Le vent soufflait fort ce soir-là, balayant les rues de la ville comme un écho du chaos intérieur qui régnait dans la maison. À l’intérieur, le silence était pesant, lourd de non-dits et de rancœurs accumulées. Nani, les yeux rivés sur le sol, hésitait à relever la tête. Elle savait que chaque parole, chaque mouvement, pouvait déclencher une tempête.
Son frère, Serge, assis sur le canapé, avait l'air plus distant que d'habitude, les bras croisés, le regard perdu dans le vide. Leur père, de l'autre côté de la pièce, observait sans un mot, une lueur froide dans ses yeux. Ce silence était devenu leur manière à eux de communiquer, de se maintenir à distance. Mais ce soir-là, Nani sentait que quelque chose allait se briser.
Elle prit une profonde inspiration, cherchant les mots qu’elle n’arrivait jamais à dire. Les mots qui, si elle les prononçait, pourraient peut-être changer quelque chose. Mais la peur de la réaction, la peur du rejet, l’empêchaient toujours. Elle resta là, figée, comme si le temps s’était arrêté autour d’elle.
"Qu’est-ce que t'attends pour parler ?" lança Serge d’une voix dure, brisant enfin le silence qui pesait sur la pièce.
Les yeux de Nani se baissèrent instinctivement. Elle savait que sa réponse ne serait jamais suffisante, peu importe ce qu’elle dirait. Tout semblait déjà trop lourd, trop compliqué.
"Je... je ne sais pas," murmura-t-elle.
"Tu ne sais jamais rien," répliqua Serge, la voix pleine de mépris. "Toujours là à attendre que ça passe, à espérer qu'on oublie. Mais ça ne marche pas comme ça."
Le père, jusque-là silencieux, se leva lentement. Le bruit de ses pas résonna dans la pièce, comme un avertissement. Il s’approcha de Serge, ses yeux noirs de colère.
"Tu parles trop, Serge," dit-il d’un ton glacial. "Tu crois que t’as la vérité ? Que t’es celui qui sait tout ?"
Nani frissonna. Elle sentait l’atmosphère se tendre encore un peu plus. Chaque mot, chaque geste devenait une arme.
"Ferme-la un peu, papa," souffla Serge, le regard défiant. "T’as pas le droit de nous parler comme ça."
Le père s’avança d’un pas. "Tu veux tester ma patience, hein ?"
Le cœur de Nani battait à tout rompre. Elle savait que ce silence, ce poids qu’elle portait chaque jour, allait bientôt éclater.Le père s’arrêta juste devant Serge, un air dur sur le visage, mais Serge ne cilla pas. Il savait que ce moment allait venir, que tôt ou tard il faudrait se confronter à la brutalité de leur père. Mais ce soir-là, il n’était pas prêt à céder. Nani, elle, sentait une lourde pression dans sa poitrine. Elle n’avait pas la force de voir une nouvelle confrontation éclater. Elle baissa la tête un peu plus, espérant que tout cela passe, qu’ils se taisent tous, qu’ils oublient cette guerre silencieuse.
"Arrêtez..." murmura Nani, la voix tremblante. Mais son père, comme d’habitude, ne prêtait aucune attention à ses paroles.
"Tu crois qu’en te taisant, ça va changer quelque chose, Nani ?" dit Serge avec une pointe de mépris dans sa voix. "T’es comme lui, t’attends juste que tout s’arrange tout seul, mais rien ne va se régler tant que tu restes là, à ne rien dire."
Le père tourna lentement la tête vers Nani, un sourire cynique sur les lèvres. "Il a raison, tu sais. Toujours dans ton coin, à attendre. Tu penses qu’on ne voit pas ? Tu crois que ça passe inaperçu ?"
Nani se mordit la lèvre, essayant de retenir les larmes. Son cœur se serrait à chaque mot, mais elle n’arrivait pas à leur répondre. Le silence, plus que jamais, semblait être sa seule option.
Serge la regarda un instant, comme s’il venait de se rendre compte de sa douleur. Mais l’instant passa aussi vite que la pensée. "T’es une lâche," dit-il, cette fois sans haine, juste une déception profonde dans les yeux.
"Tu n’as aucune idée de ce que tu dis," souffla Nani, levant la tête pour la première fois depuis un moment. Ses yeux étaient rouges, mais elle n’allait pas laisser ses larmes la rendre vulnérable. "Tu crois que c’est facile, que c’est juste de dire ce qu’on pense, de briser le silence ? Tu ne sais même pas ce que ça coûte."
Le père ricana. "La vérité n’a jamais été facile à entendre, Nani. Et tu sais quoi ? Si tu crois qu’on peut fuir tout ça... alors tu es encore plus naïve que je ne pensais."
Nani serra les poings, luttant pour ne pas céder à la colère. Il y avait trop de choses qu’elle aurait voulu dire, trop de choses qu’elle aurait voulu changer, mais sa voix restait bloquée, engloutie par la peur et le poids des années de silence.
"On devrait partir," dit Serge, brusquement. "Je n’ai plus envie de rester ici."
"Tu veux fuir encore une fois ?" répliqua leur père d’un ton glacial. "Tu vas toujours fuir, Serge ?"
Serge ignora la question, se dirigeant vers la porte. Nani hésita un instant avant de le suivre. Elle savait que rester ici, c’était se perdre un peu plus à chaque instant. Mais elle savait aussi que fuir n’était pas la solution. Elle se sentait piégée dans ce cercle vicieux, pris au piège par un passé qu’elle n’arrivait pas à quitter.
"On ne peut pas fuir ce qu’on est," murmura-t-elle en se dirigeant vers la sortie, sans se retourner.
Veuillez télécharger l'application MangaToon pour plus d'opérations!