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Et Parce Qu'Il N'A Jamais Osé

Chapitre 1

— Tenez votre commande et passez une bonne fin de soirée, dit-il un legé  sourire sur les lèvres en tendant au client un petit sac en papier.

  Le jeune homme en face lui rougit subitement, prend le sac et sort en vitesse en murmurant un «merci». Erawat hausse un sourcil en le regardant s'emmêler les pieds dans la porte en verres.

  Cela fait deux semaines que ce jeune homme vient à la même heure commander la même chose, et à chaque fois il agit toujours aussi bizarrement. Il le trouve étrange mais adorable.

  Erawat secoue doucement la tête de gauche à droite en soupirant, un léger sourire sur les lèvres. Il est 21 heures et c'est le dernier client de la journée. D'ordinaire, ils ferment à 22 heures passées mais aujourd'hui c'est samedi et ils ferment plus tôt.

  Il entreprend de ranger l'argent gagné précédemment dans la caisse quand un rire se fait entendre derrière lui. Il soupire, mais de désespoir cette fois ci.

— Tu as finis de te moquer de moi Daniel ?

— Mon petit Era chéri, je n'ai jamais fini, lui répond son interlocuteur en se rapprochant de lui.

— Il n'y avait rien, il n'y a rien et il n'y aura jamais rien d'accord ? le menace-t-il du bout du doigt.

— J'ai jamais dit qu'il y aura quelque chose, commence Daniel en levant les mains au ciel comme pour s'innocenter. Je dis juste que ce petit bonhomme à un faible pour toi, ça ce vois comme le nez au milieu de la figure.

— De la figure de Voldemort oui, marmonne l'asiatique dans sa barbe inexistante.

  Daniel sort de derrière le comptoir et se dirige vers la porte vitrée en rigolant. Il la ferme à double tours, tourne la petite pancarte pour signifier que la pâtisserie est fermé et baisse les rideaux de fer. Il se retourne vers Erawat en passant une main dans ses cheveux blonds et en agitant ses sourcils de façon suggestive.

— Arrête avec ça, et de toutes façons je ne suis pas disponible.

– Ah ouais excuse moi, commence-t-il sur un ton de reproches. J'oubliais que tu sors avec ce magnifique homme invisible que je n'ai, bien évidemment, jamais vu et que tu ne m'as, toujours aussi évidemment, jamais présenté.

— Dany, je-

— Ça va faire deux ans Era, deux putains d'années que tu es dans cette situation.

— Tout va bien je t'assure, il n'est juste-

— Tout va bien ? demande Daniel incrédule. Tout va bien quand tu passe toutes tes nuits à pleurer ? Est-ce que tout va bien lorsque je dois te ramasser à la petite cuillère trop de fois par mois quand tu finis bourré à trois heures du matin dans la rue ? Non Era, tout se casse la gueule.

— Je suis désolé...

  Daniel soupire et commence à vider le présentoir à pâtisserie pour le nettoyer, tout de suite suivi par Erawat.

  l'Asiatique est inquiet. Ce n'est pas la première fois que Daniel le dispute à ce sujet, mais il est toujours aussi nerveux lorsque ça arrive. Il a peur que son ami se lasse de ses problèmes de couple et l'abandonne.

  Il sait que Daniel s'inquiète juste pour lui, qu'il lui veut le meilleur mais il ne sait pas tout, et c'est mieux comme ça.

  Erawat sent une pression sur son épaule, il sursaute légèrement en voyant le visage de son ami juste devant le sien. Il se rend maintenant compte qu'il est resté planté là dans le passage, les plateaux toujours en mains. Il s'empresse d'aller les déposer près de l'évier. Il retire son tablier et sa petite toque noirs et jaunes, retrousse les manches de sa chemise et commence à proprement laver les ustensiles utilisés dans la journée.

  Il sent une présence à ses côtés et un regard sur lui. Il sait que c'est Daniel. Il a peur de tourner la tête, d'affronter son regard qu'il imagine plein de déception et de colère.

— Je ne suis pas en colère contre toi, entend-il dire près de lui. Je suis juste inquiet. Je vois bien que ça te détruit de vivre comme ça, de vivre caché même si tu dis le contraire. Tu es comme mon petit frère Era et je ne peux pas te voir souffrir comme ça sans rien faire. Je sais que le fait qu'il ne veuille pas s'assumer, qu'il ne veuille pas être vu avec toi te blesse. Alors s'il te plait Era, prend la bonne décision avant qu'il ne détruise totalement ce qu'il te reste dans la poitrine.

— J'essaierai de lui en parler quand on se verra.

— N'essais pas, fais-le !

  Daniel ébouriffe les cheveux du thaïlandais qui râle pour sa coiffure, mais ne peut s'empêcher de sourire.

— Au faite, tu n'as pas besoin de rester ce soir, lance Daniel plus loin. Tu as besoin de repos, je vois bien la petite mine fatiguée que tu arbore depuis cet après midi.

— Mais comment vous allez faire à trois pour tout préparer pour demain ?

— Ne t'en préoccuper pas, dit-il sur de lui. Eddie, Léna, Chris et moi allons gérer. Demain c'est dimanche, il y aura moins de monde et on n'est pas ouvert longtemps en plus. Il n'y aura pas grand chose à faire.

  Erawat sourit de toutes ses dents en jettant un regard en biais à son ami, secouant ses sourcils de manière suggestive.

— Quoi ? demande Daniel en fronçant les sourcils.

— Léna hein ?

— Quoi Léna ? dit-il en plissant les yeux.

— Non rien, chantonne-t-il d'une voix mielleuse.

  l'Asiatique passe devant son ami en chantonnant.

— Il ne se passe rien avec elle.

— Si tu le dis.

  Daniel plonge ses yeux noisettes dans ceux sombres de son interlocuteur.

— C'est une amie, dit-il très sérieusement.

— Je n'ai jamais dit le contraire, lance Erawat en mettant son sweat. Je vais y aller maintenant, je t'enverrais un message quand je serais rentré.

— D'accord, passe une bonne nuit. Et, n'oublie pas, confronte le dès que tu pourras.

  Le brun se contente d'hocher la tête doucement. Il prend son mentaux et s'enfonce dans la fraîcheur du soir.

  Arrivé à l'arrêt de bus, il prend son téléphone et écrit :

De vous à Nath

Aujourd'hui 22:40

J'aimerais qu'on se voit, est-ce que tu es libre ce soir ?

  Il range son téléphone dans sa poche et frotte ses mains entre elles pour les réchauffer. Très vite, il le sent vibrer dans sa poche et le sort pour lire la réponse envoyée :

De Nath à vous

Aujourd'hui 22:43

Très bien. Je passerai chez toi tantôt. Je t'aime.

  Erawat sourit en serrant son téléphone contre lui. Il le range à nouveau et attends le bus qui ne tard pas à se présenter.

Chapitre 2

Erawat arrive chez lui aux alentours de vingt-trois heures et quart. Il est épuisé par sa journée bien chargée. En effet, le jeune homme doit succéder deux emplois pour payer le loyer du petit studio qu'il occupe et régler les différentes factures sans pour autant mourir de faim. Il travail de sept à treize heures dans un café au centre ville et ensuite de quatorze à vingt-deux heures dans une petite pâtisserie tenue par son meilleur ami Daniel.

  Depuis son arrivée en Amérique Celui-ci l'a prit sous son aile, l'hébergeant, lui trouvant un petit boulot et l'aidant à s'améliorer en anglais.

  Erawat peut le dire sans peur, Daniel est la meilleure chose qui lui soit arrivé dans sa vie.

  Daniel Collins, cet homme de deux ans son aîné, un mètre quatre-vingt, finement musclé, blond aux yeux noisettes. Il a été persuadé d'en être tombé amoureux un moment avant de se rendre compte que ce n'était pas vraiment le cas mais qu'il lui voue une profonde administration.

  l'asiatique se rend dans la salle de bain, se déshabille puis fait sa toilette. Il sort très lentement, ayant peur de glisser et de se blesser. Il attrape sa serviette et tente de se sécher correctement en parcourant le couloir jusqu'à sa chambre.

  Il ouvre son placard et sort une tenue décontractée : un jean gris et un tee-shirt blanc à l'effigie d'un groupe quelconque. Il passe par la salle d'eau pour coiffer ses cheveux noirs et brosser rapidement ses dents.

  Il ne préfère rien manger, son estomac noué par le stresse.

  Il attrape son téléphone, deux messages. Il sourit.

De Dany à vous

Aujourd'hui 23:28

J'espère que tu es bien rentré. Et n'oublie pas de quoi je t'ai parlé. Bisous.

De vous à Dany

Aujourd'hui 23:37

Je ne risque pas d'oublier vu comment tu me le rappelles. Passe un merveilleuse nuit en compagnie de tu sais qui. Bisous.

De Nath à vous

Aujourd'hui 23:34

Je suis là dans une dizaine de minutes environ.

De vous à Nath

Aujourd'hui 23:37

À tout de suite.

  Nathan, son premier amour arrivé bien tard. Alors que d'autres voient leurs cœurs s'éprendre de quelqu'un au primaire ou au secondaire, lui c'est arrivé bien pour plus tard à l'aube de ses vingt-deux ans.

  Il s'en souvient comme si c'était hier, dans cette librairie où il avait travaillé. Nathan était entré avec sa petite fille dans ses bras à la recherche de livres de contes. Il l'avait trouvé très beau et intelligent durant le bref moment où ils avaient échangé.

  Nathan était revenu plusieurs fois, parfois sans sa fillette, et ils avaient discuté encore et encore, s'échangeant des banalités, se découvrant des points communs, apprenant à se connaître. Jusqu'au jour où, prenant son courage à deux mains, Erawat lui proposa un rendez vous qu'il accepta. Le soir du rendez-vous arriva bien vite. Erawat était encore plus stressé lorsqu'il vit Nathan. Il était magnifique. Ses cheveux châtains encore plus ondulé que d'habitude parfaitement coiffés, ses lunettes noir faisant ressortir son regard émeraude et ses tâches de rousseur le rendant encore plus séduisant.

  Il se fréquentèrent pendant des mois avant officialiser. Erawat était, à ce moment là, l'homme le plus heureux du monde. Nathan n'était pas vraiment convaincu au départ, mais il s'est rendu compte que c'est le bon. Ils nageait en plein bonheur, mais celui-ci fut de courte durée. Le thaïlandais était conscient que quelque chose n'allait pas. Ils ne se voyaient que chez lui, ne sortaient pas en publique, Nathan se renfermait et devenait distant. Chaque nuit, il se couchait avec un goût amer dans la bouche, amer de ne pas pouvoir rendre Nathan heureux et que celui-ci s'éloigne.

  Il apprit la raison de ce comportement bien malgré lui.

  C'était un soir hivernale. En ces périodes de fêtes, le restaurant familial où il était serveur à temps partiel était plein à craquer. Ses collègues et lui étaient débordés. Une magnifique femme et une fillette se posèrent à une table dans un coin. Il se dit qu'il avait déjà vu cette fillette quelque part, mais la fatigue l'empêchait de réfléchir correctement.

  Il se dirigea vers elles, calepin en mains, sourire aux lèvres, leur demander leurs commandes. «Nous attendons mon époux, il est allé garer la voiture plus loin. Si vous pouviez patienter...» avait gentiment demandé la dame. «Pas de problème!» s'était-il entendu répondre.

  «Excusez mon retard, une place était plus dur à trouver que ce que je pensais.» entendit-il derrière lui.

  Le sourire qu'il avait gardé pour accueillir le client se fana aussitôt qu'il reconnu la voix. Il se tourna lentement comme pour faire perdurer l'illusion. Mais il devait se rendre à l'évidence, c'était bien Nathan devant lui, le même avec qui il avait couché la veille, le même qu'il avait vu dans son lit se matin au réveil. S'était-il donc servi de lui ? Erawat passa par plusieurs émotions dont l'appréhension, la surprise, la colère, la honte, la déception et une profonde tristesse. Des larmes perlaient aux coins de ses yeux. Son coeur souffrait dans le déni. Incapable de se résoudre à croire que l'homme à qui il avait tant donné pendant tous ces mois lui avait menti, l'avait trahi de la plus horrible des façons.

  Erawat secoua doucement la tête pour se reprendre. S'excusant auprès de la dame qui le regardait d'un air inquiet, prétextant un soudain mal de tête.

  Nathan murmura des excuses, paniqué, au bord des larmes, plus pour le brun que pour son retard devant l'incompréhension de sa femme. Il se sentait horrible, monstrueux d'avoir blessé la personne qui avait le plus d'importance pour lui quitte à lui cacher la vérité. Parce que, oui, il l'aimait, oui, il voulait égoïstement l'avoir pour lui. Mais sur le moment il n'avait pas pensé aux sentiments du brun, à ses besoins, à ce qui allait se passer quand il découvrirai tout.

  L'asiatique prit rapidement les commandes et disparu en cuisines. Quelques instants plus tard, il revint accompagné d'un collègue avec les plats et les boissons commandés. Ils déposèrent le tout. Erawat sentait un regard peser sur lui. Il leva la tête et la baissa aussitôt en croisant le regard brisé du châtain.

  Il rentra chez lui à la fin de son service vers vingt-trois heures. Ses sourcils se froncèrent lorsqu'il vit Nathan l'attendre devant la porte de son appartement, son immeuble n'étant pas sécurisé. Il a tenté de s'expliquer mais le thaïlandais l'a tout simplement ignoré. Cette situation avait duré des semaines. Des semaines où Nathan n'avait pas cessé de le harceler de messages et d'appels, de l'attendre devant la porte de son appartement le soir. Il lui promettait de tout lâcher pour lui si il lui laissait le temps. Il le couvrait de cadeaux et de belles paroles que, Erawat épuisé et surtout amoureux, finit par croire.

  Il attendit deux ans, deux années pendant lesquelles il ne cessait de se convaincre que Nathan allait tout mettre en œuvre pour être avec lui, qu'ils allaient enfin vivre sans ce cacher. Deux années à culpabiliser parce qu'il allait sans doute diviser une famille, il repensais à la petite fille qui vivra la séparation de ses parents à un âge aussi bas et à cette femme charmante qui allait sûrement souffrir de se faire jeter à cause de lui. Deux années à se sentir horrible d'être un potentiel briseur de famille et à être soulagé de ne pas voir cette division arriver. Deux années à être en contradiction totale avec lui-même, dans ses sentiments.

  Erawat s'assoit sur le divan, raide comme un piquet, attendant la venue de son amant. Tendu, il surveille sans arrêt l'horloge de son petit salon. Il se lève en sursaut et cours presque préparer deux tasses thés à la vanille sachant que ni lui ni Nathan ne dîne aussi tard.

  Il finit de servir le thé brûlant, met les tasses proprement sur un plateau et l'apporte au salon. Toujours aussi tendu, il se pose sur le divan. L'heure tourne, il attend.

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