LA Mémoire Du Vent
Mon père aimait les voyages. Aussi le soleil, avec une préférence pour les pays méditerranéens. Comme il ne voulait pas se séparer de moi, j'ai, dès l'âge de cinq ans, parcouru le monde avec lui.
Mes premières impressions d'enfant reste une féerie de couleurs, des parfums, des chansons. Des rires surtout, car mon père était très gai.
Passionné de la vie,il avait besoin de sortir, de recevoir, de découvrir sans cesse des nouveaux visages et sa séduction lui attirer des Sympathies dont je profitais.
Partout, nous avions des amis, liens éphémères nous valaient, à chaque nouvel an, d'innombrables cartes de vœux.
Rarement nous nous arrêtons plus d'une saison dans un même lieu, mon père ayant un besoin viscérale de changement que sa profession d'écrivain lui permettait de satisfaire.
Partout, lorsque j'eus dix ans, il se crut obligé de me faire faire des études régulières. Avec soin, il choisit parmi les villes qu'il préférait celle qui jugeait capable de le retenir une année entière, se décida pour Madrid et m'inscrivit dans un établissement français.
L'automne se passa bien; Noël, il s'impatientait déjà ; quand vint Pâques, tel un oiseau migrateur soumis à l'appel du printemps, il n'y tint plus. Le lundi de quasimodo, au lieu de me reconduire à l'école, il m'emmena à l'aéroport de barakas, d'où un avion d'iberia nous emporta vers Malte...
Les années suivantes, même scénario. À la rentrée, bardé de Bonnes résolutions, mon père jurait de ne pas bouger avant le prix ; pourtant, je n'ai pu commencer, une seule fois, le troisième trimestre scolaire. Derrière moi, je laissais des compagnes, des professeurs à qui, je croyais être attaché et qui n'étaient bientôt qu'un nom de plus sur mon carnet d'adresses, mais j'étais trop jeune pour ressentir la mélancolie de ces amitiés interrompues.
Au surplus, mon père me suffisait.
Il me gâtait avec outrance et notre vie vagabonde était pour moi un émerveillement perpétuel. Malgré intermittence de mes études, je parvenais à m'instruire. Conscient des lacunes de mon éducation, mon père s'efforçait d'y remédier en me laissant lire tout ce qui me tentait ou en m'entretenant des problèmes qui l'intéressait, sans se rendre compte que ses propres dépassaient parfois ma compréhension.
Je parlais couramment plusieurs langues et, si j'ignorais une grande partie de ce que savaient les enfants de mon âge, sur bien sujet j'en avais appris plus qu'ils n'en apprendraient jamais.
J'allais avoir seize ans lorsque mon père à déclarer que j'étais assez savante pour mettre un terme à ce qu'il appelait, avec quelque exagération « mes études ». Délivré d'une obligation qui pesait, et par un paradoxe bien dans son caractère fantastique, il découvrit alors les charmes d'un domicile permanent et loua à Rome un appartement proche de la Piazza Novana. Nous voyagions encore, des amitiés suivies. Enfin, j'appartenais à u groupe, une ville, un pays, même si ce n'était pas le mien.
La France, ma patrie, je l'avais quittée à cinq ans, après la mort de ma mère, et je la connaissais à peine. À part des courts séjours à Paris, où mon père allait discuter avec son éditeur, nous n'y étions pas retournés. Il n'avait donné aucune raison de cette exclusive, mais je les devinais. Veuf à trente ans, pour qu'il n'ait pas songé à se remarier, il fallait qu'il eût beaucoup aimé la jeune épouse si tôt disparue. Parce qu'il parlait rarement d'elle, je mesurais combien il restait marqué par sa mort. Je le connaissais assez pour comprendre que c'était d'abord ce qui lui rappelait son bonheur détruit qu'il avait voulu fuir en fuyant son pays et même sa famille.
Il n'avait plus ses parents, il lui restait des oncles, des cousins avec lesquels il n'entretenait aucune relation. Quant à ma famille maternelle, il avait fallu la mort de ma grand mère, survenu lorsque j'avais dix sept ans, pour que j'aie la révélation qu'elle avait vécu jusque-là. je ne m'en étonné ni ne m'en plaignais.
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