La Dixième Flammes
avant que tout brûle
Le ciel saignait lentement ce soir-là, teinté d’un rouge inquiétant.
On disait que lorsque les nuages prenaient cette couleur, les dieux détournaient les yeux.
Dans un petit village caché, entouré de forêts antiques et de barrières magiques, deux enfants vivaient encore dans l’illusion de la paix.
Éléris, 12 ans, l’enfant aux cheveux argenté et au regard trop sage, courait à travers l’herbe humide, suivie de près par son petit frère, Lyren, 8 ans, frêle et joyeux.
Lyren
(essoufflé, riant) T’es trop rapide ! Tu triches, Éléris !
Éléris avant (Eira)
J’ai pas besoin de tricher. Je suis l’aînée, c’est tout.
Ils s’étaient arrêtés près d’un arbre tordu — leur repaire.
Là où les promesses étaient faites, et jamais brisées.
Lyren
(hésitant) Tu crois… que les gens du village disent vrai ? Que t’es différente
Éléris avant (Eira)
(calmement) Oui. Je le sens. Des fois je rêve… d’un feu immense, de chaînes… et de toi. Tu cries, mais je peux pas t’aider.
Lyren
Alors promets-moi que ça arrivera jamais.
Éléris avant (Eira)
(prenant sa main) Je te le promets.
Mais les promesses ne tiennent pas face à la peur.
Ce soir-là, les mages sont venus.
Leur verdict : un sacrifice devait être fait.
Un être portant l’éclat de l’âme céleste devait être offert au Seigneur Sareth, pour sauver le monde.
Et cet être… c’était Lyren.
Éléris avant (Eira)
(enragée) NON ! Prenez-moi à sa place ! Vous n’avez pas le droit !
Maître Sael
(froid) Ton pouvoir est trop dangereux. Si le seigneur noir te corrompt, il n’y aura plus de monde à sauver.
Elle est battue. Enchaînée.
Elle hurle, elle supplie.
Le rituel a lieu.
Lyren meurt.
Éléris s’échappe une nuit plus tard. Elle détruit la moitié du sanctuaire dans sa rage.
Mais il est trop tard.
Alors, les anciens décident de la punir.
Ils ne veulent pas qu’elle survive.
Mais ils veulent faire un exemple.
Une arme cassée est plus utile qu’une légende vengeresse.
On l’attache.
On la bat, longtemps.
On la torture : sorts de douleur, chaînes gravées de runes maudites, lames rituelles.
La pluie tombait. Elle était là, nue, sale, enchaînée contre le vieux pilier du jugement.
Autour d’elle, les torches s’allumaient, les chants anciens résonnaient.
On préparait le feu.
Les regards étaient froids. Ou fuyants. Aucun ne pleurait.
Un vieil homme s’avança. Courbé. Silencieux. Il avait connu ses parents. Il avait vu grandir Éléris. Il n’avait rien dit. Il n’avait pas bougé.
Mais maintenant… leurs regards se croisent.
Éléris avant (Eira)
(voix faible, rauque) Toi… Vieil homme…
Je sais que tu crois encore… au fil des âmes…
Je te demande une chose… Pas pour moi.
Il s’arrête. Tremble. Les gardes ne bougent pas.
Éléris avant (Eira)
Quand mon âme quittera ce monde…
Guidez-la.
Offrez-lui une seconde chance.
Qu’elle garde ses souvenirs… qu’elle ressente tout.
La douleur. La perte. Le feu.
Et…
Qu’elle se souvienne de Lyren.
Un silence déchire l’air.
e vieil homme, sans un mot, incline lentement la tête.
Ses lèvres bougent, inaudibles.
Un sort ancien… oublié… une prière de réincarnation unique.
Une magie interdite.
Le bois craque.
Les chaînes chauffent.
Sa peau brûle.
Ses yeux restent ouverts.
Mais avant de mourir, elle crie une dernière phrase :
Éléris avant (Eira)
(hurlant) Je reviendrai ! Même si les cieux me maudissent !
Je reviendrai, Lyren… et cette fois… JE TIENDRAI MA PROMESSE !”
Son dernier cri déchire les montagnes.
Et le ciel, enfin, pleure.
Et dans les flammes…
une colère
Quelque chose d’ancien. Quelque chose de brisé.
Quelque chose qu’on aurait dû laisser mourir.
Mais qu’ils ont réveillé.
Par peur.
Par haine.
Par erreur.
Celle qui ne dort jamais
Le vent frais s’engouffrait entre les hautes tours de l’Académie Astralis.
Le soleil s’était levé, mais le ciel était encore teinté de brume. Une matinée comme les autres.
Et pourtant, pour Eira Valemir, ce jour n’en serait pas un.
Elle ouvrit les yeux en sursaut.
Sa chambre était baignée de lumière douce, mais son cœur battait comme s’il avait été frappé d’un éclair.
ce rêve.
Des flammes.
Des chaînes.
Et un nom… Lyren.
Toujours ce nom inconnu qui restait sur ses lèvres à son réveil.
Eira Valemir
(chuchotant) Pourquoi est-ce que je pleure ?
Ses doigts effleuraient ses joues mouillées.
Eira Valemir avait toujours été “différente”, même ici, parmi les élèves doués de dons surnaturels.
Ses cheveux argenté blanc tombaient en cascade sur son dos.
Ses yeux mauves brillaient parfois dans l’obscurité, ce qui effrayait certains professeurs.
Elle était brillante… mais instable.
Calme… mais intérieurement agitée.
Ce jour-là, elle devait assister à un cours d’invocation de base.
Mais quelque chose clochait.
Dans les couloirs de l’académie, elle croisa Runa, sa camarade la plus étrange — une fille à la chevelure rose éclatante et aux yeux mauves doux, qui semblait toujours savoir quand quelque chose n’allait pas.
Runa Elorith
Runa (en souriant doucement) Encore un cauchemar ?
Eira Valemir
(surprise) Comment tu… ?
Runa Elorith
Tu n’es pas la seule à porter un feu dans le ventre.
Eira la regarda, bouche entrouverte. Cette phrase… elle l’avait déjà entendue.
Mais où ?
On leur demanda de faire un exercice de visualisation magique :
“Imaginez un souvenir heureux, et donnez-lui une forme magique.”
Tous les élèves s’exécutèrent.
Elle posa sa main sur le cristal devant elle…
Un feu invisible jaillit de ses paumes, sans chaleur, mais lourd comme une colère ancienne.
Le cristal explosa en mille éclats, et tous les autres élèves furent projetés en arrière.
Un silence de mort s’installa.
Professeur Kaelie
(choqué) C’est… c’est impossible. Tu as utilisé une énergie… inconnue.
Eira, elle, respirait difficilement.
Ses yeux étaient redevenus normaux.
Mais au fond d’elle, une voix murmurait :
“Tu te souviens… Tu sais pourquoi tu es là.”
Elle tomba à genoux. Et pour la première fois…
elle vit des cendres autour d’elle.
Le professeur Kaelis tentait de calmer la classe.
Certains élèves pleuraient, d’autres étaient figés, encore couverts de poussière magique.
Mais Eira… était restée là.
À genoux.
Le souffle court.
Ses mains tremblaient encore.
Elle entendait à peine les voix autour d’elle.
Des pas légers.
Un parfum doux, familier.
Et une chaleur qui remplaçait enfin le froid intérieur.
Runa s’accroupit doucement devant elle.
Runa Elorith
(voix basse, douce mais ferme) Tu vas bien ?
Eira leva les yeux. Des larmes dans les siens.
Elle s’attendait à voir de la peur.
Du rejet.
Mais Runa ne bougeait pas.
Runa Elorith
Tu n’as pas à avoir honte de ce que tu es.
Eira Valemir
Je… je ne sais même pas ce que je suis.
Un silence.
Puis Runa sourit, comme si elle savait quelque chose qu’Eira ne savait pas encore.
Runa Elorith
Moi non plus.
Mais… si tu veux, on peut le découvrir ensemble.
Eira fixa cette main tendue.
Elle la saisit.
Et dans ce simple geste, elle sentit…
qu’elle ne serait plus jamais vraiment seule.
Ce qui dort encore
INTÉRIEUR — ORPHELINAT, FIN DE JOURNÉE
Une légère pluie tambourine contre les vitres sales de la chambre. Eira regarde dehors, le menton appuyé contre sa main. Les autres enfants jouent ou crient. Elle, elle reste silencieuse
Ses yeux violets semblent perdus dans quelque chose d’invisible aux autres.
Eira Valemir
(pensée)C’est étrange… pourquoi est-ce que je déteste la pluie ? Je ne me souviens pas de l’avoir aimée. Mais… je ressens quelque chose… comme si… elle m’avait déjà volé quelque chose.
Elle serre ses bras contre elle. Un vertige léger la traverse. Elle cligne des yeux. Une silhouette floue apparaît, l’espace d’un battement de cœur. Un garçon. Il sourit, tend la main.
Voix d’enfant (lointaine, écho étouffé)
— Promets-moi…
Eira Valemir
(à voix basse) Hein ? Qui… ?
Elle se tourne vers la pièce. Personne. Juste les autres, bruyants. Insouciants. Elle regarde sa main, celle que cette silhouette semblait vouloir saisir. Elle la referme lentement, troublée.
EXTÉRIEUR — COUR DE L’ORPHELINAT, PLUS TARD
La pluie a cessé. L’herbe est trempée. Eira est seule, assise au pied d’un vieux cerisier sans fleurs. Elle regarde le ciel, dont les couleurs commencent à virer à l’orange du soir.
Des pensées envahissent lentement son esprit. Des choses qu’elle ne comprend pas encore. Des choses trop lourdes pour une enfant de dix ans.
Eira Valemir
(pensée) Pourquoi j’ai l’impression… de ne pas appartenir ici ? Comme si ce corps n’était pas vraiment le mien… comme si ce nom… n’était pas le bon.
Une main tendue vers elle, puis arrachée.
Elle rouvre les yeux, le souffle court. Le ciel est sombre maintenant. Le vent s’est levé. Elle se relève lentement.
INTÉRIEUR — ORPHELINAT, PLUS TARD DANS LA NUIT
Eira est dans son lit, incapable de dormir. Elle fixe le plafond. Les images tournent dans sa tête, sans fin, comme un film flou. Un nom essaie de remonter à la surface… un nom qui n’est pas le sien.
Eira Valemir
(chuchotement tremblant)…El…e…
Mais rien ne sort. Juste un nœud dans la gorge. Une sensation écrasante de perte. De solitude.
Un silence épais s’installe. Puis un craquement secoue la nuit. Un éclair au loin. Eira se lève d’un bond. Elle ne comprend pas pourquoi mais son corps réagit seul. Elle sort, pieds nus, encore en pyjama.
EXTÉRIEUR — BORD DE LA FORÊT, SOUS L’ORAGE
Elle avance, lentement, tremblante. La pluie est revenue. Mais cette fois, elle ne la déteste pas. Elle la craint.
Le vent murmure quelque chose. Des mots oubliés.
Des lueurs dans les arbres.
Puis, une voix. D’une douceur effrayante. Comme un chant ancien.
Voix inconnue (souffle presque imperceptible) Tu t’es souvenue, un peu…
Eira s’arrête. Le tonnerre éclate. Mais elle reste là, figée. Quelque chose, ou quelqu’un, la regarde. Mais ce n’est pas hostile. C’est ancien.
INTÉRIEUR — MAISON DE RUNA, AU MÊME MOMENT
Runa se redresse dans son lit, lentement. Son regard mauve est inquiet. Pas terrifié. Juste… tendu. Elle regarde la pluie, puis sa main. Elle la serre, ferme les yeux.
Runa Elorith
(pensée) Eira… tu ressens quelque chose, pas vrai ?
Veuillez télécharger l'application MangaToon pour plus d'opérations!