Pdv Noa :
Le bruit des portes qui se ferment derrière moi résonna dans le hall d'entrée de l'Académie Saint-Adrian. Je me tenais là, au milieu de l’immense vestibule en marbre, les yeux écarquillés face à l'opulence qui m'entourait. L'Académie, un bâtiment majestueux, digne d'un palais royal, semblait être une autre réalité, un monde où les règles du simple et du quotidien n'avaient plus de place. Et pourtant, j'étais là, avec mon uniforme trop large, mon sac qui semblait peser une tonne, et ce sentiment d'inadéquation qui me rongeait depuis que j'avais franchi les portes de ce monde réservé aux enfants des plus puissants du pays.
Un orphelin, pauvre, sans nom véritable dans cette société régie par les apparences. J'avais tout quitté derrière moi pour une chance. Une chance d’échapper à la pauvreté, d’avoir une vie meilleure, même si cela signifiait m’installer dans un lieu où je ne serais jamais qu’une anomalie.
Je levai les yeux et croisai le regard des autres élèves qui m'observaient. Leur regard était acéré, plein de curiosité et, dans certains cas, de mépris. L'un d'eux, un jeune homme grand et élégant, aux cheveux soigneusement coiffés, se détacha du groupe et s'approcha de moi.
Evan Delcourt.
Le nom me fit frissonner, même si ce n’était pas la première fois que j’entendais ce prénom. Evan Delcourt n'était pas qu'un simple étudiant ici. Il était le fils du président de la République, un héritier d'une dynastie politique et économique. Son influence était sans égale à l’Académie. Et il s’avançait vers moi, un sourire en coin, comme si j’étais un insecte qu’il s'apprêtait à écraser sous son talon.
— Alors, c’est toi, le petit nouveau, dit-il, sa voix suave et sexy, presque amusée. – Tu penses vraiment avoir ta place ici ? »
Le ton était froid, moqueur, presque prévisible. Evan avait l'habitude d'avoir ce genre de réaction, mais il ne s'attendait pas à ce que je réagisse de cette façon. Loin de baisser les yeux ou de me laisser intimider, je soutiens son regard, sans ciller.
— Je suis ici pour apprendre, répondis-je, la voix calme mais ferme. – Et je compte bien en profiter, même si ça ne vous plaît pas.
Un éclat de surprise traversa ses yeux, mais ce ne fut que l’espace d’un instant. Il fronça légèrement les sourcils avant de se rapprocher un peu plus.
— Tu devrais savoir qu'ici, on ne fait pas ce qu'on veut. Il fit un geste circulaire autour de lui. – Tu n'as aucune idée du genre de monde dans lequel tu viens de mettre les pieds.
Je serrai les poings sous mon manteau, mais je gardai mon calme. Je savais que cet affrontement ne faisait que commencer. Je savais aussi que je n’avais pas le luxe de me laisser faire. L’Académie Saint-Adrian n’était pas un endroit où l'on pouvait se laisser écraser sans riposter. Et même si Evan Delcourt était le fils du président, je n’étais pas du genre à me plier sous la pression des puissants.
— Si vous voulez me faire partir, vous allez devoir en faire beaucoup plus. dis-je d'une voix encore plus basse, mais déterminée.
Le regard d’Evan se durcit. Il y avait quelque chose de dangereux dans cet échange, une promesse silencieuse de guerre. Evan n’était pas du genre à accepter une telle défiance de la part de quelqu’un qu’il considérait comme inférieur. Pourtant, je pouvais sentir qu'il ressentait une étrange fascination pour moi, comme un feu que ni l’argent ni le pouvoir ne semblaient pouvoir éteindre.
—Très bien, On verra jusqu’où tu iras, Noa. Mais tu devrais savoir une chose. À Saint-Adrian, ce n’est pas l’intelligence qui compte. C’est la place que tu occupes. Et tu es bien loin de celle des grands. dit-il d’un ton qui ne laissait aucune place à la discussion.
Il tourna les talons et s’éloigna, laissant un silence pesant derrière lui. Son regard, ancré sur moi, laissait entendre la promesse d’un défi permanent.
Je me tenais là, dans ce monde où il ne me serait pas permis de m’échapper, où chaque faux pas pourrait me perdre. Mais une chose était certaine : je n’avais pas l’intention de céder, quel qu'en soit le prix.
Les jours qui suivirent mon arrivée à l’Académie Saint-Adrian furent marqués par une tension palpable. Chaque mouvement, chaque regard semblait chargé de signification. La guerre silencieuse entre Evan et moi avait commencé, et elle se déployait dans les couloirs dorés de l'école avec une précision froide et inéluctable.
Je n'avais pas l’habitude de me laisser intimider. Ce que j'avais vécu avant d’arriver ici m’avait forgé, m’avait donné une résilience que la majorité des élèves de Saint-Adrian ne pouvait même pas imaginer. Mais la réalité était implacable. Autour de moi, les regards étaient souvent moqueurs, pleins de mépris, et chaque conversation semblait se faire à voix basse dès que j’entrais dans une pièce. Je n’étais pas un élève comme les autres, et je savais qu’il n’y avait aucune place pour les faiblesses dans ce monde.
Le matin, dès que je franchissais les portes de l’Académie, je sentais les regards des autres élèves se poser sur moi. Comme des piranhas affamés scrutant leur proie, prêts à m’attaquer à la moindre occasion. Je pouvais entendre des murmures derrière mon dos, des rires étouffés, mais je les ignorais tous. Pas question de laisser ces petites attaques m’atteindre.
En classe, c'était pire encore. La plupart des étudiants étaient issus de familles riches et influentes, et leur arrogance était palpable. Mais il y en avait un qui se démarquait toujours, que ce soit par sa présence ou par son absence de subtilité : Evan. Il n’avait de cesse de me défier, mais jamais de façon directe. Il agissait dans l’ombre, subtil dans ses attaques, mais toujours aussi froid et calculateur.
Un jour, en cours de littérature, alors que le professeur expliquait un passage de "Les Misérables", Evan choisit de lancer une pique, à peine audible, mais suffisante pour semer la confusion parmi les autres élèves.
— Non, Noa, tu vois, ce n’est pas ce genre de livre qu’il te faut. Tu n’as pas encore l’étoffe pour comprendre des choses aussi profondes.
Le murmure qu’il provoqua fit naître des sourires sur les visages des élèves autour de moi, mais je gardai mon calme. Ce genre de provocation faisait partie du jeu. Si je me laissais faire, je perdais la bataille. Alors, je répondis d’une voix aussi posée que possible.
— Peut-être. Mais la seule façon de savoir, c’est d’essayer, n’est-ce pas ?
Les élèves échangèrent des regards, certains amusés, d'autres déstabilisés. Evan, quant à lui, se contenta de sourire, un sourire plein de supériorité. Il n’avait pas besoin de répondre pour le moment. Il savait qu'il avait planté une graine de doute, et il était patient. Comme un serpent, il attendait le bon moment pour frapper.
Cependant, ce n’était pas qu’une question de guerre psychologique. Ce qui rendait cette situation encore plus délicate, c’était qu’au fond de moi, je sentais que quelque chose d’autre se passait. À chaque interaction, à chaque confrontation, un étrange lien semblait se tisser entre lui et moi. Un lien que je n’arrivais pas à définir, mais qui se faisait de plus en plus fort.
Le soir, après les cours, je me rendais dans la petite bibliothèque de l'école, un endroit calme et presque désert où je pouvais me concentrer sur mes études. J’avais besoin de cette tranquillité pour échapper à l’agitation de ma nouvelle vie. Mais une fois encore, même dans cet espace, Evan me retrouva.
Ce soir-là, alors que je feuilletais un livre sur les grands poètes français, j'entendis des pas derrière moi. Je savais immédiatement qui c’était. L’odeur subtile du parfum d’Evan, sa silhouette élancée, tout cela m'était désormais familier.
— Tu sembles beaucoup lire pour quelqu’un qui n’a pas les moyens de comprendre. Sa voix était une caresse glacée, presque une provocation en elle-même. –Tu te fais des illusions.
Je levai lentement les yeux, sans me laisser démonter par le ton d’Evan.
— Et vous, vous pensez qu’en lisant un livre de plus, vous allez comprendre le monde mieux que quiconque ?
Il n’y eut aucune réponse pendant un moment, juste le silence pesant de la bibliothèque. Puis Evan s’approcha lentement, s’asseyant sur la chaise en face de moi.
— Tu es têtu, dit-il avec un sourire amusé. J’aime ça. Mais sache que ce genre d'attitude te mènera à ta perte ici.
Je croise les bras et répond d’une voix tranquille. — Peut-être. Mais j’aime bien courir ce risque.
Evan me regarda un instant, comme s’il pesait mes mots. Puis il se leva soudainement, l’air presque pensif.
— On verra combien de temps tu tiendras, dit-il finalement, avant de s’éloigner.
Je le regardai partir, un frisson courant sur ma peau. Cette guerre silencieuse était loin d’être terminée, et je savais que les choses allaient devenir bien plus complexes. Il ne s’agissait plus seulement de me défendre. Je devais riposter, et non pas seulement pour ma propre survie. Je devais comprendre ce qui se cachait derrière cette fascination étrange d'Evan, et pourquoi cette bataille, aussi secrète soit-elle, devenait de plus en plus importante pour nous deux.
Les jours passaient, et la routine à l'Académie Saint-Adrian semblait se transformer en un enchaînement mécanique de défis et de confrontations. Pourtant, sous cette surface de normalité, quelque chose de plus insidieux se tramait. Evan, malgré sa position, semblait être celui qui attirait le plus l’attention. Non seulement il avait ce pouvoir naturel qui émanait de lui, mais il savait aussi comment manipuler les autres pour qu'ils l’admirent et le craignent en même temps. Il s’était vite rendu compte que je n'étais pas comme les autres, et qu'aucune de ses petites attaques n’aurait l’effet escompté.
Ce soir-là, alors que je me rendais dans la salle commune, le sentiment que quelque chose allait se passer m'envahit. L’air semblait chargé d’une tension palpable, bien plus que d’habitude. Les discussions s’éteignirent dès que j'entrai, et je pouvais voir les regards furtifs posés sur moi. J'avais pris l’habitude de ne pas prêter attention à ce genre de comportement, mais ce soir, c’était différent. La pièce semblait être un terrain d'observation, un piège invisible tendu autour de moi.
Je fis mine de ne rien remarquer et pris place dans un coin, mon sac posé à mes pieds. Mais tout était devenu plus difficile à ignorer. Le regard insistant d’Evan, un peu plus lointain que d’habitude, me fit tourner la tête. Il était là, dans l'ombre du canapé, avec un groupe de ses amis, son regard ancré dans le mien, comme s’il attendait quelque chose. Une provocation ? Une réaction ?
Il ne fallut pas longtemps pour qu’il s’approche. Avec sa démarche nonchalante et sa posture toujours si assurée, il se planta devant moi, un sourire sarcastique sur les lèvres.
— Tu sembles perdu, Noa. Tu sais, l’Académie peut être un endroit si... solitaire pour ceux qui n’arrivent pas à s’y faire une place. Sa voix était basse, presque chantante, mais il n’y avait rien de gentil dans ses mots.
Je ne répondis pas immédiatement. Il cherchait une réaction, un écart, un faux pas que je pourrais lui offrir pour qu’il puisse me ridiculiser devant les autres. Mais je savais que c'était exactement ce qu'il attendait. Si je lui donnais ce qu'il voulait, il gagnerait.
Il se pencha un peu plus près, et je pouvais sentir son souffle léger sur ma peau.
— Mais ne t’inquiète pas, tu finiras bien par comprendre que ce n’est pas la compétence qui compte ici. C’est l’allégeance. Et tu n’as rien à offrir.
Mon cœur battait plus fort, mais je restai parfaitement immobile, les yeux rivés sur le sol, mes mains serrées contre mes cuisses. Je pouvais presque entendre l'écho des rires qui suivaient ses paroles. Mais je ne bougeai pas, ne réagis pas. Au lieu de ça, je me contente de le regarder, cette fois-ci sans détourner le regard.
Il attendait. Les autres étudiants attendaient. Mais j'avais décidé de jouer à un autre jeu. Le silence. Le silence était une arme que j'avais apprise à manier dans les rues, là où les mots pouvaient blesser, mais où le silence imposait une tension insupportable.
— Tu veux que je m’excuse ? lui demandai-je enfin, ma voix calme, presque mesurée. – C’est ça que tu veux ?
Evan resta silencieux un instant, visiblement déstabilisé. Il n’était pas habitué à être ignoré de cette manière. Ses amis observaient, surpris, comme si la scène venait de prendre un tournant qu’ils n’avaient pas anticipé.
Puis il se redressa, ses traits se durcissant.
— Tu ne sais pas à qui tu t’adresses. Ce genre de jeu, Noa, tu n’es pas prêt pour ça. Son ton était plus froid, plus menaçant.
Je restai là, sans bouger, et quand il tourna les talons pour s’éloigner, je sus que j'avais gagné une petite victoire. Non pas parce qu’il s'était éloigné, mais parce qu’il n’avait pas réussi à me briser. L’ignorer avait été la meilleure réponse.
Cependant, je savais que ce n’était que le début. La guerre silencieuse n’avait fait qu’évoluer vers un nouveau stade, mais je savais aussi qu’à chaque mouvement de sa part, je devais être plus stratégique. Il cherchait à me déstabiliser, à me forcer à réagir, à me pousser à faire une erreur. Mais je ne pouvais pas me permettre de commettre cette erreur. Pas encore.
Le reste de la soirée se déroula dans une relative tranquillité. Mais en me couchant dans mon lit, je sentis le poids de la situation me peser. Evan ne me lâcherait pas. Il continuerait à chercher des failles, des faiblesses à exploiter. Et je devais être prêt à répondre. Parce que je savais qu'il n’était pas seulement là pour me détruire, mais pour me pousser dans mes derniers retranchements.
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