Le nouveau monde
Nous étions le 5 mai 1984, dans la ville de Tauron.
Je regardais la route sans fin qui nous menait vers notre nouveau chez-nous. Mon petit frère, Michael, endormi sur mes genoux, serrait encore son robot préféré contre lui. Exténuée par le déménagement, je m’étais collée à la vitre, bercée par la voix de mes parents qui débattaient gaiement de la meilleure chanson à la radio. Puis je me suis assoupie.
Je fus réveillée par mon père, chantant à tue-tête du Michael Jackson.
J’ai souri. Mon frère n’avait même pas bougé. Je lui caressais doucement les cheveux encore emmêlés par le sommeil.
Lorsque nous sommes arrivés dans la nouvelle ville, tout m’a semblé différent. Les maisons mêlaient un style antique et moderne. Les rues étaient propres, presque trop parfaites. On aurait dit que ni le banditisme ni la criminalité n’existaient ici. Tout semblait... hors du temps.
Mon père a garé la voiture devant une maison contemporaine aux allures anciennes. Façade en bois sombre, contours bruns, porche chaleureux. L’intérieur était déjà meublé, comme si tout avait été pensé longtemps avant notre arrivée.
— Akira, descends les valises et réveille ton frère*, m’a lancé mon père.
Je me suis levée aussitôt, j’ai délicatement déposé la tête de Michael sur le siège arrière, puis je suis sortie ouvrir la malle. Trois de mes valises, deux sacs à lui. Ma mère et mon père ont pris les leurs.
En franchissant le seuil de la porte, une étrange sensation m’a saisie. La chaleur, la douceur, l’air frais… tout respirait la paix.
Je suis montée à l’étage. Trois chambres côte à côte. Sur l’une, il était inscrit : *Akira*.
La porte était d’un bois rosé, et ma chambre semblait m’attendre. Le lit était fait. Il ne manquait plus que moi et mes affaires pour compléter le decore
Ma mère appela Michael, qui monta en courant. Quelques minutes plus tard, son cri de joie résonna à travers la maison. Il avait découvert sa chambre. Spacieuse, colorée, rien que pour lui.
Puis, la sonnette retentit.
Mon père ouvrit, et sa voix s’éleva :
— Les enfants ! Chérie ! Venez voir qui est là !
Je dévalai les escaliers, comme poussée par un élan invisible. Et là, je le vis.
Mon oncle. Celui qu’on appelait ainsi, même si ce n'était que l’ami proche de mon père. Un loup mon père avait pour meilleure ami un loup.Leur amitié prouvait qu’au-delà des races, des peaux, des crocs ou des griffes, un vrai lien pouvait exister
Mon oncle s’installa dans le salon à l’invitation de ma mère. Nous étions tous réunis autour de lui, captivés par ses récits d’aventures. Il nous parla de cette ville, affirmant qu’elle serait une bénédiction pour nous, que la vie ici serait bien meilleure.
Ma mère l’invita à dîner. Nous étions à table, riant, discutant, partageant ce moment simple mais précieux.
— *Akira,* dit-il en me regardant, *demain, c’est ton premier jour à l’école. Tu n’es pas stressée ?*
— Non, tout va bien. Je pense même que je vais vite m’y faire.
Il sourit, puis tourna son regard vers Michael.
— Et toi, petit homme ? Tu viens d’avoir cinq ans. Tu crois que ça ira ?
Michael, les yeux encore collés de sommeil, répondit d’une voix pâteuse :
— Oui. Je vais me faire plein d’amis robotiques.
Nous éclatâmes tous de rire.
Plus tard, mon oncle repartit chez lui. Je fis la vaisselle pendant que mon père regardait la télé, fasciné par les programmes de ce nouveau monde. Il avait l’air heureux, comme si ce déménagement était enfin le début de quelque chose de bien.
Dans ma chambre, je découvris mon uniforme dans l’armoire : simple mais beau. Chemise blanche, haut rayé bleu et rouge, jupe au genou, chaussettes longues et ballerines noires. Il m’allait parfaitement. Je me couchai tôt, l’esprit agité.
Le lendemain, je me réveillai sans réveil. Michael dormait encore. Ma mère préparait le petit déjeuner. Je pris une douche, attachai mes cheveux en queue de cheval, laissant ma frange tomber légèrement sur mes yeux. Pas de parfum, juste moi, naturelle.
À 7h, Michael se leva. Mon oncle nous avait prévenus : le bus passait à 9h. Très différent de notre ancienne ville.
Mon père partait travailler dans une entreprise en tant qu’électricien. Il ne parlait pas beaucoup de son boulot. Peut-être qu’on finirait par déménager à nouveau… Mais j’en doutais. Mon oncle vivait ici.
Le bus arriva. Bleu foncé, avec un logo représentant un loup au pelage blanc et aux yeux verts. Une coïncidence troublante. Je montai. Une forte odeur m’entourait : c’était moi. Personne n’avait l’air d’apprécier l’odeur humaine. Je m’assis au fond, discrète.
À l’arrêt suivant, une fille monta et vint s’asseoir à côté de moi.
— Salut ! Je m’appelle Séraphine. Je suis une semi-humaine vampire. Et toi ? Tu es humaine, non ? Tu sens… fort l’humaine.Son ton était direct, presque amusé.
— Mon frère jumeau s’appelle Kaelen. Si tu veux, je peux t’expliquer quelques règles ici… Mais mieux vaut déjà arriver. Franchement, même moi, je n’ai jamais senti l’humaine comme ça.
L’académie apparut. L’Académie de Luneval. Monumentale, ancienne de plus de 200 000 ans. Fondée par Luptus, un membre de la lignée royale, descendant des loups fondateurs. L’extérieur était ancien, presque mystique. L’intérieur, d’une modernité saisissante.
Alors que je rangeais mes affaires dans mon casier, deux garçons m’interpellèrent.
— Hé toi, c’est toi l’humaine qui sent comme ça ? Tu attires la moitié des élèves !
— Moi c’est Riven, dit-il avec un sourire tordu. Et lui, c’est Lorcan. T’as de la chance de tomber sur nous.
— Dans tes rêves, répondis-je sèchement. Vous êtes cinglés.
Je les ignorai et rejoignis la salle de classe. À la récréation, je me rendis à la cafétéria. Tous les regards se tournèrent vers moi.
— C’est elle, chuchotaient certains.
Je n’aperçus pas Séraphine. Je m’installai seule dans un coin. Une fille s’approcha.
— Salut, je m’appelle Sylva, dit-elle. Je pense que tu devrais aller voir un médecin-traiteur pour masquer ton odeur. Sinon, certains risquent de t’attaquer.
— *M’attaquer ?* Cette ville si calme… pouvait être dangereuse ?
— Oui. Même ici, la loi n’élimine pas tous les risques. La délinquance est présente, même dans un royaume dirigé par les loups. Tu as encore beaucoup à apprendre. Mais si tu veux, je peux t’aider.
Je voulais répondre, mais la cloche retentit à cet instant précis. Je n’eus d’autre choix que de dire à Séraphine, avec un petit sourire :
« Peut-être une prochaine fois. »
Puis, je retournai en classe.
Nous avions cours de dissection lunaire. Je ne savais pas du tout ce que cela signifiait. Je pris place, décidée à écouter attentivement pour mieux comprendre ce nouvel univers. Beaucoup de matières me semblaient inconnues, même si certaines, comme la physique, la chimie ou les mathématiques, me rappelaient un peu mon ancienne école. Pour les loups et autres clans, il y avait des cours spécifiques : aboiement, métamorphose, gestion de clan par aboiement... Pour moi, c’était plutôt les bases et l’histoire des loups.
En entrant, l’enseignant me lança un regard et dit d’un ton sec :
« Tu es humaine. »
Un éclat de rire parcourut la classe comme si c’était une blague. Je le regardai droit dans les yeux.
— Oui, confirma-t-il.
Il me demanda de m’asseoir, puis, au bout de quelques minutes, m’ordonna d’aller m’asseoir au fond car mon odeur dérangeait. Je protestai, disant que c’était discriminant, car je ne voyais pas bien et que ce placement m’empêcherait de suivre correctement.
Finalement, il fit une exception : je restai à ma place habituelle.
Il expliqua alors que la « dissection lunaire » concernait l’étude des phases lunaires et leur influence sur les loups.
Je ne comprenais pas bien, alors je levai la main pour demander des précisions.
Il expliqua :
- La lune de croissant représente la naissance et l’alignement de certains loups.
- La lune semi-croissant correspond à la période de reproduction.
- La pleine lune, période où les loups, surtout les femelles, doivent rester chez eux, car les mâles deviennent très agressifs et peuvent provoquer des combats aux conséquences graves.
- La lune de son, la plus dangereuse, multiplie la force des loups par cent.
Je demandai alors :
« Si cette lune est si dangereuse, pourquoi ne pas enfermer les loups pendant cette période ? »
Un silence s’abattit sur la classe. Certains me regardèrent comme si j’avais proféré un blasphème.
Le professeur répliqua, sévère :
« Vous, les humains, ne comprenez rien. C’est notre mode de vie. Nous avons des règles et des droits que nous respectons. Nous n’allons pas emprisonner des citoyens honnêtes à cause d’une phase lunaire. »
Je me sentis coupable, baissai la tête et m’excusai auprès de tous.
Un élève lança alors :
« Vous croyez qu’on va rester en cage comme des chiens ? Ici, c’est notre monde, pas le vôtre. Retourne chez toi, humain. »
La classe éclata en murmures agressifs, mais le professeur rappela le silence et continua son cours.
Après ça, j’avais raté le bus. Je dus donc rentrer à pied, mais je connaissais le chemin, ce qui me rassura un peu.
L’hiver battait son plein, et beaucoup de passants me regardaient bizarrement.
Je sentis soudain une présence derrière moi. Je me retournai, mais il n’y avait personne. Pourtant, je sentais quelqu’un me suivre. J’accélérai le pas.
Puis, une voix s’adressa à moi :
- Où vas-tu comme ça ? Bonjour ! Tu as besoin de compagnie ? »
Je répondis d’un ton froid et nerveux :
-Non. Lâche-moi. »
L’homme attrapa ma main :
-Et si on allait un peu plus loin, juste toi et moi ? »
Je le repoussai, mais il était fort.
À ce moment, un policier passa et cria :
- Hé toi, lâche-la ! »
Le policier s’approcha, voulut parler, mais se tut en croisant mon regard perçant.
Après une toux gênée, il lança en souriant :
- Tu sens vraiment fort. »
Je ne pus retenir mes larmes.
Il était déjà 19h, j’étais partie à 17h, et mes parents n’étaient pas là. Où pouvaient-ils être ? S’inquiétaient-ils ?
Mes jambes flanchèrent, et je m’effondrai au sol.
Le policier me releva doucement :
- Allez, debout. Où habites-tu ? »
Je répondis :
- Je ne connais pas précisément l’adresse, mais je sais par où rentrer. »
En marchant, mon oncle apparut, courant vers moi, visiblement inquiet.
Il cria :
- Akira ! Akira, c’est toi ? »
En sanglotant, je répondis :
-Oui ! »
Et là, il me prit dans ses bras, soulagé et bouleversé.
Puis nous sommes rentrés. La maison n’était plus très loin.
Mon père, inquiet, faisait les cent pas devant la porte, le regard fixé vers l’horizon. Ma mère essayait de le calmer, tout en gardant elle-même les larmes aux yeux.
Mon petit frère, Michael, était accroupi sous un arbre, en pleurs. Il murmurait mon prénom entre ses sanglots, appelant sa grande sœur.
Quand nous avons franchi le seuil de la porte, tout le monde s’est figé.
Ma mère courut vers moi sans réfléchir, m’enlaçant fort, pleurant sur mon épaule.
Mon père, soulagé, posa sa main sur ma tête, me serra contre lui.
- Je suis désolé… Je croyais que tu avais pris le bus. J’aurais dû aller te chercher. Je suis désolé, ma fille. »
Je sentais sa voix trembler. Il avait eu peur. Tous avaient eu peur.
Pour apaiser l’atmosphère, nous nous sommes tous installés autour de la cheminée.
Le feu crépitait doucement, jetant une lumière chaude dans la pièce.
Mon oncle prit la parole :
-J’ai remarqué qu’Akira dégage une odeur bien plus forte que la normale, même pour un humain. Ça risque de lui attirer des ennuis, surtout la nuit ou lors de certaines phases lunaires.
Il fit une pause, puis reprit :
-J’ai une solution. Demain, pendant qu’elle sera à l’école, j’irai voir un vieil ami à moi. Il prépare des traitements naturels. J’en ramènerai une fiole. Elle permettra d’atténuer son odeur… Mais vous devrez me prévenir à chaque fois qu’elle s’estompe. Je ne peux en obtenir qu’un petit peu à la fois. Il faut aussi surveiller attentivement l’effet, car cette odeur peut être interprétée comme un signal de chaleur par certains loups… et cela pourrait la mettre en danger. »
Ma tête était posée sur les genoux de mon père. Il me caressait les cheveux pour m’apaiser, murmurant des paroles douces.
Mon oncle se leva. Il allait partir, mais ma mère l’invita à rester dîner.
Il sourit et lança en plaisantant :
-Franchement, si tu n’étais pas mariée à mon frère, je t’aurais sûrement épousée. »
On a tous éclaté de rire. Il était devenu bien plus qu’un oncle ou un ami de la famille. C’était comme un frère pour nous tous.
Après le repas, je suis montée dans ma chambre, encore bouleversée.
Je me suis déshabillée lentement, puis je suis allée prendre un bain chaud. L’eau m’enveloppa comme un cocon. J’essayais d’effacer les images, les regards, les mots durs…
mais ce n'était que le début
je replongea dans mon bain essayant de m'endormir et d'oublier. c'est entrain chaude enveloppant mon corps frêle me donner l'impression de flotter j'ai envie de disparaître loin de tout ça cette belle maison presque irréel cet académie trop bien cadré seul les étudiants me dérangeait mais je sais que Séraphine et Sylva sont là pour moi enfin je l'espère de tout cœur
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