me chercher me gratifie d'un sourire patient. Il s'appelle Philip, il me semble. Je ne suis pas sûre. C'était dur de l'entendre pardessus les battements affolés de mon cœur.

-Parée pour l'aventure ?

Non. Non, je ne suis absolument pas parée... ni pour l'aventure, ni pour quoi que ce soit d'autre.

Si quelqu'un m'avait annocé voilà un mois que je me retrouverais bientôt a l'aeroportde Fairbanks, en Alaska, je lui aurais répondu qu'il etait mal infomé.Et si il avait ajouté que je quitterais cet aeroport à bord du plus petit coucou du monde à destination de l'endroit le plus perdu du continent-en l'occurrence, une ville située au pied du Denali, la plus haute montagne d'Amérique du nord-, je lui aurais carrément ri au nez.

Mais trente jours suffisent à changer une vie. En trente jours, on peut tout perdre.

La seule certitude qui me reste après ces dernières semaines, c'est que même une situation désespérée peut encore empirer.

...ΩΩΩΩΩΩΩΩΩΩΩΩΩΩΩΩ...

...Chapitre 1...

...𝑨𝒕𝒕𝒆𝒓𝒓𝒊𝒓, 𝒄'𝒆𝒔𝒕 𝒔𝒆 𝒋𝒆𝒕𝒆𝒓 𝒂𝒖 𝒔𝒐𝒍 𝒆𝒏 𝒆𝒔𝒑𝒆̄𝒓𝒂𝒏𝒕 𝒏𝒆 𝒑𝒂𝒔 𝒍𝒐𝒖𝒑𝒆𝒓 𝒔𝒐𝒏 𝒄𝒐𝒖𝒑...

-Là-bas ! S'écrie Philip tandis que nous survolons des pics enneigés.

D'une main, il lâche son manche a balai pour m'indiquer des bâtiments dans le lointain.

-Bienvenu à Healy, Alaska !

-waouh ! Cette ville a l'air...

Très petite. Vraiment, vraiment minuscule. Bien moins étendu que mon quartier de San Diego.

Je ne vois pas grand-chose d'ici, cela dit. Non seule-ment la ville est tapie dans l'ombre des montagnes qui la dominent comme autant de titans oubliés, mais en plus on vole dans un genre de pénombre bizarre que Philip s'obs-tine à appeler le crépuscule (alors qu'il est à peine cinq heures).

Néanmoins, si mes yeux ne me trompent pas, cette prétendue ville n'est qu'un amas de bâtiments mal assortis.

-très intéressante, je termine.

Ce n'est pas l'adjectif qui m'est venu d'emblée à l'esprit pour décrire l'endroit (<< enfer glacé » m'avait paru plus approprié), en tout cas, c'est le plus poli. Philip amorce la descente; je me prépare à ajouter un affreux accident

À la longue liste de tout ce qui m'est arrivé d'horrible depuis que j'ai embarqué à bord de mon premier avion (celui de Philip étant le troisième), dix heures plus tôt

Je viens tout juste de repérer ce qui fait office d'aéropor dans cette ville de mille habitants (merci, Google) quand Philip me dir:

La piste est très courte parce que sinon elle serait impossible à dégeler. L'atterrissage va être rapide, alors accroche-toi!

Je n'ai aucune idée de ce qu'est un atterrissage rapide. routefois ca ne m'inspire pas du tout confiance. Il y a une

barre à l'intérieur de la portière de la cabine, prévue pour ce genre de situation. je parie. Je my agrippe de toutes mes forces. Nous perdons de l'altitude.

OK, jeune Alle. Rien ne va plus! s'exclame Philip. et je range sa dans le top 5 des pires phrases à étre jamais sorties de la bouche d'un pilote en plein atterrissage.

La piste fonce à notre rencontre, blanche et dure Je ferme fort les yeux.

Quelques secondes plus tard, le train d'atterrissage rebondit sur le tarmac. Philip freine si brusquement que mon crane aurait explosé sur le tableau de bord si ma ceinture ne m'avait pas retenue. L'avion gémit - je ne sais pas si ça vient d'un endroit en particulier ou si c'est l'appa. reil tour entier qui pousse son chant du cygne. Je m'efforce

de l'ignorer. Voilà qu'on dérape vers la gauche.

Je me mords la lèvre, garde les yeux résolument fermés et essaie d'empêcher mon coeur de bondir hors de ma poitrine. Si c'est la fin, je n'ai aucune envie de la regarder en face.

Je me demande si mes parents ont vu leur mort arriver. Le temps que je chasse cette pensée, l'avion s'arrête en vibrant.

J'ai ma réponse, à présent. Je tremble de tout mon corps. de la racine des cheveux aux orteils.

J'ouvre enfin les yeux. Par politesse, je me retiens de palper mon corps pour vérifier s'il est toujours entier. Philip rit.

J'ai tout fait comme ils disent dans le manuel de pilotage!

Peut-être que son manuel est en fait un roman d'épου-vante? Ou qu'il l'a lu à l'envers?

Sans répondre, je lui offre le plus beau sourire dont je suis capable et attrape le sac à mes pieds pour en sortir la paire de gants qu'Oncle Finn m'a envoyée. Je les enfile. ouvre la porrière et saute à terre en priant pour que mes

genoux supportent mon poids sans broncher. Ils tiennent. Tout juste, mais ils tiennent.

Je reprends mon souffle le temps de serrer mon manteau autour de moi (il doit faire moins quinze). Une fois certaine que je ne risque pas de tomber dans les pommes, je me dirige vers l'arrière de l'avion pour récupérer les trois valises qui contiennent toute ma vie, ou plutôr, ce qu'il en reste.

Ça me fait un choc de les revoir. Bon, le moment est mal choisi pour repenser à ce que j'ai dû laisser derrière moi, ou au fait que des inconnus habitent désormais dans la maison de mon enfance. Après tout, j'ai perdu bien plus que mon matériel à dessin, bien plus que ma batterie ado-rée. Bien plus qu'une maison.

Tant bien que mal, j'empoigne une des trois valises dans la soute et la pose sur le sol. Avant que je puisse prendre la deuxième. Philip soulève les deux autres comme si elles étaient remplies de plumes.

-Viens, Grace. Allons-y avant que tu te transformes en glaçon.

M'indique un parking (même pas un bâtiment un parking) à une centaine de mètres. Je me retiens de grogner. Il fait si froid... Ce n'est plus à cause de la fraук de l'atterrissage que je tremble. Comment font les pr pour vivre ici? C'est surréaliste ce matin, à mon revelle thermomètre affichait vingr degrés.

Ai-je le choix? le saisis ma valise par la poignér n la traîne vers la bande de béton qui constitue sans doute l'aéroport de Healy. On est bien loin des terminaux bondis de San Diego.

Philip me rattrape vite, une valise dans chaque main Alors que je m'apprête à lui dire qu'il peut utiliser les sou lettes, je comprends dès qu'on quitte la piste pourquoi préfère les porter il va de la neige partout, impossible de faire rouler des valises là-dessus.

Malgré mon épais manteau et mes gants en fausse four rure, je suis frigorifiée avant même d'avoir parcouru la moitié du parking. J'ignore comment je suis censée effec tuer la dernière partie du voyage jusqu'à l'internat dom mon oncle est le directeur. Avant que je puisse demander à Philip s'il y a des Uber par ici, une silhouette émerge de derrière un camion et court à ma rencontre.

Je crois que c'est Macy, ma cousine, sans en être cer-raine: elle est emmaillotée des pieds à la tête dans une com binaison protectrice.

Tu es là! s'écrie la pile ambulante de bonnet,

d'écharpes et de manteaux.

Oui c'est bien Macy.

-Je suis là, je confirme tout en me demandant s'il est trop tard pour envisager un placement en famille d'accueil. Ou l'émancipation. Peu importe ce qui me permettrait de rester à San Diego, ça doit valoir mieux que de vivre dans une ville dont l'aéroport consiste en une unique piste

et un minuscule parking. Hesther va hurler quand je lui raconterai

Enfin ajoute Macy. -

Elle tente de m'enlacer, ce qui est un peu compliqué comme mantœuvre vu qu'elle porte trois mille couches de vêtements. En plus, même si elle a seize ans et moi dix-sept. elle fait une tête de plus que mol.

-Ça fait plus d'une heure que j'attends!

Je la serre contre moi.

-Désolée, mon avion a cu du retard à Seattle. Une

tempête nous empéchait de décoller.

Elle grimace.

Quais, ça arrive souvent. La météo là-bas est encore

pire que la nôtre !

J'ai envie de protester ici, tout est enfoui sous des kilomètres de neige et les gens portent des combinaisons prorectrices qu'envieraient les astronautes. Mais je ne connais pas très bien ma cousine et je ne veux surtour pas la vexer. À part Oncle Finn et Philip, c'est la seule personne qui m'est familière ici.

Ainsi que la seule famille qui me reste.

Je me contente de hausser les épaules,

Ça semble la satisfaire: elle me sourit avant de se tourner vers Philip, qui porte toujours mes valises.

-Merci d'être allé la chercher. Phil! Papa m'a chargée

de te dire qu'il te doit un pack de bière.

-Pas de souci, Mace. J'avais quelques courses à faire

à Fairbanks de toute façon, répond-il avec naturel, comme si effectuer un vol de deux cents kilomètres n'avait rien d'exceptionnel.

De fait, il doit avoir l'habitude, étant donné qu'il vit encerclé par des montagnes enneigées. D'après Wikipedia,

Il n'y a qu'une seule route qui mène à Healy, et elle est pa fois fermée l'hiver.

Ca fair un mois que j'essaie de m'imaginer ce que c'est de vivre comme ça, aussi isolé, le ne vais pas tarder à le savoir - li re apportera vendredi avant le match, acute Macy avant de se tourner vers mol. Papa regrette de te pas avoir pu venir t'accueillir. Grace. Il y a eu une urgence à l'école et personne d'autre ne pouvait s'en occuper. Il m's

demandé de le prévenir dès qu'on arrive. Tinquiète, je souffle.

Qu'est-ce que je pourrais répondre d'autre? De toute facon, depuis que mes parents sont morts, j'ai du mal à accorder de l'importance à ce genre de tracas je m'en fiche qu'on vienne m'accueillir ou pas, tant que l'arrive à desti. nation. Et je m'en fiche de l'endroit où j'habite. Où que ce soit, mes parents ne m'y attendront pas.

Philip nous accompagne jusqu'au bout du parking pose mes valises. Macy l'embrasse ; je lui serre la main.

-Merci d'être venu me chercher.

-Pas de problème, le suis la si t'as besoin de faire un autre trajet!

Il me fait un clin d'oeil avant de retourner vers son avion. On le regarde s'éloigner, puis Macy saisit les poignées des deux valises et les tire à travers le parking. Elle me fait signe de l'imiter et je m'exécute, ignorant la partie de moj qui rève de rattraper Philip sur le tarmac, de remonter dans son minuscule avion et de le supplier de me ramener à Fairbanks. Ou, mieux, à San Diego.

Certe envie s'intensifie quand Macy me demande: As-tu besoin d'aller aux toilettes? Parce qu'il y a encore une bonne heure et demie de trajet avant d'arriver au lycée.

Une heure et demie Ça me paralt impossible: la ville est si petite qu'on pourrait la traverser en quinze minutes de voi cure. Cela dit, pendant notte vol, je n'ai vu aucun bâtiment suffisamment grand pour héberger tout un pensionnat. Peut-être que le lycée n'est pas à Healy même ?

Je me remémore les montagnes et les rivières qui entourent certe ville de toute part où diable ce voyage imerminable va-t-il s'achever? Et où, exactement, Macy voudrait-elle je soulage ma vessie? On est sur un parking. Ça ira, je réponds après une minute.

Le trajet jusqu'ici m'a déjà pris une journée entière, ce qui, en soi, est une épreuve, mais tandis que je tire ma valise dans la pénombre, avec l'air glacial qui me gifle à chaque pas, tout devient surréaliste. Et plus encore quand je vois Macy se diriger vers une motoneige garée sur le parking Ce n'est pas possible. Ça doit être une plaisanterie. Macy

charge mes valises sur le traîneau qui y est fixé et je com prends que non, c'est très sérieux. Je suis bel et bien sur le point de faire un trajet d'une heure et demie à motoneige, dans le noir, en Alaska, alors que, si j'en crois mon télé phone, il fait moins vingt.

-Il ne manque plus que le Grand Méchant Loup pour compléter le tableau. Quoique, à ce stade, cela serait quasi-ment superflu.

Horrifiée, je regarde Macy arrimer mes valises au tral-neau. Je devrais sans doute lui proposer mon aide, sauf que je n'ai aucune idée de la façon de m'y prendre. Étant donné que je n'ai pas la moindre envie que mes dernières posses-sions soient éparpillées à flanc de montagne, mieux vaut laisser faire l'experte.

-Tiens, ça pourrait t'être utile, me dit Macy en ouvrant un sac qui attendait sur le traincau.

Elle fouille dedans pendant quelques instants avant d'en tirer un pantalon de skiet une écharpe en laine. Rose vid tous les deux : c'était ma couleur préférée quand j'étais gamine. Plus maintenant, néanmoins l'anention de Macy me touche Merci, je murmure, en me forcant à sourire,

Après quelques essais infructueux, je parviens à enfiler le pantalon par-dessus mon calecon long et mon pantalon de pyjama molletonné (c'est le seul pantalon molletonné que je possèdel Sur les conscils de mon oncle, le m'étais changée avant d'embarquer à Seattle. Ensuite, j'observe la facon dont Macy a coroulé son écharpe chamarrée autout

de son cou et de son visage, et je fais pareil, C'est plus difficile qu'il n'y parait de parvenir à couvrir mon nez sans que l'étoffe retombe.

Quand j'y parviens enfin, Macy me tend l'un des casques suspendus au guidon de la moto.

Le casque et isolant, donc il te gardera au chaud.on plus de te protéger en cas d'accident, explique-t-elle. Et il y a une visière pour préserver tes yeux du froid.

Mes yeux peuvent geler? je m'caclame en prenant le

casque, traumatisée d'avance. L'écharpe sur mon visage gêne ma respiration,

Non, tes yeux ne vont pas geler, rigole Macy. Mais la visière t'empêchera de larmoyer, ce sera plus confortable

Ah! OK, je dis en rougissant. Je suis bére.

Mais non!

Macy passe un bras sur mes épaules et m'attire à elle.

C'est toujours un choc d'arriver en Alaska. Tout le monde a besoin d'un temps d'adaptation! Tu verras, tu t'y feras très vite.

Bien que j'en doute, je ne réplique pas. Je ne veux pas me montrer désagréable envers Macy qui fait de son mieux pour me faciliter les choses.

- Je suis désolée que tu aies dû venir ici, continue-t-elle. Enfin, je suis ravie que tu sois là! Mais je suis désolée que ce soit à cause de...

Elle laisse la phrase en suspens.

J'ai l'habitude. Depuis des semaines, mes amis et mes profs marchent sur des œufs. Personne n'a envie de dire les mots à voix haute.

Trop épuisée pour sortir Macy d'embarras, j'enfile mon casque et l'attache.

T'es prête ? me demande Macy.

Ma réponse est la même que quand Philip m'a posé la question à Fairbanks. Non. Pas du tout.

Quais. Parée.

J'attends que Macy s'installe avant de grimper derrière elle.

Tiens-toi à ma taille, crie-t-elle en démarrant.

Je l'agrippe fort. Deux secondes plus tard, nous filons dans l'obscurité qui s'étend à l'infini devant nous.

Je n'ai jamais eu aussi peur de ma vie.

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