C’était une journée ensoleillée, le soleil était à son zénith. La ville s’animait vivement, les bruits incessants des klaxons et le ronronnement des moteurs résonnaient à travers les rues bondées. Puis, le vrombissement caractéristique d’un avion survolant la cité se fit entendre, ajoutant une nouvelle couche sonore à ce paysage urbain. Autour, les immeubles s’élevaient en une forêt de béton et de verre, leurs façades étincelantes captant la lumière éclatante du jour, tandis que des passants pressés parcouraient les trottoirs étroits, défilant entre les boutiques animées, les néons colorés et les enseignes lumineuses qui jalonnaient chaque artère.
Les passants, silhouettes pressées et déterminées, s’entremêlaient dans un ballet effervescent. Certains, aux visages concentrés, filaient d’un pas rapide, absorbés par leurs pensées ou un rendez-vous imminent, tandis que d’autres se laissaient porter par la lenteur des après-midis, échangeant quelques mots complices ou sourires furtifs. L’air vibrait d’une énergie palpable, mêlant la frénésie de la vie urbaine à une certaine sérénité propre aux habitués de ces lieux. Les conversations s’entremêlaient au murmure des pas, tandis que les éclats de rire d’enfants jouant dans un parc voisin apportaient une note de légèreté au tumulte ambiant.
C’est dans ce tableau vivant que se mouvait Fram, vêtu d’un uniforme scolaire léger, chemise blanche aux manches retroussées et pantalon de toile sombre, portant sur le dos un sac usé par le temps. Son casque vissé sur les oreilles diffusait les sons immersifs d’un jeu vidéo, captant toute son attention tandis que ses doigts faisaient glisser les commandes sur l’écran de son téléphone. Le regard rivé sur cet univers virtuel, il semblait presque détaché du brouhaha environnant, perdu dans une autre réalité que seul lui pouvait appréhender.
Fram marchait, le front perlé de sueur et le cœur battant à tout rompre, se répétant avec une pointe d’impatience :
Fram (stressé) : Allez… il ne me reste plus qu’un seul coup, et ce sera terminé !
Concentré sur l’écran, il manœuvrait ses unités avec une précision presque frénétique, cherchant désespérément à renverser le cours d’une bataille déjà compromise.
Mais, malgré ses efforts méticuleux et ses stratégies savamment pensées, le sort en décida autrement. Un assaut fulgurant de l’adversaire balaya ses dernières défenses, et l’écran s’illumina d’un message cruel, accompagné d’une sonnerie stridente :
Jeu : Défaite.
Frustré, Fram laissa échapper un soupir amer, la mâchoire crispée, pleinement conscient que, cette fois encore, la victoire venait de lui échapper. Dans un accès de colère, il poussa un cri bref et involontaire, arrachant quelques regards curieux aux passants. Honteux, il baissa aussitôt les yeux, tentant de se fondre dans la foule, tandis que ses joues se teintaient d’un rouge ardent.
Le tumulte de la ville reprit son cours, indifférent à sa défaite. Fram se redressa lentement, inspira profondément et murmura d’une voix lasse :
Fram : Bon… c’est bon, j’abandonne. J’en ai assez de ce jeu insipide.
Sans plus tarder, il désinstalla ce divertissement virtuel de son téléphone, puis s’engagea dans un bus bondé. Durant le trajet, il fit défiler distraitement la liste de ses applications, comme on feuillette un livre sans y trouver de page intéressante.
Fram : Pff… il y a peut-être un Autre jeu qui pourrait enfin me captiver…
À cet instant, la voix légèrement éraillée du conducteur résonna dans le haut-parleur :
Chauffeur : Mesdames et messieurs, nous arrivons à destination.
Le bus ralentit, s’immobilisa dans un chuintement, et les passagers commencèrent à se lever dans un désordre organisé. Fram rangea son téléphone dans sa poche et se fraya un chemin vers la sortie.
À peine eut-il posé le pied sur le trottoir que ses doigts retrouvèrent l’écran lisse de son appareil, et il se remit à parcourir les catégories de jeux, l’esprit absorbé par cette quête futile.
Fram (pensée) :Voyons… stratégie, fantasy… héros… Ce serait bien d’en trouver un qui change un peu des autres…
Les minutes devinrent des heures. Malgré ses recherches acharnées, aucune application ne parvenait à éveiller son intérêt.
Fram (soupirant) : Ce n’est pas vrai… même pas un seul jeu capable de me distraire…
Il leva les yeux, cherchant une échappatoire au vide qui s’installait en lui. Le ciel, d’un bleu limpide, s’étendait à perte de vue. Un avion le traversait lentement, traînant derrière lui un sillage blanc qui se dissolvait doucement dans l’azur.
C’est alors que son terminal vibra dans sa main, annonçant l’arrivée d’une notification. Une icône qu’il ne se souvenait pas avoir installée attira immédiatement son regard : un blason noir et or, orné d’une couronne et d’une épée entrelacées.
Fram (intrigué) : Qu’est-ce que… ? Un nouveau jeu ?

Sous l’icône inconnue, un titre mystérieux s’affichait : Lords of Valendris. Juste en dessous, un court message en lettres dorées semblait l’inviter :
Plongez dans un monde en guerre… et devenez le maître de son destin.
Fram (intrigué) — « Qu’est-ce que… ? Un nouveau jeu ? »
Sous l’icône inconnue, un titre mystérieux s’affichait : Lords of Valendris.
Juste en dessous, un court message en lettres dorées semblait l’inviter :
Plongez dans un monde en guerre… et devenez le maître de son destin.
Fram : Hmm… étrange. Je ne me souviens pas avoir vu ce jeu quelque part. On dirait qu’il vient tout juste de sortir…
Sans la moindre hésitation, poussé par une curiosité presque instinctive, Fram sélectionna l’option de téléchargement.
À peine l’application fut-elle chargée qu’elle sembla déjà prête à être lancée, comme si elle avait toujours été là, dissimulée dans son appareil, en attente du moment opportun.
Il toucha l’icône pour l’essayer, et aussitôt, l’écran de son terminal s’assombrit brusquement, englouti dans un noir absolu.
Une légère vibration parcourut l’appareil, suivie d’un silence étrange, presque oppressant.
Puis, lentement, des lettres lumineuses émergèrent des ténèbres, comme tracées par une main invisible.
texte : chaînes du destin se brisent…
Les royaumes s’élèvent et s’effondrent…
Un trône attend son héritier perdu.
Marche, voyageur… et que ton nom soit gravé dans l’éternité.
Fram (fronçant les sourcils, à mi-voix) : Mais… qu’est-ce que c’est que ce délire ?
Absorbé par l’étrangeté du message, il ne prêtait plus la moindre attention à son environnement. Ses pas le guidaient machinalement, tandis que son regard demeurait rivé à l’écran, happé par cette application mystérieuse.
À quelques dizaines de mètres, un grondement mécanique monta soudain dans l’air. Sur la chaussée, un véhicule venait de dévier brutalement de sa trajectoire, ses pneus hurlant contre l’asphalte. L’odeur âcre de caoutchouc brûlé se mêla aux cris de surprise des passants qui se dispersaient dans un mouvement de panique.
Fram, inconscient du danger imminent, avançait toujours, l’esprit noyé dans le jeu qui venait de s’ouvrir devant lui. Le véhicule, incontrôlable, s’élança à toute allure, déviant dangereusement de sa voie. Les cris des témoins se firent plus pressants, tandis que le métal rugissant se rapprochait inexorablement de Fram.
Ce dernier, toujours absorbé par l’écran, ne vit rien venir. Ce fut dans un fracas brutal que l’impact survint. Un choc violent le projeta en arrière, le corps heurtant durement le sol. Un silence pesant s’abattit sur la scène, rapidement remplacé par des murmures angoissés et des appels au secours.
Des passants accoururent, tandis que le conducteur, tremblant, descendait précipitamment de son véhicule, les mains trempantes, cherchant à comprendre l’ampleur du drame.
Fram gisait, immobile, le souffle court et les yeux mi-clos, un filet de sang perlant à la commissure de ses lèvres. Sa main, encore crispée sur son téléphone, tremblait faiblement, témoin silencieux de son dernier instant.
Les secours arrivèrent promptement, mais l’espoir s’amenuisait à chaque seconde qui passait. Dans un dernier souffle, un médecin prononça avec gravité :
Le patient n’a pas survécu à ses blessures. Il est décédé sur place.
Le monde de Fram s’éteignit dans ce tumulte, laissant derrière lui un silence chargé de tristesse et d’incompréhension.
Fram percevait encore, comme à travers un brouillard, les clameurs affolées des passants, empreintes de frayeur et d’angoisse. Certains, dans un geste aussi irréfléchi que morbide, immortalisaient la scène à l’aide de leurs téléphones, tandis que d’autres, plus conscients de l’urgence, tentaient fébrilement de joindre les secours.
Fram (agonisant, dans un souffle) :
Qu’est-ce… qu’il s’est passé…? Pourquoi… tous ces gens… autour de moi… Comme… Ah… oui… ça me revient… Un véhicule… m’a… percuté… Quel… idiot… je fais…
Sa voix se brisa. Il toussa faiblement, sentant un goût métallique envahir sa bouche. Ses yeux, déjà voilés, tentèrent de distinguer un visage familier dans la foule… en vain.
Peu à peu, les sons familiers de la vie urbaine se firent plus lointains, comme étouffés derrière un voile épais. Les cris devinrent murmures… puis de simples échos indistincts. Ses paupières, lourdes comme du plomb, se fermèrent malgré lui, et une étrange sensation d’apesanteur l’enveloppa.
Il eut l’impression que le sol se dérobait sous son corps, que son être entier glissait dans un abîme de silence et de lumière diffuse. L’air autour de lui semblait vibrer d’une présence inconnue, tandis qu’une douce chaleur l’attirait vers un ailleurs…
Un parfum subtil, à la fois floral et boisé, remplaça l’odeur âcre de l’asphalte et du sang.
Lorsqu’il rouvrit les yeux, il était allongé sur un sol de pierre polie, baigné par la lumière argentée de la lune qui filtrait à travers de hautes fenêtres ornées de vitraux.
Fram (surpris, chuchotant) :
Où… suis-je ? C’est… ici que se retrouvent les morts…? Drôle… d’endroit…
Son regard, encore embrumé, parcourut lentement la pièce. De lourds rideaux de velours écarlate encadraient les fenêtres. Au centre, un vaste lit à baldaquin trônait, drapé de soieries brodées d’or. Sur un mur, un imposant blason aux armes inconnues était suspendu, et de part et d’autre, des armoires ouvragées de bois sombre témoignaient d’un raffinement certain. Des chandeliers d’argent, encore fumants, diffusaient une lueur douce, tandis qu’un tapis richement orné recouvrait le sol.
Tout, dans cette chambre, respirait la majesté… et le pouvoir.
Fram : « Eh bien… si c’est ainsi que l’on accueille les âmes, cela ressemble davantage à la chambre d’un monarque qu’aux portes de l’au-delà. »
Alors qu’il se redressait lentement, une voix éraillée, lourde de souffrance, fendit le silence comme un murmure venu de l’abîme. Chaque syllabe semblait porter le poids d’un siècle de douleur et de résignation.
Fram tourna la tête vers l’origine du son et aperçut, allongée sur un lit à baldaquin aux draperies pourpres, la silhouette amaigrie d’un vieil homme. Ses traits étaient creusés par l’âge et la maladie, mais dans ses yeux, voilés par la fatigue, persistait une lueur étrange — un éclat mêlant sagesse et désespoir.
— « Approche… jeune étranger… » souffla l’inconnu, sa voix tremblante telle une flamme vacillante sur le point de s’éteindre.
Fram sentit un frisson glacé lui parcourir l’échine. Entre curiosité et méfiance, il obéit, ignorant encore que cet instant scellerait un destin qui le dépasserait.
Fram : « Qui… qui êtes-vous ? Êtes-vous celui qui accueille les âmes et décide de leur sort ? »
Le vieillard esquissa un faible sourire, empreint de lassitude, comme s’il se réjouissait d’une ironie invisible. Sa respiration haletante trahissait l’urgence de ses paroles.
Vieillard : « Non… je ne suis ni juge… ni gardien des morts… Je suis… le dernier roi de ces terres… et voici… mon ultime heure. »
Fram resta immobile, son cœur battant avec une force presque douloureuse. Les mots résonnaient dans son esprit, irréels, absurdes, mais étrangement lourds de sens.
Vieillard : « Écoute-moi attentivement… étranger. Si tu te trouves ici… ce n’est pas le fruit du hasard. Tu as reçu… un message… avant d’arriver en ce lieu. »
Fram : « Un message… ? Mais… de quoi parlez-vous ? »
À cet instant, comme une décharge électrique traversant sa mémoire, il se rappela. Les images lui revinrent brutalement : l’écran de son téléphone, l’icône étrange de l’application qu’il venait d’installer… et ces mots, inscrits en lettres d’or sur un fond sombre :
« Celui qui franchira ce seuil héritera d’un trône… et d’un fardeau. »
Fram : Ah ouais je me souviens, ce message, je l’ai juste avant que j'ai eu l’accident.
Vieux roi mourant (d’une voix brisée, cherchant son souffle) :
C’est exact… et je te présente mes regrets… quant à la manière dont tu es parvenu jusqu’à moi. Ce message… je l’ai scellé d’un ancien enchantement. Quiconque le lit et l’accepte… se voit arraché à son monde et transporté devant son expéditeur. Mais… il n’existe qu’une seule voie pour franchir le seuil… la mort elle-même.
Fram (éberlué, puis la colère montant) :
Attendez… vous voulez dire… que lorsque j’ai accepté… ma mort était déjà scellée ?! Que cet accident… n’était pas le fruit du hasard ?
Vieux roi (fermant un instant les yeux, comme écrasé par le poids de ses propres paroles) :
Hélas… non. Ton trépas n’a pas été une coïncidence, mais le prix exigé pour briser les barrières entre nos mondes. Sans ce sacrifice… jamais ton âme n’aurait pu franchir la frontière invisible.
Fram (la voix tremblante, oscillant entre rage et incompréhension) :
Alors… vous m’avez tué… pour me convoquer ?!
Vieux roi (avec un regard empli à la fois de remords et de gravité) :
Non… je n’ai pas choisi toi… mais le destin, lui, t’a désigné. Mon royaume se meurt, jeune étranger. Et je n’avais qu’un seul moyen de trouver un héritier… avant que mon souffle ne s’éteigne.
Un silence pesant emplit la pièce. Les battements du cœur de Fram résonnent comme des tambours sourds dans sa poitrine. Entre le poids de la révélation et l’étrange solennité du moment, il sent confusément que sa vie — ou ce qu’il en reste — vient de basculer à jamais.
Vieux roi : Comme je te l’ai dit, mon royaume est déchiré par des guerres incessantes, livrées contre des nations avides de domination et prêtes à tout pour étendre leur emprise. Si ce pays tient encore debout aujourd’hui, c’est grâce à la loyauté indéfectible de mes sujets, ainsi qu’au sang précieux versé par ceux qui n’ont pas hésité à sacrifier leur vie pour sa défense.
Sa voix, bien que fragilisée par la maladie, conservait la gravité et l’autorité d’un monarque aguerri. Il marqua une pause, reprenant lentement son souffle, avant de poursuivre d’un ton grave :
Vieux roi : Mais hélas… mes forces s’amenuisent chaque jour, et mes heures sont comptées. Les ennemis se pressent à nos frontières, plus audacieux, plus nombreux, et plus impitoyables que jamais. Si je ne trouve pas un successeur digne de porter cette couronne et d’unir ce peuple meurtri, alors, lorsque mon dernier souffle s’éteindra, ce royaume sombrera inexorablement dans le chaos et l’anarchie.
Ses yeux, lourds mais perçants, se posèrent sur Fram, comme s’ils cherchaient à sonder les tréfonds de son âme, à y déceler une force cachée, une réponse encore insoupçonnée.
Un silence solennel s’installa, chargé d’une attente presque palpable.
Vieux roi : Toi, jeune voyageur… es-tu prêt à endosser ce fardeau, à te dresser face aux tempêtes à venir et à devenir le rempart entre la lumière et les ténèbres ?
Fram, bouleversé, demeura muet, incapable de formuler la moindre réponse. Son esprit tourbillonnait, cherchant en vain des mots adaptés, des pensées claires dans ce tumulte intérieur.
Le vieux roi, comprenant ce silence chargé, tendit doucement la main droite et saisit celle de Fram avec une fermeté pourtant empreinte de douceur.
« Je comprends ton trouble, » murmura-t-il avec bienveillance.
Puis, il glissa dans la paume de Fram un objet froid au toucher : une montre à gousset en argent finement ouvragée. Sur son couvercle, un blason gravé témoignait de l’histoire et de la noblesse du royaume, mêlant épée et couronne en un symbole d’autorité et de sacrifice.
« Voici l’emblème de ton héritage, » déclara le roi d’une voix désormais plus faible. « Cette montre ne mesure pas seulement le temps… elle garde le souvenir de nos ancêtres et rappelle à celui qui la porte la valeur de chaque instant. Porte-la avec honneur, car elle symbolise le fardeau et la lumière du trône que tu es appelé à défendre. »
Fram serra l’objet contre lui, conscient que, malgré son poids, c’était désormais à lui de porter l’avenir d’un royaume tout entier.
Le vieux roi hocha faiblement la tête, le souffle court, mais la détermination intacte dans ses yeux fatigués. Il saisit lentement la main de Fram, comme pour lui transmettre toute la force qui lui restait.
« Écoute-moi bien, Fram… » murmura-t-il d’une voix rauque, presque un souffle. « Ton devoir est clair, mais ô combien périlleux. Ce royaume est déchiré par des conflits sans fin, et seul un leader capable de rallier nos forces pourra inverser le cours de cette guerre. »
Il fit une pause, son regard se perdant un instant dans le vague, comme s’il voyait déjà l’ombre qui s’abattait sur lui.
Vieux roi : Tu devras t’imposer… non seulement par la force de ton épée, mais aussi par la sagesse de tes décisions. Conquiers le respect de tes alliés, déjoue les intrigues de tes ennemis, et surtout, ne laisse jamais vaciller ta volonté, même dans les heures les plus sombres.
Sa main trembla légèrement, et il porta un instant ses doigts à sa poitrine, comme pour apaiser une douleur lancinante.
Vieux roi : Ces terres ont besoin de toi, Fram. Ne les abandonne pas. Ne faiblis pas.
Un dernier souffle rauque franchit ses lèvres, puis ses yeux se fermèrent lentement, et son corps s’abandonna enfin au silence de la mort.
Fram resta immobile, tenant toujours la main désormais froide du roi, le poids de son héritage pesant lourd sur ses épaules, tandis que la chambre semblait s’assombrir autour de lui.
Fram demeurait figé, tenant encore la main désormais glacée du roi, le poids écrasant de l’héritage royal pesant sur ses épaules comme une armure trop lourde. Autour de lui, la chambre semblait se draper d’ombre, comme si la lumière elle-même se retirait en signe de deuil.
Une minute de silence s’écoula, longue et solennelle, chaque battement de cœur résonnant dans sa poitrine tel un glas funèbre. Puis, au-dehors, un vent froid fit frémir les lourdes tentures, portant avec lui le murmure d’un monde qui retenait son souffle.
Soudain, un frappement discret retentit à la porte, brisant l’oppressante immobilité de la pièce. Un instant plus tard, un homme à la chevelure rousse et à la prestance martiale — vêtu d’une tunique sombre brodée d’or et portant à la ceinture un sabre dont le pommeau reflétait les flammes vacillantes des bougies — poussa lentement le battant. Ses traits durs, creusés par les batailles, trahissaient à la fois une loyauté indéfectible et la gravité de l’heure.
— « Votre Altesse… pardonnez-moi de vous déranger à une heure si tardive, mais… »
Il leva les yeux, et ses paroles se figèrent dans sa gorge. Son regard glissa sur la silhouette immobile du roi, puis sur Fram, toujours penché sur lui, les doigts crispés autour de la main inerte.
Un éclat de suspicion traversa ses prunelles, aussitôt suivi d’une tension guerrière. Sa main se porta instinctivement au pommeau de son arme.
— « Qu’avez-vous fait…? » souffla-t-il d’une voix où grondait déjà la menace.
Fram se redressa lentement, le cœur battant à tout rompre, conscient que chaque geste, chaque mot prononcé à cet instant pourrait sceller son destin.
— « A… Attendez, je vous en prie, il y a une terrible méprise… Si… si vous pensez que j’ai mis fin à ses jours, vous… »
— « Silence !! » tonna l’homme en s’avançant d’un pas ferme. « Comment avez-vous franchi la garde et atteint cette chambre ? »
Les bougies vacillaient, projetant sur les murs des ombres dansantes, comme si elles assistaient en silence à la confrontation. Dans le regard du soldat brillait une détermination froide, celle d’un homme prêt à frapper au moindre doute.
— « Écoutez-moi, je vous en supplie… » tenta Fram, la voix tremblante.
Mais l’inconnu demeurait sourd à toute justification. D’une voix plus forte, il lança :
— « Garde ! À moi ! Le roi est mort et l’assassin est ici ! »
Déjà, des bruits de pas résonnaient dans le couloir, lourds et pressants, se rapprochant inexorablement. Fram sentit la peur l’enserrer, mais aussi une étrange colère naître en lui — la certitude que s’il ne survivait pas à cette nuit, tout ce que le roi lui avait confié périrait avec lui.
Il fit un pas en arrière, cherchant une échappatoire, mais le soldat à la chevelure rousse fondit sur lui, le saisissant par l’épaule avec une poigne de fer.
— « Pas un geste de plus ! » gronda-t-il, son souffle brûlant au creux de l’oreille du jeune homme.
La porte principale s’ouvrit à la volée, et une escouade de gardes en armes envahit la chambre.Leurs visages, tendus et fermes, se figèrent en découvrant le corps sans vie du roi… et l’étranger maintenu par le capitaine.
— « Capitaine ! Quels sont vos ordres ? » lança une soldate.
— « Saisissez-le ! Et enfermez-le. Dès demain, il sera jugé. » ordonna sèchement le capitaine en projetant Fram à genoux.
Les lames étincelèrent sous la lumière vacillante des chandelles. Dans un geste désespéré, Fram sortit de sa poche la montre en argent, gravée du blason royal.
— « Regardez ! Le roi me l’a confiée avant de mourir ! C’est la preuve que— »
Mais le capitaine lui arracha violemment l’objet des mains.
— « Cette pièce n’a rien à faire entre celles d’un traître. Vous l’avez volée à Sa Majesté. »
Le claquement sec du couvercle se refermant sur la montre résonna comme une sentence. Sans autre forme de procès, Fram fut entraîné hors de la chambre, ses protestations étouffées par le fracas des bottes sur la pierre. Dans le couloir glacé, l’ombre des barreaux se dessinait déjà sur son avenir.
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