Unions Imposées

Unions Imposées

01

BELLA

Je sue à grosses gouttes. Ma respiration hachée résonne dans mes oreilles. La tête baissée, je n'ose pas relever les yeux. Mes poings sont si crispés que mes ongles s'enfoncent dans ma peau, m'arrachant des brûlures qui me tiennent debout. Si mon courage égalait la rage qui me brûle, j'aurais déjà levé le menton pour leur cracher mon mépris au visage. Mais la réalité est là, implacable : je tremble, nu, offerte comme une marchandise sous les regards avides de ces hommes.

À ma gauche, une fille prie en silence. Ses mains tremblent, ses yeux restent obstinément fermés. Je comprends ce qu'elle demande : être choisie. Être l'épouse de l'un d'eux, plutôt qu'un corps qu'on use, qu'on échange, qu'on détruit.

Le silence se fait lourd, seulement troublé par le froissement des vestes et le souffle calme de ceux qui nous observent. Enfin, l'homme en face de moi prend la parole, d'une voix grave qui résonne dans la pièce.

- Relève la tête.

Je m'exécute lentement, comme si chaque mouvement pesait une tonne. Son regard me transperce. C'est un vieil homme, la soixantaine peut-être. Costume taillé sur mesure, yeux d'un bleu glacé. Il m'examine comme on jauge un animal avant de l'acheter.

- Viens voir, Damian, dit-il en se tournant vers l'un des hommes derrière lui. Celle-ci a l'air en bien meilleure condition.

Un autre s'avance. Plus jeune. Costume sombre, allure impeccable, démarche sûre. Ses yeux, du même bleu que l'ancien, mais plus insolents, se posent sur moi. Son examen est méthodique, presque distrait.

- Comment tu t'appelles ? demandes t-il après un long silence.

- Bella, murmuré-je, la gorge serrée.

Damian incline à peine la tête, comme s'il attendait que je me dévoile davantage.

- Bella... quoi ?

- Bella Kingsley.

Un signe de tête, puis il commence à tourner autour de moi. Ses pas claquent sur le sol avec une régularité oppressante. Chacun résonne dans ma poitrine comme un écho de menace. Je sens son regard glisser lentement sur ma nuque, mes épaules, mes poings crispés, comme s'il s'appropriait chaque parcelle de mon corps.

- Bien... souffle-t-il, presque pour lui-même. Tu as déjà appartenu à quelqu'un ?

- Non.

- Donc... tu es vierge.

Je ferme brièvement les yeux, ravalant l'humiliation brûlante qui m'étrangle.

- Oui.

Il s'immobilise derrière moi. Sa présence est un poids, une ombre écrasante. Son souffle reste calme, mais sa voix, lorsqu'elle s'élève de nouveau, se fait plus lourde, plus pesante.

- Dis-moi, Bella... que penses-tu de moi ?

Ma bouche est sèche. Je tente d'avaler, mais ma voix vacille.

- Je... je ne vous ai pas vraiment regardé.

- Alors regarde-moi. Analyse-moi.

Je tourne la tête avec lenteur, comme si le moindre mouvement pouvait déclencher sa colère. Ses traits sont durs, sculptés, empreints d'une beauté froide, presque inhumaine.

- Vous êtes... beau.

Un rictus effleure ses lèvres.

- Tu envisagerais de me tuer, un jour ?

- Non.

- Pourquoi pas ?

- Pourquoi le ferais-je ?

Le vieil homme éclate d'un rire bref, presque amusé. Mais Damian ne lui accorde pas plus d'une seconde d'existence.

- Est-ce que tu me hais ?

- Non.

Il me saisit brutalement par la mâchoire, m'arrachant un cri étranglé. Ses doigts s'enfoncent dans ma peau, et ses yeux se teintent d'une lueur bestiale, presque sauvage.

- Est-ce que tu me hais, moi, et tous les miens ? Ne mens pas.

Je sens mon corps trembler, mais cette fois, ma rage déborde. Elle étouffe ma peur, elle ronge ma chair de l'intérieur. Mes yeux s'embrasent malgré mes larmes.

- Oui... Je vous hais. Tous. Vous n'êtes que des parasites, des monstres qui ne savent rien d'autre que souiller et détruire. Vous me dégoûtez jusqu'au plus profond de mes os.

Son sourire s'élargit, cruel, savourant ma rébellion.

- Assez pour m'empoisonner ?

- Non.

- Pourquoi pas ?

Je détourne le visage, le cœur battant à tout rompre.

- Parce que... parce que j'aurais peur des représailles.

Sa main se pose contre ma joue. Un frisson de dégoût me traverse, mêlé à une rage brûlante que je peine à contenir. Sa paume est chaude, mais je la ressens comme une souillure. Ses lèvres se tordent dans un sourire satisfait.

- C'est bien, murmure-t-il, sa voix douce et pourtant venimeuse. Tu comprends déjà les règles de survie. La peur des représailles te maintiendra en vie.

Son regard glisse sans pudeur, s'attardant sur ma poitrine, et sa voix reprend, plus basse, presque séductrice dans son venin :

- Tu sais que si je décidais de faire de toi mon épouse, tu serais sauvée. Parce que tu es encore vierge, tu aurais un statut. Tu n'aurais pas à craindre le rejet. Tu n'aurais pas à craindre d'être jetée, tous les deux ans, de foyer en foyer, comme une simple fille de service qu'on use puis qu'on remplace. Avec moi, tu n'aurais rien à craindre.

Ses mots résonnent comme une promesse, mais je n'entends qu'une condamnation déguisée. Parce que je sais qu'il dit vrai. Et c'est cela, le plus insupportable : savoir qu'il détient le pouvoir de m'arracher à un destin encore plus ignoble.

Cette maison... ils l'appellent La Retraite Blanche. Un nom hypocrite, presque ironique, donné à ce pensionnat où l'on entasse les jeunes humains. Ici, rien n'a de paisible ni de pur. Tout est calculé, réglementé. Les murs blancs, trop propres, ne sont qu'un masque derrière lequel se cache la pourriture.

Car si aucun de ces hommes réunis dans cette salle ne pose son sceau sur moi, alors je ne vaudrai plus rien. Je deviendrai un rebut. Et le maître de la Retraite Blanche ne se contentera pas de m'écarter : il me vendra. Non pas comme une épouse, non pas comme une concubine, mais comme une marchandise de seconde zone destinée aux Maisons Rouges, ces bordels où l'on use les femmes jusqu'à la corde.

Là-bas, un homme m'achètera. Il me gardera deux ans, pas un jour de plus, avant de me renvoyer comme on rend un objet usé. Et alors, je retournerai sur le marché, pour qu'un autre m'achète à son tour, encore et encore, jusqu'à ce que mon corps ne soit plus qu'une carcasse vide, jusqu'à ce que mes yeux cessent de briller et que je ne sois plus qu'un fantôme.

Alors oui... même si je tente de garder une façade d'indifférence, même si ma fierté hurle de se taire, je prie. Comme la fille debout à mes côtés, je prie pour qu'on me choisisse. Parce qu'aussi cruel que soit ce choix, il reste moins abject que l'alternative.

- Oui... je le sais, murmuré-je, presque malgré moi.

Damian incline à nouveau légèrement la tête, ce geste mesuré, presque mécanique, comme s'il enregistrait mes réponses une à une. Puis sa voix s'élève à nouveau, calme mais implacable :

- Quel âge as-tu ?

- Vingt-deux ans.

Un éclat traverse ses yeux, une étincelle d'intérêt qui me donne la nausée.

- Tu es jeune... dit-il lentement, comme s'il goûtait chaque mot.

Soudain, ses doigts se referment sur mon menton, forçant mon visage à se relever. Sa poigne est ferme, autoritaire, et je sens la brûlure de son contact s'incruster dans ma peau. Mon cœur s'emballe, mes entrailles se tordent, mais je n'ose pas détourner le regard.

Son sourire revient, tranchant comme une lame.

- Je vais te prendre.

Populaire

Comments

🎓 Miss Nk 💖

🎓 Miss Nk 💖

Du moment que t'es beau ça me va

2025-08-19

0

🧸🎓 Miss Nk 💖

🧸🎓 Miss Nk 💖

Mais avec plaisir

2025-08-23

0

Tous
Episodes
Episodes

2 épisodes mis à jour

Télécharger maintenant

Aimez-vous ce travail ? Téléchargez l'application et vos enregistrements de lecture ne seront pas perdus
Télécharger maintenant

Bien-être

Les nouveaux utilisateurs peuvent télécharger l'application pour débloquer 10 chapitres gratuitement.

Recevoir
NovelToon
Ouvrir la porte d'un autre monde
Veuillez télécharger l'application MangaToon pour plus d'opérations!