La pièce était sombre, seule une lumière faible filtrait à travers les rideaux épais. L’air était lourd, oppressant.
Arista était allongée, incapable de bouger. Son corps était engourdi, brisé.
Il était là, debout, en train de remettre sa chemise.
— T’avais qu’à pas être aussi naïve, lâcha-t-il d’un ton froid.
Sa voix résonna dans la pièce, tranchante comme une lame.
Arista ouvrit la bouche, mais aucun son ne sortit. Les larmes coulaient sur ses joues, brûlantes, silencieuses.
— Je te faisais confiance… murmura-t-elle, sa voix tremblante.
Il la regarda enfin, un sourire cruel étirant ses lèvres.
— Tu croyais quoi ? Que j’étais différent ?
Il s’approcha, s’accroupit à sa hauteur et lui attrapa le menton.
— Oublie-moi, Arista. T’es plus rien maintenant.
Puis il se releva et quitta la pièce.
Arista resta là, seule. Son corps lui faisait mal, mais c’était son cœur qui saignait le plus.
Noir. Silence. Obscurité totale.
•°•
Arista ouvrit brusquement les yeux, haletante. Son souffle était court, son cœur battait à une vitesse incontrôlable.
Elle était dans son bureau.
Ses doigts tremblaient légèrement. Elle porta la main à son visage et sentit l’humidité sur sa peau. Elle pleurait.
Un bruit de pas.
— Madame ?
Elle sursauta et tourna la tête. Alex, l’un de ses collègues, se tenait à l’entrée du bureau, une expression inquiète sur le visage.
— Tout va bien ?
Arista inspira profondément et effaça rapidement ses larmes du bout des doigts. Elle redressa les épaules, ajusta son expression.
— Oui. Juste… une migraine.
Alex la regarda, pas convaincu, mais il hocha lentement la tête.
— Si vous avez besoin de quelque chose…
— Non, c’est bon, merci.
Il hésita encore une seconde, puis sortit du bureau.
Arista ferma les yeux un instant. Ce n’est rien. C’est du passé.
Une légère vibration sur son bureau la ramena à la réalité. Son téléphone clignotait.
Un appel.
Elle décrocha.
— Oui ?
— Madame Arista, le PDG de A&M Entreprises souhaite vous voir immédiatement.
Elle haussa un sourcil. Le PDG ? Pourquoi maintenant ?
— Très bien. J’arrive.
Elle raccrocha et se leva, lissant sa jupe d’un geste automatique.
Une réunion imprévue.
Elle n’avait aucune idée que son passé était sur le point de la rattraper.
•°•
Arista inspira profondément avant de pousser la porte de la salle de réunion. Son regard froid et professionnel balaya la pièce. Elle était directrice maintenant, une femme puissante. Elle ne se laissait plus impressionner.
Au fond de la pièce, un homme était assis, de dos. Il feuilletait un dossier, l’air concentré.
Un des assistants s’approcha d’elle.
— Monsieur Darlon va arriver dans un instant.
Elle hocha la tête et prit place à la table, ajustant ses documents devant elle.
— Madame Arista, ravi de faire votre connaissance.
Cette voix.
Un frisson parcourut son dos.
Arista releva lentement la tête, et son monde s’arrêta.
Evans Darlon.
L’homme qui l’avait détruite. L’homme qui l’avait laissée brisée, humiliée.
L’homme qui, aujourd’hui, lui souriait avec assurance, tendant une main pour la saluer.
Son cœur rata un battement.
L’espace d’un instant, elle revit tout. Son corps paralysé cette nuit-là, sa famille qui l’avait rejetée, les années de lutte, Suniva grandissant sans père.
Mais Evans, lui, ne montrait aucun signe de reconnaissance. Pour lui, elle était une inconnue.
Arista fixa sa main tendue, une seconde trop longue, avant de la serrer brièvement.
— De même, monsieur Darlon.
Sa voix était calme, maîtrisée. Aucun tremblement. Il ne devait rien voir.
Elle s’assit et ouvrit son dossier.
— Nous sommes ici pour discuter du contrat entre nos deux sociétés. J’espère que nous trouverons un terrain d’entente.
Evans hocha la tête, apparemment satisfait de son ton professionnel.
— Bien sûr, nous avons beaucoup à gagner en collaborant.
Arista sourit légèrement.
Il n’a aucune idée de qui je suis. Il ne se souvient même pas.
Un mélange de colère et de dégoût bouillonnait en elle, mais elle le cacha derrière son masque de femme d’affaires.
Ce contrat allait lui donner accès à lui.
Elle n’avait jamais envisagé la vengeance. Jusqu’a maintenant
La salle de réunion était vaste, lumineuse, dominée par une immense table de verre autour de laquelle étaient assis les principaux décideurs des deux entreprises. D’un côté, SunCorp, dirigée par Arista. De l’autre, A&M Entreprises, avec Evans Darlon et son équipe.
Le PDG de A&M, M. Laurent Morel, un homme d’une cinquantaine d’années au regard perçant, prit la parole en premier.
— Merci à tous d’être présents. Nous sommes ici pour finaliser l’accord entre nos deux entreprises. A&M souhaite externaliser une partie de sa production à SunCorp, et nous espérons aboutir à une collaboration mutuellement bénéfique.
Il hocha la tête en direction d’Evans, qui dirigeait la division en charge de ce partenariat.
— Monsieur Darlon, pouvez-vous nous rappeler les points clés ?
Evans ouvrit son dossier et prit la parole avec assurance.
— Bien sûr. Nous avons analysé la proposition de SunCorp et elle répond à nos exigences en termes de qualité et de délais. Cependant, certains points restent à ajuster, notamment sur la gestion des imprévus et la flexibilité des livraisons.
Arista garda son visage impassible. Elle attendait son moment.
Le directeur des opérations de SunCorp, M. Diallo, intervint à son tour.
— Nous avons prévu plusieurs mesures pour garantir une exécution fluide du contrat. Nos usines partenaires fonctionnent en double rotation, et nous avons un stock tampon pour pallier d’éventuels retards.
Evans acquiesça.
— Très bien, mais en cas de force majeure ?
Arista prit enfin la parole.
— Nous avons un protocole spécifique. En cas de problème majeur, nous nous engageons à proposer une alternative sous 48 heures. De plus, nous avons mis en place un fonds de garantie pour absorber d’éventuels surcoûts et maintenir la chaîne d’approvisionnement stable.
Le responsable financier d’A&M, Mme Lefèvre, consulta ses notes avant d’intervenir.
— Parlons chiffres. La proposition initiale prévoit un paiement en trois tranches avec un acompte de 40 %. Nous pouvons aller jusqu’à 45 %, mais pas plus.
Arista croisa ses mains sur la table, prenant une seconde avant de répondre.
— Nous demandons 50 %. Cela nous permettrait d’accélérer la mise en production et de sécuriser l’approvisionnement des matières premières.
Evans eut un léger sourire et secoua la tête.
— 45 %, c’est notre offre finale.
Arista soutint son regard et répliqua calmement.
— 48 %.
Un silence.
M. Morel échangea un regard avec Mme Lefèvre, qui hocha légèrement la tête.
Evans prit la parole.
— 47 %. C’est notre dernière proposition.
Arista laissa planer un instant de réflexion. Puis elle hocha la tête.
— Entendu. 47 %.
Le PDG de A&M sourit.
— Bien, je pense que nous sommes arrivés à un accord. Nos équipes juridiques finaliseront les derniers ajustements et nous signerons officiellement d’ici la fin de la semaine.
Tout le monde acquiesça. Les discussions techniques reprirent brièvement avant que la réunion ne se termine.
Arista rassembla ses documents avec un calme apparent, mais son cœur battait plus vite que d’habitude.
Elle venait de serrer la main d’Evans, comme si rien ne s’était passé.
Mais maintenant qu’elle savait qui il était, une certitude s’imposa à elle.
Il n’allait pas s’en tirer aussi facilement.
Après la réunion avec les responsables, Arista retourna dans son bureau et s'affala sur son fauteuil. La journée avait été longue, mais elle ne pouvait pas se relâcher. Elle ouvrit son ordinateur et continua à travailler sur le dossier de SunCorp, jusqu’à ce qu’une notification de Léana, sa meilleure amie, apparaisse sur son téléphone.
📲 Léana : "J’espère que ta journée s’est bien passée ! Moi, encore une réunion interminable 😩. On se fait un restau ce week-end ?"
📲 Arista : "Encore une réunion ? Tu vas finir par détester ton job 😂. Pour ce week-end, je te confirme demain."
📲 Léana : "Ne commence pas avec tes ‘je te confirme demain’, je te connais ! 😒😂"
Arista sourit légèrement en lisant les messages. Parler avec Léana lui permettait d'oublier la pression du travail, même si, ce soir, ses pensées étaient ailleurs.
Elle termina son travail, rangea ses affaires et quitta l’immeuble. En descendant au parking, elle déverrouilla sa Mercedes noire et s'installa au volant. Après une trentaine de minutes de route, elle arriva enfin chez elle.
---
Dès qu’elle ouvrit la porte, Suniva se précipita vers elle en riant.
— Maman !!
Arista lâcha son sac et la souleva dans ses bras.
— Ma princesse, tu as été sage aujourd’hui ?
— Euh… oui ? répondit Suniva avec un sourire malicieux.
Arista haussa un sourcil.
— Ce ‘oui’ n’a pas l’air très convaincant…
À ce moment-là, Rya, la nounou, apparut dans l’encadrement de la cuisine, un torchon à la main.
— Bonsoir, madame Arista ! Si elle a été sage ? Hmm… laissez-moi réfléchir.
— Ryaaa, chut ! protesta Suniva en posant ses petites mains sur les hanches.
Rya ignora sa tentative d’intimidation et s’appuya contre le comptoir en souriant.
— Disons que votre fille a décidé d’être une exploratrice aujourd’hui. Elle a transformé le salon en jungle, construit une cabane avec les coussins, et a refusé de ranger en disant que c’était une œuvre d’art.
— C’est pas vrai ! s’exclama Suniva en croisant les bras. J’avais presque fini de ranger quand Rya est arrivée !
— "Presque fini" veut dire que tu avais mis UN coussin en place sur les vingt que tu avais déplacés, c’est ça ? taquina Rya.
Arista éclata de rire et posa Suniva au sol.
— Bon, exploratrice Suniva, est-ce que tu veux bien montrer à maman à quoi ressemble ta "jungle" ?
Suniva sauta d’excitation et prit sa main.
— Viens, maman !!
Arista la suivit jusqu’au salon et découvrit une immense cabane de coussins et de couvertures, avec des peluches en guise d’animaux de la jungle.
— Waouh, c’est impressionnant… murmura-t-elle en essayant de ne pas rire.
— Tu vois ?! Moi, je dis que c’est une œuvre d’art !
Rya, qui les avait rejointes, croisa les bras.
— Ouais… sauf qu’une œuvre d’art, ça ne bloque pas l’accès à la télé et au canapé.
— Pffff, toi aussi, Rya ! Suniva roula des yeux. Tu veux pas nous laisser jouer tranquilles ?
Arista éclata de rire.
— Tu sais quoi, princesse ? Ce soir, c’est moi qui vais t’aider à finir ta cabane !
Les yeux de Suniva brillèrent de joie.
— Vraiiiii ?
— Bien sûr !
Rya posa une main sur sa hanche.
— Eh bien, dans ce cas, je veux voir un vrai château et pas un truc bancal !
— Défi accepté ! déclara Arista en attrapant un coussin.
Ce qui suivit fut une explosion de rires et de folie. Elles construisirent un château encore plus grand, Suniva donnait des ordres en se prenant pour une reine, et Rya s’amusait à critiquer comme une inspectrice de chantiers.
À un moment, Rya attrapa un coussin et, d’un air innocent, le posa au sommet de la structure.
— Parfait ! Maintenant, c’est terminé…
Mais Suniva, malicieuse, lança un coussin en plein sur Rya.
— TRAHISON ! s’écria Rya en riant.
Arista éclata de rire… avant de recevoir un coussin elle aussi.
— Oh, c’est comme ça ?!
Elle riposta, et en quelques secondes, une véritable bataille de coussins éclata. Des rires fusaient de partout, Suniva courait en criant, Rya esquivait habilement, et Arista riait comme elle ne l’avait pas fait depuis longtemps.
Pendant un instant… tout était parfait.
Après une dizaine de minutes, elles tombèrent toutes les trois sur le canapé, épuisées. Suniva était allongée sur sa mère, le souffle court mais un immense sourire aux lèvres.
— C’était la meilleure soirée de ma vie ! déclara-t-elle avec enthousiasme.
Arista caressa tendrement ses cheveux.
— La mienne aussi, ma chérie.
Rya sourit en les regardant.
— Bon, je vais préparer quelque chose à manger avant que la reine Suniva ne décrète qu’on doit encore jouer toute la nuit.
— Trop tard ! s’écria Suniva en riant. Je veux jouer encore !
Arista secoua la tête avec un sourire.
— D’abord, on mange, après tu prends ton bain, et ensuite je te raconte une histoire avant de dormir.
— Mmmm… ok, mais je veux une histoire drôle ce soir !
— D’accord, une histoire drôle.
Suniva sauta du canapé et courut vers la cuisine pendant qu’Arista la regardait avec un sourire attendri.
C’était pour elle qu’elle se battait.
C’était pour elle qu’elle voulait tout réussir.
Pour que jamais elle ne manque d’amour, de protection, ni de bonheur.
**Et personne… absolument personne… ne viendrait détruire leur monde**
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