Tokyo, sous une pluie battante, semblait s'effondrer dans une mer de gris. Haruto, un jeune homme de vingt-et-un ans, marchait d'un pas traînant, les mains dans les poches, le regard vide. Le poids du monde reposait sur ses épaules. L'université, les attentes sociales, ses amis... tout devenait oppressant. Le bruit des voitures, les lumières des néons, rien n’arrivait à briser son état de lassitude.

Soudain, un éclair illumina brièvement le ciel. Haruto frissonna. Pourtant, aucun tonnerre ne suivit, juste un silence lourd. Intrigué, il leva les yeux, et en un clignement d'œil, Tokyo disparut.

Il se retrouvait dans un paysage qu’il n’aurait jamais pu imaginer : des montagnes imposantes baignées par un ciel d'un bleu éclatant, des forêts verdoyantes à perte de vue. Une brise fraîche caressa son visage tandis qu'une odeur d'herbe fraîche emplissait ses poumons.

« C’est quoi ce délire... ? » murmura-t-il, déboussolé.

« Bienvenue à Valoria ! » retentit une voix douce derrière lui.

Haruto se retourna brusquement et fit face à Arianne, une femme élancée aux longs cheveux argentés et aux yeux violets perçants. Son regard semblait transpercer Haruto, tout en affichant une certaine méfiance. À ses côtés se tenait un homme massif, Kyosuke, un sourire narquois accroché à ses lèvres.

« Qu'est-ce que... ? » balbutia Haruto, toujours sous le choc.

Arianne plissa les yeux, un léger rictus s'affichant sur son visage. « Tu es une anomalie. Ton arrivée ici a perturbé l'équilibre de Valoria. »

Haruto fronça les sourcils. Une anomalie ? Lui ? Il n’était qu’un étudiant ordinaire. Rien de plus. Mais un étrange sentiment d'appartenance à ce lieu envahit soudain son esprit, comme s'il avait toujours été connecté à cet endroit. Il secoua la tête, essayant de chasser cette impression.

Kyosuke éclata de rire en voyant son trouble. « Eh bien, mon petit novice, ce n'est pas tous les jours qu'on rencontre un type comme toi ! Tu as un pouvoir, un don unique. La capacité de manipuler les ombres. »

Haruto le fixa, bouche bée. « Manipuler... les ombres ? Mais c’est absurde ! Je ne sais même pas comment... »

Il s’interrompit. Une image floue envahit son esprit : des ombres dansantes, mouvant sous sa volonté. Il plissa les yeux et, sans vraiment y croire, tendit ses mains devant lui. À sa grande surprise, une chaleur douce émana de ses paumes. Lorsqu’il ouvrit les yeux, des ombres se tordaient autour de lui, dansant au rythme de ses pensées.

« Incroyable... » souffla-t-il, entre émerveillement et terreur.

Arianne, les bras croisés, observait la scène avec un air grave. « Ce pouvoir attire des convoitises. Les démons rôdent dans ce monde, et des seigneurs corrompus voudront s'emparer de toi et de cette force. »

Kyosuke, toujours avec son sourire provocateur, lui donna une tape sur l’épaule. « Hé, pas de panique. Je suis là pour t’apprendre les ficelles, petit. On va faire de toi un vrai guerrier des ombres ! »

Haruto le dévisagea, encore sous le choc, mais un éclat de détermination apparut dans son regard. « Si je suis ici pour une raison, alors montrez-moi ce que je dois faire. »

Kyosuke émit un rire tonitruant. « Voilà qui est mieux ! Allez, suis-nous, Haruto. Ton aventure commence à peine, et crois-moi, elle ne sera pas de tout repos. »

Alors qu’ils s’éloignaient ensemble, une ombre mystérieuse s'étira derrière eux, annonçant les dangers à venir. Dans ce nouveau monde où la lumière et les ténèbres dansaient en harmonie, Haruto devait découvrir ce qu’il était vraiment : une force de destruction ou de rédemption.

Haruto avançait à travers la forêt dense de Valoria, encore sous le choc de tout ce qu’il avait appris. Arianne et Kyosuke marchaient devant lui, leurs pas assurés dans ce monde qu’ils connaissaient si bien. Quant à lui, chaque bruissement des feuilles et chaque cri d’un oiseau le faisait sursauter. Tokyo lui semblait si loin, comme un rêve flou qu’il peinait à se rappeler.

« Nous approchons d'un village, » dit Kyosuke sans se retourner. « Prépare-toi. Les gens ne sont pas aussi accueillants que tu pourrais le croire. »

« Pourquoi ? » demanda Haruto, sa voix trahissant une nervosité croissante.

« Les seigneurs de Valoria sont corrompus, et la terre elle-même en souffre. Des créatures des ténèbres envahissent les routes et les villages. Le simple fait que tu sois un étranger suscitera la méfiance. »

Haruto serra les poings. Son regard se porta sur ses mains, encore marquées par la sensation des ombres qui s’étaient matérialisées sous sa volonté quelques heures plus tôt. Ce pouvoir… pouvait-il vraiment l’aider ici ? Il n’était pas un héros. Comment pourrait-il survivre dans un monde qui semblait si hostile et mystérieux ?

« Tu réfléchis trop, » murmura Arianne, lui lançant un regard en coin. « Laisse-toi porter par les ombres. Elles répondront à tes instincts si tu les laisses faire. »

Haruto haussa un sourcil. Laisser les ombres le guider ? Comment pouvait-il se fier à une force qu’il ne comprenait même pas ? Cependant, il n’eut pas le temps de questionner davantage. Un cri perçant déchira l’air.

Sans réfléchir, Kyosuke bondit en avant, dégainant son épée avec une rapidité fulgurante. Haruto resta figé, paralysé par l’incertitude. Mais Arianne posa une main ferme sur son épaule.

« C’est le moment, Haruto. Montre-nous ce que tu peux faire. »

Devant eux, une créature ténébreuse sortit des buissons. Elle ressemblait à un loup, mais ses yeux étaient des cavités sombres, et son pelage semblait absorber la lumière autour de lui. Kyosuke engagea la bête, mais deux autres surgirent des ombres environnantes, leurs crocs scintillant de malveillance.

« Concentre-toi, » murmura Arianne.

Haruto inspira profondément, fermant les yeux. Il sentit quelque chose bouger en lui, une énergie sombre et fluide. Lorsqu’il ouvrit à nouveau les yeux, les ombres autour de lui semblaient frémir, comme prêtes à répondre à son appel.

Il tendit une main tremblante. Les ombres au sol se mirent à ramper, enveloppant l’une des créatures et la figeant sur place. Kyosuke n’eut besoin que d’un instant pour abattre son épée sur la bête.

« Pas mal pour un début, » lança Kyosuke avec un sourire satisfait.

Haruto relâcha un souffle qu’il ne savait pas retenir. Ce pouvoir… il n’était peut-être pas si inutile après tout. Mais quelque chose lui disait que ce n’était que le début des épreuves qui l’attendaient. Chaque victoire attirerait des adversaires plus terrifiants encore, et bientôt, Haruto comprendrait que manipuler les ombres était autant un fardeau qu'une bénédiction dangereuse, voire une malédiction à double tranchant

Le village se déployait devant eux, ses maisons de pierre et de bois formant une petite enclave isolée dans la clairière. Une atmosphère lourde y régnait. Des silhouettes se tenaient près des portes, observant leur arrivée avec des regards méfiants, presque hostiles. Haruto pouvait sentir la tension dans l’air. Ce monde était bien plus sombre et inquiétant que ce qu’il avait imaginé.

« Restons discrets, » murmura Kyosuke en rangeant son épée. « Les rumeurs se propagent vite. Mieux vaut que personne ne sache qui nous sommes. »

Haruto acquiesça, mais ses pensées dérivaient. Il repensait encore à ce qui s’était passé dans la forêt. Ce pouvoir qu’il avait utilisé… Il ne le maîtrisait pas vraiment. C’était comme si les ombres avaient leur propre volonté, prêtes à surgir sous sa main. Pourtant, il savait que ce pouvoir était sa clé de survie ici. Sans lui, il n’était qu’un jeune homme perdu, très loin de chez lui.

Arianne, qui observait Haruto du coin de l’œil, semblait deviner ses pensées. « Ne sois pas trop dur avec toi-même. Les ombres prennent du temps avant de se soumettre pleinement à leur maître. »

« Leur maître ? » Haruto fronça les sourcils. « Je ne sais même pas si je les contrôle vraiment. »

« C’est pour ça que tu es avec nous, » répondit-elle avec un léger sourire. « Nous t’aiderons à comprendre, mais tu dois aussi apprendre à te faire confiance. »

Ils pénétrèrent dans le village en silence, Arianne et Kyosuke ouvrant la voie. Les villageois, vêtus de haillons, se rassemblaient près des feux, leurs visages marqués par la fatigue et la méfiance. Haruto sentait leurs regards pesants, mais il fit de son mieux pour les ignorer.

« Il y a une auberge là-bas, » indiqua Kyosuke en montrant un bâtiment en bois, à moitié délabré. « Nous y passerons la nuit avant de repartir. »

L'intérieur de l'auberge était aussi modeste que son apparence extérieure le laissait présager. Une odeur de boue et de bois humide emplissait l'air. Une femme derrière le comptoir les observa un instant avant de leur faire signe de s'installer à une table.

« Que faites-vous ici ? » demanda-t-elle d'une voix rauque. « Nous n’avons pas souvent de visiteurs. »

« Nous ne sommes que de simples voyageurs, » répondit Kyosuke calmement. « Nous partons dès l’aube. »

La femme les scruta un instant, puis hocha simplement la tête avant de disparaître à l’arrière. Haruto s’effondra sur sa chaise, laissant échapper un soupir. Tout cela le dépassait. Il ne comprenait toujours pas pourquoi il avait été envoyé ici, ni comment il pourrait retrouver son chemin vers Tokyo.

« Ne t’en fais pas, » murmura Arianne pour briser le silence. « Les réponses viendront en temps voulu. »

Haruto hocha la tête, bien que l'incertitude continue de le ronger. Soudain, la porte de l'auberge s'ouvrit brusquement, laissant entrer une bourrasque glaciale. Un homme grand et musclé, avec un œil caché sous un bandeau, fit son entrée, son regard perçant se fixant directement sur Haruto.

« Toi… l’étranger, » grogna-t-il en avançant d’un pas lourd. « Tu possèdes quelque chose que je veux. »

Le cœur de Haruto se mit à battre plus vite. Il n’avait aucune idée de ce qui allait suivre, mais il sentait déjà que cette rencontre n'annonçait rien de bon.