LUNA
Repliée sur son lit de chêne, Luna fixait la fenêtre aux volets vermoulus, sentant ses mains trembler d'une anxiété sourde. La lune, teintée d'un rouge sanguin, éclairait sa chambre d'une lueur sinistre, métamorphosant les murs en ombres inquiétantes. Ce soir se déroulait l'éclipse, phénomène redouté et rare, annonciateur de malheurs. Comme à chaque éclipse, une jeune fille vierge de leur village devait être offerte en sacrifice, un acte sacré qui pesait sur leurs âmes. L'idée lui tordait l'estomac, et un frisson glacial parcourait sa colonne vertébrale, tandis que les ombres dansaient, tissant une atmosphère de mystère et de frayeur.
Le son du tambour résonnait à l'extérieur, un rythme ancestral vibrant à travers le sol de terre battue. Chaque coup résonnait tel un battement de cœur, appelant à la cérémonie. Elle pouvait presque sentir la terre trembler sous ses pieds, comme si le sol lui-même était en émoi. Cette pleine lune brillait d'un éclat surnaturel, mais nulle jeune fille de son âge n'osait se montrer dehors, tout comme aucun parent n'osait exhiber le visage de leur fille vierge. Les anciens, drapés dans leurs robes sombres et usées, se mouvaient tels des spectres, leurs visages marqués par la gravité de leur tâche.
« Luna ! »
Son cœur s'emballa à l'entente de ce nom, lorsqu'un cri perçant, un cri déchirant, s'échappa de la gorge d'une jeune fille. La terreur s'empara d'elle, et ses lèvres se desséchèrent, comme si le vent avait emporté toute l'humidité de son corps. Ses yeux s'écarquillèrent, et elle s'adonna à une prière silencieuse, les mains jointes contre sa poitrine, ses paumes moites de crainte. Elle espérait ardemment que ce n'était pas Monica, sa confidente, celle qui partageait ses secrets et ses rêves.
« Luna ! »
Elle sursauta, le cœur battant à tout rompre, se tournant vers sa mère. Celle-ci se tenait là, aux côtés de son père, leurs visages empreints d'angoisse. La lumière vacillante des torches projetait des ombres inquiétantes sur leurs traits marqués par l'inquiétude. Les rides sur le front de sa mère se creusaient, ses yeux, d'ordinaire doux, étaient désormais emplis d'une terreur palpable. Une perle de sueur glissait le long de sa tempe, et Luna aperçut ses lèvres se serrer, blanches comme la craie.
« Hélas, le sort a désigné Monica, » déclara sa mère d'un ton solennel.
Le monde autour d'elle sembla se figer. Son cœur sauta brutalement dans sa poitrine, tel un oiseau captif. Le bruit du tambour, qui résonnait comme un appel désespéré, devenait un écho lointain, étouffé par la panique qui montait en elle.
« Mais elle n'est plus vierge, » murmura-t-elle, tremblante d'angoisse. La réalité était cruelle : Monica allait être bannie avec sa famille, condamnée à l'exil dans les forêts obscures qui entouraient leur village. Les murmures des anciens, tels des vents funestes, parvenaient à ses oreilles, porteurs de malédictions et de chuchotements.
À l'extérieur, le tambour résonnait plus fort, un battement de cœur collectif qui semblait se synchroniser avec sa peur. Les cris lointains se mêlaient aux battements, créant une mélodie lugubre. Elle serra les poings, ses ongles s'enfonçant dans sa paume, tandis que la terreur s'emparait d'elle. Son souffle devenait court, chaque inspiration un effort, comme si l'air s'était épaissi autour d'elle.
« Nous devons fuir ! » s'écria sa génitrice , la voix tremblante. « Ils vont désigner une autre personne, et je suis convaincue que ce sera toi. »
À peine ces mots avaient-ils quitté ses lèvres qu'un grand fracas retentit à la porte d'entrée, brisant le silence pesant. Luna sursauta, se redressant d'un seul coup de son lit, le cœur battant la chamade.
Les yeux écarquillés, ses parents et elle observaient avec horreur les deux guerriers les plus redoutés de leur village pénétrer dans leur demeure, leurs armures scintillant d'une lueur sinistre à la lumière vacillante des torches. Leurs visages étaient marqués par la cruauté, et elle pouvait presque voir le rictus satisfait qui se dessinait sur les lèvres de Alaric lorsqu'il annonça d'une voix glaciale :
« Votre fille a été désignée par nos ancêtres. Nous sommes ici pour l'emmener. »
« Non, je vous en conjure, épargnez-la ! » s'écria le père de Luna, sa voix tremblante d'effroi. « Elle est encore si jeune, si innocente ! »
Mais il fut aussitôt interrompu par Rufus, le deuxième guerrier, dont la stature imposante écrasait tout espoir :
« Reculez, misérable ! Les dieux l'ont choisie, et vous êtes priés de ne point intervenir. »
Il s'approcha d'elle, sa présence menaçante comme un orage s'annonçant. Son père, dans un élan de désespoir, se dressa comme un rempart fragile entre sa fille et le destin funeste qui s'annonçait :
« Vous devrez me passer sur le corps avant de l'emmener ! » déclara-t-il, sa voix vibrante d'une bravoure désespérée.
Un rire glacial s'échappa de Rufus, résonnant comme un coup de tonnerre, alors qu'il avançait d'un pas assuré vers le père :
« Si tel est votre souhait, très bien. »
D'un geste fluide, il dégaina son épée à la vitesse de l'éclair. Le temps sembla se figer, et aucun d'eux n'eut le temps de réagir. Dans un mouvement brutal, il trancha le cou du père de Luna. Le sang jaillit, éclaboussant le visage de la jeune fille, chaud et visqueux, tandis que le corps de son père s'effondrait au sol dans un bruit sourd, tel un arbre abattu par la tempête.
Un cri déchirant s'échappa de la bouche de sa génitrice , un cri qui résonna comme un écho de désespoir, emplissant la pièce d'une tristesse insupportable. Luna, figée par l'horreur, n'arrivait pas à comprendre l'ampleur de la tragédie qui venait de se jouer.
Lorsque Rufus la saisit par le poignet, sa prise brutale la ramena à la réalité. Elle commença à se débattre, hurlant et pleurant de toutes ses forces :
« Comment as-tu osé commettre un tel acte ?! »
Sa mère, dans un élan désespéré, se jeta sur Rufus, implorant de toutes ses forces :
« Lâchez ma fille, je vous en prie ! Épargnez-la ! »
Mais Alaric, impitoyable, la saisit par la taille, la maintenant à distance, comme une proie soumise.
Luna, le cœur en lambeaux, criait de toutes ses forces, sa voix se brisant sous le poids de la douleur et de la terreur :
« Vous ne pouvez pas faire cela ! »
Les ombres dansaient autour d'eux, et le destin tragique s'annonçait, implacable, tandis que la mélodie lugubre des tambours résonnait, marquant le début d'une souffrance infinie.
LUNA
- Non !! Lâchez-moi ! s'écria-t-elle, sa voix tremblante d'angoisse, tandis qu'elle se débattait avec toutes ses forces. Père ! Père, réveillez-vous !
L'hystérie s'empara d'elle, telle une tempête déchaînée, alors qu'elle portait un coup de genou à l'entrejambe de Rufus. Dans un élan désespéré, elle se déroba à son emprise et se précipita vers le corps inerte de son géniteur, gisant là, comme une ombre du passé.
- Père !!! Réveillez-vous ! Père ! implora-t-elle, sa voix résonnant comme un cri de désespoir dans l'air lourd de tension.
Sa mère, toujours maintenue captive dans les bras d'Alaric, pleura à chaudes larmes, ses sanglots résonnant comme des échos de souffrance. Elle secouait la tête de gauche à droite, comme si elle pouvait chasser le malheur qui pesait sur eux.
- Luna ! s'écria-t-elle, le désespoir dans la voix, mais sa tentative de réconfort fut interrompue lorsque Rufus, d'un geste brutal, saisit les cheveux de la jeune fille et la ramena vers lui.
- Petite sotte, tu devrais être heureuse d'avoir été choisie par les dieux, meugla-t-il, un sourire cruel aux lèvres, en la balançant par-dessus son épaule comme un fardeau. Les mots résonnaient, pleins de mépris et de dédain.
Luna, horrifiée et désespérée, s'écria, frappant avec frénésie le dos de Rufus dans une tentative désespérée de se libérer. Ses poings, bien que pleins de rage, ne faisaient que glisser sur sa peau dure et impassible.
N'étant pas ébranlé le moins du monde par ses coups, celui-ci l'emporta avec lui à l'extérieur de la demeure. L'air était chargé d'une atmosphère oppressante, et l'on pouvait déjà entendre, au loin, les tambours résonner sur la grande place du village, un prélude à un événement funeste. La peur de Luna se décupla, s'enroulant autour de son cœur comme un serpent venimeux, tandis qu'elle réalisait l'horreur qui l'attendait.
Les ombres s'allongeaient, et la nuit semblait se refermer sur elle comme un voile sombre, emportant avec elle les derniers vestiges d'espoir. Au-dessus, le ciel se teintait d'un rouge inquiétant, alors qu'une éclipse lunaire se préparait à envelopper la lune d'une aura mystérieuse. Les étoiles, habituellement brillantes, étaient masquées par des nuages menaçants, et un frisson parcourait l'air, chargé d'une tension palpable.
Sans préambule, Rufus la jeta au sol lorsque le groupe atteignit la grande place du village. Luna se redressa, le cœur battant, et se trouva au centre d'un cercle formé par les anciens. Les tambours résonnaient autour d'elle, battant un rythme lourd et sinistre, tandis que les visages des villageois, aux traits marqués par le temps et l'expérience, l'observaient avec des yeux effrayants, vides de compassion.
- Regardez-la, murmura une vieille femme, sa voix rauque se mêlant au bruit des tambours. Elle est l'élue, celle que les dieux ont choisie.
Désorientée et apeurée, Luna scrutait les visages impassibles des anciens, se demandant comment ils pouvaient s'adonner à cette coutume sans le moindre remords. Ses pensées tourbillonnaient dans son esprit, et elle se mit à balbutier :
- Pourquoi me faites-vous cela ? Qu'ai-je fait pour mériter un tel sort ?
Un ancien, à la barbe blanche comme la neige, s'avança lentement. Ses yeux, d'un bleu glacial, fixaient Luna avec une intensité dérangeante.
- Silence, jeune fille, répondit-il d'une voix profonde et grave. Les dieux exigent un sacrifice, et c'est toi qui as été désignée. C'est un honneur, même si tu ne peux le comprendre.
- Un honneur ? s'écria-t-elle, désespérée. Vous parlez de sacrifice, mais cela ne ressemble qu'à une monstruosité !
La foule murmura, des murmures de désapprobation s'élevant parmi les anciens. Mais avant qu'elle ne puisse poursuivre, la vieille sage du village s'avança dans le cercle, portant un petit bol en bois qui contenait le sang d'un agneau. Le liquide rouge, sombre et épais, brillait faiblement à la lumière des torches qui entouraient la place.
- Comme avant tout sacrifice, je dois purifier l'élue, annonça-t-elle d'une voix solennelle. Que les dieux nous guident dans ce rite !
Elle plongea ses deux doigts dans le bol, immaculant ses mains de sang. Les gouttes s'écoulèrent lentement, formant un contraste macabre avec sa peau ridée. Puis, avec une précision rituelle, elle s'approcha de Luna, son regard empreint de détermination.
- Lève la tête, enfant du destin, ordonna-t-elle. Ne crains rien, car ce que nous faisons ici est nécessaire pour la prospérité de notre village.
Luna, le cœur lourd, se força à obéir. La vieille sage dessina un symbole complexe sur son front, une rune ancienne qui scintillait d'une lueur mystérieuse. Chaque mouvement de la sage était empreint de gravité, et Luna ressentit une chaleur étrange se répandre sur sa peau.
- Que ce symbole te protège, murmura la sage, presque comme une prière. Que les dieux t'accueillent dans leur lumière.
- Je ne veux pas ! s'écria Luna, sa voix brisée par l'émotion. Je ne veux pas être leur sacrifice !
Mais ses mots se perdaient dans le tumulte des tambours, qui résonnaient de plus en plus fort, comme un cœur battant au rythme de la peur et du désespoir. La foule semblait hypnotisée, leurs regards rivés sur elle, et Luna se sentit piégée dans une toile d'araignée tissée par les traditions et les croyances ancestrales.
Sans prévenir, la vieille sage, drapée dans sa robe de lin usé, noua ses poignets, les attachant avec force. Son visage, marqué par les années et les épreuves, était empreint d'une gravité qui glaçait le sang de Luna.
- Debout, mon enfant, ordonna-t-elle d'une voix ferme, mais douce. Le moment est venu.
Les yeux embués de larmes, Luna se redressa, le cœur lourd. Elle pouvait sentir le regard de sa mère, perdu dans la foule, rempli d'inquiétude et de désespoir.
- Maman ! cria-t-elle, sa voix brisée par l'émotion. Ne me laisse pas ici !
Mais la sage la fit taire d'un geste de la main, et Luna entendit alors les voix des anciens s'élever en chœur. Ils chantaient une mélodie ancienne, une chanson qui accompagnait le sacrifice, leurs voix résonnant comme un écho des temps révolus. Leurs visages étaient impassibles, marqués par des années de traditions immuables.
- Suivez-moi, ordonna l'un des anciens, un homme à la stature imposante et à la voix profonde. Le chemin vers la forêt nous attend.
Luna, le cœur battant, réalisa qu'ils prenaient tous la direction qui menait à la forêt obscure, où l'arbre de vie se tenait, majestueux et redouté. Elle savait ce qui l'attendait : elle allait être attachée à cet arbre, abandonnée là, une offrande pour une créature légendaire qui hantait les ombres de la forêt.
- Non, je ne peux pas ! s'écria-t-elle, la panique montant en elle. Vous ne pouvez pas faire cela !
Son cri se perdit dans le tumulte des tambours qui martelaient le sol, et la foule avançait sans se retourner. Elle se débattit, mais les liens autour de ses poignets étaient serrés, et les anciens tiraient sur la corde qui la retenait pour la faire avancer.
- Luna, calme-toi, murmura une voix familière. C'était sa mère, qui, bien que retenue par Alaric, avait réussi à s'approcher.
- Maman, aide-moi ! supplia-t-elle, les larmes coulant sur ses joues.
- Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir, ma chérie, répondit sa mère, la voix tremblante. Mais tu dois être forte. Les ancêtres veillent sur nous.
Son cœur battait dans un rythme désordonné dans sa poitrine alors qu'elle avançait, avouant ses pleurs, en les suppliant, mais tout le monde semblait se ficher de sa détresse. Les tambours résonnaient comme un appel à la bravoure, et malgré la peur qui l'étreignait, elle se força à avancer.
Rapidement, ils s'enfonçaient dans la forêt obscure, là où plusieurs personnes avaient été sacrifiées au fil des ans. Les flammes des longues torches éclairaient leur chemin, projetant des ombres dansantes sur les troncs des arbres noueux. Leurs silhouettes se mouvaient comme des spectres, et Luna pouvait sentir le souffle frais de la nuit sur sa peau.
- Regardez, murmura une jeune femme, son visage blême. L'arbre de vie est devant nous.
Luna leva les yeux et aperçut, au loin, l'arbre colossal, ses branches tordues s'étendant comme des bras désespérés vers le ciel. Son écorce était noire, marquée par des cicatrices anciennes, et une aura sinistre l'entourait.
- Là où les âmes se rejoignent, murmura la sage en avançant, l'arbre attend son offrande.
Luna se sentit submergée par la terreur. Elle savait qu'elle allait devenir une proie, une victime pour une créature mythique qui, selon les légendes, se nourrissait de la peur et du désespoir. Les corbeaux croassaient au-dessus d'eux, leurs cris résonnant comme des présages funestes.
- Ne les écoutez pas, dit l'ancien qui marchait en tête, sa voix grave résonnant dans la nuit. Ce sont des messagers des dieux. Ils annoncent notre rite.
- Des dieux ? s'indigna Luna, la colère bouillonnant en elle. Pourquoi devrais-je être leur sacrifice ? Qu'ai-je fait pour mériter cela ?
Mais ses mots se perdaient dans le tumulte, et la foule continuait d'avancer, indifférente à sa souffrance. Alors qu'ils atteignaient l'arbre, Luna sentit une force irrésistible l'attirer vers lui, comme si l'arbre lui-même voulait l'engloutir.
- Attachez-la, ordonna la sage, et les anciens s'exécutèrent, ligotant ses poignets autour du tronc rugueux.
Luna ferma les yeux, retenant ses larmes. Elle savait que la fin était proche, mais au fond d'elle, une petite flamme de révolte brûlait toujours. Elle ne se laisserait pas abattre sans se battre.
- Je ne suis pas une offrande, murmura-t-elle pour elle-même, sa voix tremblante. Je suis Luna, et je ne céderai pas à la peur.
Alors que la lune rouge émergeait des nuages, projetant une lumière sinistre sur la scène, Luna leva les yeux vers le ciel, espérant que les étoiles, témoins de son désespoir, lui viendraient en aide.
LUNA
La respiration haletante et les yeux plissés, cherchant sans doute à voir quelque chose dans l'obscurité, Luna priait intérieurement pour que rien ne surgisse de l'ombre. La nuit était épaisse, presque palpable, enveloppant la forêt d'un silence oppressant, seulement troublé par le bruissement des feuilles et le souffle du vent. Elle pouvait sentir l'humidité de la terre sous ses pieds, et l'odeur des sous-bois, mélangée à celle de la résine des arbres .
En effet, elle avait été laissée attachée à l'arbre de vie par les anciens de son village. Les souvenirs de ce moment tragique lui revinrent en mémoire avec une clarté douloureuse. Sa mère, avec son visage empreint de désespoir, avait tenté de la sauver, mais les anciens, figés dans leurs croyances, avaient agi sans hésitation. Lorsque sa génitrice avait fait un pas en avant, son cœur battant la chamade, on l'avait retenue. Luna se souvenait de la force avec laquelle ils l'avaient maintenue, les cris de celle-ci résonnant comme un écho lointain. Elle s'était débattue, le désespoir la poussant à vouloir à tout prix sauver sa fille, mais en vain. On l'avait alors assommée pour la tranquilliser, un acte brutal qui avait brisé le dernier lien entre elles.
- Père... mère... murmura-t-elle, ses yeux s'humidifiant de larmes, mon pauvre père. Les souvenirs de son visage souriant, de ses bras réconfortants, lui revenaient en mémoire, mais la douleur de sa perte était insupportable.
Luna ferma les yeux un instant, essayant de repousser la tristesse qui menaçait de l'engloutir. Mais elle n'eut pas le temps de pleurer la mort de son géniteur. Un craquement attira son attention, brisant le silence pesant de la nuit, et son cœur se mit à battre de plus belle. Elle dirigea alors son regard dans la forêt, dans un rythme désordonné, s'attendant à voir la créature mythique dont tout le monde parlait dans son village.
Le bruit se rapprochait, et son imagination s'enflammait. Était-ce la bête aux yeux rouges, celle qui, selon les légendes, se nourrissait de la peur des âmes perdues ? Elle pouvait presque sentir son souffle chaud sur sa peau, comme une promesse de mort. Les ombres dansaient autour d'elle, créant des formes menaçantes qui semblaient vouloir l'avaler.
- Qui est là ? osa-t-elle demander, sa voix tremblante trahissant sa peur. Mais seule la brise lui répondit, chuchotant des secrets oubliés.
Les arbres, immenses et silencieux, semblaient observer, leurs branches tordues se penchant légèrement comme pour écouter. Luna se mit à imaginer des yeux cachés derrière les troncs, des créatures tapies dans l'obscurité, attendant le bon moment pour frapper. Elle se força à respirer lentement, essayant de calmer son esprit tourmenté, mais chaque craquement de branche faisait grimper son anxiété.
Soudain, un autre bruit, plus proche, la fit sursauter. Elle se redressa, tendant l'oreille. C'était un froissement, comme si quelque chose avançait dans les sous-bois. Son cœur battait à tout rompre, et elle se mit à prier, murmurant des mots de protection appris dans son enfance.
- Esprits de la forêt, protégez-moi...
Elle ferma les yeux, espérant que ses prières atteindraient les ancêtres. Mais la peur était là, tangible, et elle rouvrit les yeux, le regard fixé sur l'obscurité. Les ombres semblaient se mouvoir, et une silhouette indistincte apparut, se dessinant lentement dans la pénombre.
- Qui va là ? s'écria-t-elle, sa voix s'élevant avec une force qu'elle ne se connaissait pas.
La silhouette s'arrêta, et un instant, le monde sembla suspendu dans un silence pesant. La brise légère, habituellement apaisante, semblait s'être figée, laissant place à une tension palpable. Luna pouvait sentir son cœur battre dans sa gorge, chaque battement résonnant comme un tambour de guerre, un écho de son angoisse croissante. Ses yeux, grands ouverts, scrutaient l'obscurité, cherchant à percer le mystère qui se cachait dans l'ombre.
Puis, lentement, la créature émergea, se détachant des ténèbres comme un cauchemar prenant forme. Ses yeux brillaient d'un éclat perçant, semblables à des braises ardentes, fixés sur elle avec une intensité déconcertante qui faisait frémir son âme. Luna sentit un frisson glacé parcourir son échine, un instinct primal lui hurlant de fuir.
L'animal avançait avec une grâce redoutable, ses pattes puissantes foulant le sol avec une assurance qui trahissait sa domination sur cet environnement sauvage. Son pelage noir, aussi sombre que la nuit elle-même, semblait absorber toute la lumière, créant une aura de mystère et de danger autour de lui. La créature était à la fois magnifique et terrifiante, un mélange enivrant de beauté sauvage et de menace imminente, comme une tempête prête à s'abattre.
Lorsque l'animal s'approcha plus franchement, Luna prit conscience de la réalité de son existence. Elle se rendit compte que ce n'était pas un simple loup... non, c'était bien plus que cela. Il était trop grand, trop majestueux, trop terrifiant pour n'être qu'un simple prédateur. Un petit cri lui échappa, un son presque inaudible, alors qu'elle aperçut d'autres silhouettes se dessiner derrière lui. Il y avait plusieurs de ses congénères, leurs yeux brillants se fixant sur elle avec la même intensité, avançant à la même cadence, comme une meute unie par un instinct ancestral.
La bête arriva enfin à son niveau, se tenant fièrement en face de l'arbre de vie contre lequel elle avait été attachée. Son cœur cognait contre sa poitrine, résonnant comme un tambour de guerre, tandis qu'elle ressentait le souffle chaud de l'animal qui la reniflait avec curiosité. Puis, dans un mouvement fluide, il baissa le museau au sol. Un craquement résonna dans l'air, et la bête hurla, un cri déchirant qui résonna dans la nuit comme un appel désespéré.
Les muscles puissants du loup se modelaient, se repliant et se redéfinissant sous la peau. La fourrure s'effaçait, laissant place à une peau bronzée, marquée par les épreuves du temps. Les griffes se transformèrent en mains humaines, tandis que le visage bestial se métamorphosait en traits humains, mais gardait une lueur sauvage dans ses yeux. Luna, subjuguée par ce qu'elle voyait, manqua de s'évanouir. L'être qui se tenait devant elle, jadis bête, était devenu un homme d'une prestance incroyable, avec des cheveux longs et ébouriffés qui tombaient sur ses épaules musclées.
Mais elle n'eut pas le temps de se demander si tout cela était bien réel. Une flèche, tirée avec une précision mortelle, manqua de justesse l'homme-loup et se ficha dans le tronc de l'arbre, juste au-dessus de sa tête, faisant vibrer le bois avec un bruit sourd. Les autres bêtes, alertées par l'attaque, se redressèrent, leurs muscles tendus et leurs yeux brillants d'une lueur sauvage. Un grondement sourd s'éleva parmi la meute, un chant de guerre vibrant à travers les feuilles des arbres, comme si la terre elle-même répondait à leur appel.
Surgissant des ténèbres, plusieurs hommes apparurent, leurs silhouettes se découpant dans la nuit. Vêtus de cuir usé par les ans, leurs vêtements portaient les marques d'anciens combats, et des symboles guerriers ornaient leurs poitrines. Leurs visages étaient dissimulés sous des capuchons sombres, mais leurs yeux brillaient d'une détermination froide. Ils tenaient des arbalètes ornées de gravures anciennes, des armes redoutables chargées de carreaux en acier, prêts à tirer.
- Sigurd, on y va ! rugit l'un des hommes, sa voix rauque résonnant comme un écho dans la nuit. Ne les laissons pas s'échapper, pour le clan et pour notre honneur !
Leurs flèches fendirent l'air comme des éclairs, et les loups, enragés, se jetèrent sur les assaillants. Les grognements résonnaient dans la forêt, un cri de guerre qui faisait trembler le sol. Les bêtes, unies dans leur instinct protecteur, se mirent à tourner autour de l'homme-loup, leurs crocs découverts, prêts à défendre leur alpha avec une férocité indomptable.
Dans le tumulte, l'homme-loup se tourna vers Luna, son regard empreint de détermination et de rage. D'un coup de griffe, il trancha les liens qui la retenaient, la libérant ainsi. Puis, sans prévenir, il l'attrapa par le poignet.
- Viens, ne restons pas ici ! dit-il avec une intensité brûlante.
Un énorme loup, le plus grand de la meute, se plaça devant eux, se tenant en défense, ses muscles tendus et son pelage hérissé. Luna fut alors jetée sur son dos, la sensation de la fourrure chaude contre sa peau lui apporta un réconfort fugace. En un clin d'œil, l'homme la rejoignit sur le dos de l'animal, frappant sur la nuque de Luna avec une précision mortelle. L'impact l'assommât , la plongeant dans un sommeil profond, tandis que le chaos de la bataille se déchaînait autour d'elle.
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