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ROSE DU DÉSERT : Mon Été

Chapitre 1 : Le voyage vers l'inconnu

Le soleil doré de ce bleu azur semblait m'écraser. Même à travers les vitres de la voiture, je pouvais sentir la chaleur suffocante du désert qui entourait ce nouveau monde où mes parents avaient décidé de m'emmener. Tout dans ce paysage semblait irréel , mais inutilement vaste : des dunes dorées ondulant à perte de vue, comme un océan figé, et ce ciel bleu, immense, sans un seul nuage pour troubler son éclat. C'était pour moi à la fois lumineux et morne. J'avais fermé mon livre depuis un moment. Impossible de me concentrer avec cette lumière éclatante et cette route interminable. Mon père, comme toujours, était absorbé par son GPS, fronçant les sourcils comme si le moindre détour pouvait compromettre notre voyage, la peur de se perdre déjà avant son arrivée. Ma mère, elle, était accrochée à la fenêtre ouverte, le vent chaud faisant danser quelques mèches blondes échappées de son chignon.

« Regarde, Joseph. On s'approche. » Sa voix trahissait une excitation que je ne comprenais pas encore. À quoi bon ? 

Je me suis redressé sur mon siège, un peu à contrecœur. Devant nous, le paysage changeait. Des habitations carrées, toutes blanches, émergeaient des dunes comme des pierres polies par le vent. Une mosquée se dressait au centre, avec son minaret pointant vers le ciel, éclatant sous le soleil qui semblait reigner en tyran ici. 

« C'est impressionnant, non ? » insista ma mère en se tournant vers moi avec un léger sourire excité. 

Je me suis contenté d'un hochement d'épaules. Impressionnant ? Peut-être. Mais aussi intimidant Tout semblait tellement différent de ce que je connaissais. Paris, avec son bruit, ses rues pleines de monde, et ses boutiques, me paraissait à des années-lumière. Ici, tout semblait figé, comme si le temps lui-même s'était arrêté.

Mon père a enfin rompu son silence. « Nous y sommes. » Il avait déjà l'air préoccupé par mille autres choses, comme si la beauté de ce lieu n'avait aucune importance.

Nous avons roulé dans les ruelles étroites du village, et immédiatement, j'ai senti les regards. Partout, des visages se tournaient vers nous : des hommes assis à l'ombre, des femmes vêtues de robes colorées et certaines voilées de noir de la tête aux pieds, portant des paniers ou des jarres, et des enfants qui jouaient pieds nus dans la poussière. Je me souviens que je me demandait comment ses femmes en burqua arrivaient à supporter cette épouvantable chaleur.Ils me dévisageaient. Enfin, ils nous dévisageaient. J'avais l'impression d'être une créature étrange sortie d'un autre monde.

« Ils nous regardent tous, » ai-je murmuré, mal à l'aise.

« Ils sont curieux, c'est tout, » répondit ma mère d'une voix douce.

Quand mon père a arrêté la voiture devant une petite maison en pierre, un homme nous attendait. Il portait une tunique blanche qui semblait presque briller sous le soleil, il avait une grande barbe et un crâne rasé. Son sourire était chaleureux, mais cela ne me mettait pas plus à l'aise.

« Bienvenue, bienvenue ! » a-t-il dit en serrant la main de mon père.

« Ha merci Ahmed ! » mon père souriait lui aussi. 

Je n'écoutais pas vraiment leur échange. Mon regard était attiré par la maison. Simple, presque austère, avec ses murs épais et son toit plat. Elle semblait vouloir nous protéger de cette chaleur écrasante.À l'intérieur, ma mère, toujours enthousiaste, s'est immédiatement mise à explorer. Mon père, lui, avait déjà sorti ses dossiers et son ordinateur, plongé dans son travail. Quant à moi, je ne savais pas trop quoi faire.

« Va explorer un peu, Joseph, » m'a lancé ma mère en passant près de moi. « Découvre le village, respire l'air. »

Je ne voulais pas vraiment, mais je savais qu'insister ne servirait à rien. Alors, j'ai attrapé mon chapeau et je suis sorti.L'air extérieur était encore plus chaud que je ne l'imaginais, presque suffocant. J'ai avancé dans une ruelle, sentant la poussière sous mes chaussures. Les maisons semblaient se ressembler toutes : blanches, avec de petites fenêtres protégées par des volets de bois. Mais ce qui m'a frappé, c'était le silence.Enfin, pas un vrai silence. Il y avait des bruits, bien sûr : des voix lointaines, des rires d'enfants, le souffle du vent. Mais ce n'était rien comparé au tumulte de Paris.Je ne savais pas vraiment où j'allais. Mes pieds m'ont guidé jusqu'à la place principale, où se trouvait la mosquée. Le bâtiment semblait encore plus grand vu de près. Son minaret montait comme une flèche, si haut qu'il donnait presque le vertige.

C'est là que je l'ai vu pour la première fois.

Un garçon se tenait près des escaliers de la mosquée. Il avait l'air d'avoir deux ou trois ans de plus que moi, peut-être seize ans. Il était grand, avec une silhouette élancée, des cheveux noirs bouclés qui semblaient absorber la lumière, et un visage marqué par une étrange sérénité. Mais ce qui m'a le plus frappé, ce furent ses yeux. Ils étaient sombres, profonds, comme s'ils cachaient un secret que personne ne pouvait deviner.Je ne sais pas pourquoi, mais je n'ai pas pu détourner le regard. Pendant un moment, le temps s'est figé. Tout ce qui m'entourait – le muezzin récitant doucement une prière, les murmures des villageois, le souffle du vent – s'est estompé.Puis, mal à l'aise, j'ai baissé les yeux et repris ma marche.Quand je me suis risqué à jeter un autre coup d'œil, il était toujours là, me regardant. Mais il n'a pas bougé, et je n'ai pas eu le courage de lui adresser la parole.Je me suis éloigné rapidement, le cœur battant un peu plus fort. Pourquoi ce regard m'avait-il autant troublé ?J'ai continué à errer dans le village, sans vraiment savoir où aller. J'ai vu des boutiques où l'on vendait des épices, des tissus, et des objets que je ne savais même pas nommer. Une vieille femme assise devant une maison m'a adressé un sourire édenté, et je lui ai rendu un hochement de tête timide.

Finalement, je suis rentré à la maison. En arrivant, j'ai trouvé ma mère sur la terrasse. Elle observait l'horizon, fascinée par les dunes dorées qui s'étendaient à perte de vue.

« Alors, qu'est-ce que tu en penses ? » m'a-t-elle demandé en se tournant vers moi.

J'ai haussé les épaules. « C'est... différent. »

Elle a posé une main sur mon épaule et m'a souri. « Donne-lui une chance. Ce village a beaucoup à offrir, tu verras. »

J'ai regardé vers la mosquée, dont le minaret se découpait sur le ciel. Le garçon n'était plus là, mais son visage me restait en mémoire.

J'ignorais alors que cet été allait changer ma vie.

Chapitre 2 : Une rencontre inattendue

Le marché du village était un spectacle vibrant, presque étourdissant pour mes sens encore habitués à la vie parisienne. Des voix animées résonnaient autour de moi, mêlant des rires, des appels, et des conversations dans une langue que je comprenais à peine. Chaque recoin semblait regorger de couleurs et de textures : des tissus aux teintes éclatantes ondulaient sous la brise, des épices empilées en cônes parfaits diffusaient des parfums enivrants, et des objets en cuir – sacs, sandales, ceintures – étaient disposés avec soin sur des étals en bois. Je déambulais, presque en transe, essayant de ne pas me laisser submerger par l'agitation qui m'entourait. Il y avait une certaine beauté dans ce chaos, mais aussi une impression d'être étranger, complètement déconnecté de cet univers. J'entendais des vendeurs m'interpeller, me lançant des phrases enthousiastes auxquelles je ne savais pas comment répondre. J'avais envie de tout observer, de tout comprendre, mais chaque pas me donnait l'impression de m'éloigner un peu plus de mes repères.

C'est alors que je me suis perdu.

Un instant, j'étais encore près d'un stand de poteries, fasciné par les motifs délicats peints sur des vases, et l'instant d'après, je réalisais que je ne savais plus d'où j'étais venu. Les ruelles étroites du marché semblaient se replier sur elles-mêmes, formant un labyrinthe où chaque tournant ressemblait au précédent.J'ai pris une grande inspiration, essayant de ne pas paniquer. « Ce n'est qu'un marché, Joseph, » me suis-je murmuré. Mais le tumulte des voix et l'agitation des passants me rendaient nerveux. J'ai serré un peu plus fort la lanière de mon sac, mes yeux cherchant désespérément un point de repère.

C'est à ce moment-là que je l'ai vue.

Une femme d'âge moyen, vêtue d'une robe longue d'un bleu profond, était debout près d'un stand de fruits. Elle avait un visage doux et accueillant, encadré par un voile léger qui flottait légèrement sous le vent. Ses mains habiles sélectionnaient des oranges tout en échangeant quelques mots avec le vendeur. Quand elle a levé les yeux, nos regards se sont croisés.

« Tu cherches quelque chose ? » a-t-elle demandé dans un français hésitant, mais parfaitement compréhensible.

Surpris, j'ai mis quelques secondes à répondre. « Oui... enfin, non... je suis un peu perdu, je crois. »

Elle a ri doucement, un rire qui semblait désamorcer toute tension. « C'est facile de se perdre ici. Tu es le fils des nouveaux arrivants, n'est-ce pas ? »

J'ai hoché la tête, impressionné qu'elle sache déjà qui j'étais. Elle a essuyé ses mains sur un coin de son voile avant de se rapprocher. « Je m'appelle Fatima. Viens, je vais te montrer le chemin. »

Avant que je puisse répondre, elle a appelé quelqu'un d'un geste de la main. « Youssef ! Aide-moi à porter ça. »

Et soudain, il était là.Je l'ai reconnu immédiatement : le garçon de la mosquée. Il portait une chemise beige et un pantalon simple, ses manches retroussées jusqu'aux coudes, révélant des avant-bras musclés mais gracieux. Son visage, toujours empreint de cette sérénité presque intimidante, était éclairé par une lumière tamisée qui filtrait à travers les étals.

« Oui, maman ? » Sa voix était calme, posée, comme si rien ne pouvait le troubler.

Fatima lui a désigné un sac rempli de fruits qu'elle venait d'acheter. « Aide ce garçon. Il est perdu. »

Youssef a tourné son regard vers moi, et pour la deuxième fois, j'ai senti mon cœur s'emballer légèrement. Ses yeux sombres semblaient m'étudier, cherchant à comprendre qui j'étais, pourquoi j'étais là.

« Viens, » a-t-il dit simplement, sans même attendre ma réponse.

Je l'ai suivi à travers le marché, avec Fatima marchant un peu devant nous. Youssef portait le sac de fruits sur son épaule avec une facilité nonchalante, mais je pouvais sentir qu'il était conscient de ma présence, même s'il ne disait rien.

« C'est... très animé ici, » ai-je fini par dire, juste pour combler le silence.

Youssef a tourné légèrement la tête vers moi, un sourire imperceptible jouant sur ses lèvres. « C'est comme ça tous les jours. Tu t'habitueras. »

Sa voix avait quelque chose d'apaisant, mais aussi de troublant. Elle semblait à la fois distante et proche, comme un murmure porté par le vent.Alors que je regardais autour de moi, mes yeux se sont posés sur un tapis finement tissé, suspendu à un stand. Les motifs complexes et les couleurs vives m'ont captivé. Sans réfléchir, j'ai fait un pas en arrière pour mieux l'observer, et je n'ai pas vu la pierre qui dépassait du sol.

Je suis tombé.

Ce fut un moment ridicule, presque humiliant. Mes mains ont tenté de me rattraper, mais tout ce que j'ai réussi à faire, c'est m'étaler sur le sol poussiéreux. Les rires des vendeurs et des passants ont fusé autour de moi, et je sentais mes joues brûler de honte.

Puis une main est apparue devant mes yeux.

« Ça va ? »

C'était Youssef. Il se tenait au-dessus de moi, son expression neutre, mais ses yeux trahissaient une lueur de curiosité. Sa main, grande et légèrement calleuse, restait tendue.J'ai hésité une seconde avant de la saisir. Sa prise était ferme, rassurante, et il m'a relevé sans effort apparent.

« Merci, » ai-je murmuré, trop embarrassé pour le regarder dans les yeux.

« Fais attention où tu marches, » a-t-il dit, mais son ton n'était pas moqueur. Plutôt... amusé.

Je me suis épousseté en silence, essayant de retrouver un semblant de dignité. Mais même en me relevant, je pouvais sentir son regard sur moi. Pas un regard accusateur, non. Quelque chose de plus subtil. De la curiosité, peut-être.

Fatima, qui avait vu la scène de loin, est revenue vers nous, un sourire bienveillant sur le visage. « Tout va bien ? »

« Oui, oui, » ai-je répondu rapidement.

Youssef n'a rien ajouté, mais un léger sourire persistait sur ses lèvres, comme si ma maladresse l'avait amusé plus qu'il ne voulait l'admettre.Nous avons continué notre chemin, et cette fois, le silence entre nous ne me semblait pas aussi pesant. J'avais l'impression que quelque chose avait changé, même si je ne savais pas encore quoi.

★★★

Quand nous sommes arrivés à l'entrée d'une ruelle qui me semblait familière, Fatima a désigné la direction à suivre. « Ta maison est là-bas. Tu peux trouver le chemin maintenant ? »

« Oui, merci beaucoup, » ai-je répondu avec reconnaissance.

Youssef m'a regardé une dernière fois avant de hocher la tête, presque imperceptiblement. Puis il a tourné les talons et est reparti avec sa mère, le sac de fruits toujours sur l'épaule.

Je suis resté là quelques instants, à les regarder s'éloigner.Ce n'était qu'une rencontre banale, un moment presque insignifiant. Mais pour une raison que je ne pouvais pas encore expliquer, je savais qu'il resterait gravé dans ma mémoire. Il y avait quelque chose dans ce garçon – dans sa voix, dans ses gestes, dans son regard – qui me fascinait.

Et même si je n'aurais jamais osé l'admettre à ce moment-là, j'avais déjà envie de le revoir.

Chapitre 3 : Le désert et la mer

Le lendemain de ma mésaventure au marché, je n'avais pas prévu de croiser Youssef à nouveau, et encore moins de passer une journée avec lui. Pourtant, ce fut exactement ce qui arriva. J'avais à peine fini de déjeuner qu'Il était apparu dans l'après-midi, devant ma maison, comme une ombre discrète projetée par le soleil brûlant.Je l'avais vu de loin, appuyé contre un mur, ses bras croisés, regardant les dunes au loin. J'avais hésité à sortir. Mon père était à la ville pour son projet et ma mère faisait une sieste qui durerait sûrement un long moment. Il n'avait rien dit, mais son regard,ses mystérieux yeux noirs,lorsqu'il se tourna enfin vers moi, semblait une invitation silencieuse. Je ne savais pas pourquoi, mais quelque chose dans son calme m'avait poussé à le rejoindre, ça m'avait systématiquement attiré. 

« Tu veux voir quelque chose ? » m'a-t-il demandé, comme s'il connaissait déjà ma réponse.

« Voir quoi ? » avais-je répondu, plus par politesse que par réelle curiosité.

Il avait simplement esquissé un sourire énigmatique. « Suis-moi. »

« Et où allons-nous ? »  bien qu'il ne dégageait rien d'hostile il restait quand même un étranger. 

Mais il ne repondit pas et se mit à marcher me laissant à la traîne. J'hesitais un instant avant de me décider à le suivre. 

★★★

Nous avions quitté le village, marchant côte à côte sans trop parler. Devant nous, le désert s'étendait comme une mer de sable sans fin, chaque dune ondulant doucement sous la lumière dorée du soleil. Les maisons blanchies du village s'effaçaient peu à peu dans le décor derrière nous et semblaient maitenant bien loin , remplacées par un silence profond et apaisant.

« Tu viens souvent ici ? » avais-je demandé, brisant le silence.

« Parfois, » répondit-il simplement.

Il ne parlait pas beaucoup, mais ses mots avaient un poids, comme s'il réfléchissait à chacune de ses réponses avant de les prononcer. Cela contrastait avec mon besoin constant de combler les silences, de donner un sens aux moments vides.Après une longue marche, une brise fraîche avait soudain caressé mon visage, portant avec elle une odeur que je n'avais pas sentie depuis que nous avions quitté la ville : l'odeur salée de la mer.

« On est près de l'eau, » avais-je murmuré, presque incrédule.

Youssef hocha la tête sans rien dire. Quelques minutes plus tard, la mer apparut devant nous, comme une promesse. Elle était vaste, infinie, s'étendant jusqu'à l'horizon où elle semblait se confondre avec le ciel, ses reflets  dorés ondulaient comme de l'or liquide. 

« C'est magnifique, » soufflai-je. 

Comme si ces mots seuls pouvaient vraiment décrire ce tableau. 

Nous nous étions installés sur un rocher, à une distance raisonnable des vagues qui venaient s'écraser sur le rivage dans une mélodie apaisante. Je regardais la mer, fasciné par ses nuances de bleu et de vert, tandis que Youssef semblait perdu dans ses pensées.

« Tu as grandi ici ? » avais-je demandé, brisant une nouvelle fois le silence.

Il hocha la tête. « Toute ma vie. »

Je tentai de l'imaginer, enfant, courant sur ce sable, construisant des châteaux sur la plage. Mais le regard qu'il posait sur la mer n'avait rien d'enfantin. Il était chargé de quelque chose de plus lourd, une nostalgie mêlée de mélancolie.

« Tu sembles... ailleurs, » remarquai-je.

Il tourna les yeux vers moi, comme s'il revenait d'un rêve. « Je pense à mon frère. »

Je ne savais pas qu'il avait un frère, mais il n'avait pas besoin d'en dire plus pour que je comprenne. La douleur dans sa voix était presque palpable, comme une note dissonante dans un chant harmonieux.

« Il est. . . Il n'est plus là  depuis combien de temps? » demandai-je, prudemment.

Youssef secoua la tête, et pendant un instant, j'eus peur d'avoir posé une question de trop. Mais il finit par répondre. « Il est parti. Depuis trois ans. »

Je restai silencieux, attendant qu'il continue s'il le souhaitait.

« Amir était l'aîné, » expliqua-t-il, son regard retournant vers l'horizon. « Il était... tout ce que mon père voulait que je sois. Responsable, respecté, fort. Mais. . .» Il coupa comme pour reprendre son souffle,sa voix était calme, mais je pouvais sentir qu'il se battait pour contrôler ses émotions.

« Et maintenant, » ajouta-t-il après une pause, « tout le poids est sur moi. C'est moi l'aîné»

Je n'avais jamais été l'aîné, mais je pouvais imaginer ce que cela représentait. Cette responsabilité, ce devoir de réussir là où quelqu'un d'autre avait échoué, surtout pour quelqu'un de si jeune. 

« Ça doit être difficile.» murmurai-je.

Il tourna la tête vers moi, et pour la première fois depuis notre rencontre, je vis une lueur de vulnérabilité dans ses yeux. 

« Parfois, je me dis que j'aimerais juste disparaître. Comme lui. » Murmura t-il. 

Il y avait quelque chose d'étrange et de bouleversant dans la façon dont il parlait : un mélange de résignation et d'espoir, comme s'il cherchait encore une issue qu'il n'arrivait pas à trouver.

★★★

Le temps tendait au crépuscule,nous étions restés là, assis en silence, pendant ce qui me sembla une éternité. La mer, avec ses vagues régulières, semblait nous bercer, apaisant les tensions que ses confidences avaient fait naître.Puis, soudain, Youssef s'était levé,sa légère chemise blanche flottant au gré du vent. Il avait marché jusqu'à la rive, là où l'eau rencontrait le sable, et s'était penché pour ramasser quelque chose. Quand il revint, il tenait un petit coquillage blanc, parfaitement lisse.

« Tiens, » dit-il en me tendant l'objet.

Je pris le coquillage, le retournant entre mes doigts. Il était si simple, si ordinaire, mais dans ce contexte, il semblait avoir une signification particulière.

« Pourquoi ? » avais-je demandé, intrigué.

Il haussa les épaules. « Parce que la mer n'oublie rien. Ce coquillage... il a été façonné par elle. C'est comme un souvenir qu'elle te donne. »

Je serrai le coquillage dans ma main, touché par ce geste. Ce n'était qu'un petit objet, mais pour moi, il représentait beaucoup plus : un fragment de cette journée, de cet instant partagé.

★★★

Alors que le soleil commençait à descendre de plus en plus vers l'horizon, nous avions repris le chemin du retour. Cette fois, le silence entre nous était plus confortable, presque complice. J'avais l'impression que quelque chose avait changé, que ce moment au bord de la mer nous avait rapprochés.

En arrivant près du village, Youssef s'était arrêté.

« Merci, » avais-je dit, sans vraiment savoir pourquoi.

Il m'avait regardé, son expression toujours indéchiffrable, mais ses yeux disaient quelque chose que je ne pouvais pas encore nommer.

« Ce n'est rien, » avait-il répondu. Puis, il était parti, disparaissant dans les ruelles du village comme une ombre.

Je restai là un moment, le coquillage toujours dans ma main, avant de rentrer chez moi. Ce soir-là, alors que je m'endormais, le coquillage serré contre ma poitrine, j'entendais encore le bruit des vagues dans ma tête. Et pour la première fois depuis notre arrivée, je me sentais étrangement apaisé.

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