Chapitre 1
Dans une vallée isolée, à l’abri des regards du monde, se trouvait un lieu où la nature semblait avoir forgé un équilibre parfait, mystérieux et effrayant à la fois. La vallée était entourée de montagnes imposantes, leurs cimes couvertes de neige tout au long de l’année, et au centre, une dense forêt d’arbres anciens, aussi vieux que le monde lui-même. La lumière du soleil semblait hésiter à pénétrer sous les épaisses branches des arbres, et la brume persistante enveloppait la terre d’une atmosphère étrange et presque surnaturelle. C’était un endroit où peu d'êtres humains osaient s’aventurer, et pour cause : cette vallée était la demeure de créatures légendaires, d’esprits oubliés et d’une meute de loups aussi redoutés que vénérés.
La meute en question était connue sous le nom de la Meute des Ombres. Ses membres, des loups aux pelages noirs comme l’ébène, étaient des créatures silencieuses qui se faufilaient entre les ombres de la forêt, invisibles aux yeux des curieux. On disait qu'ils ne chassaient jamais pour se nourrir, qu'ils n'avaient pas de proie à capturer, car leur rôle était bien plus mystique. Ils étaient là pour protéger un secret, un lourd secret qu’aucun villageois n'osait percer. Mais au cœur de cette meute se tenait un loup particulier, un alpha qui surpassait tous les autres, et dont le nom seul suffisait à glacer le sang : Kuro.
Kuro n’était pas un alpha ordinaire. Bien que son apparence fût celle d’un loup majestueux, imposant, aux yeux d’un jaune perçant qui semblait voir au-delà des ténèbres, son existence allait bien au-delà de ce que la nature avait prévu pour lui. Il n’était pas seulement le leader de la Meute des Ombres, mais aussi un protecteur des âmes perdues. Son pouvoir, dit-on, lui permettait de voir et de communiquer avec les esprits des défunts, qu’ils soient errants ou condamnés à errer dans la vallée, à jamais liés à ce monde par des chaînes invisibles.
Les anciens du village, ceux qui avaient grandi près des bords de la forêt, racontaient de nombreuses histoires à propos de Kuro. Certaines étaient des contes de guerre, des récits sur la façon dont il avait protégé la vallée contre les envahisseurs et les chasseurs avides. D’autres étaient des légendes plus sombres, sur la manière dont il guidait les âmes des morts vers l’au-delà, les emmenant avec une telle douceur qu’ils n’avaient même pas conscience de leur départ. Les jeunes du village, quant à eux, étaient particulièrement fascinés par l’histoire de Kuro. Mais c’était aussi une peur irrépressible qui les poussait à l'éviter, à l'ignorer, et à ne jamais s’aventurer trop près de la forêt, de peur de croiser son regard perçant.
Kuro était aussi connu pour sa sagesse. Les villageois disaient que personne ne pouvait comprendre l’étendue de son pouvoir. Il était plus qu’un simple alpha. Il était un guide, une sorte de pont entre le monde des vivants et celui des morts. Chaque nuit, au crépuscule, lorsque le ciel prenait une teinte pourpre et que la brume montait des rivières, les hurlements des loups se faisaient entendre. Mais ceux-ci n'étaient pas des hurlements de chasse. C’étaient des hurlements de rassemblement, comme si la meute appelait les âmes perdues, les invitant à se joindre à elle dans le royaume des esprits. Ces bruits étaient porteurs de mystère et de mysticisme, résonnant à travers la vallée avec une force hypnotique.
Les anciens racontaient également que Kuro avait été le protecteur des âmes déchues. Lorsqu'un individu mourait dans la vallée, quelle que fût la manière dont il avait vécu, son âme était condamnée à errer dans les forêts sombres, perdue et désemparée. Mais Kuro, avec sa sagesse et son pouvoir, pouvait guider ces âmes vers l’au-delà, là où la paix les attendait. Il était un guide silencieux et inébranlable, capable de détecter les âmes perdues et de les accompagner au-delà des frontières du monde des vivants. Cela faisait de lui une figure vénérée, mais aussi terriblement redoutée.
Au fil des générations, le nom de Kuro était devenu une légende. Les villageois, tout en ayant une profonde admiration pour lui, n’osaient jamais s’aventurer dans la forêt. Les histoires racontaient que quiconque osait franchir les frontières de la vallée sans la permission de Kuro ou de ses loups en revenait changé, ou plus souvent encore, ne revenait tout simplement pas. Des voyageurs qui cherchaient à prouver la véracité de la légende disparaissaient mystérieusement. Il se disait que les âmes perdues, conduites par Kuro, se levaient à la tombée de la nuit, errant dans la vallée à la recherche de nouveaux venus. Ceux qui n'avaient pas été guidés à temps se retrouvaient piégés dans ce monde parallèle, entre l’au-delà et la terre des vivants.
Les voyageurs racontaient des histoires à faire froid dans le dos, des histoires sur des silhouettes fantomatiques qui surgissaient des ombres et les observaients silencieusement avant de disparaître dans la brume. Les chasseurs de l’époque, qui s’étaient aventurés dans la forêt à la recherche de ces créatures surnaturelles, étaient également devenus des légendes, mais de la pire sorte. On parlait d'un groupe de chasseurs qui, après avoir tenté de traquer la meute, avaient vu Kuro en personne, ses yeux étincelants et son regard perçant les hypnotisant. Ils étaient ensuite revenus, dévastés, leurs esprits perdus, murmurant des paroles incompréhensibles avant de succomber à une mort étrange, le regard figé, comme s’ils avaient vu quelque chose qu’aucun être humain ne devait voir.
Ce qui était étrange, c’est que, bien que les loups étaient considérés comme des créatures de l’ombre, il était aussi dit que Kuro avait une forme de symbiose avec les villageois. Certains affirmaient que, pendant les périodes de guerre, il avait pris la tête de la meute pour protéger les habitants. D’autres croyaient que Kuro était une entité immortelle, un esprit d’une époque révolue, lié à la forêt et à la vallée, mais toujours fidèle à son rôle de gardien des âmes.
De génération en génération, la vallée et la forêt devinrent plus qu’un simple lieu. Elles prenaient une dimension mystique, et Kuro, l’alpha légendaire, devenait l’incarnation même du lien entre la vie et la mort, entre l’ombre et la lumière. La vallée était son royaume, la forêt son domaine. Personne ne savait vraiment s’il était vivant ou mort, s’il était un dieu ou un simple loup, mais une chose était certaine : tant que Kuro veillait sur les âmes, la vallée resterait en équilibre, préservée des horreurs du monde extérieur.
Mais cette paix fragile ne durerait pas éternellement, et un jour, le destin viendrait frapper à la porte de cette vallée perdue, bouleversant pour toujours l’histoire de Kuro et de la Meute des Ombres.
Chapitre 2
La lumière de l’aube perçait timidement à travers le couvert dense des arbres, jetant une lueur dorée sur le sol de la forêt humide. Le murmure des feuilles s’élevant avec le vent était parfois interrompu par le cri lointain d’un corbeau. À l’orée du village, un groupe de chasseurs, silencieux et concentrés, aiguisait leurs lames, vérifiait leurs arcs et ajustait leurs flèches. Une tension palpable régnait entre eux, nourrie par les récits effrayants qui circulaient depuis des semaines.
Kuro, l’homme mystérieux dont les yeux brillaient dans l’obscurité comme des braises ardentes, était désormais au centre de toutes les conversations. Certains l’accusaient d’être un démon déguisé, d’autres de posséder des pouvoirs interdits qu’il avait acquis au prix d’un pacte avec les esprits sombres de la forêt. Personne n’avait jamais vu Kuro blesser quiconque, mais les histoires avaient leur propre pouvoir : celui d’attiser les craintes et d’effacer la frontière entre la réalité et la légende.
Dans l’auberge du village, Yaren, le plus âgé des chasseurs, raconta une fois de plus ce qu’il avait vu une nuit.
— Ses mains… elles ont brillé dans la nuit, comme si elles tenaient le feu sans le moindre bois. J’ai vu une bête sauvage, un loup gigantesque, lui sauter dessus, et il n’a eu qu’à lever la main. La bête est tombée, inerte, comme frappée par un éclair invisible.
Les autres écoutaient en silence, hochant la tête, certains fascinés, d’autres tremblant de peur.
Kuro vivait en marge du village, dans une cabane isolée à la lisière de la forêt. Il ne parlait à personne, excepté lorsqu’il passait au marché pour échanger des herbes médicinales ou des peaux d’animaux contre des provisions. Les enfants le suivaient parfois de loin, curieux, mais dès qu’il se retournait, ses yeux perçants les faisaient fuir.
La Peur Devient une Chasse
Un jour, un mouton disparut du troupeau de Yaren, et les soupçons tombèrent immédiatement sur Kuro.
— C’est lui ! Qui d’autre pourrait l’avoir fait ? Il attire les bêtes sauvages avec ses sortilèges, elles viennent à lui comme des esclaves !
Cette accusation fut la goutte d’eau qui fit déborder le vase. Le village se divisa en deux camps : ceux qui voulaient confronter Kuro et lui demander de quitter les lieux, et ceux qui préféraient éviter de provoquer sa colère. Mais la peur finit par l’emporter, et un groupe de chasseurs décida d’agir.
Leur chef, un homme robuste nommé Galdric, rassembla ses hommes.
— Nous ne pouvons pas attendre qu’il nous maudisse tous, dit-il en serrant son arc. S’il est réellement un démon, alors il faut le traquer avant qu’il ne s’en prenne à nos familles.
Ils partirent au crépuscule, armés de torches et de lames affûtées. Leur expédition s’enfonça dans la forêt, guidée par la lueur de la lune et le chant lugubre des hiboux. Mais Kuro n’était pas un homme facile à trouver. Il connaissait la forêt mieux que quiconque, ses chemins secrets et ses ombres.
La Rencontre
Après des heures de recherche, les chasseurs tombèrent sur un cercle étrange, dessiné sur le sol avec des pierres blanches. Au centre, des feuilles brûlées dégageaient une odeur âcre.
— C’est un autel ! Un autel de sorcellerie ! souffla l’un des chasseurs, terrifié.
Soudain, un bruit les fit sursauter. Une silhouette se dessinait dans l’obscurité, avançant lentement vers eux. La lumière vacillante des torches révéla Kuro, debout et calme, ses yeux brillant d’une lueur surnaturelle.
— Pourquoi êtes-vous ici ? demanda-t-il d’une voix grave.
Les chasseurs hésitèrent, mais Galdric fit un pas en avant, la lame de son couteau scintillant.
— Nous savons ce que tu es, Kuro. Tu as effrayé le village assez longtemps. Si tu es un homme, alors pars. Si tu es autre chose… nous t’arrêterons ici.
Kuro les fixa, silencieux, puis leva lentement les mains. Une brise froide s’éleva, éteignant leurs torches une à une. Plongés dans l’obscurité, les chasseurs entendirent des murmures, des voix étranges venues de nulle part. Certains crièrent et s’enfuirent, laissant tomber leurs armes.
Seul Galdric resta. Il lança son couteau avec une précision mortelle, mais le couteau s’arrêta en plein vol, suspendu dans les airs. Kuro s’avança, et d’un geste, renvoya le couteau qui se planta dans un arbre à côté de Galdric.
— Je ne cherche pas la guerre, dit-il. Mais si vous revenez, vous regretterez d’avoir défié les ombres.
Retour au Village
Quand les chasseurs rentrèrent au village, ils étaient changés. Ceux qui avaient fui ne disaient rien, mais leurs visages livides parlaient pour eux. Galdric, lui, fit un récit à demi-mots de leur rencontre, insistant sur le fait que Kuro n’était pas un simple homme.
— Ce n’est pas un démon, dit-il enfin. Mais il est plus dangereux que tout ce que nous avons jamais affronté.
Le village s’endormit ce soir-là, plus divisé que jamais. Certains voulaient encore expulser Kuro, d’autres pensaient qu’il valait mieux le laisser tranquille. Mais une chose était claire : Kuro, l’homme des ombres, ne quitterait pas la forêt, et sa présence continuerait à hanter leurs jours et leurs nuits.
La tension dans le village monta d’un cran, et une question commença à émerger : qui serait le prochain à défier Kuro, et à quel prix ?
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