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La Femme À Facettes

Chapitre 1

Aurora est une jeune fille comme tout adolescent rêve de parcourir New York et aussi gagner sa vie. En trois ans, elle devenue une vrai New-yorkaise. Qui aurait pu croire qu'elle avait grandi dans une petite ferme au Kansas, en la voyant évoluer avec autant d'aisance dans les rues de New York?

Elle avait vingt ans lorsqu'elle avait décidé de s'y installer pour se lancer dans la carrière de mannequin. Et la transition n'avait pas été facile. Pour une petite fille élevée dans une petite ville de province, la vie a New York à quelque chose d'un peu effrayant. Mais Aurora avait pris son courage à deux mains et résolument frappé à toutes les portes.

La première année, elle avait eu du mal à trouver du travail, mais s'était accrochée, bien décidée à ne pas rentrer chez elle pas avant d'avoir tout tenté. Et petit à petit, elle avait fini par se forger une certaine réputation dans le monde de la publicité. Mais lorsqu'elle avait commencé à travailler avec Liam que tout s'était mis à bien marcher. Aujourd'hui on voyait son visage dans tous les grands magazines, et souvent même en couverture. Sa vie se déroulait comme elle l'avait prévu. Très bien payée, elle avait pu quitter son petit studio meublé pour s'installer dans un superbe appartement près de Central Park.

Pour elle, le travail de mannequin qui n'était pas une passion, mais un moyen comme une autre de gagner sa vie. Elle n'était nullement venue à New York avec des rêves de gloire, mais tout simplement dans l'intention de se faire une place au soleil. Le choix de sa carrière s'était imposé de lui-même, Car la nature l'avait dotée d'une beauté comme on en voit peu. Ses cheveux d'un noir de jais et ses pommettes hautes lui donnaient un charme exotique, et son teint mat mettait en valeur ses grands yeux d'un bleu violet, frangés de longs cils épais. Elle avait une bouche charnue et bien dessinée, qui souriait naturellement. Et puis elle était merveilleusement photogénique. Capable de se mettre dans la peau de n'importe quel personnage, elle pouvait, sans effort, adopter toutes les expressions possibles et imaginables. Il suffisait de lui expliquer ce qu'on attendait d'elle, et elle devenait tout ce qu'on voulait: sensuelle, sophistiquée, pratique, tendre...

Aurora ferma la porte derrière elle et enleva ses chaussures, enfonçant avec délices ses pieds nus dans l'épaisse moquette. Quel plaisir de rentrer chez soi pour une soirée tranquille, avec un bon livre...

Une demi-heure heure plus tard, vêtue d'une robe de chambre bleue, elle était en train de se préparer un frugal dîner de potage et de biscottes, lorsqu'on sonna à la porte.

-Tiens, bonsoir, Lily! Tu dînes avec moi?

Lily Mac Donald fronça les sourcils.

-Merci bien! Je préfère manger normalement, quitte à prendre quelques kilos... Il faut être folle pour suivre un régime pareil!

-Si je ne surveillais pas la ligne, il faudrait bientôt que tu me trouves une place de secrétaire dans ta boîte, tu sais. A propos, comment va notre jeune avocat dynamique?

-Noah. Il n'a toujours pas remarqué mon existence, répondit Lily en se laissant tomber sur le divan. Oh! Je ne sais vraiment plus quoi faire Aurora! Je sens qu'un de ces jours je vais finir par lui sauter dessus dans le parking...

-Non, ça manque de style, décida Aurora.

Essaie plutôt dans un genre moins dramatique. Si tu lui faisais un croche-pied quand il passera devant ton bureau?

-Tiens, c'est une idée, ça...

Aurora posa ses pieds nus sur la table.

-Julien Sanchez... C'est un nom qui te dit quelque chose?

Lily ouvrit de grand yeux.

-Tu veux parler du mystérieux milliardaire?

Celui qui est beau comme un dieu, dur en affaires mais d'une honnêteté comme on n'en fait plus?

Pourquoi me demandses-tu ça?

-Liam a rendez-vous avec lui demain matin.

-Tu veux dire qu'il va le voir... en chair et en os?

-Oui... Oh! nous avons déjà travaillé pour ses magazines, Liam et moi... Mais je ne vois pas pourquoi le grand patron de Mode éprouve brusquement le besoin de rencontrer un photographe, même si c'est le meilleur de tous. Dans les milieux d'affaires, on parle de lui avec vénération. Et si on en croit la rumeur, il est l'homme idéal... celui dont rêvent toutes les femmes. Je me demande à quoi il peut ressembler. C'est drôle, maintenant que j'y pense, je m'aperçois que je ne connais personne qui ait eu directement affaire à lui. Pour moi, c'est une sorte de mythe vivant. Un géant invisible, qui trône au sommet de Mode comme Zeus sur le mont Olympe...

-Eh bien, tu n'auras qu'à demander à Liam de te donner des détails, demain.

-Liam? Ça m'étonnerait! Il ne fait attention aux gens que lorsqu'il les tient au bout de son objectif!

Il était presque 9 heures et demie, le lendemain matin, quand Aurora entra dans le studio de Liam. Ses cheveux, qu'elle avait lavés le matin même, tombaient sur ses épaules en vagues souples et brillantes. Elle se maquilla très légèrement, dans le petit cabinet du fond, et à 10 heures moins le quart, elle allumait déjà les projecteurs.

Mais le temps passa et personne ne vient. Aurora commençait à se demander si Liam n'avait pas oublié d'envoyer un remplaçant... Il était presque 10 heures quand enfin la porte s'ouvrit.

-Ce n'est pas trop tôt! dit-elle. Vois êtes en retard!

-Ah bon? répliqua l'homme en levant les sourcils.

C'est alors qu'elle remarqua à quel point il était séduisant. Il avait des cheveux blonds comme les blés, coupés assez court, et des yeux gris de la même nuance que son pull-over. Un sourire amusé flottait sur ses lèvres, et son visage avait quelque chose de vaguement familier.

-Je n'ai jamais travaillé avec vous? demanda-t-elle.

Il était si grand qu'elle était obligée de lever la tête pour lui parler.

-Pourquoi me demandez-vous ça?

Il la regardait droit dans les yeux, et son regard insistant la mit un peu mal à l'aise.

-Oh! comme ça! murmura-t-elle en se retournant. Bon. Eh bien, allons-y! Où est votre appareil?(Elle venait de remarquer, non sans surprise, qu'il avait les mains vides.) Vous allez vous servir de celui de Liam?

-Oui, sans doute...

Il continuait à la fixer sans manifester la moindre intention de se mettre au travail, et tant de désinvolture commençait à agacer Aurora.

-Alors, on s'y met? On ne va pas y passer la journée? Ça fait déjà une demi-heure que je vous attends!

-Je suis désolé...

Son visage s'illumina d'un sourire rayonnant d'un tel pouvoir de séduction qu'elle songea, l'espace d'une seconde, que cet devait certainement faire des ravages dans les cœurs féminins. Elle se détourna vivement, s'efforçant d'ignorer le trouble qu'il éveillait en elle. Elle était ici pour travailler, pas pour rêvasser.

-De quelles photos s'agit-il? demanda-t-il tout en examinant les appareils de Liam.

-Liam ne vous a pas mis au courant? (Elle secoua la tête en souriant.) Ce Liam! Comme photographe, il a du génie, mais c'est l'homme le plus distrait que je connaisse! parfois, je me demande comment il fait pour se souvenir qu'il doit se lever le matin... (Et elle poursuivit, en imitant le ton d'une annonce publicitaire:) <>

-Compris!

Et il se mit à installer les appareils avec l'assurance d'un professionnel, ce qui apaisa aussitôt les inquiétudes d'Aurora.

-A propos, où est Liam? demanda-t-il soudain.

-Il ne vous a rien dit? Ah! c'est bien lui!

Débout sois les projecteurs, elle se retourna et secoua la tête, mettant en valeur le nuage sombre de ses cheveux et prenant plusieurs poses différentes, tandis qu'il la photographiait sous toutes les coutures.

-Il avait rendez-vous avec Julien Sanchez, poursuivit-elle sans cesser de sourire. J'espère qu'il n'a pas oublié, au moins! Je tiens à le revoir vivant!

-Pourquoi? Julien Sanchez a pour habitude de croquer des photographes pour son petit déjeuner?

-Ça ne m'étonnerait pas tant que ça!

Elle se releva ses cheveux au-dessus de sa tête, puis les laissa retomber sur ses épaules.

-Julien Sanchez n'est pas un homme commode, à ce qu'on dit! Et j'imagine qu'il ne doit pas tellement apprécier qu'un photographe un peu distrait lui fasse perdre son temps.

-Vous le connaissez?

-Non, Dieu merci! (Elle éclata de rire.) Et il y a peu de chance que je le rencontre un jour! Il évolue dans des sphères beaucoup trop élevées pour moi... Et vous, vous le connaissez?

-Pas précisément.

-Mais nous avons tous travaillé pour lui à un moment où à un autre, n'est-ce pas? Je me demande combien de fois ma photo a paru dans ses magazines... Mais je n'ai jamais eu l'honneur de rencontrer Sa Majesté!

-Sa Majesté?

-Comment désigner autrement un personnage aussi haut placé? C'est qu'il est à la tête d'un véritable empire!

-Ça n'a pas l'air de vous plaire beaucoup...

-Oh! ça m'est bien égal! dit-elle en haussant les épaules. Seulement, les grands de ce monde m'intimident. Je suis une petite paysanne sortie tout droit de sa campagne, vous savez!

-Ah bon? Vous n'en avez pas tellement l'allure, fit-il remarquer. Avec ça, on va vendre des centaines de litres de shampoing! Je crois que ça suffit, Aurora.

Elle repoussa une mèche de cheveux et le considéra avec curiosité.

-Vous connaissez mon nom? Je suis désolée, mais je n'arrive pas à vous remettre ... Nous avons déjà travaillé ensemble, c'est ça?

- Qui ne connait le visage d'Aurora Baxter? D'autant que cela fait partie de mon métier de connaître les modèles les plus en vogue.

Ses yeux gris pétillaient de malice.

-Apparemment, vous avez un avantage sur moi. vous connaissez mon nom, monsieur...

-Sanchez. Julien Sanchez, répondit-il.

Il y eut un déclic. Il avait saisi sur le vif son expression stupéfaite.

-Ça va. vous pouvez fermer la bouche maintenant. C'est fini. Alors, on a perdu sa langue? fit-il d'un air moqueur, visiblement ravi de l'effet qu'il venait de produire.

Mais oui. Elle elle le reconnaissait maintenant... Elle l'avait déjà vu en photo.

-Et vous m'avez laissé débiter toutes ces sottises! s'écria-t-elle, les joues roses de colère, en vous amusant à prendre des photos, alors que vous n'étiez pas là pour ça!

-Je n'ai fait qu'obéir à vos ordres, répondit-il avec un calme qui la mit hors d'elle.

-Eh bien, vous... vous n'aviez pas le droit! Vous auriez dû me dire tout de suite qui vous étiez!

Elle était tellement indignée qu'elle en avait la voix qui tremblait. Mais Julien Sanchez se contenta de sourire, sans se démontrer le moins du monde.

-Vous ne l'aviez pas demandé.

Avant qu'elle ait eu le temps de répondre, la porte s'ouvrit et Liam entra en trombe, tout essoufflé.

- Monsieur Sanchez! Je suis vraiment désolé! Je croyais que nous avions rendez-vous à votre bureau... (Il passa nerveusement la main dans ses cheveux.) Quand je suis arrivé là-bas, on m'a dit que vous étiez ici. Je ne comprends pas comment j'ai pu me tromper! Excusez-moi encore de vous avoir fait attendre...

-Ne vous en êtes faites pas, dit Julien en souriant. Je n'ai pas eu le temps de m'ennuyer.

-Aurora! (Liam sembla se souvenir brusquement de son existence.) Mon Dieu! Je savais bien que j'avais oublié quelque chose... Il va falloir qu'on prenne ces photos un autre jour.

-Ne vous inquiétez pas pour ça... (Julien tendit l'appareil à Liam.) Nous nous en sommes occupés, tous les deux.

-Vous avez fait les photos?

- Aurora déteste perdre son temps... (Il sourit, puis ajouta:) J'espère que vous serez satisfait?

-Oh! certainement, monsieur Sanchez! répondit Liam avec respect.

Aurora était au supplice. Jamais elle ne s'était sentie aussi ridicule. Et tout ça, à cause de ce type qui lui avait laissé croire qu'il était photographe! Songeant avec horreur à tout ce qu'elle lui avait dit, elle ferma les yeux, prise de vertige. Elle n'avait plus qu'une envie: prendre ses jambes à son cou pour ne plus jamais le revoir de sa vie.

Elle ramassa son manteau d'un air digne.

-Je vous laisse discuter entre hommes... J'ai encore une série de photos à faire à l'autre bout de la ville. Salut, Liam! Monsieur Sanchez... ravie d'avoir fait votre connaissance.

Elle se dirigeait vers la porte, mais Julien l'arrêta au passage.

-Au revoir, Aurora. (Elle se sentit défaillir au contact de sa main sur son bras.) J'ai passé une matinée très intéressante. Il faudra qu'on recommence, un de ces jours.

Sans répondre, elle se rua vers la porte, poursuivie par rire moqueur.

Chapitre 2

Le soir en s'habillant pour sortir, elle ne put s'empêcher de penser à cette matinée. Au moins, elle était sûre que son chemin ne croiserait jamais plus celui de Julien Sanchez. Après tout, leur rencontre n'avait été due qu'à un stupide quiproquo et <>, dit le proverbe. Il n'y avait qu'à espérer qu'il disait vrai, car c'était tout à fait ce qui lui était arrivé. Elle avait eu l'impression d'être frappée par la foudre lorsqu'il avait décliné son identité. A cette seule pensée, elle sentait le rouge lui monter aux joues.

La sonnerie du téléphone vint la tirer de ces sombres pensées. C'était Liam. Et il avait l'air très excité.

- Salut!

- Tu as de la chance de me trouver! J'étais sur le point de partir. Que se passe-t-il?

- Je ne peux pas te raconter en détail maintenant. Julien s'en chargera lui-même demain matin.

Tiens... Il m'appelait Julien maintenant?

- Mais... De quoi parles-tu?

- Julien t'expliquera tout ça demain matin, je te dis! Tu as rendez-vous avec lui à 9 heures.

- Comment? fit-elle d'une voix étranglée. Liam!

Mais de quoi parles-tu, enfin? Je n'y comprends rien!

- C'est une chance extraordinaire pour nous deux. Julien t'expliquera tout demain. Tu sais où est son bureau... (C'était une affirmation plutôt qu'une question, car qui, à New York, pouvait ignorer l'adresse des bureaux de Mode?)

- Mais... je n'ai aucune envie de revoir ce type! protesta Aurora, brusquement prise de panique au souvenir de ses yeux gris. Je ne sais pas ce qu'il a bien pu te raconter, mais ce matin, je me suis couverte de ridicule. Je l'ai pris pour un photographe. Je dois d'ailleurs dire que c'est en grande partie de ta faute...

- Oh! ne t'en fais pas pour ça, interrompit Liam. C'est sans importance! Je ne te demande qu'une chose: va le voir demain matin à 9 heures. Au revoir!

- Mais... Liam!

Il était inutile d'insister: il avait déjà raccroché.

<> se dit-elle avec désespoir en se laissant tomber sur son lit. Comment pourrait-elle affronter cet homme, après tout ce qu'elle lui avait dot?... Brusquement, elle se redressa. Elle n'allait pas se laisser abattre aussi facilement. Ce Julien Sanchez s'imaginait sans doute qu'il allait pouvoir se payer sa tête encore une fois? Eh bien, la petite paysanne allait montrer à sa Majesté de quel bois elle se chauffait!

Le lendemain matin, elle s'habilla avec le plus grand soin, choisissant une robe en laine blanche toute simple, qui mettait en valeur sa silhouette gracieuse. Puis elle se fit un chignon, histoire de se donner l'air plus sérieux. Cette fois, ce n'était pas une jeune fille bégayante et rougissante qu'il allait avoir en face de lui, mais une femme pleine d'assurance. Elle met enfin des chaussures à hauts talons. Au moins, elle ne se sentirait plus petite aussi petite à côté de lui...

Elle était exactement à l'heure. On l'introduisit dans une pièce assez grande, où l'accueillit une ravissante jeune femme qui se présenta comme la secrétaire de M. Sanchez.

- Vous pouvez entrer, mademoiselle Alexa. M. Sanchez vous attend.

Il était assis à son énorme bureau, devant une baie vitrée qui offrait une superbe vue sur Manhattan. Il se leva aussitôt pour la saluer.

- Bonjour, Aurora. Vois entrez, ou bien vous comptez rester debout sur le pas de la porte jusqu'à demain matin?

Elle se redressa, décidée à ne pas se laisser impressionner.

- Je suis ravie de vous revoir, monsieur Sanchez...

- Ne soyez donc pas hypocrite! dit-il doucement en lui avançant un siège. Vous auriez donné cher pour ne plus jamais avoir affaire à moi, n'est-ce pas?

Il avait touché juste. Ne sachant que répondre, elle esquissa un vague sourire.

- Et pourtant, poursuivit-il, j'avais de bonnes raisons pour vous demander de venir...

- Lesquelles? demanda-t-elle, piquée au vif par cette attitude autoritaire.

Il s'enfonça dans son fauteuil et la détaillant des pieds à la tête, cherchant visiblement à la mettre mal à l'aise. Mais ne perdit pas son sang-froid, du moins en apparence. Elle avait l'habitude d'être examinée de cette façon, cela faisait partie de son métier. Et elle ne voulait pas montrer à cet homme à quel point elle était troublée par son regard.

- Oh! ce sont des raisons strictement professionnelles, ne vous méprenez pas...

Aurora sentit brusquement toute sa belle assurance fondre comme neige au soleil et ne put s'empêcher de rougir légèrement. Mais elle soutint son regard sans ciller.

- Mais vous rougissez! s'écria-t-il. Moi qui croyais que les femmes ne rougissaient plus, de nos jours! (A ces mots, elle devint littéralement écarlate.) Vous savez, vous êtes certainement la dernière représentante d'une espèce en voie de disparition...

- Si nous en venions au fait, monsieur Sanchez? Je suis sûre que vous êtes très occupé. Quant à moi, croyez-le si vous voulez, mais je n'ai pas que ça à faire.

- Excusez-moi. J'oubliais que vous n'aimez pas perdre votre temps... Voilà : je voudrais faire un reportage photographique pour Mode. Un reportage assez spécial. ( Il alluma une cigarette et en proposa une à Aurora qui refusa.) Il y a une idée qui me trotte dans la tête depuis pas mal de temps, mais jusqu'ici je n'arrivais pas à trouver le photographe capable de la réaliser... Ni le modèle, d'ailleurs. Maintenant, c'est fait.

- Si vous vous expliquiez plus clairement? dit-elle. J'imagine qu'il n'est pas dans vos habitudes de recruter personnellement vos modèles. Ce doit être un projet qui vous tient particulièrement à cœur!

- Effectivement. Voilà de quoi il s'agit : j'ai envie de faire un reportage, une sorte de roman-photo, si vous voulez, sur les différents visages de la femme.

Il se leva et vint s'asseoir sur un coin du bureau, face à Aurora qui se sentit étrangement émue par la virilité qui émanait de ce corps mince et souple.

- Je voudrais arriver à saisir toutes les facettes de la femme avec un grand F . La mère, la sportive, la femme d'affaires, la femme fatale, l'innocente, la séductrice... Bref, un portrait d'Eve, de l'éternel féminin.

- Cela m'a l'air assez bon, comme idée, reconnut-elle, gagnée malgré elle par son enthousiasme. Et vois pensez que je pourrais convenir pour certaines photos?

- Je pense que vous êtes exactement la femme qu'il me faut pour toutes les photos.

Elle le regarda avec surprise.

- Vous comptez vous servir d'un seul modèle pour toute reportage?

- Je compte me servir de vous pour tout le reportage.

Elle éprouva la désagréable impression d'être prise dans un piège qui se renfermait inexorablement sur elle. Et pourtant, comment aurait-elle pu refuser?

Il faudrait être folle pour laisser passer une chance pareille ! Mais pourquoi m'avoir choisie, moi?

Aurora! fit-il. (Il se pencha et lui saisit le poignet.) Vous avez bien un miroir chez vous, non? Et vous êtes sûrement assez intelligente pour comprendre que vous êtes belle. Et, qui plus est, extrêmement photogénique !

Il parlait d'elle comme si elle n'était qu'une marchandise ! Quel mufle ! Malgré le trouble qu'elle éprouvait au contact de sa main, elle trouva la force de dire :

Il y a des centaines de jolies filles photogéniques rien qu'à New York, monsieur Sanchez. Vous êtes bien placé pour le savoir. J'aimerais comprendre pourquoi c'est à moi que vous avez songé pour ce projet qui semble vous tenir tellement à cœur?

Il se leva et enfonça les mains dans les poches, l'air un peu agacé.

J'ai décidé que ce serait vous, un point c'est tout. Vous avez un don assez remarquable pour incarner différents personnages. J'ai besoin d'une femme qui soit aussi belle que bonne comédienne. Une femme capable d'avoir l'air naturel dans n'importe quelle circonstance.

Et vois croyez que je suis cette femme!

Vous ne seriez pas ici si je n'en étais pas certain. Je ne prends jamais de décision à la légère, vois savez.

Et ce sera Liam, le photographe?

Il hocha la tête.

Il n'y a qu'à regarder les photos que vous faites ensemble pour comprendre que vous avez beaucoup d'affinités, tous les deux. Séparément, vous êtes excellents, mais ensemble, vous faites vraiment des merveilles!

Merci.

Oh ! ce n'est pas un compliment ! Une simple constatation, c'est tout. Bon, j'ai déjà tout expliqué en détail à Liam. Vous verrez ça avec lui. Je m'occupe des contrats, vous n'aurez plus qu'à signer.

Les contrats? fit-elle, brusquement sur ses gardes.

C'est vrai, j'oubliais de vous dire... Ce reportage va prendre pas mal de temps, je ne veux pas qu'il soit fait à la va-vite et je tiens à avoir l'exclusivité de votre ravissant visage jusqu'à ce que tout soit publié.

Je vois...

Elle se mordilla la lèvre inférieure tout en réfléchissant.

On dirait que je viens de vois faire une proposition malhonnête, dit-il sèchement. Tout cela est strictement professionnel.

Je comprends bien. Seulement... je n'ai jamais signé de contrat à long terme.

Je tiens à vous garder jusqu'à bout. Et je ne dois pas courir de risque. Il es t indispensable que vous soyez liés par contrat, Liam et vous. Je veux que, durant les quelques mois à venir, vous vous consacriez uniquement à ce projet. Vous aurez des compensations sur le plan financier, cela va sans dire, et je suis tout prêt à discuter des conditions. Mais je veux absolument posséder tous les droits sur votre personne pour les six prochains mois.

Il se tut, guettant la réaction d'Aurora, toujours songeuse.

Si l'homme lui-même ne lui plaisait guère, sa proposition, elle, était plutôt séduisante. Ce serait une expérience passionnante. Pourtant, elle hésitait quand même à se lier pour si longtemps... Un engagement pareil ressemblait un peu à un serment d'allégeance. Et, subitement, elle décida de se jeter à l'eau. Avec un de ces sourires ensorcelants qui l'avaient rendue célèbre, elle répondit :

C'est d'accord. Dorénavant, mon visage vous appartient.

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