— Tu sais ce que j’aime chez toi ? il a murmuré.

Sa voix s’est glissée dans le silence comme un secret qu’on n’ose pas vraiment dire à voix haute. J’ai tourné légèrement la tête vers lui, mais je n’ai pas répondu. Pas encore. J’aimais ces moments suspendus, quand nos souffles se frôlaient et que le monde semblait oublier de tourner. C'était mon refuge.

— Quoi ? j’ai fini par souffler.

— Quand tu regardes la lune comme si tu la comprenais.

J’ai souri sans le regarder, les yeux levés vers cette lumière tranquille au-dessus de nous.

— Peut-être que je la comprends. Peut-être qu’on se ressemble, elle et moi.

— Comment ça ?

— On brille mieux quand personne ne nous regarde.

Il a ri doucement, ce petit rire chaud et sincère que je suis probablement la seule à connaître.

— Faux. Tu brilles même quand tu crois que je dors.

J’ai ri à mon tour, doucement. Un rire qui ne dérangeait ni la nuit, ni le silence. Juste lui et moi, ici, là où rien ne pouvait nous déranger.

— Tu te souviens quand tu m’as dit que je te faisais penser au clair de lune ?

— Bien sûr que je m’en souviens.

— Tu veux me dire pourquoi, cette fois ?

Il s’est tourné vers moi. Et son regard m’a touchée plus que ses mots.

— Parce que même dans tes silences, il y a de la lumière. Tu dis peu, mais tu dis juste. Et parce que t’oublier, ce serait comme oublier que la lune existe. On peut essayer de l’ignorer, mais elle finit toujours par manquer.

Je l’ai regardé un instant sans rien dire. Il avait cette façon de me parler, comme s’il me connaissait mieux que moi-même. Et peut-être que c’était vrai. Peut-être qu’à force de m’aimer, il m’avait comprise.

— Tu rends l’amour compliqué, tu sais ?

— Pourquoi ça ?

— Parce que je suis déjà tombée amoureuse de toi… et toi, t’es encore là à parler de lune.

Il s’est rapproché. Nos mains se sont frôlées, lentement, comme si elles hésitaient à se retrouver malgré l’évidence.

— Je parle de lune parce que j’ai peur. Peur de dire à quel point j’ai besoin de toi. À quel point j’ai peur de te perdre.

J’ai entrelacé mes doigts aux siens. Comme une promesse silencieuse.

— Tu ne me perdras pas. Tant qu’on revient ici… tant qu’on revient à nous.

Il a fermé les yeux. Un souffle. Un battement. Et le monde s’est arrêté.

Ce coin, cet instant, cette nuit… c’était à nous. Hors du temps. Hors des doutes. Et peut-être que tout ça finirait par changer. Peut-être qu’un jour, on se perdrait ou qu’on se tairait trop longtemps. Peut-être.

Mais pas ce soir.

Ce soir, la lune brillait. Et dans ses yeux à lui, je brillais aussi.